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Citations de Jean Ray (214)


Le rose n’est pas une couleur, c’est le bâtard du rouge triomphant et de la lumière coupable ; né d’un inceste où l’enfer comme le ciel ont joué un rôle, il est resté la teinte de la honte. Mais cela, je ne l’ai senti que plus tard, quand il m’était devenu impossible de sortir encore de la géhenne.
La connaissance d’après coup, celle qui arrive trop tard pour vous sauver, me rappela que le rose est jumelle à l’horreur.
Pleur sanglante des poumons phtisiques, mousse aux lèvres des hommes qui meurent la poitrine percée, tissus visqueux des fœtus, prunelles affreuses des albinos morbides, témoin du virus et du spirochète, compagnon des sanies et de toutes les purulences, il a fallu l’innocence et l’admiration des enfants et des jeunes filles pour l’entourer de désirs et de préférences, et cela même démontre sa malice et sa ténébreuse essence.
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Les hommes ne sont pas nés du caprice ou de la volonté des dieux, au contraire, les dieux doivent leur existence à la croyance des hommes. Que cette foi s'éteigne et les dieux meurent. Mais cette foi ne se souffle pas comme une flamme de chandelle, elle s'allume, brûle, irradie et agonise. Les dieux vivent d'elle, lui empruntent leur force et leur pouvoir, sinon leur forme. Or, les divinités de l'Attique n'ont pas encore disparu du cœur et de l'esprit des humains ; la légende, les livres, les arts ont continué d'alimenter le brasier que les siècles ont surchargé de cendre.
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Les bruits étaient sympathiques et excellents : des grésillements de graisse chaude, des flonflons de bouilloire, des bruits en fusée de rôtis arrosés, le choc clair des casseroles et de la vaisselle, un glou-glou de bouteilles qui semblait parodier une cascadante série de baisers goulus.
Toute sa sympathie d’homme affamé serait allée vers les odeurs des viandes chaudes et des sauces épicées, si un effluve étrange, doux et terrible, n’était venu flotter autour de lui.
— Je connais cela, murmura-t-il.
Et, soudain, une cruelle fantasmagorie se déroula en film silencieux dans sa mémoire : il revit les boueuses tranchées où saignaient d’innombrables cadavres de Tommies et de Feldgrauen.
— Cela sent la mort, dit-il, le sang… Pouah !
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Jean Ray est né à Gand, le 8 juillet 1887. C'était un personnage des plus insolites, dont la vie semblait issue en droite ligne d'un roman d'aventures. Trafiquant à l'époque légendaire de la prohibition, Jean Ray sillonna, dit-on, toutes les mers du monde sur différents vaisseaux, plus ou moins fantômes, mêlé sans cesse aux écumeurs de mers et aux pirates, dont il était un des derniers représentants.

(dans le dossier en fin de volume de mon exemplaire : Marabout, 1965)
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Parce que je suis parti chasser avec Monsieur Stumble dans les marais de Fenn et parce que cet imprudent n’est pas revenu, et qu’on m’a trouvé en possession de sa gibecière et de sa gourde on veut que moi j’en sache plus que les autres.
[Dans les marais de Fenn]

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Une belle femme est une fleur précieuse née au hasard d’une pelouse de la vie, mais une belle Allemande me semble toujours sortie furtivement d’une serre savante et cruelle, où dans un coin d’ombre épaisse on soigne la mandragore...
(dans Mondschein-Dampfer)

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Mais de nouveau, l’horreur hanta les yeux de l’homme.
Lentement, ils sortaient du trou béant, les rats, les rats sans nombre ! noirs et gras, et leurs yeux luisaient dans la clarté rouge de la lampe.
Puis après eux d’autres bêtes en sortirent ; cloportes, blattes, scolopendres, mille-pattes ; des coléoptères de formes inconnues dont Rooks ignorait absolument l’existence.
Ils inondèrent la pièce comme une eau boueuse, et c’était un grouillement silencieux de pattes, de pinces, de mandibules et d’élytres qui s’offraient à son regard.
Dans le fond de la chambre les rats tenaient conseil, et avec une terreur indicible il vit leurs yeux humains et tristes posés sur lui.

[La vengeance]

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"La logique est un corollaire de la raison humaine, et nous avons bien tort de la demander aux puissances inconnues qui, parfois, s'immiscent dans nos destinées."

(Extrait de la nouvelle "L'histoire de Marshall Grove")
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L'image recule comme les castels de Morganne ; le pinceau devient de plomb dans la main du peintre ; tant de choses, que je voudrais fixer par description ou définition, se dérobent, deviennent vagues et s'envolent en brumes...
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N’avoir personne à qui parler par une nuit d’octobre, à cent pas de la mer qui meugle, et des fanfares d’oies sauvages, pour toutes voix vivantes autour de soi, c’est bien le pire châtiment pour un homme honorable.

(dans Le dernier voyageur)

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Les ans ont jauni les pages du mémoire et le temps a dû ternir les pierres de la cité.
Mais les dieux n’ont-ils pas survécu ?


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"Mais en cette sinistre matière, l'humour ne perd pas ses droits, témoin cette histoire écossaise :
Passant de nuit par un carrefour, Mac Tacish voit Mac Duff pendu à un arbre. Il est déjà rigide et froid.
_Pour enterrer un pendu, Mac Gregor, le fossoyeur, prend un shelling, mais il s'est pendu à un carrefour, il exige une demi-couronne, monologue Mac Tavish, et il s'en va, sans plus s'occuper du cadavre. Le lendemain on retrouve Mac Duff pendu à un saule au bord d'une prairie. Il fait bon de finir toute chose en gaieté, dit le proverbe.
Un proverbe écossais d'ailleurs...

(Nouvelle "La hantise des carrefours")
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Sur ce, par un temps de neige et de glace, arriva la Noël.
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Un bout de biscuit de mer dur comme pierre, un petit morceau de lard rance, un litron de soupe et un pot de lavasse baptisée thé ou café, au caprice du cuisinier, étaient dévolus comme ration quotidienne. Deux fois par semaine une écuelle de pois chiches, de riz éventé ou de lentilles rouges parsemées de cadavres de cancrelats, corsait cet horrible menu.
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-Eh bien oui, ils ont reçu chacun un pruneau dans la tête, parce qu'ils m'avaient manqué de respect.
Land s'écria :
-Un Malais qui manque de respect à quelqu'un ! Mon Dieu, il faut absolument que j'en découvre un pareil, non pour lui brûler la cervelle, mais pour l'envoyer à l'Académie des Sciences. Un Malais vous plantera son kriss dans le dos, vous enverra une flèche empoisonnée, vous mettra du verre pilé dans votre thé ou quelque saleté de venin emprunté à la forêt, mais vous manquer de respect, jamais, entendez-vous, monsieur...Brandt !
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Avec des pans de dunes et des loques de brouillard, l'ombre construisait alentour des temples hypèthres.

(Le dernier voyageur)
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"Car c'est dans cet espace riche d'une dimension inconnue, mais néanmoins entrevu par notre intelligence, que se situe LA PEUR, cette formidable gardienne qui s'est attachée à l'Etre Immense, et dont, par humaine sottise, nous voulons nier l'essence tutélaire."

(Nouvelle "Des rues")
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À cinquante ans passés, on le trouvait toujours à sa même place dans Swan Lane, gras à lard, rose et souriant ; son nez en boule de gomme chaussé de fines lunettes d’or et une jaquette d’étrange confection, à bourrelets aux hanches, le faisaient ressembler à un Pickwick en vertugadin, grossièrement agrandi au pantographe.
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— Elle veut que l’on baptise tout de suite la petite, parce qu’elle est catholique.
— Diable, dit Septimus, voilà une autre histoire.
— Oui, dit un matelot, si le mioche meurt et s’il n’est pas baptisé, il n’ira pas au ciel, et sa petite âme viendra tout le temps se plaindre à bord des bateaux de la Row, voilà ce que je dis, moi.
— Ce gentleman à raison, affirma Jim Holloway.
— Et comment faire ? demanda Septimus Kamin au barman.
— On lui verse de l’eau sur la tête et l’on dit : Je te baptise au Nom du Père, du fils et du Saint-Esprit.
— De l’eau, dit Septimus méfiant.
— De l’eau, répéta le barman.
— Pas possible, grogna Holloway.
— Je sais ce que je dis !
— Si tu le dis, c’est pas avarice et par méchanceté, trancha Holloway, pour que notre filleul soit mal baptisée et que cela ne te coûte rien ; voilà toujours pour toi, cul de bouteille.

« L’assomption de Septimus Kamin »
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Où sont-elles accourues, toutes nos douloureuses amies de ports ? L'Espagnole de Las Palmas qui nous demandait des prières pour son amant, un pêcheur de Maltes, parce que l'Atlantique hurlait comme une louve ; la bonne fille de Marseille qui, après les instants brûlants de l'amour, voulait nous rendre notre ardeur par une ravissante bouillabaisse épicée comme un feu ; la girl de Southampton qui croyait que nous rapportions d'Orient des remèdes magiques ayant pouvoir de guérir un mal cultivé par cinq générations damnées et que nous avons payée, la pauvre, en formules grotesque et en brins d'algues séchées ; la Hollandaise aux seins lourds, qui se vengea à coups de sabots de notre parcimonie d'errants miséreux ; la blonde femme de Bergen dont le regard d'ange ignorait toutes les erreurs de son corps ; la Juive d'Hambourg qui marmottait une longue prière, en une chienne de langue hébraïque, en s'abandonnant à nos frustres désirs ; l'étrange belle d'Honfleur qui exigea la nuit complète autour de ses baisers ; l'hétaïre du Caire qui parfuma nos corps de benjoin ; la créole de Rio qui rythma le minutes d'oubli d'une singulière chanson des Pampas ; la pauvrette d'Iquine qui ne nous en voulut pas d'imprégner sa misérable couche des fauves odeurs des nitrates et du guano ; l'adorable insulaire de Papeete qui ne voulait pas d'argent, mais des chansons nouvelles de France et d'Angleterre ?
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