Bienfaits et méfaits de la
psychanalyseBernard PIVOT présente son émission consacrée à la
psychanalyse et reçoit quelques auteurs dont trois psychanalystes.
Aïda VASQUEZ pour "SOS psychanalyste"
Julien BIGRAS raconte "l'Enfant dans le grenier" Robert CASTEL pour "le psychanalysme"
Dominique FRISCHER explique comment a été élaboré son livre "
Les Analysés parlent"
Didier ANZIEU l'un des auteurs de l'ouvrage collectif ...
Aussi lui racontai-je que Marie avait du sang indien et qu'elle connaissait le langage des animaux. Mais de tout cela elle avait une indicible honte. C'était même là sa folie.
« Quoi ? m'interrompit aussitôt Aubert. Tu me dis qu'elle est folle ?
– Oui, elle est folle, mais c'est une folie bien spéciale. Une folie qui ne ressemble à aucune autre. »
À quel moment me suis-je vraiment rendu compte que c'était précisément ce même « langage-cocon » qui nous unissait ? Était-ce une certaine qualité du silence mêlé aux bruissements des feuilles d'un arbre situé juste devant la fenêtre de mon bureau qui faisait que Marie et moi avions le sentiment de vivre dans un nid ?
Le rythme des sons et des silences, la musique des mots avaient beaucoup plus d'importance que les confidences elles-mêmes, si terrifiantes fussent-elles. Avec Marie, je perdais le sens de la durée et de l'espace. Elle me transportait, sans avertissement, dans son univers. Elle recréait avec une aisance désarmante, dans la pièce où nous, nous trouvions, l'atmosphère trouble et fantastique de la vie animale. Tout devenait textures, couleurs, odeurs. Moi-même je me retrouvais au milieu de ce monde ; mon corps et ma vie vibraient au même diapason.
Je me demandais pourquoi mon père, si débordant de vie et d'assurance le jour, éprouvait de si grandes frayeurs la nuit.
Rien de plus facile que de falsifier un registre d’état civil. Au XVIIe siècle, il y avait de trente à quarante mille esclaves et renégats chrétiens en Barbarie (Alger, Tunis). Monsieur Vincent (*note de l’éditeur : c’est en 1646 que saint Vincent de Paul créa la mission d’Alger) y fonde une mission en 1642 pendant que les Jésuites, au mépris de l’Édit de Nantes, font du Canada une colonie strictement catholique. Or que faire des renégats, des galériens turcs convertis pour les empêcher de retourner en Barbarie : on les envoie au Canada par La Rochelle, métropole douteuse.
Les ancêtres arabes des coureurs de bois ont préféré la langue indienne à la foi catholique. La langue et la vie indiennes ont remplacé la langue et la vie catholique française. Par le « truchement » de la langue indienne, ces gens auraient enfin trouvé un sens à leur vie… Mais, surtout, ils seraient devenus les vrais conteurs, les vrais « scribes » d’une nouvelle langue autrement plus riche, plus féconde et plus efficace que la langue française…
Entre elle et moi les mots comptaient de moins en moins. Lentement un nouveau langage s'était établi, celui des silences, des mimiques, des gestes, mais aussi celui des frissons et des sanglots, ou encore celui des fuites du regard et de la pensée. Plus que les mots comptait le fait d'être ensemble. L'air, chargé de la puissance de nos émois, circulait de l'un à l'autre et prenait chaque fois une densité nouvelle.
Cela expliquerait que les Canadiens, à l’encontre des Américains qui restent cantonnés dans leurs villages, aient fui le bagne catholique parmi les nations amérindiennes (avec leur tuque de galériens), fondant l’immense Amérique française, une hégémonie acceptée par l’Amérique amérindienne, après la grande paix signée à Montréal en 1702
Avec Jonathan, je m'aperçois par hasard que son délire, loin d'être fou, constitue la plus grande découverte de sa vie.
Les renégats, les Turcot, les Daoust, les Gamache, qu’on expédiait en Nouvelle-France pour les empêcher de devenir relaps, y introduisirent vraisemblablement le narcotique qui, mêlé au tabac, dérégla le discours amérindien et donna grande place aux truchements dans leurs palabres.