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Citations de Juan Carlos Onetti (36)


Ce qu'il restait de la nuit, la noirceur qui l'entourait, cherchaient à la convaincre de la nécessité d'une descente, d'une immersion lente et sans heurts. A bout de forces, elle se rebellait pourtant et parvenait à se revoir au milieu d'un bal de campagne, où seul le vin doré donnait de la joie, où personne n'était ivre, le cercle des danseurs tournoyait au rythme des chansons, se laissait porter par elles, ce cercle qui fut sien, où elle évoluait légère et vêtue d'une robe à fleurs, heureuse, ignorant rides et petites douleurs des articulations, la peau du visage si fraîche, si lisse, à laquelle l'heureuse fatigue donnait un teint de rose, un oeillet dans les cheveux, un oeillet dans la poitrine, un oeillet dans la bouche.
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Il était à la fois sujet et objet, il se regardait vivre, prêt à s'étonner, incapable de déterminer quels actes lui appartenaient en propre, et lesquels étaient empruntés ou réalisés par pur caprice.
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Derrière chaque printemps se sont accumulés d'autres printemps, immatériels, dont le souvenir a déjà vieilli et qui ont déposé pour toujours leur goutte de douceur ou d'amertume dans la mémoire. Gouttes qui revivent et imprègnent subtilement le printemps qui vient de naître. Et non, on ne peut modifier le passé.
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Malgré les années, les modes et la démographie, les habitants de la ville étaient toujours les mêmes. Timorés et vaniteux, obligés de juger pour se donner confiance, et jugeant toujours par envie ou par peur. Le plus clair à dire sur eux était qu'ils étaient dépourvus de joie et de spontanéité, qu'ils ne pouvaient être que des amis tièdes, des ivrognes agressifs, des femmes qui ne cherchaient que la sécurité et étaient interchangeables comme des jumelles, des hommes frustrés et solitaires. Je parle des Sanmariniens ; peut-être les voyageurs ont-ils aussi constaté que la fraternité humaine est, dans les circonstances défavorables, une vérité décevante et étonnante.
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Les pluies sont arrivées. (...) Je sais bien qu'on est toujours entouré de champs, de semailles et de récoltes, surtout de vignes, et que des milliers de personnes doivent se réjouir de cette eau bénie qui peut sauver ce qu'ils ont planté en se donnant de la peine, en attendant l'arrivée du pénible maquignonnage avec les acheteurs qui leur tomberont dessus depuis leurs villes pour les escroquer et leur faire de fausses promesses. Ils ne sont en effet rien d'autre. Derrière, il y a les entrepreneurs, les multinationales invisibles et sûres que les transactions se feront à leur avantage.
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Je compris tout, clairement, comme si c’était une de ces choses qu’on apprend enfant, pour toujours, et que les mots ensuite n’arrivent pas à expliquer.
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Je la vis depuis les hauteurs gazonnées de la promenade ; la silhouette grandissait à l’autre bout de la jetée, à mesure qu’elle avançait vers la brume de l’eau, sa valise et son manteau d’hiver tantôt apparaissant, tantôt se confondant avec le fond.
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Mais l'autocompassion et la nostalgie, que j’exagérais sans le vouloir, ne m'étaient d'aucun secours.
Mes années passées en France, en dépit des affres de la faim, du froid et de la pluie, avaient été une manière d'être au monde. Ici, à quelques kilomètres d'un village qui aspirait à être une ville, je me sentais comme une sorte de témoin de l'éclosion de la vie terrestre. Les insectes aux formes étranges et avides de sang, les hurlements d'animaux encore inconnus qui venaient de la forêt me confortaient dans l'idée que je n'habitais pas vraiment un monde réel.
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Exactement ça: un cactus, le mur du cimetière en pierres sèches, un mugissement répété sur le fond invisible de l'après-midi; et l'été encore indécis avec son soleil blanc et tâtonnant, le bourdonnement des mouches, l'odeur d'essence qui me venait de la voiture, indolente; l'été, la sueur comme de la rosée, la paresse.
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La luna continuaba creciendo. Ella, horadando la noche con sus pequeños senos resplandecientes y duros como el zinc, siguió marchando hasta hundirse en la luna desmesurada que la había esperado, segura, años, no muchos.
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- Je ne suis pas très porté sur la lecture mais, vous, peut-être. Dites-moi, mettons que vous êtes en train de lire un livre et que vous tombez sur un type qui parle autant que moi, qu'est-ce que vous faites ? Vous refermez le livre et vous maudissez celui qui l'a écrit.
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Et par-dessus tout, je retrouvais une nouvelle fois dans ma vie le printemps, sa fébrilité, la nécessité de faire des projets et de longues soirées chastes au cours desquelles Eufrasia me renouvelait mon pot de fer-blanc, et je buvais et fumais assis dehors dans un fauteuil conçu pour un postérieur plus large que le mien en contemplant le lent voyage de la lune sur les cimes obscurcies des bois.
Mais derrière chaque printemps se sont accumulés d'autres printemps immatériels, dont le souvenir a déjà vieilli et qui ont déposé pour toujours leur goutte de douceur ou d'amertume dans la mémoire. Gouttes qui revivent et imprègnent subtilement le printemps qui vient de naître.
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Il était vieux, incrédule, sentimental, fonder un bordel c'était maintenant, essentiellement, comme de se marier in articulo mortis, comme de croire aux fantômes, comme d'agir pour Dieu.
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Le pire n'est pas que la vie refuse ce qu'on désire, c'est que, l'ayant donné, elle le reprend .
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Le printemps commençait à poindre mais il fit honteusement machine arrière après deux ou trois nuits sans étoiles et d’abondants coups de tonnerre qui se voulaient redoutables avant, comme il était prévisible, de battre en retraite.
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Le gardien du cimetière avait une matraque inutile qui pendait à son bras. Il sortit dans la rue et regarda des deux côtés. Moi je fumais, assis sur une pierre ; les deux types en bras de chemise se taisaient, adossés au mur, les bras ballants, les mains dans les poches ou dans la ceinture du pantalon. Exactement ça : un cactus, le mur du cimetière en pierres sèches, un mugissement répété sur le fond invisible de l’après-midi ; et l’été encore indécis avec son soleil blanc et tâtonnant, le bourdonnement des mouches, l’odeur d’essence qui me venait de la voiture, indolente ; l’été, la sueur comme de la rosée, la paresse. Le vieux toussa à ma place et finit par émettre quelques jurons. Alors je me levai pour me détendre, j’aperçus le chemin dénudé, je regardai sur ma gauche et j’esquissai lentement une grimace de haine et de méfiance. (« À une tombe anonyme », traduction Abel Gerschenfeld)
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«Et la vie c'est soi-même et soi-même c'est les autres.»
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Je me souviens, surtout, d’avoir évoqué une chose simple: une prostituée me montrant son épaule gauche, rougie, avec la peau presque fendue, qui me disait: « Tu te rends compte, ces sales chiens! Il en arrive vingt par jour et pas un ne se rase. »
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Déjà le rêve échappe à ton sommeil lointain et obstiné. Comme la lumière grise qui vainc les rideaux, les choses étranges et les personnages fous qui te remplissent débordent désormais dans la chambre.
"Des pousses lentes se gonflent et croissent, enlacent les meubles, frottent les coins de leurs énormes yeux aveugles. Nous, le matin, l'air que tu as bercé dans la nuit, la main perdue sur le drap, le bout de ton sein lie-de-vin, replié en-dedans, nous sommes ton rêve. (..."
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Dans le balancement de sa coupole noire et luisante, le corbillard gravissait lentement la rue, traîné par un attelage incolore. J'aperçus la croix sombre, le haut-de-forme du cocher et sa petite tête penchée, les chevaux rétifs, d'une couleur scandaleuse, presque des mules en train de tirer une charrue. Ensuite, solidifié par le soleil, brun et doré, suivait mollement le nuage de poussière. Et tout de suite après sa mort, immédiatement après, quand la lumière occupa de nouveau, sans se presser, la région de terre remuée, je les vis, je mesurai leur approche maladive. Je vis les deux petits nuages indépendants qui s'élevaient en se renouvelant, pour leur donner un fond, sans se rejoindre. Entre-temps, le visage du cocher penché sur le siège surélevé du corbillard, son expression de patience offensée, s'approchait de moi.

A une tombe anonyme
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