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Citations de Jean Malrieu (53)


LEVÉE EN MASSE

Ne serait-ce qu’une fois, si tu parlas de liberté,

Tes lèvres, pour l’avoir connue, en ont gardé le goût du sel,

Je t’en prie,

Par tous les mots qui ont approché l’espoir et qui tressaillent,

Sois celui qui marche sur la mer.

Donne-nous l’orage de demain.

Les hommes meurent sans connaître la joie.

Les pierres au gré des routes attendent la lévitation.
Si le bonheur n’est pas au monde nous partirons à sa rencontre.

Nous avons pour l’apprivoiser les merveilleux manteaux de l’incendie.

Si ta vie s’endort,

Risque-la.
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Le bruit court qu’on peut être heureux.
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Jean Malrieu
LE TEMPS ET MOI

Dans le mur, à l'heure où le chat-huant se retourne dans ses
clameurs,
Éclaboussant dans le jardin les roses d'une nuit de ses cou-
leurs
Qui ressembleraient étrangement à des flammes veillant à
côté de leurs lampes,
Une couleuvre est de sortie hors des broussailles et rampe
Dans une fuite de sommeil dont les pierres sont déjetées.
C'est un sablier qui se renverse, le temps disjoint rejoint
l'éternité.
Un frisson se retient, un nerf se rompt, une pincée de cendre
Amorce une chute retenue, entraîne un remuement.
Rien qu'à l'entendre
La chaleur dans mon corps qui veut me rassurer, ma lâcheté
serrant ses bras autour du cou,
Murmure qui me désole et me console : « Tout durera bien
plus que nous».
J'ai peur, je suis vivant. La chasse est dans le temps qui pié-
tine dans la pendule.
Par la fenêtre ouverte, elle surveille la transhumance des col-
lines noctambules
Et, soudain, fait s'envoler une compagnie
d'étoiles dans l'éblouissement d'une beauté plus cruelle que
le remords
Car il fait plus beau sur terre que dans les rêves. Et le sang qui
se refuse se retourne comme un serpent et mord.
C'est la mort qui travaille et reste à mon écoute,
Et me construit et me détruit mon cœur qui bat la campagne
comme un nomade court les routes
Dans le sourd tremblement d'une terre alertée
Par le désordre des charrois des fourgons nocturnes en
déroute de l'été.
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Jean Malrieu
DERNIÈRE LETTRE

Les écrits restent

Je t’aime

Je m’envole
À la poursuite de nos ombres


Adieu la minute précise

Où mon amour est plus fort que la mort

Et l’on saura combien mon éphémère

Je t’ai donné

Plus d’un dira de moi


J’ai plus aimé que lui

J’ai souffert comme lui

Et plus d’une dira

Je suis plus belle qu’elle

Pourquoi personne ne saura

Les écrits restent

Je m’efface

Moi qui n’étais qu’un homme

Et toi tu étais tout

Et c’est toi qui nous feras vivre dans la mémoire des hommes

Moi qui te parle comme un mort

Les écrits restent

Aussi j’écris j’écris

Je gagne sur l’immortalité en ce moment

Je dresse mon torse à la hauteur des amants célèbres

Parce que je t’aime comme on respire

Je t’aime comme on vit

Que ma vie est une vie d’homme

Et que j’ai joué mon sang

Les écrits restent

Je m’éloigne

Adieu

Le temps est merveilleux aujourd’hui

Tes yeux sont parfaitement bleus

On dirait de l’encre

J’écris tes yeux

Comme une heure tranquille celle de la poésie et de la vie

Il fait un temps de poème

Ta chair neige j’écris la neige

Parce que c’est beau et parce que c’est vrai
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Jean Malrieu
Sur le seuil avec beaucoup d'ombre dans le dos
Je n'en finis pas de regarder une rose.
C'est la dernière de l'été. Ma mère aimait cette chanson.
Il est resté quelque chose d'elle dans l'automne
Comme « Soyez heureux » ou « Amitié d'un convive
absent ».

Je n'en finis pas de poser comme sur une photographie
Avec un chien à mes pieds.
On reconnaît le pied de vigne, le géranium,
L'entaille au cœur qui marque la saison
Comme autrefois lorsque nous grandissions
Ces dates et ces traits cernant nos tailles juvéniles.

Je n'en finis pas de poser pour retrouver un jour d'hiver
Ce qui fait vivre éternellement ce qui dure peu :
Le pas du voisin sur la route, le chant de l'électrophone
Qui part du cœur de l'été blessé

Et dans les marges de ce soir blanc s'approchent
Les phalènes, les champs lunaires indivis,
La paix descendue du haut des peupleraies,
Brusque présence
Qui fait taire pour un instant
Toutes les bêtes de la nuit.
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Jean Malrieu
Le silence est fait de portes fermées
Derrière lesquelles un animal geint.

Un homme se déchire
Aux paroles d'une chanson.

Septembre, assis dans une bergerie,
S'en prend aux choses et les dépouille
Dans la rouille, l'air noir.

Le silence est dur comme un os.
La voix gémit par rafales
L'été porte le deuil des guêpes.

J'attends le passage,
À l'orée du sommeil qui sent le foin coupé,
Des bêtes qui vont aller se perdre dans les songes.
Les prodiges annoncent une fête
Quelque part. Un tambourin
Saute
Hors de la mémoire.

La pitié,
Avec ses deux mains jointes au milieu des flammes,
Prie.
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Jean Malrieu
De la terrasse, sur la partition même de l'été,
Nous avons déchiffré le paysage.
Il est des statues d'air dans les champs.
Quand on les heurte, elle résonnent,
Réveillent l'âme aux harmoniques.
De la graminée sans couleur
À l'ombre
Jetée comme un manteau sur le chemin,
Tout est divin.
L'air s'attarde
Autour de la maturité légère des jours.
Le lyrisme, avec ses pleureuses de flammes,
Rend supportable la fuite du temps.
Il ne se passe strictement rien en ce jardin
Sinon que je vais y vieillir
En choisissant mes pensées tournées vers l'amour.
Un ver glisse dans le fruit. Le jour
A pris la couleur de l'ambre.
Les saintes images de la terre vont nous quitter.
Le silence amical de la lune est terrible.
J'entends déjà des mers l'inaudible clameur
Et ce n'est plus la peine d'appeler au secours.
Je marche
Sur les empires du sable.
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   Dormir avec toi.
extrait 3
  
  
  
  
   Dormir avec toi.

   Ne me laisse jamais seul. Un cheval tourne dans ma tête.

   Dormir avec toi pour assouvir la vie.

                                                  
  Le nom secret
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Jean Malrieu
L'imperceptible grignotement du temps
S'annonce avec le vent d'Ouest qui courbe, à la pointe du chant,
Les mots et la luzerne.
Au seuil de l'âme
La lande est désolée avec ses autels verts,
Genévriers-fantômes des jours éteints entre deux pierres.
Là, nous avons assisté au combat des nuages,
Écouté la chute du temps dans les marches de l'Aquitaine,
Avec mon sang intact sous la peau dans un réseau de cathédrale,
Rudement fort pour soutenir l'assaut de la petite mort.
Je pointe un doigt vers l'invisible.
L'agonie promet d'être longue,
Règlement de comptes divin
Entre la tendresse et la foudre.
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APPROCHE D’UN VILLAGE



1. EXERCICES SPIRITUELS
         5

La terre, à l’approche du village,
Est verte.
Qui se venterait
De sa plaie d’innocence ?

Nous aimions les choses nettes,
Les bords purs de de l’évidence,
La place exacte du mieux vivre.

Le mur serait-il le mur
Sans la rose de Mai ?
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À leur sage lumière



De la joie

      Purs comme la pluie, jeunes comme le vent, fauves comme
le seigle, éléments d’une journée toujours nouvelle, nous retour-
nerons au chaos, à l’ivresse perpétuelle. L’amour est alarme et
révolution.
      Les profondeurs se sont ouvertes. Il y a des floraisons
d’abîme à la fenêtre. Les champs de la mer sont mûrs.


p.269
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Jean Malrieu
Et maintenant j’ai rendez-vous avec le petit jour
Comme on n’aimerait pas en rencontrer au coin d’un bois.
Comme il fait froid
Dans un grand cœur qui s’ensommeille
Versez la vie.
Deux doigts,
Deux doigts de femme
De la tisane des grands vents.
Cinq heures, dit l’horloge. La mousse du café s’assemble au bord de
la tasse.
On dit que ce sont les baisers perdus.
La buée sur la vitre
Est une femme qui regarde.
Effacez la vitre.
C’est vite le geste de l’adieu.
L’air est une fourrure soluble.
Dans la glace est restée une épaule de jour.
Les ongles des ronces en sont à leur premier quartier.
Je salue, comme la fougère,
Du poing fermé de la forêt.

(Les maisons de feuillages, éditions St Germain-des-Près, 1976)
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Le mal du temps


Tous les soirs
Parce que j’aime et je veux vivre
Tous les soirs
Parce que tant qu’on vit on vit d’espoir
Et que je sais ce que vivre veut dire
Tous les soirs
Ce poids tu temps je le dépose à terre
Comme un qui sait dormir
Comme un qui peut mourir
Mais qui ne veut le faire
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Jean Malrieu
Puisque nous sommes mortels,
Puisqu'en nous, déjà, cheminent
Les ombres et que le temps montant
Comme un gravier s'éboule,
Puisque s'élancent à la course
D'autres soleils,
En nous, pour publier l'instant accompli,
Avec les mots et les choses qui les portent
Dans la plus grande attention, la nudité
De l'âme quand elle s'éveille avant le jour,
Nous choisissons le témoignage.
Car nous sommes responsables,
Non de ce que nous avons fait,
Mais des promesses non tenues.
Ce n'est point de ne point avoir fait le mal.
Les mains quittes ne sont jamais pures.
Il faut les avoir noires de terre,
Saisies en leur travail, armées.
Il fallait toujours parfaire.
L'ordre du monde le demande.
C'est par les rêves tenus
Que se fait notre alliance.

Je n'ai pas assez aimé.
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Avril perpétuel de l'âme (extrait)

Où que tu ailles, l'humus,
le sable, prends modèle
sur les ondes, allège-toi.

Ne sois que souffles
et vois : une glycine
a débordé le mur.

Ne coupe aucune fleur,
tu t'élargis
dans l'air des cimes.

Oublie tous les noms
sauf ceux du jardin,
à la fois ceux des plages.

Pleines mains sur ce tronc,
écoute, équitable,
le silence, la sève.

Rien n'est invisible,
dis à présent
le parfum des lilas.

Pluie fine, la chair en liesse,
la clairvoyante, réveille
un chant de grive.

Les ailes, le cœur,
laisse-les battre,
laisse-les battre ensemble.
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À leur sage lumière



Portrait

La route mène jusqu’à moi
Simple et facile.
La feuille lourde du cerisier,
Velue au vent amer
En ce temps de disette, crois ce qu’elle dira.
Car elle est prophétie jetée au vent.
Si tu es heureux, tu viendras.
Vois un signal dans le bois.
Le printemps sonne sous l’écorce.
Tu débusqueras un homme
En peine dans la chaleur.
Il a des mots dans la bouche
Et un cheval dans le regard.


p.270
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À leur sage lumière



J’écris

      J’écris pour la pierre du chemin, pour un fagot de hêtre,
pour une graine d’eau retenue dans un puits. Pour les poissons
aveugles. Pour de futurs soleils et de prochains orages. J’écris
pour la dureté.


p.269
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TRESSE NOIRE


Extrait 3

Ample et sonore, moi, je ne sais où, demandant avec
 insistance des nouvelles du beau temps, la dernière
 adresse de l'aube, le goût fruité du printemps.
J'ai déjà en toi cette faim des choses sensibles. Aime et
 surveille ma mémoire. Je me confie à ta vie. Je refuse
 la mort et le sommeil.
La nuit se tait. C'est la nuit dans un hibou, un hibou
 dans la nuit, et nous couchés, tournons à la vitesse
 acquise de la terre, de saison en saison, boule qui
 amasse la mousse, vivants qui cueillons les frissons.
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La joie


Avec au bord des lèvres la vie surprise au moment où j’allais dire ton nom
Je m’avance, respire
Tu es ma femme et je te connais depuis cent ans
Tu es un château de feuilles

J’ai pris ta main au bout du soleil
Et le soleil m’a dit une longue histoire de soleil
Avec des radeaux sur la rivière
Et la rivière m’a parlé de ton corps
Et ton corps se termine par une main que j’ai rendue au soleil
C’est toi
Je suis fait d’ombre à tes côtés
Je suis fait des silences que tu aimes

Nous sommes jeunes et nos jours sont longs
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Mon pays préféré



Mon pays préféré est cette gorge de montagne
Que dévalent les arbres grêles, maladifs,
Où la bruyère croit, où l’ombre,
Quand le soleil s’en va derrière les sommets,
Tombe avec le bruit de l’ombre.
A mourir, autant que ce soit là.
Cinq heures du soir me conviennent,
Epoque où il fait clair encore, mais la vitre allumée
   griffe l’ombre.
L’âme vacille comme la flamme des bougies dans
   la cuisine assiégée.
Mais les pierres et les poutres sont mes amies.
Le front à la vitre obscurcie,
J’attends le veilleur qui va crier
Alerte.
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