On croit que le malade n’attend que ça mais en réalité la rémission est dure. On ne sait plus qui on est en dehors de la maladie, on ne sait plus où est notre place. Mon couple ne va pas très bien. On est tellement éprouvés par tout ça. Mes filles, elles, s’en sont bien sorties… À force de communication et de transparence, nous avons réussi là où il est si facile d’échouer : leur faire passer le cancer sans traumatismes.
Comment en si peu de temps on a pu basculer là-dedans ? Oui, c’est vrai que je n’arrête pas de le dire et de le répéter mais cette question résonne en moi comme lorsqu’on a une migraine et que l’on sent les battements de notre cœur dans notre cerveau. Et tous ce gens qui pensent que j’ai peur de mourir ! Tous ces gens qui me disent : Ça va aller hein… tu vas t’en sortir ! Tu vas vivre ! C’est fou ça ! Eh bien non merde ! Je n’y ai même pas pensé à ça ! Pas une seule fois ! Pourtant toute le monde se sent obligé de me dire que je vais m’en sortir vivante !
Cependant Marina ne flancha pas. Pas une fois. Elle voulait préserver cette paix qu'il y avait en elle. Un pacifisme envers autrui qui permet de n'avoir ensuite que des comptes à régler avec soi-même, avec ses propres questions,ses propres doutes, mais pas avec les autres. Marina était consciente qu'en réalité c'était ça le plus dur. Faire la paix avec soi-même et arrêter de se poser sans cesse des questions.
Chaque soir, elle se couchait dans son lit sans aucune envie de dormir. Par moments, elle se sentait fatiguée, mais cet épuisement était lié à une angoisse qui prenait souvent le dessus. Elle regardait la télévision, mais pensait à autre chose. Elle lisait, mais pensait à autre chose. Elle tentait de trouver le sommeil, mais les questions arrivaient dans sa tête les unes après les autres.
Qu'avait-elle fait pour cela ? Elle s'était endormie en espérant que quelqu'un lui explique comment préparer son avenir et quelle voie professionnelle, comportementale et spirituelle suivre. Résultat : elle était encore plus dans le flou. Pourquoi ces deux femmes s'étaient-elles immiscées dans sa nuit et dans sa vie ?
Le futur appartient à ceux qui croient à la beauté de leurs rêves.
Lorsqu’elle était dans les transports en commun ou dans des lieux publics, elle se rendait bien compte du malaise. Les gens ne souriaient pas et c’était normal, et, dès qu’une personne se mettait à sourire, les gens la regardaient avec des regards surpris qui semblaient dire: « Oh, mais qu’est-ce qu’elle a? Elle doit être folle! » Folle d’oser rire à une époque où plus personne n’est totalement heureux. Folle d’oser montrer aux gens que rire rend déjà la vie un peu plus belle.
Physiquement ce que je vis est très dur. J’ai mal, j’ai la bouche sèche, les doigts qui picotent au froid, des cauchemars, de la peur, de l’angoisse…
Voilà un peu de courage pour écrire et tenir ce journal. Je suis sûre qu’un jour je serai heureuse de l’avoir fait. D’avoir tout mis noir sur blanc…
Je trouve qu’il n’y a pas de fidélité. Les gens n’aiment pas un endroit parce qu’ils s’y sentent bien, mais parce que c’est la mode. […] Je trouve que c’est dommage, parce que, du coup, on ne s’habitue à aucun endroit et aucun endroit ne s’habitue à nous.