Finalement, les grands récits littéraires impriment leur marque, obstinément, dans le corpus juris des décisions judiciaires du passé : l'homme de loi y trouve un encouragement à donner une forme de plus en plus littéraire à ses propres récits.
La littérature, qui s'appuie sur la ressemblance avec la réalité, recherche un possible ; elle est figurative. La loi s'intéresse à ce qui est réel ; son domaine est celui du littéral, de l'enregistrement du passé. La littérature glisse vers le fantastique, la loi vers la banalité du quotidien.
Se raconter, c'est en quelque sorte bâtir une histoire qui dirait qui nous sommes, ce que nous sommes, ce qui s'est passé, et pourquoi nous faisons ce que nous faisons.
La manière dont on se construit soi-même au travers des récits de vie ne cesse jamais et ne trouve pas de fin.
Il existe, dès l'origine, une sorte de prédisposition au récit.
Le Moi est probablement l'oeuvre d'art la plus impressionnante que nous ayons été capables de concevoir, mais à n'en pas douter, la plus complexe (p. 26)
Lorsque les circonstances font que l'on est prêt pour le changement, nous nous tournons vers les personnes parmi lesquelles nous avons vécu, nous nous ouvrons à de nouvelles tendances, nous imaginons d'autres façons d'être au monde. Nous trouvons de nouvelles raisons de nous intéresser aux romans que nous lisons (...) (p. 102)
Témoin oculaire et flash de mémoire servent bien d'autres maîtres que la Vérité (p 35)
Concevoir une histoire, c’est le moyen dont nous disposons pour affronter les surprises, les hasards de la condition humaine, mais aussi pour remédier à la prise insuffisante que nous avons sur cette condition. Les histoires font que ce qui est inattendu nous semble moins surprenant, moins inquiétant : elles domestiquent l’inattendu, le rendent un peu plus ordinaire. (p. 79-80)
La manière dont on se construit soi-même au travers des récits de vie ne cesse jamais et ne trouve pas de fin. [...] Et nous avons beau tenter de nous rassurer en prétendant que les gens ne changent jamais, ils changent ! Ils rééquilibrent sans cesse autonomie et engagements, la plupart du temps sous une forme qui ne trahit pas ce qu’ils étaient auparavant. (p. 76)