AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Joseph Kessel (1410)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Les cavaliers

Hallal, Hallal ! La clameur sacrée s'élève. Les cris du vainqueur résonnent encore dans ma tête. Les fiers cavaliers et leurs montures fourbues ont tout donné. Mais à présent la partie de bouzkachi est finie, le vainqueur a jeté la dépouille du bouc décapité dans le Cercle de la justice (cercle de craie tracé au sol entre deux mâts où la dépouille doit être lancé pour gagner). Il pourra rentré auréolé de gloire dans son village, y être fêté et ses prouesses seront longtemps chantées et contées.



Ouh la la ! Je me demande encore comment j'ai pu passer à côté de ce chef d'oeuvre.

Ah, c'est sûr je ne suis pas prête de les oublier ces sacrés tchopendoz et je crois même qu'ils, Les cavaliers, vont partir avec moi sur une île déserte.

Je suis conquise et fascinée !



Oui, j'ai aimé les tchopendoz, ces hommes perchés sur des bottes à talonnettes, le crâne couvert d'un bonnet fourré de loup, dieux vivants de tout un peuple aux qualités équestres incomparables, leur violence et leur fureur, leur noblesse, leur démarche déglinguée...

J'ai aimé Toursène, le Maître des écuries, au corps torturé et à la face abîmée

J'ai aimé Ouroz, son fils, au rictus de loup rongé par l'orgueil et rêvant de gloire



J'ai aimé leurs serviteurs, les saïs.



J'ai aimé leurs femmes mais pas leurs conditions, confinées aux tâches domestiques et non autorisées à regarder les bouzkachis, ne pouvant même pas être les témoins de la gloire de leurs fils!

J'ai compris Zéré, la fille du petit peuple nomade, écartelée entre ses rêves d'amour et d'ascension sociale, traitée de putain car libre de son corps.



J'ai apprécié la beauté des décors, imaginé la steppe brûlante, la vallée de Bamyan et le défilé des lacs sacrés de Band-e-mir .

Harassée, je me suis reposée dans les tchaïkanas, les maisons à thé.



Je me suis occupée de l'un des plus beaux chevaux: Jehol, le cheval fou.

J'ai respiré l'odeur forte des chameaux, des boucs, essuyé leur sueur .

J'ai tout pris, tout accueilli : la faim, la soif, la fièvre, les couleurs, les parfums ...

Je me suis embrasée à la lecture de ce magnifique et superbe roman.



Alors prenez place pour savoir si le tchopendoz qui a été désigné relèvera le défi lancé par le Maître des écuries de la province de Maïmana: gagner le premier bouzkachi royal organisé à Kaboul sur le plateau de Bagrami où s'affrontent les trois provinces du nord.



Avec ce titre Kessel nous convie à la découverte d' une contrée légendaire, la partie occidentale de l'Afghanistan et , il nous invite à partager la culture ancestrale de cette société, de son peuple nomade qui a su si bien l'accueillir lors de ses reportages dans les années 1950.



Une évasion totale, un voyage époustouflant!

Un roman au souffle épique, riche, foisonnant, inspiré des voyages de Joseph Kessel .

Un vrai bonheur.



Pour finir de vous convaincre, je cite Olivier Weber dans Kessel, le nomade éternel:

« Tout est là: le danger, l'imprévu, les odeurs de l'Orient, des personnages incroyables, la magie des contes, les antiques caravanes, l'amitié et la férocité . » 



De mon côté, je vais aller mettre le nez dans Le jeu du roi dès que je le déniche.
Commenter  J’apprécie          17118
Les cavaliers

Le chef d'oeuvre romanesque de Kessel.



Afghanistan dans les années 1950. Le bouzkachi, LE jeu équestre objet de tous les honneurs. Toursène, le plus grand des Tchopendoz (joueurs de Bouzkachi) désormais maître des chevaux. Ouroz, son fils, qui porte tous les espoirs de son père. Mokkhi son sais, serviteur et palefrenier de Jehol, LE cheval. Zéré, la petite nomade arriviste. Guardi Guedj, le conteur sans âge. Tout ce petit monde se croise dans une traversée du pays qui à défaut d'être épique prend aux tripes.



Le bouzkachi, déjà pratiqué sous Gengis Khan. le roman aurait presque pu s'y dérouler, tant, en dehors de la présence de camion (au début), le récit semble hors du temps moderne.

Kessel s'appuie sur son voyage dans le pays en 1956 (dont il écrira un reportage et un script de film). Il se dégage du roman un sentiment (bien évidemment artificiel) de vécu. Une immersion forte et poignante à travers des personnages fiers et entiers, des paysages magnifiques, une vie brutale et des traditions ancestrales violentes.

L'écriture, fluide et parfois poétique, parfois crue, sert admirablement l'histoire que l'on dévore, pressé d'en connaître le dénouement, rageant parfois (souvent) de l'entêtement voire de la fière stupidité d'Ouroz, du comportement parfois veule, parfois admirable de Mokkhi.



Une belle épopée à travers un pays que l'on découvre autrement que dans la guerre.
Commenter  J’apprécie          1597
Les mains du miracle

Du soldat inconnu au masseur méconnu.

Pas de flammèche éternelle mais un récit de Joseph Kessel qui mérite la postérité et qui m’a fait découvrir un épisode incroyable de la seconde guerre mondiale.

En résumé, le diable a mal au ventre. A défaut de Toprec ou de suppos à la menthe poivrée, Himmler, le suppôt d’Hitler, fait appel aux doigts experts du docteur Felix Kersten pour apaiser ses terribles crampes d’estomac et malaxer sa couenne de nazi. Le pauvre chou, on ne s’en rendait pas compte mais c’était stressant le boulot de Chef de la Gestapo. Et son patron à la petite moustache qui n’était pas très sensible aux risques psychosociaux de ses collaborateurs zélés lui avait refilé le sale boulot. Indifférent à la douleur des autres, le Reichsführer en fureur ne supportait pas le moindre bobo. Ce n’était pas les remords qui rongeaient ses entrailles mais sa passion fanatique pour Hitler.

Le toubib finlandais d’apparence grassouillette, qui n’avait pas le profil du héros de guerre, avait hérité par sa mère d’un pouvoir de rebouteux et il affina sa technique en maîtrisant la science du massage tibétain (sans le look de gambas en tong) auprès du docteur Kô, qui n’était ni un prof de Kung Fu ni le méchant d’un film de James Bond adepte de supplices chinois, mais un maître absolu dans l’art d’apaiser les douleurs nerveuses par ses mains.

Plutôt ulcéré à l’idée de s’occuper des ulcères du monstre, Felix Kersten va se rendre compte qu’il gagne sa confiance et qu’il peut ainsi profiter de la reconnaissance du patient impatient pour obtenir des faveurs inespérées. Une activité plus risquée que le traitement du zona de mémé mais plus salvatrice en temps de guerre.

Kersten devient donc son médecin personnel et il susurre à l’oreille du planificateur de la solution finale de sauver des vies de prisonniers, de ressortissants des pays occupés et de déportés. La magie des doigts boudinés va opérer et celui qui est considéré comme « le meurtrier du siècle » va céder à beaucoup de ses demandes et plusieurs milliers de vies furent ainsi épargnées. D’un autre côté, toute proportion gardée, je suis prêt à accepter de manger des choux de Bruxelles ou d’accompagner mon épouse à son cours de Zumba quand je me fais gratter le dos. Tout est donc possible.

Cette histoire à peine croyable est véridique (pas le cours de Zumba) et méritait la plume bourlingueuse de Joseph Kessel.

La description de la relation entre le médecin et son terrible patient est aussi trouble que captivante, oscillant entre lutte et manipulation. Himmler cherchait l’amitié de Kersten en lui cédant et le médecin gardait une certaine distance pour maintenir son emprise.

Les jeux de pouvoirs des indignitaires nazis qui jalousaient l’influence de Kersten et tentèrent par tous les moyens de le discréditer et de l’éloigner (mais cela ne servit aryen…), pimentent le récit de suspense. Kessel possède vraiment le don d’animer les manuels d’histoire. Il donne toujours l’impression à ses lecteurs de l’accompagner au cœur de l’action.

Je suis étonné que ce récit ne figure pas dans les deux tomes de la Pléiade consacrés à Kessel, tant cette histoire reflète bien son œuvre, son goût pour les destins hors du commun, l’aventure et la liberté.

A certains charlatans des médecines douces aux intitulés ésotériques, préférez un rendez-vous littéraire avec le docteur Kersten. Il ne soigne pas mais il réconcilie avec l’espèce.

Commenter  J’apprécie          1547
Le lion

Dans le Parc royal du Kenya, une petite fille évolue librement parmi les animaux les plus féroces de la réserve.

Écartelée entre la fierté que lui voue son père et les angoisses de sa mère, elle tente de sauvegarder sa liberté, sa volonté de de ne faire qu'un avec la nature, au prix d'une grande solitude.

Elle est comme une petite sorcière au regard des membres des tribus africaines. Celle qui parle le langage du lion et fait de lui son ami est à la fois respectée et redoutée.



On se retrouve transporté au milieu de paysages paradisiaques, avec pour décor le Kilimandjaro. Cet écrin de beauté n'empêche pas la cruauté de la loi du plus fort dans le monde animal. La réalité est la même chez les hommes. Ils s'obstinent à se voir différents, à mettre des barrières entre eux.



Pourtant, Patricia réussit à faire écrouler cette hiérarchie, à faire entrer le lecteur dans le mystère qui régit ces tribus africaines, à nous faire comprendre leur façon de penser la vie.



Roman d'aventures et roman d'initiation, qui nous emmène droit vers une fin tragique. On en devine les grandes lignes, en espérant qu'on se trompe.

Une aventure qui ressemble à une fable, où le mystère finit par se briser sur le miroir de la réalité. La petite fille s'éveille et doit abandonner ses rêves et ses pouvoirs.



Commenter  J’apprécie          1454
L'Armée des ombres

Je n'ai pas pour habitude de lire un livre après avoir vu un film mais là, j'ai fait une exception et je n'ai aucun regret. Merci Monsieur KESSEL pour ce poignant et bouleversant roman qui met en lumière cette France de l'ombre qui croyait en la Liberté, du plus humble au plus brave. Toute cette chaîne humaine animée par la même foi, rester DEBOUT. Vos mots sont percutants, vos phrases sont empreintes d'un tel réalisme, qu'à vous lire, j'ai vibré. Défilent sous nos yeux, les difficultés du quotidien, la faim, le ravitaillement, la confiance, l'hébergement, le problème d'unifier les forces, le cloisonnement des informations, la peur de la torture, le risque de trahir pour préserver un être cher (je pense à Dounat, à Mathilde), la distribution des journaux, les opérations d'exfiltration. J'ai ressenti le poids de la clandestinité.

Je pense toujours à la chanson de GOLDMANN "Né en 17 à Leidenstadt" même si ce n'est pas la même période :

"On saura jamais c'qu'on a vraiment dans nos ventres

Caché derrière nos apparences,

L'âme d'un brave ou d'un complice ou d'un bourreau,

Ou le pire ou le plus beau,

Serions nous de ceux qui résistent ou bien les moutons d'un troupeau"

Je pense aussi au "Chant des partisans" écrit avec votre oncle, Maurice Druon et au poème de Paul Eluard "Liberté" parachuté à des milliers d'exemplaires au dessus de la France occupée.

A chaque chapitre, je ne pouvais m'empêcher de revoir Lino Ventura, Simone Signoret, Paul Crauchet, Jean-Pierre Cassel, Christian Barbier, ce qui rendait votre livre encore plus vivant.

Monsieur KESSEL, votre préface vous honore : je m'incline devant tant d'humilité et d'humanisme!
Commenter  J’apprécie          13211
Le lion

Afrique sauvage, éclatante de couleurs.

Kilimandjaro majestueux, parc royal du Kenya.

Savane. Point d’eau. Gazelles, antilopes, girafes, gnous, zèbres, rhinocéros, buffles, éléphants.

Soleil irradiant.

Chaleur étouffante.

Paix. Silence. Bruissements.

Une petite fille de dix ans.

Un lion.

L’histoire se prépare à vibrer...



Inutile de vous dire que moi aussi j’ai vibré !

Ce chef-d’œuvre de Kessel raconte l’extraordinaire fusion entre une gamine et un lion recueilli lorsqu’il était bébé et livré à la vie sauvage quelques mois après.

Cette fusion, le narrateur y assiste avec effroi et fascination. Ecrivain-voyageur fasciné par les bêtes, désirant de toutes ses forces « être admis dans l’innocence et la fraîcheur des premiers temps du monde », il ne peut qu’aspirer à entrer dans la danse de force et de douceur, approcher du mufle doux et des yeux d’or de King, le bien-nommé.

Patricia l’y fait entrer, avec toute l’espièglerie et la cruauté de l’enfance mais aussi toute la maturité du monde, avec toute la certitude de connaitre une « vérité hors de la routine humaine ».

Petite fille entière vivant exclusivement pour son lion, elle est totalement comprise par son papa, le fameux John Bullit, le volcanique, le tempétueux. Ancien chasseur repenti, il consacre son temps à la protection des animaux du Parc dont il est le propriétaire.

Mais il y a Sybil, la maman de Patricia, névrosée, ne supportant plus cette nature brute et cruelle dans laquelle son mari et sa fille s’aventurent avec passion.



Et puis arrivent les Masaï, tribu la plus libre de toutes les tribus d’Afrique, la plus fière, la plus instinctive, qui glorifie ses « moranes », ses jeunes hommes, seuls habilités à porter les cheveux longs et la crinière du lion...

Le destin est en marche.



Jeu, douceur, amour fou, jalousie.

Terrible confrontation, danse ultime.



Je ne peux me détacher des paysages décrits avec poésie et passion, de la liberté, du silence, de la chaleur, des couleurs.

Je ne peux me défaire de la relation particulière, puissante, absolue entre le lion et la petite fille.

Je ne peux quitter les animaux libres et élégants, quels qu’ils soient.

Je ne peux dire adieu à ce monde fier et noble, sans faux-semblants.

Je suis obligée, pourtant, de retourner à ma civilisation, mais dans un coin de mon cœur, continuera à vivre ce lion.

Commenter  J’apprécie          12330
Les mains du miracle

Si il y a un auteur capable de susciter de nombreuses émotions chez moi, c'est bien Joseph Kessel ! J'ai connu l'ennui avec Une balle perdue, l'émerveillement avec Le Lion et là avec Les mains du miracle j'ai eu un sacré coup de coeur. Quelle bonne idée à eu Folio de rééditer ce petit bijou il y a quelques mois, cela aurait été dommage de laisser un tel ouvrage en mode épuisé/introuvable.



Dans Les mains du miracle, Joseph Kessel nous plonge dans un épisode inconnu (du moins pour moi) de la seconde guerre mondiale avec cette biographie romancée du docteur Félix Kersten. Spécialiste des massages thérapeuthiques, il jouit d'une réputation honorable et d'une clientèle haut de gamme. Un jour, notre docteur va se trouver dans l'obligation de prodiguer des soins à un patient un peu particulier : Heinrich Himmler. Dans un premier temps révolté par cette obligation de soigner un homme qui ne lui provoque que dégoût, Felix Kersten, étant le seul qui arrive à soulager le redouté chef SS, va prendre peu à peu du pouvoir sur lui. Intervenant auprès du Reichsführer pour sauver des prisonniers internés dans les camps de concentration, détesté par l'entourage d'Himmler, Felix Kersten n'hésitera pas à risquer sans cesse sa vie pour en sauver des milliers d'autres...



Ce roman est court mais efficace. Kessel y accomplit la prouesse de rendre ce monstre d'Himmler presque humain. Tous les hommes ont leur talon d'Achille, y compris lui. Immobilisé la plupart du temps à cause de ses douleurs que seul le docteur Kersten arrivait à soulager, le plus cruel des soldats nazi était partagé entre son amitié pour le docteur, en qui il avait une confiance aveugle, et sa vénération pour Hitler qu'il n'aurait jamais trahi. D'un autre côté nous vivons l'histoire sous l'oeil de Kersten, qui vit sans cesse sur ses gardes et dont le seul but est d'arracher le plus de prisonniers des griffes des allemands. Ce livre est passionnant d'un bout à l'autre, plusieurs mois après en avoir achevé la lecture, j'en garde encore un souvenir précis. Bien écrit, détaillé, moi qui aime les livres historiques je peux dire qu'avec celui-ci j'ai été servie alors je le conseille à tous les lecteurs qui sont passionnés par le seconde guerre mondiale car c'est l'occasion de sortir des sentiers battus en lisant ce roman, vous ne serez pas déçus.

A lire et à découvrir!



Commenter  J’apprécie          1146
L'Equipage

En lisant L’odeur de la forêt et son chassé croisé amoureux durant la première guerre mondiale, je songeais à Jean Herbillon et Claude Maury, les aviateurs de l’Equipage, vivant le même amour impossible et ceci m’a incité à relire une fois encore le chef d’oeuvre de Joseph Kessel.



Publié en 1923, l’Equipage décrit la vie des aviateurs, et plus exactement celle des observateurs, qui étaient les yeux de l’état major sur les positions ennemies. Joseph Kessel (Jef) fut l’un d’eux, en 1917-1918, dans l’escadrille du Capitaine Thélis Vachon abattu le 14 octobre 1918, à qui ce roman rend hommage.



Jef écrit ce texte au lendemain de la mort de son frère Lazare qui s’est suicidé en 1920, après la naissance de Maurice son fils adultérin, le 23 avril 1918, et son reniement par leur père Samuel Kessel. Jef se reprochera toujours ce suicide et veillera sur son neveu … le futur académicien Maurice Druon. Lazare Kessel inspire le personnage et la tragique amour de Jean Herbillon.



L’équipage et Une balle perdue sont mes deux titres préférés de l’oeuvre immense de Joseph Kessel.

Commenter  J’apprécie          1114
L'Armée des ombres

L'armée des ombres est à la Résistance française ce que Si c'est un homme est à la Shoah : Un livre nécessaire et éclairant. Un livre à rouvrir fréquemment pour en relire certains passages, certaines fortes scènes.

J'ai vu le film voici une vingtaine d'années, avec cette figure de Lino Ventura ,hiératique dans ce rôle d'homme et de chef des ombres.

Mais le livre...

Le livre, c'est le manifeste de l'action secrète du refus de l'abdication. le livre, écrit en pleine guerre, transcende les classes, les milieux et les caractères dans cette lutte commune et cette abnégation de chaque instant. le livre, c'est le courage incroyable de ces hommes et de ces femmes des plus jeunes aux plus âgés qui se levèrent, s'unirent pour dire NON à la honte et à la collaboration avec les nazis. Des hommes et des femmes prêts à faire le sacrifice suprême de leur vie, conscient de risquer à chaque instant la capture et les supplices de la Gestapo et ses complices français.

L'armée des ombres est un livre terrible, dur, mais exaltant! Sa lecture vient, à point, nous réveiller et nous rappeler que la bête n'est pas morte et qu'elle revient à peine masquée.

L'une des phrases-clefs de L'armée des ombres, c'est ce baron de province qui l'exprime ainsi: "Je préfère, Monsieur, une France rouge à une France qui rougisse"

En lisant ce livre, plongé dans le froid, la souffrance, la fatigue et la faim des protagonistes, j'avais le Chant des Partisans qui m'accompagnait: Un bel hymne pour un livre puissant.

Un grand, un immense merci à vous, Joseph Kessel.
Commenter  J’apprécie          1118
La vallée des rubis

Kessel aime les gemmes mais pas autant que l’aventure.

Impossible de lire un de ses récits de bourlingue sans l’imaginer assis sur un rocher inconfortable au milieu de nulle part en train de prendre des notes sur un vieux carnet écorné, le front en sueur et le visage buriné par l’écume de ses expériences passées.

Kessel n’a pas eu droit à une petite place dans le Lagarde et Michard mais il dispose de son strapontin dans mon Panthéon personnel. Il fait partie de ces auteurs dont la vie romanesque a perfusé les récits, ceux pour lesquels il faudrait créer une étagère à part dans les bibliothèques, celle des voyageurs révoltés. Je suis certain que Joseph Kessel ne serait pas contre le voisinage de Jack London.

Le lion ne pouvait résister à la jungle birmane et à la découverte de Mogok, la mystérieuse vallée des rubis. Embringué par un vieil ami à la recherche de pierres précieuses disparues, il partit au milieu des années 50 pour le plus grand gisement connu au nord-est de la Birmanie.

Terre sauvage à l’accès dangereux, infestée de rebelles et de moustiques, Kessel y découvre une société à part, très hiérarchisée, obéissant à ses seules règles et organisée autour de l’extraction, du polissage, du commerce et… du trafic des rubis.

La Birmanie était indépendante depuis 1948 (une indépendance négociée par le général Aung San, le père d’Aung San Suu Kyi). L’empire britannique s’était effacé et il avait laissé derrière lui quelques vieux baroudeurs rêvant de fortunes qui n’avaient pas pris de billets retours.

La population de Mogok était bigarrée et bagarreuse mais le rubis unissait tous ces chercheurs d’absolu. A force de gratter le sol des mines, ils vivaient en mitoyenneté avec l’enfer. Ils avaient pactisé pour que les mines continuent à saigner et offrent ces caillots qui font la fortune de certains chanceux et damnent les autres. Comme en science, il y a les éternels chercheurs et quelques rares trouveurs.

Kessel décrit dans ce livre les décors somptueux de Mogok qui donnent envie de remplir son sac de voyage et de passer une semaine en milieu hostile dans sa tente Quechua… au fond de son jardin, confinement oblige. Mais y’en a marre, je veux aller au Myanmar !

Dans ce récit autobiographique, la nature vit, saigne et emprisonne. Le monde de Mogok tourne autour des rubis, pas du soleil. Cette dévotion pour un caillou incrusté dans l’écorce terrestre n’étonne guère quand on sait que le plus précieux rubis, le fameux "sang de pigeon" ne se cache que dans cette contrée et se négocie au même prix qu’un diamant. Ces merveilles passent encore aujourd’hui par les mains d’hommes et de femmes qui vivent dans la misère et n’en voient que la couleur. Kessel remonte presque toute la chaîne de production et de distribution. Il ne fuit que les joailleries et les cous fortunés.

Dans les années 50, le voyage pour se rendre sur place était déjà une aventure. Kessel ne fait que transiter en Inde mais il parvient par ses mots à nous encenser ses odeurs.

Le reste n’est qu’humanité. Une humanité brute, sans artifice, la seule dans laquelle l’auteur semble trouver la paix. Comme souvent chez Kessel, il est ici aussi beaucoup question d’amitiés viriles, celles qui ne se déclarent pas mais qui se témoignent à travers une fraternité silencieuse d’anciens combattants. Pas étonnant de la part du parolier du Chant des Partisans, écrit avec Maurice Druon. Montez de la mine, descendez des collines, camarades...

La lecture de ce récit ne tient pas à son intrigue, aussi rare que les rubis dans les filons épuisés de Mogok, mais dans ses couleurs et dans ses personnages réels qui paraissent pourtant moins vrais que nature tant ils sont travaillés comme les pierres précieuses qui les hantent.

Un beau voyage.

Commenter  J’apprécie          1009
L'Armée des ombres

Ecrit en 1943. Pleine guerre. Ecrit par un Résistant. A chaud, au coeur de l'action. Joseph Kessel, alors membre du réseau Carte, témoigne. Pas de son courage, pas de son héroïsme, pas de son engagement. Pourtant aussi méritoires que ceux de ses compatriotes. Il s'efface devant le courage, l'héroïsme et l'engagement de ces anonymes unis pour la plus grande des causes à défendre : la liberté.



Son ambition : raconter aussi fidèlement que possible la France souterraine, la France combative, celle qui lutte pour son honneur. Mettre dans la lumière la France de l'ombre.

Son angoisse : manquer justement de fidélité, et ne pas honorer à leur juste valeur ces héros. Car si tout est authentique, Kessel doit modifier, déformer les profils pour protéger leur vie et éviter toute représaille.

Ses héros : simples, discrets, ordinaires. Garagiste, ingénieur, mère de famille, instituteur, plus de barrière sociale. Juste une même colère, une même résolution, une même hargne.

Son écriture : sobre, humble, sur la réserve mais ferme. La main qui trace les mots ne tremble pas, ne doute pas, ne laisse pas place à la rêverie. Une main déterminée. A l'image de ces résistants : Gerbier, Jean-Francois, Mathilde, le Bison et tous les autres.

 

Kessel n'esquive pas les sentiments pour autant, laissant surgir le temps d'un paragraphe exaltation, doute, colère, dépit mais jamais longtemps. Pas le temps de tergiverser, pas le temps de s'attendrir, pas le moment de s'apitoyer sur les jours heureux. L'action domine dans les coeurs. On pèse alors chaque mot, on surveille chaque geste. Tout acte est réfléchi, plus de place à l'instinct. Des amitiés naissent mais la méfiance règne. La trahison n'est jamais loin, et la Gestapo rôde. Pourtant, jamais une plainte, jamais un regret, jamais une larme. Ni la peur de l'arrestation, ni l'angoisse de la torture, ni la mort ne peuvent les arrêter. Car ils le savent : " La Résistance a pris la forme de l'Hydre. Coupez-lui la tête, il en repousse dix, à chaque jet de sang."



Non, L'armée des ombres n'est pas un livre de plus sur la Résistance. L'armée des ombres est Le livre à lire sur le sujet.

Car à n'en pas douter, la fiction, aussi réussie soit-elle, n'égalera jamais la puissance émotionnelle du témoignage de l'intérieur.
Commenter  J’apprécie          946
Les Coeurs purs

En décembre 1920, Lloyd George et Churchill, contraint pas les événements, proposèrent une partition de l’Irlande qui aboutit un an plus tard à la création de l’Etat libre d’Irlande (catholique au sud) et de l’Ulster (loyaliste au nord).



Cette indépendance relative, avec statut de dominion, divisa les irlandais. Michaël Collins fut assassiné par les troupes d’Eamon de Valera et l’écrivain Erskine Childers, auteur de « L’énigme des sables », fusillé pour trahison.



Joseph Kessel et Henri Béraud suivirent, comme envoyés spéciaux, ce drame irlandais et « Mary de Cork » est la première, et la meilleure, histoire du recueil « Les coeurs purs ». Unité d’action, de lieu et de temps, la rencontre de Mary et de son époux Art, noue une tragédie de quarante pages que leur fils achève dans un des sommets de l’oeuvre de Kessel.



La dédicace « A mon cher Henri Béraud, en souvenir de Dublin et de Cork, cette histoire irlandaise » rappelle que Kessel, âgé de 22 ans, était l’envoyé du quotidien conservateur « La liberté » alors que Béraud, âgé de 35 ans, enquêtait pour le journal radical « L’oeuvre ». La révolte irlandaise fut à l’origine d’une amitié de quinze ans, forgée alors sur une commune anglophobie, et les articles de Kessel furent accusés de fragiliser nos relations diplomatiques avec le Royaume Uni.



En 1925, quand Kessel écrit « Les coeurs purs », Béraud publie « Ce que l’ai vu à Moscou » dédié à Kessel « Cher compagnon, je t’offre ce livre en souvenir des jours d’Irlande où nous luttions ensemble de tout notre coeur pour aider les plus hardis et les plus pauvres révolutionnaires de monde à conquérir la liberté ». Kessel et Béraud se rejoignent alors au « Journal » puis en 1928 participent au lancement de « Gringoire » dont Kessel prend la Direction littéraire et les deux amis créent le Prix Albert Londres en 1932, précise Yves Courrière, le biographe de Kessel.



L’affaire Salengro et le Front Populaire menèrent à la rupture entre les deux hommes en décembre 1936, Kessel reprochant à Béraud son antisémitisme qui répondait « je ne suis pas antisémite, je suis anti-parasite ». Kessel créa « Le chant des partisans » et Béraud fut condamné à mort à la libération.



« Makhno et sa juive », la deuxième histoire, semble aussi improbable que l’amitié entre Kessel et Béraud, et parait invraisemblable dans notre époque traumatisée par la Shoah.



« Le thé du Capitaine Sogoub » qui conclut ce recueil, permet à Joseph Kessel de revenir sur une rencontre survenue chez ses parents.



« Les coeurs purs » sont ainsi de la même pureté qu’un poison et associent un parricide, un égorgeur et un expatrié douteux dans l’entre deux guerres, un contexte qui rend finalement éternel ce recueil.
Commenter  J’apprécie          930
Le lion

Je termine à l'instant la lecture de mon deuxième Kessel. Autant Une balle perdue ne m'a pas emballée des masses que Le lion m'a complètement envoûtée.

Joseph Kessel, lors d'un périple en Afrique, fait une escale au Parc Royal à quelques kilomètres de Nairobi. Lors de son séjour, il fera la connaissance de Patricia, la fille de John Bullit le directeur de la réserve.

Au contact de cette étrange petite fille, il découvrira qu'elle possède un don : celui de comprendre les bêtes. De toute la faune qui peuple le parc, l'enfant entretient une forte amitié avec King, un lion, leurs liens sont si étroits que les autochtones la considèrent comme une sorcière.

Témoin privilégié de ces rapport entre la petite fille et le fauve, Kessel nous entraîne dans la mystérieuse Afrique qui nous enseignera ses lois...



Absolument fabuleux, comme vous l'aurez compris j'ai adoré ce livre. L'Afrique étant un rêve de voyage que je souhaite réaliser un jour, pour le moment, je tente de m'y rendre par la lecture. Le lion, a accompli complètement sa mission, le dépaysement à été total.

J'ai été beaucoup touchée par cette histoire. En parallèle de cette merveilleuse amitié, ce roman est une véritable mine d'or sur le plan des descriptions et des sentiments. L'écriture est brute et raffinée et dans la moiteur de l'atmosphère l'on ne reste pas tranquille, la magie de l'Afrique nous prends au tripes et l'on sent que quelque chose de grave va se produire...

J'ai pleuré à la fin du livre, et j'ai été déçue que ça se termine si vite au bout de 243 pages. Toutes les bonnes choses ont une fin certes, mais dans quelques temps je prendrai un grand plaisir à la relecture de ce roman qui a été un coup de coeur. Je le conseille à tous. A lire !
Commenter  J’apprécie          922
Les captifs

Toujours sous le charme de l'écriture de Joseph Kessel qui dépeint avec sensibilité et sans pathos la douloureuse et angoissante vie quotidienne de malades atteints de tuberculose qui se font soigner dans un sanatorium au milieu des années 1920.

Un établissement, le Pelvoux, situé en Suisse où un médecin humain et bienveillant envers ses patients essaye de leur apporter la sérénité dans leur combat contre une maladie souvent mortelle à cette époque là.
Commenter  J’apprécie          892
En Syrie



Depuis que Joseph Kessel a visité la Syrie, au début des années 1920, les choses ont bien changé dans ce pays du Moyen Orient grâce aux "efforts" combinés des al-Assad père et fils avec le génial maître du Kremlin. En effet, le régime Baas et surtout la guerre civile depuis 10 ans, avec l’appui de Poutine au président Bashar al-Assad, ont résulte dans un exode inimaginable de la population syrienne. En chiffres cela donne 6,6 millions de Syriens en fuite, soit 60% de la population totale et 1 Syrien sur 4 réfugiés dans le monde actuel.

À ce triste bilan il convient d’ajouter 117.388 morts civils Syriens dont 22.000 enfants d’après les données de l’OSDH - Observatoire Syrien des Droits de l’Homme - du 14 mars 2021.



Présenter le prolifique auteur qu’a été Joseph Kessel (1898-1979) sur un site de lectrices et lecteurs avisés ne manquerait pas de ridicule. Je crois que je peux me contenter d’évoquer quelques best-sellers signés par lui, tels "L’Armée des ombres", "Les amants du Tage" , " Le lion", "Les cavaliers", "La rage au ventre", etc.



Le grand Kessel met tout au début de son ouvrage un avertissement étrange : "Il ne faudrait jamais entreprendre de raconter un voyage : on est d’avance vaincu." Il explique que dans un tel récit il manque inévitablement le mouvement, le bruit, la vue, la découverte... Et il se pose la question que faire alors ? À laquelle il répond lui-même par la belle boutade : "Si l’on aime, il faut parler de l’objet de son amour."



Un bel exemple de l’esprit particulier de l’écrivain, puisque dans les quelque 79 pages qui suivent cette mise en garde, il parle avec amour de sa passion des voyages et ici en l’occurrence de cette Syrie à l’histoire très ancienne et fascinante.

Et l’auteur fait cela en 10 brefs chapitres et une annexe relative au mandat français sur cette partie du globe.



Juste pour vous offrir un petit aperçu, je me réfère au chapitre 9 intitulé "Le capitaine tabou".

L’histoire en fait du général de brigade Philibert Collet, né près d’Oran en Algérie en 1896 et mort à l’âge de 48 ans, en 1945 à Toulouse.

Joseph Kessel rappelle la conversation qu’il a eu sur ce personnage avec des officiers tcherkesses qui mettaient tous en exergue, de façon d’ailleurs fort exaltée, son immense courage et qui étaient offusqués qu’on lui refusait la rosette de la Légion d'honneur.

Ce sera finalement fait par le général de Gaulle à Alger, en janvier 1944.



Je peux recommander ce recueil de souvenirs de Joseph Kessel aux amateurs de dépaysement et à toutes celles et ceux qui apprécient le style joliment à part de l’auteur.

Commenter  J’apprécie          887
L'Armée des ombres

Lu le roman, vu le film de Jean Pierre Melville.

Revu le film, relu le livre, plusieurs fois.

Désormais, je ne peux plus dissocier le personnage de Philippe Gerbier de Lino Ventura qui incarne avec un réalisme époustouflant ce résistant .

Kessel concluait sa préface en donnant une dernière précision : tout ce qu'il donnait à lire avait été vécu par des gens de France et souhaitait avoir conservé, le plus fidèlement possible leur image.

Son vœu est exaucé au-delà de ses espérances.

Parmi les romans qui évoque la Résistance, c'est, pour moi un des meilleurs. Il est magistral.
Commenter  J’apprécie          867
La passante du Sans-Souci

Sublime et lyrique écriture de Kessel qui nous décrit avec finesse, avec humanité, une atmosphère, la complexité des relations humaines, l’imbroglio qui peut se nouer dans les sentiments humains, l’impact d’un instant sur nos vies, pour mieux nous entraîner, attirer notre attention, nous rendre plus réceptifs à ce qui peut se cacher sous le masque d’un visage humain. Il perçoit les mouvements de l’âme humaine. Il nous entraine dans une histoire d’amour tragique, bouleversante.



Témoin de son époque, ce « Lion » magnifique et généreux a tellement roulé sa bosse en sa qualité de journaliste-reporter qu’il a développé un sens aigu de l’observation. Ses aventures qu’il cherche aux quatre coins du monde, lui servent d’inspiration pour ses romans. Dans cette fiction (voire autofiction), il scrute ce qu’il se passe sous le ciel de Paris en 1935. Il voit les modifications sociopolitiques de l’époque et avec elles, pressent l’avenir de l’Europe malgré le bonheur des premiers congés payés.



Montmartre au petit jour, le narrateur, journaliste-reporter, fini sa nuit, attablé derrière la vitre du bistrot « Le Sans-Souci ». Il remarque une jeune femme qui toujours aux mêmes heures, invariablement, passe devant le café. Son allure retient son attention. Elle est mystérieuse, elle le fascine par sa façon de se comporter dans son manteau de zibeline jusqu’à devenir une obsession.



« Je crois que sa régularité même, l’inclinaison pareille de la tête, le trajet identique, la démarche qui reproduisait strictement celle de la veille, m’inspiraient l’effroi que j’éprouve toujours devant l’automatisme des fous"



Jusqu’au jour où n’y tenant plus, le narrateur, ivre et fiévreux ce jour là, se met en travers de la route de son apparition. Pris d’un malaise, il s’écroule près d’elle, la jeune femme lui porte secours et va l’aider à rejoindre son domicile.



Elsa Wiener est allemande, elle a fuit l’Allemagne et son cortège de bourreaux. Son mari, Michel, éditeur et opposant à la nouvelle politique d’Hitler, a été arrêté pour être transféré dans un camp. C’est l’époque où l’apparition des premiers camps est évoquée. Elsa a fuit en compagnie de Max, un enfant juif, que les coups des nazis ont rendu infirme. Pour subvenir à leur besoin, Elsa chante dans les cabarets, la nuit.



A partir de cet instant, on assiste impuissant à la lente descente aux enfers d’Elsa dans ce milieu interlope des nuits parisiennes. Elle doit survivre pour elle et pour Max, tenir envers et contre tout jusqu’au retour de Michel ! La lecture nous propulse à la suite d’Elsa, d’étape en étape, de bonheur en déchéance, d’espoir en crise de détresse, d’angoisse pour Michel mais détestation d’elle-même, l’avilissement dans les bas fonds, l’alcool aidant, Elsa va vivre un véritable calvaire devant le regard d’un enfant de douze ans impuissant à soulager la détresse de celle qui l’a sauvé d’une mort certaine.



Ce roman est peut-être le plus beau de Kessel bien que je n’ai pas lu « Belle de jour ». Assister à la déchéance de cette femme a été pour moi une torture et c’est là que l’écriture de Kessel est admirable, il défie notre empathie.



Bouleversant, fascinant, la présence de Romy Schneider ne m’a pas quittée un seul instant bien que le livre et le film fussent totalement différents. Son aura a illuminé le livre.



La passante du « Sans-Souci » se situe à la fin des années folles. Kessel ressemble au narrateur, journaliste-reporter. La narration emploie le « Je » ce qui donne plus d’épaisseur à son message. Paru en 1936 chez Gallimard, ce petit livre de 285 pages est un manifeste antifasciste d’un écrivain Juif qui pressent un sombre avenir.

Commenter  J’apprécie          8432
Les mains du miracle

Félix Kersten est le personnage central de ce roman. Roman ? le docteur Kerstein a existé. « Ce gros homme, ce médecin débonnaire dont l'aspect tenait d'un bourgmestre des Flandres et d'un bouddha d'Occident, avait dominé Himmler au point de sauver des centaines de milliers de vies humaines ! Mais pourquoi ? Mais comment ? Par quel incroyable prodige ? Une curiosité sans bornes avait remplacé mon peu de foi »



Ainsi Joseph Kessel nous donne les raisons qui l'ont poussé à écrire ce roman-vérité. Nous imaginons aisément que les conversations privées, ce huis-clos entre Himmler, chef de la gestapo, et le docteur Kerstein, ont été imaginées par l'auteur. Kessel le romancier s'est chargé de cette partie de l'histoire. mais les mains de ce médecin ont bel et bien fait des miracles. Des milliers de juifs de nationalités diverses ont échappé au pire. La traque a reculé. « Himmler c'était un état dans l'état. Celui de la délation, de l'inquisition, de la géhenne, de la mort infiniment multipliée » écrira Kessel. Cette partie historique c'est Kessel le journaliste qui l'a développée.



Le docteur Kerstein avait le don de comprendre l'origine des douleurs d'un malade en palpant avec ses doigts. Ensuite il soulageait avec ses massages.

Himmler souffrait de douleurs intenses à l'estomac. Il suppliait Kerstein de le soulager. Il l'à bien entendu mais en imposant ses conditions.



De 1939 à 1945 ce médecin hors norme, au destin exceptionnel, a réussi a dompter la folie criminelle d'un monstre en le manipulant de différentes façons.

« L'écriture n'est pas affaire de confort, de silence, ni de crayons bien taillés : c'est un flot intérieur prêt à déferler » écrit Kessel dans les colonnes d'un quotidien. Ce livre est conforme à cette idée. La tension monte au fil des pages. Les prises de risques sont de plus en plus grands. Un grain de sable suffirait à gripper la stratégie mise en place par le docteur Kerstein, vénéré par Himmler, haï par ses proches collaborateurs. Les enjeux sont inestimables, les risques sont incroyables.



Un livre sur la guerre et ses horreurs, sur le courage de certains mais aussi sur la lâcheté trop souvent constatée, sur la puissance du mot humanité, sur l'aveuglement qu'entraîne la confiance, sur les conséquences du fanatisme, sur l'espoir en toute circonstance, sur une lumière qui surgit alors que tout est plongé dans l'obscurité.



Un ouvrage puissant dont je n'avais jamais entendu parler lorsqu'une amie m'a dit : Tout le monde devrait lire ce livre.



Commenter  J’apprécie          8411
Le lion

J'ai refermé ce livre avec la satisfaction d'une mission accomplie....

Je me devais de lire ce petit roman dont ma petite soeur avait inscrit sur la première page intérieure son nom pour l'étudier en 5ème en 1982. Petite pointe de nostalgie, je n'ai pu me résoudre à l'abandonner sur un banc, des fois que mon fils l'etudierait également l'année prochaine au collège (même si je trouve que le style est quelque peu désuet pour aujourd'hui...).

Désolé de ne pouvoir couvrir d'éloges ni d'enthousiasmes excessifs pour cette oeuvre de J. Kessel, je voulais en outre marquer mon profond respect envers cet illustre représentant de l'académie française .

Commenter  J’apprécie          822
Le lion

Moins de 250 pages et pourtant une immersion profonde et intense dans la savane africaine, dans un univers où la sauvagerie est aussi dense que la fascination qu'elle fait naître au coeur de l'homme.



John Bullit, ancien chasseur repenti, gère un parc Royal et veille au bien-être des bêtes sauvages comme au pacifisme des tribus autochtones qui le peuplent. Sa femme, la blonde Sybil, vit de plus en plus mal leur mode de vie et perçoit comme une menace permanente l'environnement fait d'espaces infinis et de sauvagerie artificiellement maîtrisée. Un sentiment en totale opposition avec celui nourri par Patricia, leur toute jeune fille, qui, née dans la brousse, en est devenue la prêtresse, respectant les bêtes et sachant s'en faire respecter. Le narrateur, voyageur de passage dans le parc, est rapidement happé par chaque membre de la famille. Des liens d'amitié, de natures différentes, se nouent entre eux tandis que se révèlent les enjeux personnels.



Mère adoptive de King, un superbe lion aussi docile qu'un chien, Patricia domine le récit par son charisme et son charme. Manipulatrice en herbe, c'est une enfant chez qui s'expriment à la fois l'envie d'aimer et celle de dominer. Courageuse et passionnée, tiraillée entre le besoin de sécurité de sa mère et la vie intrépide de son père, la fillette a reporté sur King toute son affection, toute sa tendresse. Mais l'amour entre l'homme et la bête sauvage est-il pleinement réalisable ?



"Le Lion" de Joseph Kessel compte parmi les grands classiques du 20ème siècle. Son écriture sobre et imagée est terriblement efficace et garantit au lecteur en quête de nouveaux horizons un dépaysement total. Toutefois, j'ai peiné à entrer dans le roman, toute la première partie avec la mise en place des acteurs m'ayant paru particulièrement poussive, ou est-ce que ma concentration était par trop volatile ? Heureusement, au fil des pages, mon intérêt a crû, émoustillé par la découverte des traditions massaï pour le moins captivantes.



Tout comme le narrateur, le lecteur attend le dénouement de cette étrange intrigue avec une exaltation de plus en plus forte, dans un contexte où s'opposent l'enfance et l'âge adulte, la civilisation et la nature primaire, la violence et l'amour.





Challenge MULTI-DEFIS 2016

Challenge PETITS PLAISIRS 2016

Challenge ABC 2015 - 2016

Pioche dans ma PAL - Juillet 2016
Commenter  J’apprécie          820




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Joseph Kessel Voir plus

Quiz Voir plus

Mais si, vous connaissez Joseph Kessel !

Avec son neveu, il est l'auteur des paroles d'un hymne à la révolte et à la résistance écrit à Londres dans les années 40 :

L'affiche rouge
Potemkine
Le chant des partisans

10 questions
195 lecteurs ont répondu
Thème : Joseph KesselCréer un quiz sur cet auteur

{* *}