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Critiques de Julian Barnes (531)
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L'homme en rouge

Le dandy peint par John Sargent — en robe de chambre coquelicot sur un col de dentelle — est un médecin à la mode, anglomane, familier des grands esprits de son temps — Wilde, Montesquiou, Barbey d’Aurevilly, Huysmans, Baudelaire —, amant de Sarah Bernhard avant et après beaucoup d’autres. Barnes en fait le guide d’une exploration savante et amusée de l’élite décadente au tournant du siècle. L’écriture est virtuose, la précision documentaire est renforcée par de nombreuses photographies d’époque.

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L'homme en rouge

Barnes Julian – "L'homme en rouge :[une biographie de Samuel Pozzi]" – Mercure de France, 2020 (ISBN 978-2-7152-5402-2)

– format 21x14cm, 300p. – nombreuses illustrations

– traduit de l'anglais par Jean-Pierre Aoustin, titre original "The man in the red coat", cop. 2019



Il s'agit ici d'une biographie de Samuel Pozzi, ce médecin gynécologue très en vogue pendant la "Belle Epoque", pionnier en France de la gynécologie mais aussi collectionneur d'art et "homme du monde" fréquentant "le gratin".

Dans cet ouvrage, l'auteur consacre quasiment autant de place à Samuel Pozzi qu'au plus célèbre des "dandys" de cette époque, le comte Robert de Montesquiou, qui inspira le "Des Esseintes" de Huysmans autant que le "baron de Charlus" de Marcel Proust. Ce qui l'amène à évoquer substantiellement des personnages plutôt glauques comme Jean Lorrain et Léon Daudet, ou encore les frères Goncourt, sans oublier Sarah Bernhardt et le monde des "cocottes". Soit une bonne part de la galaxie des êtres réels qui inspirèrent "La recherche du temps perdu"...



Seul bémol : l'auteur se complaît souvent dans le clabaudage, les cancans, les commérages et les médisances, une pratique au moins aussi répandue, tolérée et suscitée par les médias de cette époque que les sont aujourd'hui les insanités, vitupérations, ignominies et harcèlements diffusés, suscités et encouragés par les réseaux dits "sociaux"...



En tant qu'anglais bon connaisseur de (ce qui fut) la culture française, l'auteur insère quelques remarques malicieuses ou ironiques parfois fort justes et drôles.



Remercions le traducteur pour la qualité de son "rendu".

Par ailleurs, rendons également hommage à l'éditeur et son imprimeur, pour au moins deux bonnes raisons. Primo, le "Mercure de France" n'a pas reculé devant l'insertion de nombreuses illustrations, aussi bien sous forme de vignettes en noir et blanc (issues de la collection Félix Pottin) que de reproduction couleur, de bonne qualité et en pleine page, des tableaux mentionnés dans le texte. Secondo, l'impression est bellement réalisée, sur du papier de qualité, dans un format agréable, une typographie irréprochable...



Un livre indispensable dans la bibliothèque de toute lectrice et tout lecteur de "La recherche du temps perdu".



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La seule histoire

L'amour, la vérité, son ivresse et ses mensonges ou l'art délicat, et âpre, du récit selon Julian Barnes. Un jeune homme tombe amoureux, il veut comprendre, saisir tous les enchantements de cet amour particulier, de cette seule histoire qui lui soit arrivée. La seule histoire entremêle habilement récit et réflexion, capture de l'instant et certitude de sa perte. Julian Barnes nous captive par cette grande spéculation sur l'âge adulte, ses acceptations et surtout par un récit sans concession sur les dépendances affectives, avec ou sans alcool.
Lien : https://viduite.wordpress.co..
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Le fracas du temps

Avec « Le fracas du temps », Julian Barnes plonge le lecteur dans les pensées et les souvenirs du grand compositeur russe Dmitri Chostakovitch. L'aspect biographique et très documenté de l'ouvrage ne doit pas nous faire oublier qu'il s'agit avant tout d'un roman et que l'auteur est libre d'interpréter la psychologie et la vie de son sujet aussi connu soit-il.





A travers ce roman biographique, Chostakovitch se remémore les étapes clefs de sa vie, ses amours, sa passion de la musique mais en premier plan sa peur et ses accrochages avec le régime soviétique notamment stalinien. Barnes utilise le compositeur pour réhabiliter ces artistes de l'Est qui ont pu collaborer avec le régime totalitaire de l'époque ou tout du moins sans le dénoncer. Il décrit ce que c'est que de vivre dans une peur quotidienne ; peur pour sa propre personne mais aussi pour son entourage. La plume de l'écrivain est mordante par son intelligence, ses critiques (du Stalinisme, de la vision occidentale du régime,...) et la réflexion qu'elle impose au lecteur ne serait-ce que sur la valeur de la vie.





« Le fracas du temps » souffre néanmoins de quelques lourdeurs et longueurs lié au style de son auteur et à la forme qu'il donne à son roman. Passé 200 pages dans la tête de Chostakovitch, on est content d'en sortir au bout d'un moment. Le livre de Julian Barnes reste toutefois intéressant à plus d'un titre et sa lecture fut enrichissante.
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Le fracas du temps

LC avec Bellonzo



Mi-biographie, mi roman, Julian Barnes a choisi de nous raconter dans cet livre trois moments de la vie de Chostakovitch.



Première partie : l’action se passe en 1936

Un article dans la Pravda déclenche tout : Staline (via la Pravda) dit que Chostakovitch écrit de la musique anti-patriotique, Chostakovitch a peur pour sa vie et celle de sa famille.

Il est convoqué et interrogé par la police. Il se voit déjà perdu, exécuté ou envoyé dans un camp. Pour éviter une arrestation devant sa famille, il va pendant plusieurs nuits rester dans le couloir devant son appartement en attendant la police. Julian Barnes sait nous mettre à côté de cet homme d’une trentaine d’années, qui est à la fois un génie musical mondial, acclamé dans le monde entier et d’autre part entièrement seul devant la « folie » de Staline. Pendant ces dix longues nuits, il réfléchit à sa vie, son enfance, ses relations avec la musique et le régime stalinien, sa résistance passive au Pouvoir. Il s’en sort « miraculeusement » alors que nombreux de ses amis disparaissent dans les purges de Staline.



Deuxième partie :1948, Chostakovitch revient de New York avec un sentiment mitigé : ce voyage organisé pour montrer l’ « ouverture » de l’URSS tourne pour lui au fiasco : il est forcé par le régime à dénigrer les musiciens russes émigrés aux USA..Il se sent lâche, humilié, honteux mais a-t-il réellement le choix ?



Le moment qui m’a le plus interpellée est lorsqu’il revient sur la période de la guerre : bizarrement, pendant celle-ci, alors que le monde est à feu et à sang, il se sentait presque libre (ou moins persécuté et surveillé : Staline avait autre chose à faire que persécuter ses compatriotes).

Julian Barnes raconte comment les russes sont sous la coupe d’un tyran et survivent en maniant l’ironie et en écoutant du Shakespeare « Les gens écoutaient les huit premiers vers en attendant impatiemment le neuvième : et l’art bâillonné par l’autorité »



Troisième partie :Début des années 70

Le génie est usé, vieilli, veuf…Cette partie est la plus triste. Au préalable, on sent la force de caractère de cet homme… des décennies de dictature l’ont totalement détruit psychologiquement…Le propos de l’auteur reste très intéressant : très empathique, on a l’impression d’être dans les pensées de Chostakovitch…
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La seule histoire

Paul aime Susan. Seulement, Paul a 19 ans et Susan 48 ans. Ce qui fait un peu désordre dans la bonne société anglaise de cette seconde moitié du XXe siècle. Mais ce n'est pas l'histoire d'amour d'un jeune homme en mal d'expériences. C'est une histoire d'amour qui marquera leurs vies à jamais.

La seule histoire est un roman anglais c'est-à-dire tout à la fois mélancolique, drôle, incisif et tendre. Un roman qui au fil de ses pages nous dit une seule chose : notre premier amour détermine notre vie. Être d'accord ou non avec ce postulat importe peu. Ce qui importe, c'est que la vie de Paul va être déterminée par son histoire avec Susan.

Julian Barnes (dont c'est le premier roman que je lis) nous offre des moments émouvants, notamment au sujet de l'alcoolisme et de l'incapacité de Paul à sauver celle qu'il aime. Mais Paul est un jeune homme qui peut parfois être très agaçant, dans son rapport à Susan et à sa famille par exemple.

Ce que je retiens de cette lecture, c'est une analyse tout en finesse et sans faux-semblants d'un premier amour déterminant, portée par une écriture sensible qui m'a touché.

Et en passionnée de tennis, j'aime quand tout commence sur un court.

C'est un beau roman cette Seule histoire !
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La seule histoire

Paul n'a que dix-neuf ans lorsqu'il rencontre Susan au club de tennis, elle en a quarante huit et est mariée avec déjà deux grandes filles.

De leurs échanges sur le cours va naitre une relation très chaleureuse puis une relation amoureuse, très forte pour Paul jusqu’au moment où Susan décidera de tout quitter pour vivre avec lui.

Il est encore étudiant en droit et dépendra de l'argent de Susan mais cela n'obscurcira pas leur bonheur, c'est tout autre chose qui fera changer l'histoire.

Au cours des années, Susan va malheureusement sombrer dans l'alcool, sans doute la difficulté à assumer tous les risques de cette relation. Malgré tout l'amour que lui portera Paul et tout ce qu’il mettra en œuvre pour tenter de l'aider, les années défileront avec le gout amer d’une vie gâchée.

On prendra part aux regrets, aux souvenirs, à la vie qui se déroule et à ce qu'elle laisse ancré au plus profond de nous.



C'est un roman fort et profond, qui fait prendre conscience de la rapidité de la vie, du souvenir de la première grande histoire, la seule qui ait vraiment comptée et de l'impact qu'elle aura tout au long de notre existence.On sent que Paul depuis le début de leur idylle, reste très protecteur avec Susan.



C'est une belle histoire que j'ai beaucoup aimée mais qui nous plonge malgré nous dans un sentiment de mal être, d'une vie difficile, gâchée par les événements et qui aura passé trop vite.



Et la question récurrente est bien : vaut-il mieux avoir aimé et perdre cet amour, ou ne jamais avoir aimé ?

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Une fille, qui danse

La première partie du roman relate l'adolescence et la jeunesse du narrateur. Trois amis, un quatrième qui perturbe un peu l'équilibre du groupe, les études, les filles, la vie qu'ils espèrent bien plus pétillante que celle des adultes, et puis la réalité...



Pour Anthony, la réalité c'est une histoire "d'amour" peu satisfaisante avec Véronica, la trahison de l'amitié pour cette fille, le suicide de l'un d'entre eux et enfin la vie adulte, le travail, les factures...



Tristounette la vie de Tony, il y manque un élan vital, comme si, il était resté au bord de sa vie . Pourtant le regard qu'il pose à soixante ans sur son parcours, n'est pas à proprement parler négatif, il a bien rongé ses désirs pour qu'ils coïncident avec sa vie.



Et puis, un grain de sable, la réception d'un testament, une somme d'argent et le journal intime de son ami suicidé, va bousculer cet homme. Les souvenirs qu'il a, vont s'avérer différents de certains éléments relatés dans le journal. Il va être amené à voir et savoir quelque chose qu'il aurait préférer ne pas connaître...



Cet homme, sans couleur et sans odeur n'est pas particulièrement attachant, pas facile ou pas envie, de se reconnaître dans cet homme mou et sans conviction. Pourtant le regard qu'il porte sur son parcours, est bien celui qui nous attend si l'on ne prend pas soin de sa vie . Il y a un volet sur "l'effet papillon " dans une vie, si je n'avais pas dit ça, pas fait ça, mais la culpabilité à retardement m'intéresse peu, ce n'est qu'un moyen de ne rien faire encore. J'ai été plus touchée par cette vie d'homme qui s'écoule sans passion, protégé de tout même de la vie et qui s'éveille pour faire le constat, qu'encore une fois, il ne peut rien changer, prêt à subir sa vie jusqu'à la fin.



J'avais vu beaucoup d'avis favorables sur ce roman, j'ai un avis mitigé , il y a un quelque chose qui en fait un roman un peu dérangeant mais pas assez à mon goût.
Lien : http://theetlivres.eklablog...
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Une fille, qui danse

Je ne reviens pas sur les discussions autour du titre qui, il est vrai est mal choisi et ne rend pas bien compte du contenu du livre...



Nous voilà plongé dans une histoire d'amour et d'amitié. Trois copains d'école rencontrent un nouvel ami (Adrian) qui va devenir le plus brillant du groupe et intègrera la prestigieuse université de Cambridge. Peu à peu, les liens de la jeunesse vont se distendre. En parallèle, le narrateur a une aventure sentimentale avec une jeune fille (Véronica) qu'il présente à ses trois amis. Il nous conte le week-end raté qu'il passe chez les parents de sa copine (Seule la mère de Véronica semble avoir éprouvé un peu de compassion pour lui lors de ce week-end), puis sa rupture et revient sur un épisode qui constitue un tournant dans l'histoire : cette ex-petite amie a noué une nouvelle aventure avec Adrian, son ami de Cambridge. Sous l'effet de la colère et de l'aigreur, il leur envoie à tous deux une lettre incendiaire dans laquelle il crache sa bile.



Puis les années passent. Notre narrateur se tisse une vie sans véritable passion, sans attrait, assez neutre. Il entretient de bonnes relations avec son ex-femme et sa fille. Avec la vieillesse, sa mémoire est devenue sélective et l'histoire de sa vie ressemble de plus en plus à ses yeux à celle qu'il se raconte à lui même... Il apprend enfin qu'Adrian s'est suicidé au moment où il avait cette aventure avec Véronica, mais qu'il semblait heureux avant ce geste tragique. La mère de cette dernière lui lègue le journal intime de cet ami disparu.



Barnes nous livre un roman très intéressant et qui donne matière à réflexion. C'est vrai que certains passages sont assez philosophiques, mais ils demeurent accessibles à tous et sont destinés à mieux nous faire appréhender le mode de pensée d'Adrian. Les personnalités des protagonistes sont très bien décrites. Ils acquièrent au fil des pages une véritable profondeur psychologique.



Barnes écrit son livre comme une bonne enquête policière : il lance plusieurs pistes : Adrian s'est-il suicidé parce que ses raisonnements philosophiques l'ont amené à la conclusion logique que c'était son libre arbitre qui s'exerçait au travers de cet acte ? (Ce qui rend cet intellectuel digne de l'admiration de ses amis). Ou au contraire a-t-il été manipulé par Véronica et poussé à cette extremité ? On ne découvre finalement la vérité que dans les dernières pages et je dois dire que le suspense nous tient en haleine. Pour moi, la surprise a été réelle à la fin. Je n'avais pas vu venir ce dénouement. En quelques phrases finales, toutes les pièces du puzzle se mettent en place !



C'est aussi une belle réflexion sur la vieillesse, sur la sélectivité de la mémoire, sur les liens entre les êtres humains, sur le remords...



J'admire chez l'auteur cette capacité qu'ont certains de ses personnages à s'exprimer sans mot, comme Véronica qui finalement révèle tout au narrateur sans vraiment lui parler. Elle ne fait que lui montrer les éléments qui au fur et à mesure doivent le conduire aux conclusions logiques. Barnes nous montre que la communication entre les êtres n'est pas facile, y compris avec ceux pour lesquels on éprouve ou l'on a éprouvé de profonds sentiments.



Le roman nous montre aussi les distinctions entre classes sociales et le poids de ces dernières dans une relation amoureuse. Le narrateur était-il à la hauteur des espérances de la famille de Véronica ? Adrian, diplômé de Cambridge ne constituait-il pas un meilleur parti ? Les sentiments de Véronica ont-ils été guidés par ce choix social, orienté par l'oeil évaluateur de son père et de son frère ?



A tout moment on s'interroge sur les secrets que cache cette famille, sur les motivations de protagonistes, sur la sincèrité des relations humaines, sur le poids d'actes semblant anodins sur le cours du destin...



A mon sens, ce roman mérite le prix littéraire obtenu et constitue une incitation à faire fonctionner nos petites méninges..
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Le fracas du temps

Le dernier roman de Julian Barnes est tout entier consacré au harcèlement.



Dimitri Chostakovitch, né en 1906, est comme une flamme d'inspiration, le monde entier en est d'accord. Mais il n'écrit pas la musique « entrainante » et « motivante» dont le Prolétariat a besoin. C'est ce que pense le Camarade Staline, qui d'ailleurs ne goûte guère, dans cette musique, ce qu'il appelle le « fatras », c'est à dire les chocs des percussions ou les cris des chanteurs.



Il se montre d'ailleurs maladroit, adaptant des livrets bourgeois (tel que « Lady Macbeth de Mzensk »), qui montrent que tout ne va pas pour le mieux sur la planète soviétique, ou glissant de l'humour dans des hommages officiels au Guide éclairé.



Chostakovitch, pendant les grandes purges des années 30, s'attend au pire, passant la nuit, avec sa petite valise, près de l'ascenseur, pour éviter à ses enfants le spectacle d'une arrestation.



Finalement, il ne sera pas tué, mais « encadré », c'est -à- dire harcelé par l'Union des compositeurs et son président Krennikov (lequel finira décoré par Wladimir Poutine).



En 1953, avec la mort du tyran et la publication de ses crimes, l'espoir renaît, mais le harcèlement va rester constant, portant moins désormais sur le contenu de la musique que sur la signature de manifestes, et, plus grave, sur la critique ou la dénonciation d'autres artistes. « En le laissant vivre », écrit Barnes, « ils l'avaient tué. »



Un livre important, surtout pour ceux qui aiment Barnes, ou le grand musicien auquel il vient de consacrer son talent.


Lien : http://www.bigmammy.fr/archi..
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Une fille, qui danse

Un homme se penche sur son passé et , bien sûr , finit par

y tomber...

Si l'on veut bien faire abstraction de la chute finale , laquelle comporte , comme dans tout bon polar , juste assez d'invraisemblance pour qu'on ne puisse jamais la pressentir,il restera alors un petit chef-d'oeuvre - 180 pages d'une lecture facile et captivante - sur notre

rapport au Temps.

A son rythme inéluctable de 60 secondes par minute , qui

parfois s'accélère follement , ou bien au contraire adopte

une lenteur désespérante .

Aux effets qu'il a sur nous , quand les rêves et ambitions

de la jeunesse sont , vingt ans plus tard , abandonnés pour un conformisme banal et terne ; quand la soif de vivre , l'orgueil et l'ardeur du bel âge finissent par se dissoudre dans la routine et les lâches apaisements .

A notre conscience de ce temps , subordonnée à une

mémoire toujours sélective et traîtresse , aussi

surprenante qu'obscure...

Cette introspection et ces formes complexes de relativité,

c'est l'histoire très concrète d'une vie toute simple , au

point d'être presque banale , mais dont la richesse

infinie se révèle peu à peu grâce au regard de l'auteur ,

à son humour léger et profond , à sa façon de nous

prendre à témoin , à la sympathie qu'il porte à ses

personnages comme à ses lecteurs.

Un conte captivant , et pourtant un véritable conte

philosophique .

Un régal !

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Quand tout est déjà arrivé

A Paris, le 6 avril 1820, naît Gaspard-Félix Tournachon. Vingt ans plus tard, il se nomme Nadar pour l’éternité. Dans un premier temps, journaliste, puis caricaturiste, photographe, aéronaute … c’est un homme avide à qui le hic et nunc semble trop exigu pour y séjourner. Il aime son temps, la modernité naissante, mais surtout il aime ses amis dont il tire le portrait. Plus il côtoie de célébrités (dont Sarah Bernhardt), plus il devient un homme de cœur. Un homme d’avenir. Mais le monde ne le sait pas. Pour cette raison, il le survole.

A Paris, le 25 septembre 1844, naît Sarah Bernhardt. Vingt-cinq ans plus tard, elle est surnommée « la Scandaleuse » pour la postérité. Fille sans père, elle fait tout pour attirer sur elle le regard des autres. Tuberculeuse, elle se repose très souvent dans son cercueil capitonné. Elle aime le théâtre, les auteurs de son époque mais surtout, elle aime ses amis. Jean Cocteau la baptise « le Monstre sacré ». Elle est une femme de cœur. Une femme de courage. Tout le monde le sait. Pour cette raison, elle le survole, une fois, en compagnie d’un bel officier anglais, entièrement sous son charme.

La troisième partie est consacrée à l’expérience que vit Julian Barnes lui-même, celle de la perte de l’être cher. Ainsi va la vie. Il ne veut pas la perdre mais la perd quand même. Elle le laisse seul. Et il se retrouve, tel Nadar perdu dans les airs, tel Sarah Bernhardt isolée sur scène. Mais les sentiments que suscite l’éternelle absence sont ici exprimés avec délicatesse et sensibilité, sans aucun apitoiement, tout en retenue. Il souffre. Personne ne le sait. Tout le monde le lit. L’amour nous rend plus fort, nous grandit, nous permet d’envisager la vie différemment, sous un autre angle. Là-haut, par exemple … Pourtant, toujours trop lourd, le corps retombe. A un moment ou à un autre.

Julian Barnes, que je découvre ici (merci, Sylvie, pour ce cadeau !), se révèle un grand écrivain, parvenant à mêler le particulier, l’intime et l’émotionnel à l’Histoire plus universelle. La résonance de l’expérience personnelle se traduit dans la construction de l’ouvrage : deux premières parties, plus légères, plus « aéronautiques », oserais-je dire, servent de prélude à la plongée au cœur de la noirceur de la vie. Aimer ne suffit jamais à vaincre la mort.
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Une fille, qui danse

Ah, ces anglais ! Après Ian McEwan avec Opération Sweet tooth, je retrouve avec plaisir un autre britannique, Julian Barnes. Leurs deux romans ne sont d’ailleurs pas exempts de points communs…

Dans Une fille, qui danse, il s’agit aussi d’une histoire d’amour ou du moins de l’histoire d’une relation, qui a eu lieu quarante ans auparavant. Souvenirs et regrets, dissimulations et mensonges… En cours de lecture, beaucoup de phrases font mouche, sur le travail de l’historien, sur la jeunesse et la maturité, sur l’intelligence… Pourtant, c’est à la fin que tout s’éclaire vraiment, quoique j’ai eu l’impression de ne pas en avoir compris la moitié. Je l’avoue, tout s’est éclairé lorsque je suis allée lire les notes de lecture de Valérie, qui a fait une page spéciale à ne parcourir que si on a lu le roman. Et tout ce qu’elle a noté donne envie de relire le roman illico, à la lumière des révélations finales ! Toute la subtilité et l’intelligence du texte surgit, alors que j’avais noté en le terminant que la fin n’expliquait pas vraiment tout les événements survenus quarante ans auparavant.

Avec tout ça, je ne vous ai pas raconté l’histoire… et je n’en ai pas envie ! Sachez qu’un homme d’une soixantaine d’années se retourne sur un épisode de sa jeunesse, en recevant une lettre qui lui remet en mémoire ses années au lycée, son groupe de camarades d’université, sa relation avec une jeune fille, la rencontre avec sa famille, la rupture, et plus tard son mariage et sa vie de père… Un drame a eu lieu, qu’il essaye de comprendre, quarante ans plus tard, tout en répétant qu’il n’est pas très sûr de la véracité de ses souvenirs… Ce qui aura son importance.

Bref, la littérature anglaise est toujours aussi brillante, qu’on se le dise !
Lien : http://lettresexpres.wordpre..
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Une fille, qui danse

Le Man Booker Prize est un prix littéraire anglais qui, contrairement à son homologue français le Goncourt, s'est rarement trompé pour décerner son prix. Ainsi en 2011, nous avons couronné un premier roman indigeste alors que nos voisins grands bretons ont accordé leurs faveurs à "The sense of an ending" de Julian Barnes , qui paraît aujourd'hui en France sous le titre "Une fille, qui danse", et qui est un roman vraiment emballant d'un auteur au sommet de son art.

A priori, si je vous raconte l'intrigue, vous aurez l'impression de vous retrouver dans un de ces romans au charme suranné dont les britanniques ont le secret, souvent écrits par des femmes (Anita Brookner, Barbara Pym, ...), mettant en scène des soixantenaires poussiéreux et ennuyeux, menant une vie sans charme et sans éclat.

Tony, le héros et narrateur de ce roman, est divorcé. Vivant seul, menant une existence tranquille et organisée, il verra sa quiétude bousculée par l'arrivée d'une lettre de notaire. La mère de sa première petite amie lui lègue une petite somme d'argent mais surtout le journal intime d'un de ses amis suicidé à 22 ans. Ce legs mystérieux va amener Tony à questionner le passé et revoir sérieusement l'histoire de sa vie, façonnée par une mémoire trop gentiment sélective.

Construit comme un polar ( pas noir, mais à l'anglaise évidemment), Julian Barnes attrape le lecteur par la main pour ne plus le lâcher. En grand romancier, il déroule son histoire, doucement et surement, nous conduisant de petits rebondissements en petites révélations vers un dénouement bouleversant lorsque la vérité finira par éclater. Nous entrons dans l'intimité de Tony qui se révélera moins attendu que prévu et surtout le vecteur d'une réflexion passionnante et stimulante sur la mémoire, la fabrication de l'Histoire (même sans h majuscule).

Un peu plus sur le blog.
Lien : http://sansconnivence.blogsp..
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La seule histoire

La seule histoire est le treizième livre de cet auteur britannique considéré comme le chef de file des auteurs anglais contemporains. C’est le premier livre de J. Barnes qui n’est pas dédié à son épouse Pat Kavanaugh, décédée en 2008.



Ce livre est un magnifique roman d’apprentissage, un roman post moderne centré sur l’amour avec une histoire tourmentée, un récit mélancolique à souhait, écrit avec une prose élégante et un ton intime qui va s’adresser par moments directement au lecteur : cela interpelle. L’humour fin de l’auteur est bien présent sur un sujet qui n’a rien d’humoristique.



Paul, âgé, se rememore l’amour de sa vie. Il a tellement de choses à dire sur le temps qui passe, sur l’amour et sur la fragilité de la mémoire. Et le livre démarre sur une question philosophique : préféreriez-vous aimer plus et souffrir plus, ou aimer moins et souffrir moins ?



Dans les années 63-64 dans une Angleterre bien pensante et dans une banlieue londonienne, Paul Casey, 19 ans, en première année de Fac, s’éprendra de sa partenaire de tennis en double, la sémillante et ironique Susan MacLeod de 48 ans (c’est l’époque de la vague scandaleuse de l’affaire Profumo qui avait tant défrayé la chronique début 1960). Ce couple va connaitre une grande complicité.



Cette histoire d’amour de Paul va de l’innocence jusqu’à l’expérience, depuis l’âge tendre jusqu’à la maturité et depuis l’engouement jusqu’à la lassitude. Ce sera leur seule histoire, une histoire qui va les marquer pour toute leur vie, une relation qui aura duré 12 années environ.



Pour vivre cet amour ils devront s’exiler à Londres où le jeune homme poursuivra des études de Droit et Susan commencera à se morfondre au domicile. Elle deviendra alcoolique et Paul ne pourra rien faire pour arrêter le désastre, tout en culpabilisant.



Mais la relation entre Susan et Paul va durer et si l’histoire en elle même n’est pas très intéressante, c’est l’analyse qu’en fait Julien Barnes qui l’est, car les sentiments du protagoniste son mis en évidence au scalpel: ses intentions, ses croyances, ses névroses. Les moments exquis du roman tiennent à l’acuité psychologique de l’auteur, notamment à ses souvenirs. Paul se demande s’il reste parce qu’il aime Susan car pour lui l’amour c’est tout, ou s’il reste parce qu’il se sent coupable. Il devient conscient qu’ils glissent vers un sexe triste, le pire sexe possible.



Le livre est divisé en 3 parties, chacune avec une voix différente : on démarre fort à la première personne avec Paul de 19 ans; dans la deuxième partie Paul est trentenaire et constate la décadence de cet amour avec Susan qui sombre dans l’alcoolisme et la dépression, puis dans la troisième partie, Barnes utilise la troisième personne du singulier pour raconter la fin de l’histoire, lorsque la souffrance morale est au paroxysme. Les 3 voix narratives correspondent aux trois paliers de la relation de Susan et Paul : la naissance de leur amour, la disparition de celui-ci et les conséquences sur le temps. Le tout sonne si triste, déchirant et véridique : l’amour englué dans son propre cadre, se vidant chaque jour de ses couleurs et de sa signification.



Julien Barnes a déjà utilisé cette structure en trois parties dans ses romans. Ici il nous livre un roman puissant, le requiem d’un amour impossible. Et c’est un sujet barnesien récurrent: le territoire familial, les banlieues, un protagoniste âgé ressassant une vie mal remplie.



Il nous a livré un sujet difficile (voué de toute façon à l’échec en raison du facteur temps) traité de façon magistrale.



Ah, l’Amour. L’Amour est un mystère dont la clé appartient à chacun, hein ?
Lien : https://pasiondelalectura.wo..
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Elizabeth Finch

Julian Barnes dresse ici des tentatives de portrait. Un homme, ici le narrateur, parle d’Elizabeth Finch, femme qui lui a appris beaucoup de choses, l’a sensibilisé à de nombreux domaines. Ce livre, en trois parties, montre les chemins de traverse d’un homme pour atteindre une femme, plus généralement d’un être pour atteindre un autre. La première partie est un historique de la relation situant Elizabeth dans la vie, parfois remuante, du narrateur. Dans la deuxième partie, Neil s’intéresse à une figure marquante dans la réflexion de cette femme, Julien L’Apostat. C’est la partie la plus prenante de ce roman, la plus fluide, la plus évidente. J’ai plongé dans la vie de cet empereur du IVe siècle après Jésus Christ qui s’opposa au christianisme en tant que défenseur du paganisme. Dans la troisième et dernière partie, on voit Neil dans le présent, explorant les carnets laissés par cette femme. Trois temps, trois axes pour comprendre, cerner un être humain. L’auteur pose cette question centrale tant pour la littérature que pour a vie quotidienne. Comment transmettre l’amour, la fascination, la tendresse, le mystère ressentis pour une personne à un tiers qui ne l’aurait jamais vu ? Comment croquer une personnalité ?



Julian Barnes, avec une écriture minutieuse, n’estompe jamais le mystère, les non dits qui entourent Elizabeth Finch. On perçoit ce qu’elle dégage, ce qu’elle provoque comme interrogation. Cela passe par sa présence, la puissance de son esprit et son côté iconoclaste. Elle n’en ressort pas idolâtrée ou mise sur une piédestal. Mais on termine le livre en enviant cette rencontre et les effets provoqués. La première et troisième parties montrent les tâtonnements du narrateur, ses hésitations, ses maladresses. Le rythme n’est pas porté par un élan mais un amour sincère, là où la deuxième partie, tenue par une envie d’écrire et par une liberté de création, amène une vigueur dans l’écriture. Ce décalage s’explique. Les parties se répondent. C’est un jeu d’écho, de miroirs permettant de montrer les multiples facettes d’une personnalité.
Lien : https://tourneurdepages.word..
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Outre-Manche

Le très francophile auteur anglais Julian Barnes (Le fracas du temps, L'homme en rouge, déjà chroniqués) est aussi un fin nouvelliste. Outre-Manche (Cross Channel), publié il ya plus de vingt ans est une délicieuse somme de dix nouvelles consacrées à la présence, au sens très large des Anglais en France. Et Barnes réalise un exploit, rester typically British dans l'âme sans jamais se gausser de ses compatriotes ni des hôtes français. J'ai vraiment apprécié huit de ces textes. Quelques images de cette Entente Cordiale.



Ermitage raconte l'installation de deux dames anglaises d'un certain âge dans le Bordelais. Devenues propriétaires d'un domaine elles s'avèrent plus douées que bien des viticulteurs autochtones. Une chronique pleine de charme entre l'heure du thé et le bal des vendangeurs. A jamais bouleverse, surtout dans ma Picardie riche en cimetières de toutes nationalités, notamment britanniques. Une femme, dans les années cinquante visite les sites de 14-18, son frère Sammy y est mort en 1917. C'est très émouvant. Elle haïssait la guerre d'Hitler, lui reprochant d'avoir affaibli le souvenir de la Gande Guerre, d'avoir assigné à celle-ci un numéro, la réduisant à n'être que la première de deux conflagrations mondiales.



Gnossienne nous entraîne à Marrant-sur-Cère (?), où, une fois la localité trouvée, ce qui n'est pas rien, semble se tenir un colloque littéraire très particulier, où flottent les fantômes de Queneau et Perec, tendances pataphysiques et oulipiennes. C'est drôlissime, Monty Python pas si loin. Rien d'étonnant avec ce titre à la Eric Satie. Dans Melon gastronomie française et cricket au programme. Incompatible? A voir.



Ces aventures d'Anglais sur le continent se révèlent spirituelles, parfois nostalgiques, parfois dramatiques (la nouvelle Dragons sur les persécutions des Camisards). Au delà de la finesse d'analyse de Julian Barnes, dont on connait le talent, je suis sidéré que les plus francophiles des écrivains viennent souvent d'Outre-Manche. Mais Honni soit qui mal y pense. Il est vrai qu'on leur doit quasiment la Côte d'Azur et le Médoc.



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La seule histoire

CHACUN N’A QU’UNE HISTOIRE D’AMOUR.

« Préféreriez-vous aimer davantage, et souffrir davantage ; ou aimer moins, et souffrir moins ? »

Cette réflexion romancée sur l’Amour, racontée avec un recul de 50 ans, est scindée en trois parties : l’ initiation, la passion, le déclin. Chacune est présentée avec un effet de style différent ; JE, tombe amoureux ; VOUS, conversation avec le lecteur pour décrire le bonheur à deux ; IL, où l’ auteur se décrit lui même pour en narrer le dépérissement. L’Angleterre d’ après guerre : Gin + tennis + libération des moeurs. Un amour-initiation-passion éprouvé par un étudiant de 18 ans pour une femme de 30 ans son aînée, négligée par un mari alcoolique. La première rencontre est banale : je complète une équipe de tennis en double mixte, je te raccompagne, nous échangeons... Le contraste entre cet homme jeune mais audacieux et cette femme mûre mais timide est servi par une écriture très british dont l’ humour pince-sans-rire repose sur l’association du grave et du léger. Plus dure sera la chute, avec la découverte d’un alcoolisme caché puis avoué. Chute qui questionne : a-t-elle été heureuse avec moi ? A-t-elle eu seulement un orgasme ? Suis-je responsable de son alcoolisme ?

La fin de l’ ouvrage m’ a cependant dérouté : toutes ces réflexions décousues (mais pertinentes) sur l’ amour ressemblent à une compilation de textes glanés sur Google. Quoiqu’ il en soit, il s’ agit d’un très beau roman qui illustre l’histoire du temps et son effet sur l’amour. À méditer !
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L'homme en rouge

"L’homme en rouge" n’est pas une œuvre de fiction ou un essai sur l’histoire de l’art, mais la biographie atypique d’un trio. On pourrait imaginer le récit se focaliser sur Samuel Pozzi, l’homme en rouge dont Sargent a peint le portrait, et sur ses deux amis aristocrates, le prince de Polignac et le comte de Montesquiou. Mais en fait, le texte va beaucoup, beaucoup plus loin. Julian Barnes nous présente en fait la période de « la Belle Époque » évoquant ainsi un âge de duels et de dandysme, relatant la montée de la modernité avec sa foi dans la science et illustrant le rôle du nationalisme ou du sexisme. Mais plus que tout, ce livre est une célébration des liens étroits et des échanges fructueux entre l’Angleterre et le continent, entre Paris et Londres. Samuel Pozzi, le roturier et ses deux amis, le prince Edmond de Polignac et le comte Robert de Montesquiou-Fezensac jouent un rôle essentiel dans la structuration du texte avec comme point de départ un séjour effectué ensemble à Londres en 1885 pour faire du « shopping intellectuel et décoratif ». Néanmoins, ce n’est pas l’objet principal de la narration, seulement une rampe de lancement : à partir des récits sur la vie de ces trois hommes, Barnes se lance dans un voyage à travers la société, l’histoire, les arts et la culture de la Belle Époque. Le récit tentaculaire parle magistralement de tous ceux qui importaient alors dans l’ensemble des disciplines et des connexions qu’ils avaient entre eux. On navigue ainsi de Sarah Bernhardt à Oscar Wilde, de Gustave Flaubert à Hysmans ou Marcel Proust, de John Singer Sargent à Degas ou Rodin. On entend parler de l’affaire Dreyfus, on se délecte des ragots des frères Goncourt ou de Jean Lorrain qui se surnommait lui-même « l’Ambassadeur de Sodome », on apprend enfin quelles innovations médicales vitales ont été développées par Pozzi lui-même ou ses confrères. À côté de ce voyage érudit, mais ni glacial ni prétentieux, Julian Barnes nous gratifie d’insertions personnelles. L’écrivain s’interroge sur la nature du récit historique, il réfléchit aux interprétations de sa recherche et émet des hypothèses éclairées sur des évènements demeurés mystérieux (la tortue dorée de Montesquiou, la disparition de la jambe amputée de Sarah Bernhardt ou la balle qui a tué Pouchkine). Et puis enfin, il y a le Brexit qui sans être mentionné dans le récit (seulement dans la postface) apparait en contrepoint. Julian Barnes célèbre dans son livre des personnages qui méprisent le chauvinisme national, vante leur ouverture d’esprit, leur curiosité ou leur enthousiasme. Il montre comment l’Angleterre et le continent se sont toujours enrichis de leurs échanges. "L’homme en rouge" est un portrait coloré, divertissant et très intelligent sur la Belle Époque, une célébration des liens féconds entre le continent et l’Angleterre et un message pour nos sociétés actuelles tentées par le repli sur soi. J’en recommande la lecture.
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L'homme en rouge

"Un artiste peint une ressemblance, ou une version, ou une interprétation, qui célèbre un sujet vivant, évoque son souvenir après sa mort, et peut éveiller la curiosité de ceux qui le voient des siècles après. Cela paraît simple, et l'est parfois. Je me suis intéressé au docteur Pozzi en découvrant son portrait par John Sargent, je suis devenu curieux de sa vie et de son œuvre, j'ai écrit ce livre, et je vois toujours dans cette image une réelle et vive ressemblance."



Voilà comment Julian Barnes, francophile et je pense francophone s'est lancé dans une biographie à son idée du docteur Pozzi. Comme vous sans doute, j'ignorais son nom, alors que, comme le dit Barnes avec malice, il était partout, entre les deux guerres 70-71 et 14-18, fréquentant le beau monde, le soignant souvent. Sa spécialité, la gynécologie, qu'il a contribué à faire évoluer (et il y avait du boulot!).



Barnes en profite, avec souvent un humour british, pour parler de la Belle Epoque (pas belle pour tout le monde, mais bref), en particulier de Polignac et Montesquiou. Ce dernier paraît-il reconnaissable dans des romans, Huysmans et Proust particulièrement, A rebours étant étonnamment inspiré par lui, et évoqué lors du procès de Wilde. Pozzi fut le médecin, l'amant et l'ami fidèle de Sarah Bernhard. On croise donc bien des auteurs, des journalistes, du grand monde, dans cette biographie érudite sans excès, aux fils conducteurs assez lâches, et passionnante de bout en bout.



Sa vie familiale ne fut pas une réussite, mais sa vie professionnelle, si. Il fut amené à soigner des victimes de duels ou de tirs au pistolet, l'époque semblant en France vraiment favorable à ces activités déplorables et criminelles (et pour des raisons futiles, souvent).



J'ajouterai que des reproductions de tableaux et de vignettes ' Félix Potin' illustrent ce livre soigné.
Lien : https://enlisantenvoyageant...
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