Le
roman dans sa diversité
Bernard PIVOT reçoit Anne GOLON pour son livre "Angélique à Québec", François Régis BASTIDE pour son livre "L'Enchanteur et nous",
Patrick MODIANO pour son livre "
une jeunesse",
Jacques LANZMANN pour son livre "
Rue des mamours",
Philippe SOLLERS pour son livre "
Paradis" et
Jean Louis EZINE auteur de "Des Ecrivains sur la Sellette". le débat est fortement axé, en partie, sur le sens et la...
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Chez nous, quand ça se tait, il faut avoir l'oreille fine pour distinguer la pudeur de l'indifférence. (p. 57)
Au reste, je dois convenir qu’il n’avait pas eu de mauvais geste personnel à mon égard. Pour ça, il avait maman. Fatalement, un mauvais geste n’aurait pas manqué de nous engager dans une relation quelconque, lui et moi, une relation humaine, comme on dit. Et c’est justement ce qui était impossible entre nous, une relation, un rapport humain.
Pourquoi l'homme est-il un animal qui ne sait plus du tout qui il est quand il ne sait pas d'où il vient ? (p. 72)
Qu’est-ce d’autre, écrire, que chercher son double perdu, son frère, son lecteur ? Des deux côtés dut texte, c’est la compassion même qui nous motive. Je cachais ma plaie. J’écorchais celle des autres.
Je ne me suis pas toujours appelé du nom que je porte, et c'est comme si j'avais vécu une autre fois. C'est comme si j'avais été un autre. Mais de cet autre, je n'ai aucun souvenir. Rien qui puisse se dire tel, plutôt les ombres floues des réminiscences où s'évanouissent, aux limites de la mémoire, les ultimes rayons d'un monde éteint. J'étais trop jeune pour les souvenirs, quand j'ai cessé d'être lui. Et cependant il a toujours occupé ma pensée, toute ma pensée. Il ne m'arrive rien d'important, ou de misérable, ou de triste ou d'heureux que je n'aie le sentiment étrange de recevoir par délégation. Nous sommes pourtant très différents, lui et moi. Pour commencer, lui avait un père, tandis que moi, je n'ai eu que le manque.
Si on n'est pas chez soi dans sa tête, où pourrait-on l'être ?
Voyons les choses simplement. il nous manque à tous quelque chose. Et à tous, quelque chose d'essentiel, il ne faut pas se leurrer. Il est inutile de s'attarder aux injustices qui nous font penser que certains doivent endurer des carences plus cruelles que d'autres, c'est égal. Ce qu'il faut, c'est aller chercher ce qui manque. Et ne pas craindre l'échec. Ce qui compte, c'est de chercher, c'est ça qui donne un sens à la vie.
(P101)
C’est feutré, l’écrit, ça n’a pas la violence d’un abordage frontal, ça ménage les distances et les sentiments et ça laisse la mémoire faire son chemin.
Je ne me suis pas toujours appelé du nom que je porte, et c’est comme si j’avais vécu une autre fois. C’est comme si j’avais été un autre. Mais de cet autre, je n’ai aucun souvenir. Rien qui puisse se dire tel, plutôt les ombres floues des réminiscences ou s’évanouissent, aux limites de la mémoire, les ultimes rayons d’un monde éteint. J’étais trop jeune pour les souvenirs, quand j’ai cessé d’être lui. Et cependant il a toujours occupé ma pensée, toute ma pensée. Il ne m’arrive rien d’important, ou de misérable, ou de triste ou d’heureux que je n’aie le sentiment étrange de recevoir par délégation. Nous sommes pourtant très différents, lui et moi. Pour commencer, lui avait un père, tandis que moi, je n’ai eu que le manque. Tout, depuis toujours, a gravité autour de ce trou noir.
Je me heurte tous les jours au fantôme de celui que je fus quand je portais un autre nom.
« Je ne me suis pas toujours appelé du nom que je porte, et c’est comme si j’avais vécu une autre fois. C’est comme si j’avais été un autre. Mais de cet autre, je n’ai aucun souvenir. Rien qui puisse se dire tel, plutôt les ombres floues des réminiscences où s’évanouissent, aux limites de la mémoire, les ultimes rayons d’un monde éteint. J’étais trop jeune pour les souvenirs, quand j’ai cessé d’être lui. Et cependant il a toujours occupé ma pensée, toute ma pensée. Il ne m’arrive rien d’important, ou de misérable, ou de triste ou d’heureux que je n’aie le sentiment étrange de recevoir par délégation. Nous sommes pourtant très différents, lui et moi. Pour commencer, lui avait un père, tandis que moi, je n’ai eu que le manque. Tout, depuis toujours, a gravité autour de ce trou noir.
Je me heurte tous les jours au fantôme de celui que je fus quand je portais un autre nom."