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4.1/5 (sur 9 notes)

Nationalité : France
Né(e) le : 30/03/1944
Biographie :

Historien de la philosophie. - Professeur de 1re supérieure au Lycée Henri IV, Paris (en 1990). - Inspecteur général de philosophie (en 2010). Auteur d'un rapport sur l'enseignement de la philosophie.

Traduit du grec ancien en français

Source : Catalogue de la BNF
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Bibliographie de Jean-Louis Poirier   (17)Voir plus

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Citations et extraits (17) Voir plus Ajouter une citation
Un immense fleuve d’oubli nous entraîne dans un gouffre sans nom. Ô abîme, tu es le Dieu unique. Les larmes de tous les peuples sont de vraies larmes ; les rêves de tous les sages renferment une part de vérité. Tout n’est ici-bas que symbole et que songe. Les dieux passent comme les hommes, et il ne serait pas bon qu’ils fussent éternels. La foi qu’on a eue ne doit jamais être une chaîne. On est quitte envers elle quand on l’a soigneusement roulée dans le linceul de pourpre où dorment les dieux morts.

ERNEST RENAN (1823-1892) - Souvenirs d’enfance et de jeunesse
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Mais un abîme va s’ouvrir maintenant sous nos pas ; nous ne savons quelle route suivre dans un tel gouffre et la pensée se précipite avec effroi de malheurs en malheurs jusqu’à l’anéantissement de tout espoir et de toute consolation. [...] tout est semblable bien qu’extraordinaire ; tout est monotone bien qu’horrible ; et l’on serait presque honteux de soi-même si l’on pouvait regarder ces atrocités grossières d’assez près pour les caractériser en détail.
Examinons seulement le grand principe de ces monstrueux phénomènes : le fanatisme politique. Les passions mondaines ont toujours fait partie du fanatisme religieux ; et souvent au contraire la foi véritable à quelques idées abstraites alimente le fanatisme politique ; le mélange se trouve partout, mais c’est dans sa proportion que consiste le bien et le mal. L’ordre social est en lui-même un bizarre édifice : on ne peut cependant le concevoir autrement qu’il n’est ; mais les concessions auxquelles il faut se résoudre pour qu’il subsiste tourmentent par la pitié les âmes élevées, satisfont la vanité de quelques-uns et provoquent l’irritation et les désirs du grand nombre. C’est à cet état de choses plus ou moins prononcé, plus ou moins adouci par les mœurs et par les lumières, qu’il faut attribuer le fanatisme politique dont nous avons été témoins en France. Une sorte de fureur s’est emparée des pauvres en présence des riches, et les distinctions nobiliaires ajoutant à la jalousie qu’inspire la propriété, le peuple a été fier de sa multitude ; et tout ce qui fait la puissance et l’éclat de la minorité ne lui a paru qu’une usurpation. Les germes de ce sentiment ont existé dans tous les temps ; mais on n’a senti trembler la société humaine dans ses fondements qu’à l’époque de la Terreur en France : on ne doit point s’étonner si cet abominable fléau a laissé de profondes traces dans les esprits et la seule réflexion qu’on puisse se permettre, et que le reste de cet ouvrage j’espère confirmera, c’est que le remède aux passions populaires n’est pas dans le despotisme mais dans le règne de la loi.

GERMAINE DE STAËL (1766-1817)
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« Bibliothèque idéale des philosophes français ». Pourquoi prendre le risque de constituer une telle bibliothèque ? Les ouvrages scolaires, les anthologies ne manquent pas et font pacifiquement cohabiter les philosophes français et bien d’autres, en grand nombre. Si cela n’a pas vraiment de sens de parler de « philosophie française », il est clair, cependant, que les philosophes d’expression française dessinent une figure singulière, et, contrairement à bien des idées reçues, renouvellent et inventent sans modération, subvertissent à l’infini le modèle d’existence d’une vie de philosophe à peu près présentable. Nos philosophes ne se tiennent pas bien, et ça ne manque pas de femmes ! On ne saurait entièrement exclure qu’en proposant au public cette Bibliothèque idéale des philosophes français nous ne nous découvrions en train de rééditer l’aventure insolente, demeurée à jamais irrespectueuse et dérangeante, des Vies des philosophes illustres, de Diogène Laërce, cet impertinent qui, à la fin de l’Antiquité, efface d’un grand geste tant de siècles d’édification et de bonne conduite, en faisant apparaître à force d’anecdotes ce qu’avaient de dérisoire ces illustres philosophes. Efface ? ou rappelle à la vie ? Voilà peut-être où nous emmène, ingénument, un recueil non prévenu des philosophes français. Pour peu qu’on les lise. Pour peu qu’on les lise… et pour peu qu’on les trouve. Cette bibliothèque voudrait y aider…

(INCIPIT)
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J’ai étudié le monde, & je me suis étudié moi-même. J’ai vu toute l’Europe, une partie de l’Asie, & de l’Afrique ; j’ai trouvé partout des gens accablés des mêmes passions que j’ai surmontées, je me suis vu en autrui comme on se voit dans un miroir, & beaucoup mieux que je ne me voyais en moi-même. Je me suis blâmé, je me suis corrigé, & après avoir connu que rien n’est solide que l’amitié, je me suis dégagé de tout, & je reviens résolu de ne vivre que pour mes amis & pour moi

MADELEINE DE SCUDÉRY - (1607-1701)
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Un tombeau est un monument placé sur les limites des deux mondes. Il nous présente d’abord la fin des vaines inquiétudes de la vie et l’image d’un éternel repos ; ensuite il élève en nous le sentiment confus d’une immortalité heureuse, dont les probabilités augmentent à mesure que celui dont il nous rappelle la mémoire a été plus vertueux. C’est là que se fixe notre vénération ; et cela est si vrai que, quoiqu’il n’y ait aucune différence entre la cendre de Socrate et celle de Néron, personne ne voudrait avoir dans ses bosquets celle de l’empereur romain, quand même elle serait renfermée dans une urne d’argent ; et qu’il n’y a personne qui ne mît celle du philosophe dans le lieu le plus honorable de son appartement, quand elle ne serait que dans un vase d’argile.
C’est donc par cet instinct intellectuel pour la vertu que les tombeaux des grands hommes nous inspirent une vénération si touchante. C’est par le même sentiment que ceux qui renferment des objets qui ont été aimables nous donnent tant de regrets.

JACQUES-HENRI BERNARDIN DE SAINT-PIERRE (1737-1814)
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Tout ce que la terre produit, se corrompant, rentre dans son sein, et devient le germe d’une nouvelle fécondité. Ainsi elle reprend tout ce qu’elle a donné, pour le rendre encore. Ainsi la corruption des plantes, et les excréments des animaux qu’elle nourrit, la nourrissent elle-même, et perpétuent sa fertilité. Ainsi plus elle donne, plus elle reprend ; et elle ne s’épuise jamais, pourvu qu’on sache dans la culture lui rendre ce qu’elle a donné. Tout sort de son sein, tout y rentre, et rien ne s’y perd. Toutes les semences qui y retournent se multiplient. Confiez à la terre des grains de blé : en se pourrissant ils germent, et cette mère féconde vous rend avec usure autant d’épis qu’elle a reçu de grains. Creusez dans ses entrailles : vous y trouverez la pierre et le marbre pour les plus superbes édifices. Mais qui est-ce qui a renfermé tant de trésors dans son sein, à condition qu’ils se reproduisent sans cesse ?

FRANÇOIS FÉNELON - (1651-1715)
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Il est, au Museo Nazionale de Florence, une statue de marbre, que Michel-Ange appelait « Le Vainqueur ». C’est un jeune homme nu, au beau corps, les cheveux bouclés sur le front bas. Debout et droit, il pose son genou sur le dos d’un prisonnier barbu, qui ploie, et tend sa tête en avant, comme un bœuf. Mais le vainqueur ne le regarde pas. Au moment de frapper, il s’arrête, il détourne sa bouche triste et ses yeux indécis. Son bras se replie vers son épaule. Il se rejette en arrière ; il ne veut plus de la victoire, elle le dégoûte. Il a vaincu. Il est vaincu.

Cette image du Doute héroïque, cette Victoire aux ailes brisées, qui, seule de toutes les œuvres de Michel-Ange, resta jusqu’à sa mort dans son atelier de Florence, et dont Daniel de Volterre, confident de ses pensées, voulait orner son catafalque, c’est Michel-Ange lui-même, et le symbole de toute sa vie.
La souffrance est infinie, elle prend toutes les formes. Tantôt elle est causée par la tyrannie aveugle des choses : la misère, les maladies, les injustices du sort, les méchancetés des hommes. Tantôt elle a son foyer dans l’être même. Elle n’est pas alors moins pitoyable, ni moins fatale ; car on n’a pas eu le choix de son être, on n’a demandé ni à vivre, ni à être ce qu’on est.
Cette dernière souffrance fut celle de Michel-Ange. Il eut la force, il eut le bonheur rare d’être taillé pour lutter et pour vaincre, il vainquit.

ROMAIN ROLLAND (1866-1944) - Michel-Ange, Préface
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En notre siècle certes la difficulté est plus grande qu’autrefois, mais ce siècle est pourtant celui qui a entrepris hardiment de reformer les chœurs des muses, les latines vêtues de la toge, et les grecques vêtues du pallium, les faisant revenir de ces cimes jadis si fréquentées, et qui semblaient désormais inaccessibles et désertées. Il est assurément d’un grand prix de pouvoir estimer les grands esprits de l’Antiquité d’après les images d’eux-mêmes qui nous ont été conservées, et qu’une ou deux générations viennent de restituer après les avoir découvertes dans des monuments misérablement décrépits, et les avoir nettoyées et. polies au point de leur rendre presque leur éclat d’autrefois.
Tout en pensant qu’un grand nombre de ces monuments ne nous sont pas parvenus intacts, nous devons pourtant rendre grâces, et maintes fois, à la providence, de ce que nous avons désormais entre nos mains, émergeant d’un déluge de plus de mille ans, ce qui en est, je crois, la meilleure part. Un déluge désastreux avait en effet englouti les lettres authentiques, les seules dignes de ce nom, et les gardait enfouies, ensevelies sous un si puissant déferlement de barbarie, qu’il est étonnant qu’elles aient pu en réchapper. C’est là un bienfait de la divine providence, qu’elle ait voulu elle-même nous rendre les reliques et les marques des anciens esprits, pour la culture et l’ornement de notre vie.

GUILLAUME Bude (1467-1540) - L’Étude des Lettres, ch. IV
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Les idées que les ruines réveillent en moi sont grandes. Tout s’anéantit, tout périt, tout passe.
Il n’y a que le monde qui reste. Il n’y a que le temps qui dure. Qu’il est vieux ce monde ! Je marche entre deux éternités. De quelque part que je jette les yeux, les objets qui m’entourent m’annoncent une fin, et me résignent à celle qui m’attendait. Qu’est-ce que mon existence éphémère, en comparaison de celle de ce rocher qui s’affaisse, de ce vallon qui se creuse, de cette forêt qui chancelle, de ces masses suspendues au-dessus de ma tête, et qui s’ébranlent ? Je vois le marbre des tombeaux tomber en poussière ; et je ne veux pas mourir ! et j’envie un faible tissu de fibres et de chair, à une loi générale qui s’exécute sur le bronze ! Un torrent entraîne les nations les unes sur les autres, au fond d’un abîme commun ; moi, moi seul, je prétends m’arrêter sur le bord, et fendre le flot qui coule à mes côtés !

DENIS DIDEROT (1713-1784)
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La Grèce reçut le message de l’Égypte, et elle eut aussi sa révélation propre : ce fut la révélation de la misère humaine, de la transcendance de Dieu, de la distance infinie entre Dieu et l’homme.
Hantée par cette distance, la Grèce n’a travaillé qu’à construire des ponts. Toute sa civilisation en est faite. Sa religion des Mystères, sa philosophie, son art merveilleux, cette science qui est son invention propre et toutes les branches de la science, tout cela, ce furent des ponts entre Dieu et l’homme. Sauf le premier, nous avons hérité de tous ces ponts. Nous en avons beaucoup surélevé l’architecture. Mais nous croyons maintenant qu’ils sont faits pour y habiter. Nous ne savons pas qu’ils sont là pour qu’on y passe ; nous ignorons, si l’on y passait, qui l’on trouverait de l’autre côté.

SIMONE WEIL (1909-1943) - L’Agonie d’une civilisation
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