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Citations de Jean-Didier Urbain (37)


De même, quel choix reste-t-il au voyageur d'agrément qui ne veut pas être touriste?
Ou bien il s'immobilise, soit qu'il reste chez lui; soit qu'il se sédentarise chez l'habitant - et alors il n'est plus un voyageur. Ou bien il voyage «se précipite dans les endroits non touristiques», et sa seule présence fait de ces endroits des lieux touristiques et de lui un touriste. Quoi qu'il fasse, ce voyageur est en situation d'échec; qu'il se déplace ou qu'il ne se déplace pas. C'est pourquoi, prisonnier de cette double contrainte, le touriste doit ne pas être là où il veut aller.
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Plus une mécanique est complexe, plus elle s'expose à la panne en augmentant le nombre de ses possibles défaillances.
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Dans cette conquête ethnographique d'univers proches par quelques explorateurs curieux de leur "voisin de palier", il y a donc, outre une certaine odeur de désobéissance, voire de provocation ou de transgression, une sorte de défi lancé à une coutume anthropologique bien étable. Ainsi que la dépeint avc humour Nigel Barley, selon cette coutume, pour qu'une réalité socioculturelle soit digne d'intérêt il faut qu'il s'agisse d'un peuple lointain qui, de préférence, pratique le culte du crâne, procède à la circoncision, possède un langage sifflé, momifie ses morts et, c'est encore meilleur, a la réputation d'être sauvage et rétif.
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A l'image de celui-ci, à Madagascar, qui note que dans ce restaurant de Tuléar "les pizzas ne sont pas toujours bonnes", mais que dans cet autre les "viennoiseries" [sont] assez bonnes", ne réalise pas le côté surréaliste de sa remarque ! La mondialisation aidant, ce "baroudeur" de pizzeria et de boulangerie, c'est Tartarin rêvant encore de chocolat chaud au beau milieu de l'inconnu. C'est le septième pilier de la mésaventure en chair et en os. Un voyageur en proie à des contradictions qui voient les désirs de confort d'un Sancho Pança le disputer assidûment aux pulsions picaresques d'un Don Quichotte. Ce type de voyageurs n'est pas rare. Il est en chacun de nous...
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La vie est un voyageur qui laisse traîner son manteau derrière lui pour effacer ses traces.

Louis Aragon
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Pour ou contre le tourisme, il faut en finir ici avec des schématismes qui ne font que figer une image, théoriser un stéréotype et appauvrir le sens d'une évolution sociale en la réduisant à un marché ou à une invasion. Que reste-t-il alors de cet événement considérable suscité par le voyage, le désir de découverte et de rencontre? Le tourisme, au XXe siècle, plus que la guerre, la colonisation ou le commerce des biens, est un formidable accélérateur de la circulation des traits culturels. Il précipite les dialectiques identitaires qui conduisent à la prise de conscience de soi et d'autrui. Comme l'invention de la prison au XIXe siècle ne peut se comprendre que si on la replace dans le cadre historique de la formation d'une société disciplinaire de surveillance (M. Foucault, Surveiller et punir (Naissance de la prison), Paris, Gallimard, 1975), le développement actuel du tourisme ne peut se comprendre qu'au regard de la formation en cours d'une société migrante de reconnaissance. Et s'il est vrai qu nous relevons toujours de cette société disciplinaire, dont le principe est l'enfermement, est-ce alors un hasard si cette autre, dont le principe est la mobilité, s'y superpose aujourd'hui?
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Si partir, c'est mourir un peu - et mourir, partir beaucoup -, choisir, c'est s'en aller déjà.
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L’Absurdie est une perception, un sentiment, une impression, voire, plus ténue, une sensation ou un frisson, quand on la frôle incidemment, et moins encore, un soupçon, quand parvenu à sa lisière on ne fait que la deviner.
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Le seul voyage qui vaille est celui qui comble le voyageur. C’est le voyage qui existe et s’éprouve comme tel, avant d’être fait, pendant qu’il se fait et après qu’il soit fait. L’existence précède l’essence. Cela signifie que le voyage réussi existe d’abord et qu’il n’est défini qu’ensuite comme vrai, selon des critères extérieurs à son vécu.
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Soyez obstiné si vous voulez échouer et pouvoir vous désoler ensuite.
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Programmez, programmez donc, sachant que le programme est un stade supérieur d'élaboration du projet. Le programme est une anticipation qui, si elle est verrouillée à l'excès, transforme la prévision en prédiction intenable. Plus encore qu'une vulgaire préparation ou un brouillon de rêve, un programme de voyage trop précis est toujours un programme de voyage trop précis. Il est une camisole : un concept rigide et sophistiqué en frome de ligne de conduite immuable, ferroviaire. Un carcan parfait. C'est pour cela qu'au prorata de ses rigidités et de sa sophistication ce programme est une promesse d'échec : une garantie de déraillement.
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A dresser, en termes de manque ou d'excès, une liste du genre : un voyage raté est ...
un voyage sans départ
sans arrivée
sans retour
sans fin
sans but
sans cesse interrompu
sans issue
sans découverte
sans rien au bout
sans aventure
sans organisation
sans gloire
sans mérité
sans idée...

Ou, à l'inverse : un voyage raté est ...
un voyage trop long
trop court
trop lent
trop rapide
trop risqué
trop organisé
trop dépaysant
trop ordinaire
trop pénible
trop confortable
trop oisif
trop actif
trop plein
trop vide
trop monotone
trop vague...
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On hésite souvent avant d'entreprendre un voyage, en se demandant quelle époque sera la meilleure. Hésitation superflue : la meilleure époque pour la visite d'un pays se situe un peu avant, ou immédiatement après, celle que vous avez choisie.
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Tout retour de voyage est un travail de deuil; et cette fraude narrative est un geste qui participe à son bon déroulement - à sa réussite.
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Bref, ce voyageur néo-moderne, qui préfère la bonne prévision à la bonne surprise, veut vivre et circuler dans un univers sensé : un monde de certitude, qui doit avoir un sens clair, précis, annoncé, par principe assuré !

C’est un mythe, bien sûr, mais il a le vent en poupe, la puissance de la norme, la banalité de l’habitude, la prégnance de l’évidence. Il est si rassurant, si raisonnable, qu’il a infiltré nos usages les plus quotidiens, et cela si bien qu’il taraude désormais tous les voyageurs, les plus humbles comme les plus ambitieux et les plus téméraires comme les plus circonspects…
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Bref, ce voyageur néo-moderne, qui préfère la bonne prévision à la bonne surprise, veut vivre et circuler dans un univers sensé : un monde de certitude, qui doit avoir un sens clair, précis, annoncé, par principe assuré ! C’est un mythe, bien sûr, mais il a le vent en poupe, la puissance de la norme, la banalité de l’habitude, la prégnance de l’évidence. Il est si rassurant, si raisonnable, qu’il a infiltré nos usages les plus quotidiens, et cela si bien qu’il taraude désormais tous les voyageurs, les plus humbles comme les plus ambitieux et les plus téméraires comme les plus circonspects…
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Contre les souvenirs inhumés dans la plus stricte intimité par des touristes déconfits renonçant à parler de leur échec, et contre les dossiers par ailleurs enterrés dans la plus stricte confidentialité par des professionnels préférant les garder par-devers eux, ou les « oublier », la première valeur de ces récits sitôt rendus accessibles est de sauver des voyages qui, condamnés au silence, auraient sombré dans le néant — tout comme « la marche solitaire est un récit perdu », pour reprendre ici la belle formule d’Alain Borer. Avec de part et d’autre ces cryptes de l’échec, récits tombés dans un puits personnel ou dans l’oreille d’un sourd, tous soustraits à la consultation, ces voyages révélés sont des histoires sauvées.
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De la plus proustienne des proses d’auteur à l’épistolaire anonyme la plus succincte, via le souvenir laconique ou ponctuel, l’oral et l’écrit, le long discours et la brève mention, cet essai s’appuie ainsi sur un corpus hétérogène mais unifié par son thème : l’échec, qui regroupe au final plus d’un demi-millier de témoignages patiemment dépouillés. Mais justement, que sont ces « récits de la colère », en quantité, en qualité, et en valeur aussi ?
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Pour résumer, il y a donc au final trois genres de voyages de type inénarrable. Le premier est le genre des inexprimables, qu’on ne peut correctement restituer dans leur qualité en les disant et qui regroupe les espèces « sublime » et « hilarante ». Le second est le genre des inconsistants, dont il n’y a rien à dire d’inédit ou rien à dire du tout et qui regroupe les espèces « éculée » et « vide ». Enfin, le troisième est le genre des inavouables, qui sont tout à fait dicibles, dont il y a bien des choses à dire, mais que pour diverses raisons il vaut mieux ne pas dire et qui regroupe les espèces « interdite » et « humiliante».
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Il ne s’agira pas de reconstituer l’image des bons, des beaux ou des grands voyages réussis : héroïques, insolites ou simplement heureux — de ces voyages bénis des dieux qui, avec ou sans accroc, traversent le réel et atteignent leur but conformément à l’idéal fixé, ajustant les faits au projet, l’expérience au rêve, et qui, en une apothéose jubilatoire, parviennent parfois même à les excéder. Ces bons, ces beaux, ces merveilleux voyages ne nous intéressent pas.

Pourquoi ? Parce qu’on leur préférera ici ceux que taraude l’échec en ce que ce sentiment est un révélateur. Il l’est avant, éprouvé comme intuition, appréhension, phobie. Pendant, ressenti comme erreur, accident ou désordre incoercible. Et après, traduit par le remords, le regret, la révolte ou la mélancolie. Anticipé, vécu ou souvenu, l’échec est cette scène pathétique qui voit, prématurée, progressive ou ultime, la faillite d’un concept qui dévoile alors, outre une théorie contrariée et un imaginaire trahi à travers ses décombres, les incompatibilités de l’une et de l’autre avec la réalité, c’est-à-dire, au-delà du rêve brisé (son contenu, sa forme, son histoire), les conditions de possibilité (et donc d’impossibilité) de sa réalisation. C’est pour cela qu’on en apprend plus encore par l’échec que par le succès, comme d’ailleurs l’on en apprend davantage d’un système à travers ses dysfonctionnements ou ses pannes qu’à travers son fonctionnement…
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