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Citation de Cielvariable


Je cours sur la pente ascendante du mont Royal, les écouteurs enfoncés dans les oreilles. L’intensité de la voix de POESY qui interprète Soldier of Love se répercute en moi.

Je croise un homme d’une cinquantaine d’années qui descend la côte, son chien sans laisse flairant les broussailles qui longent le chemin asphalté réservé aux piétons et aux cyclistes. Considérant la noirceur qui s’installe doucement dans un brouillard typique des journées humides automnales, je sais que peu de gens errent ici à cette heure du jour, certainement préoccupés par la préparation du souper.

Après quelques minutes de montée, j’atteins mon objectif.

Parvenue au belvédère qui offre une vue spectaculaire sur la ville de Montréal, je m’arrête. Seule à cet endroit bondé de monde le jour et les week-ends, je tente de calmer ma respiration haletante en m’imposant de longues inspirations. Mais il m’est difficile de la contrôler, car ce n’est pas strictement l’effort physique qui la malmène.

C’est également l’émotion.

J’amorce un premier pas. Puis un deuxième.

Obnubilée par un endroit précis, j’avance lentement sur cette immense terrasse d’observation en demi-lune.

Ma démarche posée m’amène près de la balustrade.

Je passe doucement la main sur une des jumelles noires à pièces qui s’y trouvent. Je cherche à discerner une réminiscence concrète, différente de celles qui prennent la forme d’images projetées de façon chaotique, telles des diapositives, dans mon cerveau.

Je fixe le pavé couvert ici et là de gommes à mâcher parfaitement intégrées au revêtement. Mes yeux restent longtemps figés sur le sol.

Là où une grande quantité de sang a déjà couvert une partie des pierres plates.

Avant de s’y infiltrer sinueusement. Puis d’être chassée par la pluie et foulée par des milliers de touristes depuis ce soir fatidique.

J’appuie mes mains sur la balustrade puis regarde vers le bas. Vers les nombreux arbres qui couvrent cette montagne entre lesquels je devine l’emplacement d’un bâtiment symbolique que je connais bien.

Ma poitrine se gonfle encore sous l’effort physique exigé. Un effort minime à côté de celui que je m’apprête à faire.

Parce que l’action que je dois accomplir requiert un effort mental.

Plus atroce à réaliser que n’importe quelle course.

Plus poignant.

Mais je dois l’accomplir.

Pour moi.

Et pour lui.

Surtout pour lui.

Mon regard toujours plongé par-dessus la balustrade, je m’exprime d’une voix déterminée.

— C’est ce soir que ça se termine.
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