Pour obtenir nos visas, la RAMQ avait fourni à chaque membre de ma famille une lettre attestant que la couverture garantie par le régime québécois continuait de s'appliquer à l'étranger sous certaines conditions.
Mais quand je me suis présenté au commissariat de police de Madrid qui reçoit les demandes de permis de séjour, on m'a obligé à prendre une police d'assurance maladie privée auprès d'une compagnie locale. J'ai brandi en vain mes lettres de la RAMQ. La femme en face de moi était un vrai butor.
Je m'en suis donc procuré une chez Adeslas, qui est un des gros joueurs de cette industrie en Espagne. Pour l'équivalent de 1 500 $ par année, deux adultes et deux enfants sont couverts pour tous les soins de base, certains soins spécialisés, les chirurgies et l'hospitalisation. Il y a évidemment des options plus chromées.
Le mois dernier, mon garçon s'est retrouvé avec une verrue sur la plante d'un pied. Nous ne sommes pas du genre à aller à la clinique pour une niaiserie. Nous avons acheté à la pharmacie une solution d'acide salicylique et nous la traitons nous-mêmes. Après un mois, peu de progrès. On se décide à consulter. J'allai enfin voir ce que valait ma police. C'est là que ça devient intéressant.
Les médecins sont liés par contrat à la compagnie d'assurance de leur choix. Vous devez donc trouver dans le site Web de votre assureur la clinique médicale affiliée la plus proche. Il y en a plusieurs dans tous les quartiers. À la première, on m'explique que ce sont les dermatologues qui s'occupent des verrues. Mes réflexes québécois prennent le dessus : «Oh non, je me dis. Un spécialiste... On va niaiser longtemps!»
Je vais dans le «D» pour les dermatologues, classés eux aussi par quartier. Le premier me dit qu'il n'enlève pas les verrues, mais m'adresse à un de ses collègues, qui est à 20 minutes de chez nous à pied. Chez celui-ci, on me donne rendez-vous... pour le lendemain soir à 20h30. Je dis: «Pardon?» J'avais bien compris. Arrive le lendemain. Vers six heures du soir, la clinique nous téléphone pour nous demander si on veut avancer le rendez-vous à 7 h. On dit oui.
Wow!
On arrive. Je tends timidement ma petite carte d'assuré. Pas de franchise, pas de ticket modérateur, pas de paperasse à remplir. On attend cinq minutes. Le dermatologue brûle la verrue et veut nous revoir dans quatre semaines, car ces petites choses sont parfois tenaces comme de la mauvaise herbe. Le rendez-vous est fixé tout de suite. On repart. On se demande si on rêve.
Éberlués, on raconte tout ça par courriel à ma belle-soeur qui habite Sherbrooke. Elle cherche aussi un dermatologue pour sa fille. Un problème au cuir chevelu. Le premier qu'elle a appelé ne prenait plus de nouveaux patients. Le mieux qu'elle a trouvé, c'est huit mois sur une liste d'attente. Aucune nouvelle depuis.
Faites-en ce que vous voulez. Comme on dit, je parle pour parler...
Mais l’ancienneté de ces sociétés leur donne peut-être un peu plus de sérénité sur ces questions. Ce sont des sociétés qui se demandent moins que nous ce qu’elles sont. Elles ont des réservoirs de traditions, de vieilles pierres sur lesquelles s’asseoir, et un rapport au temps qui est plus serein.
Dans les journaux espagnols, on trouve les mêmes débats qu’ici sur la qualité du système éducatif, sur l’identité nationale, des débats étrangement similaires entre l’état central et les régions, quand ces régions ont des traits nationaux, comme la Catalogne et le Pays Basque, sur les accommodements raisonnables, sur l’importance de la lange nationale...