Quand je me trouve seul
Quand je me trouve seul, comme au temps de misère,
Quand je fais le café pour le repas du soir,
Quand tu me laisses pour un jour à mes pensées,
Il me semble toujours que je ne pourrais plus,
Jamais plus vivre encor ces nuits tissées de brume
Où je sombrais ainsi qu’un arbre dans la mer.
Douce comme le pain et le vin sur la table,
Je n’avais pas encore cette chaleur en moi,
Ni tes mains sur mes yeux, ni ces mots dits par toi,
Vivants et anciens, ces mots toujours pareils
Et qui rayonnent jusqu’au fond de mon sommeil
Enfin pacifié… Le temps de la misère
Où je me trouvais seul pour le repas du soir,
Conjuré pour toujours n’est plus qu’un arbre noir
Disparu au tournant du chemin, les veillées
S’écoulent doucement près d’une lampe aimée –
Et je me sentirai plus paisible, plus fort,
Moins seul pour affronter les chemins de la mort.
//Jean-Pierre Schlunegger (1925 – 1964)