Johan de Smet

Les Bains à Ostende sont typiques d'une série de tableaux peints par Ensor sur de petits panneaux entre 1889 et 1893-1894. Ensor traite ces œuvres de manière très graphique, tandis que ses dessins et ses gravures coloriées de la même époque font penser à de petits tableaux. Les Bains à Ostende ressemble à un dessin au pinceau, avec l'improvisation fantastique propre à Ensor. L'œuvre est très anticonformiste, jusque dans le rôle joué par la couche préparatoire dans cette évocation des loisirs populaires des baigneurs mondains. C'est une esquisse satirique, acerbe et pétillante, de la plus importante ville d'eaux de Belgique vers 1900, en plein délire fin-de-siècle. À gauche s'alignent des cabines de plage, tirées par des chevaux jusqu'au bord de l'eau pour permettre aux messieurs et aux dames de la bonne société de se baigner, ce qui, aux yeux d'Ensor, leur fait aussitôt perdre toute dignité. Ce spectacle de masse est observé attentivement par un public varié. Envahissant la plage, les spectateurs grimpent sur les cabines pour mieux voir le déchaînement de cette folie.

James Ensor [à propos du tableau Les Bains à Ostende], p.30

Le cercle des XX constitue en outre un terreau fertile pour le développement du symbolisme belge, qui n'est pas seulement une réaction au réalisme dominant de l'époque, mais suggère plutôt un état d'esprit, une forme d'introspection, une quête de sens, une dimension idéelle, visionnaire, interprétative, une inspiration surnaturelle, un intérêt pour la mythographie et l'ésotérisme, et un attrait pour l'imaginaire décadent. Rien d'étonnant à ce que Redon, personnalité marginale à Paris, soit acclamé à Bruxelles.

Les Modernes belges