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Critiques de Jean Giono (1498)
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La trilogie de Pan, tome 1 : Colline

Bon sang quel voyage, quelle magnifique écriture!

Avec Decoin, Echenoz, Camille Lemonnier, j'avais découvert de la belle prose mais en dègustant Giono, on monte encore d'un cran!



Sur les crêtes de Manosque, les Bastides blanches, hameau perdu où s'accrochent encore quatre familles, où le vieux Janet hallucine sur son lit de mort, où l'apparition d'un chat noir n'annonce rien de bon.



Giono un auteur que j'aurai plaisir à approfondir!

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Le Hussard sur le toit

1832, la Provence est ravagée par une épidémie de choléra. L'auteur décrit le périple macabre dans ces contrées d'un jeune cavalier italien. Traverser des hameaux jonchés de cadavres, où seuls subsistent une foultitude d'oiseaux devenus mangeurs d'hommes. Être confronté à la violence des hommes, rongés par la peur et l'égoïsme. Devoir conserver son humanité, son honneur, sa dignité dans ce marasme ambiant. Ce récit est avant tout un voyage intérieur. Une introspection du personnage principal. Sa vision de l'humanité. Jean Giono fait le choix d'un héros romantique qui incarne la vie dans un univers où la mort prédomine. Malgré quelques imperfections, la plus grande force de cet ouvrage demeure dans l'écriture élégante de l'auteur et dans sa description imagée de la région provençale.
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Deux cavaliers de l'orage

Deux cavaliers qui vous sortent de la torpeur estivale. Cette lecture est un choc salutaire au milieu d'une saison trop sèche, comme le petit verre d'alcool avalé cul-sec qui vous secoue à la fin d'un repas trop lourd. Écrit entre 1938 et 1942, publié en feuilleton en 1942-1943, le livre ne fut publié en volume qu'en 1965. Dans la famille Jason les parents dont la vie est relatée en préambule ("Histoire des Jason") eurent trois fils qui ne furent bientôt plus que deux. "Celui du milieu" Marat, prénom qui honorait un aïeul guillotineur, fut tué à la guerre quatorze. Marceau l'aîné protecteur dit "Jason l'entier", rentré sain et sauf, et Ange le dernier, de dix-sept ans "son cadet" auréolé d'une toison lumineuse digne du patronyme, restèrent seuls avec la vieille Ariane leur mère à la mort du père. Puis Marceau épousa Valérie et eut cinq enfants. Ange trouva Esther. C'est leur histoire personnelle et familiale qui est racontée. Tendre, âpre et rude en même temps. Histoire d'une passion fraternelle et physique réciproque peu ordinaire dessinée dans l'inséparabilité de deux corps frères musculeux gâtés par la nature et de deux destins "héroïsés", soudés l'un à l'autre, dont les "Tendresses" du second chapitre portent déjà en germe l'issue d'un dénouement inéluctable.



Chacun sera le Dieu de l'autre. Même pendant le service armé du plus jeune ils resteront ensemble, libres de circuler, l'aîné ayant su faire prévaloir aux autorités militaires sa compétence et celle de son frère à pourvoir efficacement la remonte des bataillons de la caserne. Récit aux échos éternels d'une mythologie et d'une culture méditerranéenne dont Giono est le chantre. le culte du corps athlétique et de la lutte en toile de fond. Les Alpes provençales deviennent tout doucement et au fil des saisons le théâtre d'un glissement fatal rythmé par un enchaînement d'événements fortuits. Les femmes en présence, impuissantes, n'y changeront rien. D'un jeu où il se mesurait d'abord aux autres, puis de défis en défis (de moins en moins contrôlés) et sous le regard subjugué de "son cadet" qu'il a sauvé de l'étouffement du "Crou" (diphtérie) Marceau, séduit par la lutte en devient le champion toutes catégories ("Clef-des-Coeurs" ; "le Flamboyant"). Est-il emporté par le goût du combat brutal dont les plus obscurs ressorts semblent tapis sous les vertus d'une force physique employée jusque là à protéger "son cadet" ou par celui d'un désir fou de domination qu'il a transmis à son insu au petit frère rêvant d'être comme lui ?



Tout cela inscrit dans une poétique de l'espace et du temps à hauteur de chevauchées sur mules et mulets dont Giono ajuste les séquences à la manière d'un horloger qui sait faire sonner ses pendules quand il faut. C'est à dire à l'heure et, malheureusement pour Ange et Marceau, à celles des plus sombres tragédies antiques. Les Hautes-Collines "du dessus" et les forêts enchevêtrées familières aux frères Jason prêtent d'abord leur cadre, en prémisses, à l'apprentissage du cadet, puis ce sont les basses vallées d'ormes et de platanes où les deux maquignons chevronnés font ensuite enfler leur réputation par un "art" discutable du commerce ; encore plus loin la ville, danger, offre des visions de moissonneurs encanaillés, de foires aux relents de jalousies, mais la ville témoin de l'exploit public de Marceau, celui qui consacre sa force dans un corps à corps avec un cheval furieux ("Les courses de Lachau"). Huit chapitres d'une langue somptueuse, épicée, suggérant des mythes oubliés, d'un style incomparable, conçus comme les actes d'une tragédie oui, qu'illustrerait la longue et pénible attente des femmes dans un huis-clos menaçant, dialogue ininterrompu au cours d'un chapitre interminable entre peur et soulagement. Jusqu'à la purge dramatique émotionnelle finale énoncée par un choeur de villageois inconsolés. Dépaysant et splendide à la fois.



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Un de Baumugnes - Provence

L'amour , la passion, l'amitié, la quête du bonheur, mais surtout la présence infinie du monde rural fondent les réalités de ce roman : la campagne avec son austérité, sa rigueur , sa rugosité, son code de l'honneur, ses moeurs farouches, sa poésie, et en contre point, la corruption de la ville.

Ce second volet de la trilogie de Pan, raconte la déchéance et la rédemption d'Angèle grâce à Albin et d'un journalier trimardeur, le vieil Amédée, il faut écouter le chant d'amour de de l'harmonica qui dit dans le silence de la nuit, l'amour d'Albin.

C'est beau comme du Giono !
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Que ma joie demeure

C'est avec beaucoup de regrets que je referme ce livre, regrets de ne pas l'avoir apprécié à sa juste valeur sans doute, regret de ne pas ressentir l'enthousiasme du plus grand nombre. Pourtant une fois encore j'ai aimé l'écriture de Giono , un auteur que j'ai lu à de nombreuses reprises et apprécié. Est-ce la période hivernale, pandémique, délétère qui ne se prêtait pas à une lecture sereine? Sans doute ...

Ce roman ,qui nous parle de joie, de quête de bonheur, de partage, de spiritualité , ce roman qui nous projette dans un autre monde où règne la bienveillance, ce roman où la poésie affleure à chaque mot, où la nature est omniprésente et où l'homme se doit de s'y fondre, ce roman où le merveilleux prédomine et frôle l'utopique ne s'est pas trouvé entre mes mains au bon moment. ... Dommage !
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La trilogie de Pan, tome 2 : Un des Baumugnes

Un des Baumugnes, c'est Albin, venu louer ses bras vigoureux pour la moisson et la foulaison sur les berges de la Durance, bordées de saules, de cyprès, de vignes et de champs de blé. C'est là qu'il fera connaissance de l'Amédée, journalier comme lui bien qu'ayant l'âge d'être son père. le dimanche soir, c'est la tradition d'aller boire le litre. L'alcool aidant, Albin raconte, comme on s'épanche, l'échec qui lui gâche la vie, les regrets qui l'empoisonnent. Il a croisé Angèle, la fille de la ferme « La Douloire », il en est tombé amoureux aussitôt mais c'est Louis, un gars de la Martiale venu se mettre au vert, qui l'a approchée, séduite et entraînée sur les trottoirs de Marseille.

Amédée est touché au cœur par ces confidences, cette tragédie, il sent qu'il peut faire quelque chose pour celui qui est, dorénavant, son ami car « il souffre de la douleur des autres ».

Il décide de chercher ce qu'est devenue Angèle et se présente à La Douloire afin de s'y faire embaucher. Reçu par Clarius, le Patron, brandissant son fusil, il doit sa chance à Maman Philomène, qui accepte de l'engager. Courageux et travailleur il deviendra vite indispensable à la ferme.



Quelle bonne idée de donner la parole à Amédée qui raconte son histoire avec ses mots, son langage simple, familier et fantaisiste qui anime et fleurit le récit. Il décrit les paysages, les lieux, tels des personnages à part entière en leur conférant une humanité poétique : « La Douloire, accroupie dans le pissat de ses fumiers, près de sa maigre terre, terne et croûteuse comme une vieille guenippe ». « Les ruisseaux où coulent à la place de l'eau, le bruit des charrettes, le parfum du thym et le rire des gardeuses de chèvres ».

Nous sommes transportés dans cette belle Provence du début du XXe siècle, nous la traversons aux côtés de ces gens laborieux, qui gagnent leur vie à la sueur de leur front.

Le malheur qui a frappé la Douloire a desséché Maman Philomène et Clarius, les repas sont faits de silences, rythmés par le choc des couverts et ponctués des rires gelés de Saturnin. Et pourtant c'étaient, ce sont, de belles personnes, « Philomène, droite, bonne, simple, noble à tout dire », Clarius connu dans tout le pays comme un remonteur de moral, le cœur sur la main.

On se rend compte comment un petit homme pervers peut causer un mal terrible dans une famille simple en séduisant une fille naïve et ceci est intemporel.



Amédée nous emporte dans sa quête, Albin nous transmet son amour pour Angèle au son de sa « monica » qui vous enlève le cœur et Jean Giono effleure avec beauté sa Provence. Comme il est réconfortant de lire un si bel élan d'amitié, un sentiment né au fond des entrailles, une amitié intergénérationnelle gorgée d'humanité qui redonne vie à la jeunesse.

Et nul mieux qu'Amédée peut avoir le dernier mot « à la fin, c'est le malheur qui reste dans la poussière ».
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Les Grands Chemins

Cela faisait bien longtemps que je n'avais lu un Giono. Je retrouve cette plume si agréable, chantant et pleine de sensations. On lit mais on marche aussi en même rythme, respirant les odeurs, sentant la caresse du vent, le froid non piqué le nez etc... c'est plein de poésie, de ressentis, j'ai adoré cette balade sur les grands chemins.

L'Artiste qui vient mettre son grain de sel dans ce décor, une drôle d'amitié, un tandem bancal mettront un peu de piquant au récit. Pour ma part, j'en avais point besoin, simplement me promener aux côtés du marcheur me comblait grandement.

Une chouette lecture qui fait du bien en ces temps si particuliers.

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L'homme qui plantait des arbres

Jean Giono en créant et en donnant vie à la belle personne qu’il aurait aimé rencontrer dans sa vie parle de lui dans un tête à tête avec nous, ses lecteurs. Nous le rencontrons et en rencontrant ainsi un auteur, nous nous rencontrons nous même, par ce que ce berger, devenu planteur d’arbre, provoque en nous. Vivre en accéléré dune vie qui s’étale de 1914 à 1957.



Un homme plante des arbres, et la nature change ! Est-ce que nous sommes prêts aujourd’hui à replanter des arbres ? A vivre autrement ?



On pourrait penser qu’il y a peu de figures féminines dans cette nouvelle, mais il y a les brebis, il y a la terre et il y a les jeunes familles qui reviennent après que la terre se soit régénérée par les arbres.



Petite nouvelle à lire presque comme une prière rurale, la prière que notre monde renaisse !
Lien : https://tsuvadra.blog/2019/1..
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Au pied du sapin : Contes de Noël de Pirandel..

Avec un peu de retard sur le calendrier, j'ai lu le recueil de contes et nouvelles rassemblés dans Au pied du sapin, de la collection Folio 2€. Avec son noeud de satin givré, sa pomme de pin et les branches de sapin, la couverture donne des envies de soirées auprès du feu, confortablement installée dans un fauteuil, une tasse de thé et un bon livre à la main.



Le recueil est divisé en trois parties:

- Des réveillons inattendus...

- Des Noëls de rêve...

- Des Noëls peu traditionnels...

Découpage somme toute artificiel et qui, à mon avis, ne reflète pas grand chose. Qu'importe, là n'est pas le plus important.



Douze contes et nouvelles s'étalant du XIXème au XXème siècle, et voyageant de la France à l'Angleterre, de l'Italie à la Russie, en passant par la Norvège. Certains récits m'étaient déjà connus et lus, comme "La petite fille aux allumettes" d'Andersen ou "La Fascination" de Balzac. J'ai découvert les autres. Sans ennui mais sans enthousiasme débordant non plus. La lecture reste plaisante, l'écriture souvent très belle, mais pas à rester dans les annales.



Je retiendrai surtout "Nuit de Noël" de Guy de Maupassant pour les délices du récit et l'ironie mordante de la chute; et "Un arbre de Noël et un mariage" pour le cynisme qui en émane.

Sur le plan humoristique, le "Conte de Noël" d'Alphonse Allais, qui clôt le recueil, démarrait bien avec la grosse colère de Dieu le Père la veille de Noël. Mais j'ai trouvé le dénouement plutôt moyen.



Je ne boude pourtant pas mon plaisir d'avoir trouvé des textes à l'écriture ciselée chez Kessel ou Giono. Un recueil pas forcément indispensable mais à 2€, ça valait le coup de découvrir l'anthologie contenue sous cette si attirante couverture.
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Le moulin de Pologne

« Le Moulin de Pologne », un curieux livre, qui par plusieurs aspects tranche avec le reste de l'œuvre. Jean Giono nous présente un morceau d’histoire de la famille Coste ; une famille frappée de malédiction dont les membres meurent tous d’une manière ou d’une autre, mais tous de mort violente…



Le Moulin de Pologne n’est autre qu’une riche propriété à l’extérieur d’un gros bourg provençal qu’on imagine sans peine être inspiré de Manosque, la ville que Giono ne quitta guère. Un narrateur sans nom décrit la vie sur quasiment un siècle de la famille maudite.

Tout d’abord, l’installation du père Coste, un veuf, et de ses deux filles ; il a perdu sa femme et ses deux fils dans des circonstances tout à fait particulières. Aussi, veut-il s’assurer qu’il n’arrivera pas malheur à ses filles et cherche à les marier à des garçons auxquels « rien n’arrive jamais » …

Il finira par les trouver : deux frères, effectivement sans histoires. Il n’en faudra pas plus pour que le destin s’acharne contre leurs familles génération après génération ; désespérant... Restera Julie, la jolie Julie, initialement, mais à demi défigurée au moment du récit.

Elle vit en dehors de tout et de tous… Jusqu’à l’arrivée de M. Joseph. Il vient de s’installer au bourg. Sous leurs efforts conjugués, le Moulin de Pologne semble revivre. La malédiction qui frappe la famille Coste serait-elle à jamais conjurée, ou ne cherche-t-elle qu’une occasion pour frapper à nouveau ?



« Le Moulin de Pologne », un ouvrage particulier dans l’œuvre de Giono, certes, mais un des mes préférés. Il dépeint, en arrière plan, la médiocrité extraordinaire des gens ordinaires. Giono, délaissant ici son art de magnifier sa chère Provence, nous livre un texte fort qui ne laissera pas le lecteur indemne.

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L'homme qui plantait des arbres

Provence, début du XXème siècle. Le narrateur, un jeune homme venu découvrir les jolies terres du Sud de la France se perd au milieu des villages sans vie, n'ayant plus d'eau. Toutefois, il rencontre un berger de cinquante ans qui l'invite à dormir dans sa demeure. Peu à peu, le narrateur découvrira la personnalité inoubliable de cet homme si généreux qui, pour passer son temps, plante chaque jour une centaine de glands. En échappant aux deux Guerres mondiales, de majestueux chênes commencent à pousser et ce berger si exceptionnel permettra à ces villages abandonnés de retrouver la vie et surtout leurs habitants heureux.



Quelle jolie fable ! L'auteur nous indique que l'on peut trouver des exceptions parmi la condition humaine : des hommes généreux, qui, par leurs bonnes actions, contribuent au bonheur d'autres personnes. Cette petite nouvelle est tout simplement merveilleuse et le style de Jean Giono m'a profondément marqué ; ainsi je poursuis le cycle "Jean Giono" en lisant "Regain", qui, je ne doute pas, me laissera un excellent souvenir de cet auteur si touchant...



A lire absolument !!
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Refus d'obéissance

Un article contre la guerre et quatre chapitres inédits du roman « Le grand troupeau ». J’ai cherché, sans succès, la raison pour laquelle ils n’ont pas été intégrés à la version définitive du roman.

Ces chapitres, ce sont des scènes de guerre, du front, de boue, de mort, de blessures abominables, de terreur et d’épuisement, autant moral que physique. Ces quatre chapitres sont terribles. Et je me demande s’il ne faudrait pas les lire avant le manifeste écrit par Giono en 1934, qu’il a intitulé « Je ne peux pas oublier » et qui figure en tête du recueil. Ces quatre chapitres disent à quel point c’est inoubliable, mieux que tous les discours et tous les manifestes.



Mais dans cet article de 1934, Giono affirme que non seulement il n’oublie pas, mais qu’il ne veut plus. Plus de cette destruction qui n’a de sens pour personne, ou seulement pour ceux qui, sans risquer ni leur peau ni même leur confort, tirent leur épingle de ce jeu macabre. « (Le capitalisme) n’a de lois que pour le sang et pour l’or ».

Giono se déclare pacifiste et s’engage à ne plus obéir à aucun ordre de conscription.

Giono met son éloquence, son talent, au service de sa déclaration et elle est convaincante, bien évidemment, percutante, et bouleversante quand il nomme ses camarades tués à ses côtés, vingt ans plus tôt. Eux qui ont été « sacrifiés à la patrie (on n’ose déjà plus guère le dire), mais enfin, à votre prochain, à vos enfants, aux générations futures. Et ainsi de suite, de génération en génération. Qui donc mange les fruits de ce sacrifice à la fin ? »



Pourtant, en 1940, Giono obéira et rejoindra son centre de mobilisation. Sa notoriété de pacifiste lui vaudra d’être arrêté et incarcéré pendant deux mois, puis d’échapper à la conscription.

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L'homme qui plantait des arbres

En 2015, près de chez moi et de la tristement célèbre forêt de Sivens, nous avons été commémorer le premier anniversaire du décès de Rémi Fraisse et les organisateurs de ce rassemblement nous ont distribué à chacun une poignée de glands à semer sur cette terre dévastée par les tractopelles et autres outils de chantier. Je ne suis pas retourné précisément à cet endroit mais je suppose que depuis, la nature a repris ses droits et que de beaux chênes commencent à coloniser la parcelle. C’est d’emblée ce souvenir qui m’est venu en lisant cette nouvelle de Jean Giono.

A la manière du facteur Cheval qui, à chaque tournée rapporte quelques pierres pour construire son édifice, le vieil Elzéard, berger dans la garrigue, va, pendant près de quarante ans, planter des arbres. Sur 11 km de long et 3 km de large, il va inlassablement reconstituer une belle forêt sur la garrigue provençale, celle-ci va retenir l’eau et faire couler les rivières desséchées. Ainsi les vieux villages désertés vont peu à peu voir des habitants s’y installer. Le vieux solitaire qui parlait peu car il n’en voyait pas la nécessité avait ainsi donné un sens à sa vie et trouvé le moyen d’être heureux.

Cette lecture fait suite au conte philosophique de Clarissa Pinkola Estès intitulée Le jardinier de l’Eden et on trouvera de nombreux points communs entre les deux œuvres : des hommes simples sans beaucoup de connaissances mais avec du bon sens paysan, un amour pour la terre nourricière, une lutte contre le manque de respect pour dame Nature.

“On décida de faire quelque chose et, heureusement, on ne fit rien” nous dit Giono dans les dernières pages.

Il faudra 40 ans pour que la parcelle de zone humide de la forêt de Sivens dénaturée par les bulldozers se reconstitue.

Chapeau Monsieur Giono.



Challenge Riquiqui 2022



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L'homme qui plantait des arbres

Eloge de la lenteur, de la nature, de l'humble patience, autour de l'évocation d'un personnage d'une simplicité lumineuse dont la vie a du sens.

Et tout cela en seulement quelques pages, pendant que passent deux guerres.

Un bijou qui me réconcilie avec Jean Giono après l'expérience malheureuse du Hussard.
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L'homme qui plantait des arbres

« Quand on se souvenait que tout était sorti des mains et de l'âme de cet homme - sans moyens techniques - on comprenait que les hommes pourraient être aussi efficaces que Dieu dans d'autres domaines que le destruction. »

Cette courte nouvelle est d'une grande puissance et véhicule un sentiment de bien être et d'espoir en l'espèce humaine.

J'aimerai croire que ce berger a existé, que cette générosité et sa constance dans l'effort et le labeur puisse être transmis.

Cette nouvelle a résonné particulièrement en moi et je suis étonnée de ne la découvrir qu'aujourd'hui, moi qui m'ulcère de voir qu'au 21ème siècle on continue à arracher le vert à tour de bras pour le remplacer par du béton, et qui a un niveau bien moindre plante des arbres dans le maquis incendié près de chez moi. Je ne suis pas douée, pour l'instant seuls un avocatier et quelques tiges d'olivier ont survécu ! Mais je suis une utopiste et j'aurai au moins fait ce petit geste.

C'est un très beau manifeste en faveur de la nature, en prendre soin aura des répercussions sur la vie en général, l'action d'Elzéard Bouffier change ce coin aride et abandonné en une localité repeuplée et économiquement saine.

Nouvelle à faire lire à tous les maires et élus de France et d'ailleurs.

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La trilogie de Pan, tome 1 : Colline

Voilà un court roman à lire et à relire tant il est fort, déroutant et mystérieux.

Quatre maisons fleuries d'orchis, à l'ombre froide des monts de Lure composent les Bastides blanches. Treize personnes y vivent. Douze appartiennent aux quatre familles et puis il y a Gagou, l'idiot du village "qui fait le mauvais compte". Les habitants semblent vivre en bonne intelligence et se réunissent volontiers autour de la fontaine qui chante. Seulement voilà, le vieux Janet, ivrogne et sorcier, tombe raide. Il n'en a plus pour longtemps.

La fontaine se tait.

Le vieux, paralysé devant l'âtre, se met à déparler, en proie à des hallucinations terrifiantes. Il voit des serpents lui traverser les doigts. il déverse un flot de prédictions..."Les rues légères, tout à l'heure rosées, bleuissent doucement ; toute la poussière blanche du soleil se dépose dans une coupe de l'horizon, l'ombre de Lure monte". Des drames en série s'abattent sur le hameau.

On peut lire ce court roman comme un conte fantastique, un poème épique ou une fable mythologique. La Nature et ses avatars ( colline, eau, feu ) en est le personnage principal. Tantôt calme et nourricière, tantôt cruelle et violente quand les hommes ne la respectent pas. Alors ceux-ci trouvent un coupable et nourrissent la bête, qui semble s'apaiser. Mais les hommes oublient aussitôt la leçon... L'écriture est formidable. Elle mêle une narration pleine de lyrisme, de métaphores colorées à des dialogues familiers ou grossiers qui imitent le langage populaire des paysans de l'époque.

Je remercie Colchik via Biblioroz pour m'avoir donné l'envie de relire ce livre ( liste des livres pour s'aérer).
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La trilogie de Pan, tome 2 : Un des Baumugnes

Lumineux



Le deuxième livre de la trilogie de Pan, est à travers le récit d'Amédée, la bouleversante quête d'un amour impossible. Amédée le vieux journalier, écoute Albin lui raconter sa vie, je suis de Baumugnes, répète t-il, "solide et droit, il n'osait pas bouger, mais vous auriez vu ses yeux !", lâche Amédée

p 124.

Ces mots il les avaient en bouche ce soir là, à Manosque, au bar de la Buvette du Piémont, ce soir là où tout a commencé. Ils étaient deux journaliers à Marigrate. Lui Amédée a trouvé Albin avec "ses mots durs, doux, qui savent où est le cœur", page 15. Albin fracassée par l'amour d'une jeune fille, enlevée devant lui par le Louis un gars de Marseille sans vergogne.



Lui Albin était bloqué à la table de fer, il fallait qu'il redise je suis de Baumugnes, "j'ai en moi Baumugnes tout entier".



"Tu vois, ce que je lui reproche, à mon village qui m'a fait, c'est qu'il ne m'a pas appris à tuer".





Cette voix qui lui parle d'Angèle, d'un amour à peine entrevu et déjà son impossible douleur. Sa voix, Amédée la décrit page 27, "cette voix lente qui partait dans la nuit, droit devant elle comme un trait, et qu'elle dépassait le rond du monde, ça semblait comme le vent, la parole des arbres, des herbes, des montagnes et des ciels. Ça avait la luisance d'une faux.





Le lendemain après cette confession, page 30, "Albin fit comme ça des épaules , à quoi bon ?" "Et ça creva dans moi comme une eau qui pèse une digue de terre puis gagne, renverse et inonde le verger."

Écoute "je vais aller à la Douloire, crois moi! " Amédée a noué sa corde à celle du garçon, sa corde à celle d'un de Baumugnes, la douleur pour seul fardeau pour affronter la Douloire, et bientôt la peur.

La Douloire où vivent les parents d'Angèle.





L'énigme de Baumugnes, est dans la lignée de la trilogie. La transposition du dieu Pan par Jean Giono, est pleine de finesse et confère à ce roman une magie qui rehausse le premier tome.

Baumugnes est le village au delà des villages, trouvant refuge dans la montagne, "une terre qui touche le ciel, p 17", pour échapper à toute incursion des religions ou des croyances étrangères. Là règne la musique, la monica, qui est un mélange de sifflements et d'harmonies, et "ça tirait les larmes au yeux."





Selon Ovide Pan défie Apollon dans un concours musical. L'autre allusion mythologique, indique que Pan confectionna un instrument de musique auquel il donna le nom de flûte de pan instrument de séduction pour rendre toute personne amoureuse.





Dans les souliers d'Amédée il n'y a que la promesse faite au gamin. Il ne sait pas encore que la peur va le gagner, quand Clarius le père d'Angèle se dresse devant lui avec son fusil. Ce fusil qu'il brandit à chaque fois que l'on parle d'Angèle.



Dire pourquoi je suis fan de Giono ? Ce grand roman d'amour puise sa force dans ces terres de Provence, ces chemins de pierres, ces vents à écorner les bœufs, bref dans la nature. Hier dans Colline elle avait endossé sa méchanceté, et sa colère.



Ici c'est la colère des hommes qui s'exprime, et parfois la nature devient magique, avec les mots de Giono, avec les doigts d'Albin, avec sa bouche qui la fait chanter, et bouleverse Amédée, subjugué, lui le vieux compagnon d'infortune.



C'est la magie quand il chuchote p 33, "c'est de finesse qu'il faut travailler, j'aime bien que le vent me flûte autour des oreilles."

C'est la magie de Saturnin, "ce valet à l'ancienne qui avait à la fin trouvé sa place, il était de la famille plus que s'il en avait eu le sang et la chair. p 50."



Amédée regardait aussi la maison, la Douloire, "la maison en pierre, les murs et les tuiles, le bois des volets, tout cela bien joint, bien fermé sur l'air noir du dedans et je ne pouvais pas arriver à comprendre pourquoi c'était si bien fermé pourquoi on avait mis cet air du dedans à l'abri de nos mains et de notre œil.



Et puis un jour une simple tasse est laissée, sur la paillasse par Philomène. La patronne revenant de la cave ne pouvait en justifier l'usage par un familier. Alors Amédée a compris qu'Angèle, "la fille aux gestes justes la meneuse de chevaux, l'amante de la Douloire, cette lampe dans la tête d'Albin était sans doute séquestrée."





La magie de ces textes tient beaucoup à ce tête-à-tête entre Amédée et Clarius. Amédée a besoin de comprendre pourquoi cet homme a verrouillé sa maison, comprendre sa colère, sa violence et sa solitude.



On retrouve aussi ce tête-à-tête dans le roman chien-loup de Serge Joncour inversé. Joséphine part affronter le dompteur, la force est avec lui, la peur qu'il suscite terrorise le village. Mais à l'extrémité de ce tête-à-tête Serge Joncour défie la peur et transforme ce tête-à-tête en un duo d'amour.



La magie de ce texte va connaître son point ultime quand Albin va jouer de la Monica deux soirs de suite, une musique qui se fond dans les arbres une musique pareille au vent. Jean Giono décline alors de très belles images, page 87  ;

"moi j'écoutais un petit bruit dans les platanes, très curieux que je trouvais doux ; c'était une feuille sèche qui tremblait au milieu du vent. Cette feuille-là me disait plus à moi que toutes les autres en train de faire les acrobates autour d'une clarinette."

"Eh bien la musique d'Albin était cette musique de feuilles de platanes et ça vous enlevait le cœur."

Un de Baumugnes, un roman déchirant et magique.



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Que ma joie demeure

Il m'aura fallu atteindre l'âge respectable de 37 ans pour oser jeter un oeil, avant d'y plonger à coeur plein dans l'univers de Jean Giono.

C'était une bonne idée, cette attente. Il faut être mûr à point pour savourer l'écriture de ce grand monsieur. Il faut déjà avoir un peu vécu la fuite du temps, la course effrénée du quotidien, le stress imposé, par nous nous-mêmes souvent, du reste, pour apprécier le calme, la nostalgie, le voir-vivre, les joies toutes simples qui parsèment "Que ma joie demeure". Il faut déjà en être arrivé à cette étape de la vie où la Nature devient un idéal à retrouver, où les histoires d'antan nous touchent pas leur charme désuet pour goûter ces descriptions de la vie paysanne, des champs de narcisses, des chants des oiseaux, cet éveil des cinq sens que l'on frôle des doigts au fil des pages. Il faut avoir déjà avoir vu défiler un certain nombre de livres, bons ou moins inoubliables, pour sentir son coeur et son cerveau frétiller de concert à la découverte, ligne après ligne, de ces mots, si bien mariés, poétiques et philosophiques.

J'imagine les ptits jeunes désabusés lisant telle une corvée ce roman, dans lequel, il est vrai, l'action n'est point l'aspect le plus évident.

Vingt, trente ans plus tard, voilà que l'expérience de vie, de lecture, font que nos papilles lecturophiles retrouvent leur Madeleine littéraire...

A découvrir absolument !!! Mais ... point trop tôt ! (L'apparition des premiers cheveux blancs pourrait être un bon timing ! ;) )

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Les Grands Chemins

Jean Giono nous présente ici un vagabond anonyme, à la recherche de son idéal. Il rencontrera l’Artiste, en fait un joueur de cartes , à qui il vouera une admiration sans limite. Naîtra une amitié virile au long de cette route qui les mènera vers leur destin.



Mais comme il arrive parfois dans ce genre d’amitié, un conflit finira par ternir les relations des deux hommes. S’en suivra une véritable chasse à l’homme ou le narrateur poursuit son compagnon d’infortune, joueur et menteur invétéré… Pour lui régler son compte ? peut-être… mais il lui faudra faire vite s’il veut le rejoindre avant la meute des villageois en colère également à ses trousses.



« Les grands chemins », un roman qu’il est convenu de situer dans la deuxième époque de l’auteur, celle de l’après guerre. On le sent désabusé…et sa prose se fait moins lumineuse, moins olfactive. Il reste malgré tout les thèmes chers à Giono : les petits boulots, l’amitié virile et les grands chemins qui ne mènent nulle part si ce n’est à soi-même…



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L'homme qui plantait des arbres

Lors de la lecture d'Un de Baumugnes l'année passée, j'avais décidé de poursuivre la découverte de Jean Giono, auteur provençal par excellence aux côtés de Marcel Pagnol. C'est ainsi que j'ai lu la nouvelle L'homme qui plantait des arbres, écrite en 1953 pour un concours du magazine américain Reader's Digest.



Elle présente l'écologie et le développement durable à une époque où ce n'était pas un sujet prédominant, en se fondant finalement sur le bon sens paysan.



Un berger solitaire, Elzéard Bouffier, ramasse des glands, les sélectionne, pour les replanter, ce qui permet de reboiser une zone désertique en retenant l'humidité et l'eau et ainsi de repeupler des villages abandonnés. L'arbre est source de vie.



Cette nouvelle est inspirante, très courte et recommandée apparemment par l'Education Nationale.



L'oeuvre de Jean Giono est le thème du club de lecture de mon village ce mois-ci, ce qui m'a poussée à lire un peu plus attentivement sa biographie et bibliographie.



Je continuerai donc sans doute l'année prochaine la trilogie de Pan avant de poursuivre par Un roi sans divertissement, dans les Chroniques, pour explorer aussi ses réflexions les plus sombres sur l'Homme, après ses livres sur la nature.

Décidément, un auteur vers lequel j'ai envie de revenir !



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Jean Giono

Né à Manosque en ...

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