Joseph Bialot :
C'est en hiver que les jours rallongentOlivier BARROT, depuis le
café "Le Rostand" à Paris, présente le livre "
C'est en hiver que les jours rallongent" (éditions le Seuil) de
Joseph BIALOT. L'auteur parle de son livre avec Barrot.
Je me suis toujours dit qu'il y a trois types de malfaisants sur la planète : le juriste, le psy et le con. Si je veux commettre une saloperie, je trouverai toujours un juriste pour justifier mon acte, un psy pour l'excuser et un con pour me pardonner.
Chaque amant possède deux visions de sa compagne, la vraie, celle qu'il touche, caresse, embrasse, et l'autre, celle qui n'existe que dans un coin de son imagination. Sans cette double image, aucun amour n'existerait.
La bicyclette, la natation, l'adhésion à un Parti et l'amour ont ça de commun avec la religion... Une fois maîtrisé ça ne s'oublie jamais ! On prie sans croire, on pédale sans grâce, on nage sans force, on adhère sans passion, on baise sans plaisir... Des automates, voilà ce que nous sommes.
A la campagne, on tue plus sainement. Lorsqu'un pépé est retrouvé étouffé avec un coussin, nous savons immédiatement quel est l'héritier pressé qui a fait le coup. En général comme il n'y pas de preuves et que le vieux, à quatre-vingt-dix ans, souffrait d'asthme, on classe. Affaires d'inceste? Nous en avons. Des chutes d'échelles, assistées, du haut d'un fenil? Ça ne manque pas. Des histoires de moeurs? Oui, mais on n'a jamais encore vu de chèvre porter plainte.
1. On se sépare, et c'est un second échec.
2. Elle reste et c'est un troisième fiasco. Dis, mec, trois désastres en deux mariages, ça fait beaucoup. On dirait un meeting chez les trotskistes: deux militants et trois courants. Basta, la vie c'est pas de la politique.
Louis Ferdinand Contentin, artiste lyrique en retraite, remontait la rue du Poteau, voie parisienne qui étire ses volutes pavées entre Montmartre et Cligancourt. Il trainait, sur des roulettes, le cabas noir des jours de marché et trottinait à petits pas rapides. Sa main gauche tirait, freinait ou suivait les mouvements de "Fourcy", son scottish Australien à la fourrure noire. Une de ces bêtes ignobles que les hommes appellent chien et qui tiennent plus surement de la moquette à poils raides montées sur pattes. Un croisement raté par la nature entre une chienne, un hérisson et une brosse en chiendent ; un animal pervers qui mordait en douce, pissait dans les ascenseurs, polluait les trottoirs.
Mauthausen était un camp où les Espagnols, les triangles bleus, étaient très nombreux. Des gens remarquables, les républicains espagnols, surtout par leur solidarité, vraiment des durs.
Je vends des fringues et c'est pas des jeans bidon. Ils sont fabriqués au Maroc par des clandestins mauritaniens, avec du tissu de Taïwan, transportés par des bateaux grecs immatriculés au Panama et vendus à Montreuil. C'est pas un délit, c'est le progrès, la délocalisation que ça s'appelle.
La communication... le sas entre le vide et le rien. Paraît que ça s'enseigne à l'université. (p27)
Le soir descendait sur Saint-Ouen. Les puces se vidaient. Les montagnes d'objets invendus, les fauteuils voltaires, les casseroles à couscous, les canivets en parchemin, les bustes de Pétain, de l'Empereur et de Maurice Chevalier, les capotes françaises, les casques de uhlans, les sacs en croco garantis pur buffle, les machines à coudre à pédales, les pédales en quête de machins, les objets perdus, le temps retrouvé, les trésors cachés, les tableaux pompiers, les tableaux de classes, les nénuphars en faux Sèvres, les biscuits en vrai Saxe, les Saxons plein de marks, la démarque invisible, la fortune du pot, les pots de tabac anciens, les dépôts de bilans, les dépôts d'ordures, tous rentraient dans leurs niches, leur boutiques, leurs remises. Rien ne perd, rien ne se crée. Rideau ! On ferme ! A lundi ! Bonsoir, les petits ! Bonsoir, les puces !