Marion Dumas Cheilletz et Julien Leblay ont parcouru 22.000 kilomètres à vélo entre la France et la Nouvelle-Zélande pour promouvoir le don du sang. Bande annonce du film de Marion Dumas Cheilletz et Julien Leblay.
Un proverbe persan dit que " le caractère de l'homme apparaît en voyage ".
L'adage africain selon lequel les Occidentaux possèdent la montre et les Africains le temps peut s'appliquer sans aucun doute à l'amateur du voyage à vélo.
Qu'offre le voyageur à ses hôtes en échange de leur invitation? Rien de matériel, seulement du rêve, de l'évasion, la simplicité d'un coeur ouvert, la franchise d'un homme qui ne sait mentir ni à lui ni aux autres. Après treize ans de voyage, la famille Hervé est sur le retour. A Abidjan, un Ivoirien demande à Claude ce qu'il vend sur son vélo si lourdement chargé. "Du rêve", répond-il. "Colporteur de rêve", quel beau métier ! Le vélo transporte du merveilleux, de la passion et de la gaieté.
Comme le vélo demande débrouillardise, effort physique et astuce, il représente un outil multifonctions appréciable. Outre le fait qu'il est un excellent moyen de transport, de découverte et de rencontre, il peut également être un outil de rééducation. Nombreux sont ceux qui montent sur un vélo après s'être découvert des problèmes d'asthme ou à la suite d'un accident vasculaire grave. Certains l'utilisent comme une thérapie. p.74
Après un voyage, le cyclo nomade est parfois emporté par la nostalgie... Alors l'envie de repartir le reprend, et il plonge ses yeux sur la carte qui domine son bureau... Le vélo attend sereinement. Du jour où il l'a remisé dans le garage ou la cage d'escalier, le voyageur sait que l'heure viendra où il repartira. Il ne s'est pas trompé. Conscient que la bicyclette façonne son être ou son couple, le cyclo nomade repart très vite sur les routes avec l'espoir d'y trouver le bonheur escompté. Ainsi en va-t-il du tao du vélo : il promet la sagesse aussi bien aux amoureux en errance qu'au randonneur solitaire. p.88 et 89
À l'heure des gadgets inutiles et clinquants, il est plaisant de penser qu'une chaîne et un simple pédalier permettent de parcourir une distance potentiellement illimitée, à la seule force des jambes.
Le bonheur de la découverte cyclopédique n'est pas réservé aux globe-trotters mais bien à quiconque enfourche un beau matin un vélo lesté de quelques sacoches.
Le voyage à vélo n'est pas une succession de sites touristiques exhibés comme des trophées. La satisfaction qu'il procure est ailleurs. Un bivouac près d'une rivière, un coucher de soleil dans une vallée, un bras levé dépassant d'un camion : voilà les humbles joies dans lesquelles le cyclonomade trouve son contentement. Les haut lieux culturels en deviennent secondaires ; la route est à elle seule une attraction, nourrissant de mille détails atypiques la curiosité de celui qui y prête attention. La bicyclette permet l'exploration du monde à vitesse humaine, ni trop lente pour qu'on se lasse, ni trop rapide pour qu'on soit frustré. Elle offre le compromis idéal entre progression et découverte.
Albert Einstein percevait une similitude entre la vie et la bicyclette : "Il faut avancer pour ne pas perdre l'équilibre." Cet objectif essentiel de progresser coûte que coûte fait partie intégrante de la vie du cyclo voyageur. "Je pédale donc je suis", dit aussi Marc Augé dans Éloge de la bicyclette. Avancer pour poursuivre sa quête de découverte ; avancer pour vivre, tout simplement. Bien plus que les mollets, c'est la tête qui fait pédaler. De même que la liberté fait avancer, c'est parce qu'on avance qu'on est libre. p.66
Le vélo a le don de briser la frilosité des badauds et d'attirer leur sympathie. Il suffit d'échanger un regard, une parole ou un sourire pour que le voyageur, enseveli sous la foule des curieux doive répondre à des rires cadencés de tapes sur l'épaule. Ainsi, la solitude qui apparaît pour beaucoup un élément pesant du voyage est paradoxalement le meilleur vecteur de rencontre. p. 27 et 28