Les maîtres, incidemment, marquent rarement eux-mêmes leurs esclaves. Marquer correctement une femme exige une main sûre et, en général, de l’expérience. Lorsqu’ils forment un individu au marquage des esclaves, les Marchands d’Esclaves, au début, lui donnent toujours les femmes les moins belles, les lui faisant marquer parfois plusieurs fois, jusqu’à ce qu’il soit devenu efficace. En général, après une quinzaine ou une vingtaine de femmes, l’individu est capable de les marquer profondément, de façon précise et propre. Il est important que la cuisse de la femme soit maintenue immobile ; parfois, il faut plus d’un homme pour la tenir ; parfois, on l’attache à la roue d’un chariot ; parfois, dans les demeures des Marchands d’Esclaves, on utilise un chevalet de marquage équipé d’un étau. Les femmes sont généralement marquées impersonnellement, rapidement, comme du bétail. Bien qu’elles ressentent leur marquage intensément, physiquement, son effet est encore plus intense, plus profond, psychologiquement ; il n’est pas rare que, en elles-mêmes, elles transforment radicalement l’image qu’elles se font d’elles-mêmes, leur personnalité ; elles deviennent alors des esclaves sans volonté individuelle, sans droits, au service des maîtres ; la marque est une désignation impersonnelle ; les femmes s’en rendent compte ; lorsqu’elles sont pas marquées par un homme donné pour un homme donné, afin d’appartenir uniquement à lui mais, pour ainsi dire, qu’elles sont marquées pour tous les hommes ; pour tous les hommes, une femme marquée est une esclave ; en général, naturellement, avec le temps, elle n’aura qu’un seul maître ; la marque est impersonnelle ; le collier, lui, intensément personnel ; la marque indique la propriété ; le collier désigne le propriétaire, celui qui l’a capturée ou a payé pour se le procurer ; le fait que la marque soit le symbole impersonnel de l’absence de statut dans la structure sociale explique peut-être pourquoi les maîtres ne marquent pas souvent leurs esclaves eux-mêmes ; la relation entre la marque et l’homme libre est institutionnelle ; la relation au collier, en revanche, est intensément personnelle