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Citations de Juan José Millas (30)


La popularité du Majordome Fantôme ne cessait de croître. Rares étaient désormais les sites spécialisés où l’on ne parlait pas de lui. Il était devenu une star à qui des internautes posaient des questions en tout genre. De son côté, il dosait beaucoup ses interventions, faisant en sorte de leur donner le ton énigmatique que les gens attendent d’un esprit. Ainsi, à la question de savoir si après la mort on relativisait les préoccupations de la vie, il répondit :
-Le succès de la tour Eiffel est surprenant.
La phrase fit aussitôt l’objet d’une avalanche d’interprétations que Majordome Fantôme lut sur l’ordinateur de la chambre de María.
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Juan José Millas
L'écriture cautérise les blessures au moment même où elle les ouvre.
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Dans ce même salon, avec des meubles identiques et une atmosphère équivalente, tous trois avaient été enfants puis adolescents puis adultes. L'aînée, ç'avait été elle, et Juan le plus petit, mais ils paraissaient avoir le même âge maintenant; la maturité élimine les nuances et la mort finit par gommer les différences.
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Je commence ces pages, dont j'ignore le titre que je leur donnerai et où elles me mèneront, à quarante trois ans, autrement dit un peu au- delà du milieu de ce que l'on pourrait considérer comme une vie très longue. Plusieurs événements personnels, difficiles à raconter en détail, m'ont offert ces derniers temps la possibilité de contrôler activement mon existence. Je me trouve au début de quelque chose d'impossible à définir, mais qui se résume dans l'impression d'avoir pris les rênes de ma vie.
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Je pensais qu'il était relativement facile de sceller un pacte avec la folie dans les salles de bains des hôtels. Tout brille et semble tellement propre, et pourvu de courbes si douces, que la folie glisse à la surface des choses sans faire souffrir.
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les obsessions paraissent s'évanouir, mais elles réintègrent toujours la tête, après avoir parcouru un tube que nous appelons oubli.
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Un corps ressemble vraiment à un quartier : il possède son centre commercial, ses rues principales, et une périphérie confuse, où il se développe ou meurt. Moi je ne suis pas d'ici, de cette ville qu'on appelle Madrid, capitale de l'Etat.....En tout cas je suis arrivé dans ce quartier démantelé, dont la forme et la maladie rappellent celle de mon corps : chaque jour, en le parcourant, on lui découvre une souffrance quelque part. Les ongles de mes pieds représentent la périphérie de mon quartier. C'est pourquoi ils sont cassés et difformes. Et mes chevilles sont aussi une zone très faible de ce quartier de chair qui est moi....et mes bras sont des maisons meurtries et mes yeux des lampes à gaz fracassées. Mon cou ressemble à une ruelle entre deux terrains vagues. Mes cheveux sont la partie végétale de cet ensemble, mais il faut les teindre pour occulter leur décrépitude. Et, enfin, j'ai aussi une décharge que je ne veux même pas évoquer, parce que, comme dans tous les quartiers en ruine, les ordures se rapprochent peu à peu du centre et désormais on peut trouver des pelures d'orange n'importe où. Mon corps est tellement sale qu'on ne peut même plus s'y promener, et la mairie ne fait rien pour le rénover.
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La vie des êtres humains repose sur un mythe, une légende, un mensonge.
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Le cerveau consomme environ vingr pour cent des besoins en énergie du corps (…) C'est énorme
(...)
–Un zèbre a besoin d’avoir un tube digestif très long, parce que son alimentation a une faible valeur calorique. Il faut choisir entre ce qui est abondant et peu calorique, et ce qui est rare et très calorique. C’est la vie.
(...)
– Changer notre régime alimentaire, qui au départ était herbivore, pour un régime de meilleure qualité, avec pour effet de raccourcir notre tube digestif.
– Et l’économie s’est traduite par une augmentation de la taille de notre cerveau ?
– Exactement. Ce qui, à son tour, a développé la vie sociale et donné naissance à la politique.
– Et tout ça avant de nous mettre à cuire les aliments ?
– Quand on s’est mis à cuire les aliments, notre cerveau avait déjà grossi.
– Je croyais que l’augmentation de la taille du cerveau était une conséquence de la consommation d’aliments cuits.
– Non, le cerveau a grossi quand nous avons commencé à manger des aliments énergétiques, même sans les cuire. La viande, tu peux la manger crue, comme les lions, dont l’appareil digestif est court. C’est le cas de tous les carnivores.
– Si je te donne la longueur d’un appareil digestif, tu es capable de me dire à quel animal il appartient ?
– Bien sûr, vas-y.
– Comme ça rien ne me vient.
– Prends note de ceci : les carnivores n’ont pas besoin de cuire leur nourriture. Les loups ne cuisinent pas. Mais il est vrai que les aliments cuits sont mieux assimilés, c’est un fait. Sur cette question, certains pensent, comme moi, que le feu est très ancien et qu’il est à l’origine de l’expansion cérébrale, et d’autres sont d’avis que le feu est arrivé dans l’alimentation après que le cerveau a grossi. Ça ne remet pas son importance en cause. Nous sommes les enfants du feu.
– Et lorsque cette expansion cérébrale s’est produite, nous sommes tout de suite devenus des Sapiens ?
– Non, nous étions encore des hominidés. Des présapiens, si tu veux. Nous parlons d’il y a trois cent mille ans.
– Mais il y a trois cent mille ans, la pensée symbolique était déjà apparue.
– Un petit peu », dit le paléontologue
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Une infirmière un peu éméchée les accompagna jusqu'à la chambre de Manuel en disant que le malade dormait comme un bébé. Laura et Julio échangèrent un regard vide et baissèrent aussitôt les yeux vers le malade, essayant de comprendre par quel mystère leur ami était à la fois présent et absent. Ils l'observaient comme si son corps était une crevasse qui leur montrait le vide qu'il avait laissé dans leur vie.
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Elle s'approcha de la vieille armoire à trois corps, sorte de ventre de la maison, et ouvrit la porte centrale; l'intérieur du meuble possédait une obscurité propre, différente des autres obscurités de la vie, et une odeur caractéristique, immuable au fil des ans. Il ressemblait à un puits dont les eaux souffriraient de quelque corruption ou maladie. Elena pensa qu'elle ne parviendrait pas à entendre le bruit d'une pierre touchant le fond si elle en lançait une à l'intérieur du meuble; tellement insondables paraissaient les ténèbres.
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« Il y a environ deux cent cinquante millions d’années, se dressait ici une chaîne de montagnes aussi hautes que l’Himalaya, qui s’est érodée. Ce qu’on voit aujourd’hui, ce sont ses racines, m’indique le paléontologue tandis que nous prenons le chemin du retour. Ce paysage, très récent, est le résultat de l’abandon de l’élevage. Le maquis a fait disparaître les pâturages. En Espagne, ajoute-t-il sans reprendre son souffle, il y a eu deux grandes périodes : la première va du Néolithique jusqu’en 1958, avec les plans de développement des technocrates de l’Opus Dei1. Jusque-là, les campagnes étaient remplies de gens, de voix, d’enfants ; la vie à la campagne n’avait rien de sinistre. La campagne était aussi animée que la ville. En 1970, les campagnes se sont vidées. Il ne restait plus personne. Aujourd’hui, aucun pays européen n’a plus de cinq pour cent de population agricole.
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Voilà pour quoi j'ambitionne d'écrire un roman où s'articuleraient, formant un seul corps, ce qui arrive et ce qui n'arrive pas. La difficulté, ce serai d'exprimer ce qui m'échappe, et de l'exprimer sans avoir besoin de le connaître.

"J'ai déjà un bon début : imaginons le personnage principal, un homme mûr, qui un jour commence à entendre inopinément L'Internationale. Et cela le conduit, comme moi, jusqu'au divan d'un psychanalyste. Et du divan du psychanalyste il se retrouve dans les bras d'une femme rencontrée dans un parc. et cette femme n'est pas celle qu'on croit. Et le personnage...
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"Papá leía como si entre el libro y él se produjera un intercambio de fluidos."

Traduction: "Papa lisai comme si, entre le livre et lui, se produisait un échange de fluides."
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On ne peut pas écrire et vivre en même temps, être écrivain et personnage de roman.
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Soudain il se sentit fort. Il remarqua que son état fébrile décuplait cette puissance, car un écrivain, un bon écrivain, doit posséder jeune faille, une fissure, une faiblesse qui remette en cause son triomphe.
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Les personnes comme Manuel et son père, pensa Julio, s'habillent de l'intérieur vers l'extérieur, si bien que chaque jour, quand elles se lèvent, elles enfilent des idées, puis par-dessus les viscères, sur les viscères les muscles, et ainsi de suite jusqu'aux tissus des vêtements. Lui, en revanche, s'habillait de l'extérieur vers l'intérieur. Il mettait d'abord sa combinaison de motard et, dessous, les vêtements informels prévisibles chez un décorateur, puis il y avait l'épiderme, le derme, les côtes..., dans l'espoir que tout ce décor extérieur cède la place à un caractère original, une pensée différente, une façon insolite d'affronter le monde. Y parvenait-il ? (p 25)
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Il passa devant la moto dont il ne restait que la fourche et le réservoir qui ressemblait un peu à un abdomen. (p 178)
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-Ta fille, quand elle s'est rendue compte que j'avais fumé, m'a dit que j'étais comme toi, bizarre.
- Ma fille a tendance à dramatiser.
- Mais elle m'a rappelé une expérience personnelle. Mes parents fumaient beaucoup et moi, quand je les voyais fumer un joint, je savais qu'ils allaient devenir tout de suite bizarres. Ce qui ne me plaisait pas toujours. (p 196)
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Un jour, il eut avec Manuel une conversation sur l'âme et le corps. Manuel prétendait qu'il s'agissait d'une distinction fantastique, irréelle. Julio lui demanda alors pourquoi il les percevait comme des instances différentes et son voisin lui répondit que l'histoire de l'humanité pouvait se résumer en un combat contre la perception, créatrice inépuisable de mirages.
- Les sens, ajouta-t-il, disent que le soleil se couche, alors qu'il ne se couche ni ne disparaît. A en croire les sens, les objets, en s'éloignant, deviennent plus petits, pourtant ils ont incontestablement la même taille ici ou à cent mètres plus loin. Les sens nous font croire que les corps sont massifs alors que quatre-vingt pour cents d'un atome sont faits de vide, rien d'autre.(p 174)
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