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Critiques de Karin Boye (48)
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Kallocaïne

Parmi les textes matriciels des dystopies, tout le monde connait les essentiels « nous autres » de Zamiatine (1920), « le meilleur des mondes » d’Huxley (1932), 1984 d’Orwell (1948) et « Fahrenheit 451 » de Bradbury (1953). En revanche, « Kallocaïne » de la suédoise Karin Boye, paru en 1940, est bien moins connu. C’est pourtant une très bonne dystopie, pertinente et intéressante.



« Kallocaïne » présente bien des aspects classiques de la dystopie, on y retrouve les archétypes du genre : état totalitaire, embrigadement, surveillance généralisée. De ce point de vue, le roman est bien foutu mais n’a rien de particulièrement remarquable, certaines dystopies vont plus loin dans la précision de la peinture du système totalitaire où elles placent leur récit. Là où le roman de Boye a vraiment un ton singulier c’est dans son versant psychologique. En effet, là où les autres dystopies classiques ne faisaient que survoler cet aspect, « Kallocaïne » pousse très loin l’introspection, on ne suit pas les pas du personnage, on est littéralement dans sa tête. Du coup, le roman fait la part belle au côté intime. La relation entre Kall, le héros, et sa femme n’est pas simplement un aspect annexe, accessoire du récit, il en est parfois le moteur. Les problèmes de couple de Kall expliquent bon nombre de ces réactions et ont finalement des conséquences d’ordre général. C’est assez inattendu et original comme regard. La plupart du temps, lorsque les dystopies s’intéressent à l’aspect intime des personnages, c’est pour illustrer le fait que le système politique va gangréner jusqu’à la sphère personnelle des gens, introduisant méfiance et dénonciations au cœur du foyer. Cet aspect est présent dans « Kallocaïne » mais en ce qui concerne son héros, Boye va plus loin, les affres personnelles de Kall influent sur la politique qui elle-même va ensuite renforcer sa suspicion, une sorte de cercle vicieux en somme.

J’ai trouvé très originale également, la façon dont est évoquée une forme de dissidence très particulière, instinctive, quasi inconsciente. J’ai trouvé vraiment saisissant ce passage où Boye décrit la soirée où des gens se sont retrouvés pour pratiquer un rituel étrange : un des protagonistes s’allonge et prétend dormir tandis qu’un autre se saisit d’un couteau et… ne fait rien. Un rituel qui est basé sur la confiance, sentiment qui n’existe plus dans cette société. Ce cérémoniel vient aussi rappeler dans cette société aseptisée et scientifiquement organisée combien l’Homme a besoin de magie (spiritualité, religion, croyance… appelez ça comme vous voulez) et que ce besoin se matérialise de façon instinctive, naturelle, sans véritable préméditation, sans volonté subversive. La subversion ne prend pas ici la forme de revendications, de propos argumentés, la dissidence se situe dans quelque chose d’en apparence plus anodin. Plusieurs fois dans le roman est évoquée une communauté vivant en dehors de la ville à la manière des anciens, cette communauté qu’on ne visitera jamais a des allures de légende et cette évocation révèle là aussi le besoin de mythes fondateurs. J’ai vraiment trouvé cet aspect du roman très intéressant.



« Kallocaïne » est un roman puissant et très efficace qui mériterait le même statut d’œuvre fondatrice que les romans d’Huxley, Orwell, Zamiatine et Bradbury.

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Kallocaïne

Merci à Foxfire de m'avoir fait sortir ce livre de ma pàl (il y traînait depuis 5 ans) en le choisissant comme bon plan au challenge multi-auteures SFFF. Je l'ai lu pour ainsi dire d'une traite.



Karin Boye (1900-1941) était une auteure suédoise et a publié Kallocaïne en 1940 (en suédois il y a un sous-titre : roman des années 2000). Suite à des séjours à Berlin et en Union Soviétique dans les années 30, elle a été témoin de la montée du nazisme et du communisme. Cela lui a inspiré cette dystopie qui aurait inspiré à son tour un certain George Orwell…



Boye nous décrit une société où toute forme d'individualité a été supprimée. Vos faits et gestes sont surveillés ainsi que vos propos. Votre seul refuge est votre pensée… enfin plus pour très longtemps. Un certain Leo Kall a mis au point un sérum de vérité, la kallocaïne, qui permettra à l'État de vérifier si vos pensées sont loyales et sincères.



«La collectivité pourrait ainsi investir l'ultime recoin des tendances asociales pouvaient se tapir. De mon point de vue, cela signifie simplement l'avènement de la communauté intégrale. » (Leo Kall)



Ce roman est bluffant car même si nous n'en sommes pas là, je trouve l'idée assez actuelle. Disons les choses comme elles sont : on ne peut plus vraiment dire ce que l'on pense. La liberté d'expression est muselée par le « politiquement correct » et les réseaux sociaux.



J'ai beaucoup aimé son écriture (très fluide, le texte n'a pas pris une ride malgré ses 80 ans) et l'évolution du personnage de Leo Kall est passionnante.



« Peu connu en France, ce roman est considéré dans les pays anglosaxons et nordiques comme l'une des quatre grandes dystopies, avec celle d'Orwell, Zamiatine et Huxley. » (Ruaud & Colson)



J'ai lu les quatre romans, la boucle est bouclée !







Challenge SFFF 2022

Challenge XXe siècle 2022

Challenge mauvais genres 2022

Challenge multi-défis 2022 (29)

Challenge duo+ d'auteurs SFFF 2022

Challenge multi-auteures SFFF 2022

Challenge plumes féminines 2022 (29)

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Kallocaïne

Kallocaïne est roman de SF suédois de 1940. On y découvre une dystopie où un régime totalitaire contrôle et organise toute la vie en société. Des villes entières sont construites autour de métiers. Il y a donc la ville des chimistes, la ville des linguistes, etc.



Les gens sont encouragés à dénoncer leurs amis, familles, parents, collègues, si ces derniers parlent contre le régime.



Voilà qu'un scientifique, notre protagoniste, invente un sérum de vérité extrêmement efficace. Non seulement on ne peut pas mentir si l'on en prend que l'on nous interroge, mais on ne peut même plus se mentir à soi-même. La kallocaïne est donc aussi une porte vers l'inconscience.



On a donc les questions classiques : doit-il faire connaître son invention? Doit-elle être utilisée pour chasser la dissidence et... existe-t-il réellement des gens qui ne soient pas dissidents au fond d'eux?



Mais plus original encore, on y explore les questions interpersonnelles. Un couple où la femme refuse de dénoncer son mari réalisera l'amour qu'il se porte. Mais, publiquement, devra agir comme s'il était en froid parce que la bonne chose à faire aurait été de dénoncer.



Pour finir : le marketing du livre se base beaucoup sur le fait qu'il a inspiré 1984. C'est une comparaison que les éditeurs font souvent trop rapidement mais, ici, c'est justifié. Une bonne partie de la trame narrative est quasi identique, et on y retrouve même ces espèces de télé/microphones que les gens ont dans leur salon par quoi l'État les écoute.
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Kallocaïne

Karin Boye, romancière et poétesse, nous propose dans sa dernière œuvre ( elle s'est suicidée quelques mois après sa publication en 1940), Kallocaïne roman du XXI ème siècle, un roman dystopique, situé chronologiquement entre Le meilleur des mondes (Huxley 1932) et 1984 (Orwell, 1949).



Dès les premières pages, le projet (et son contenu) nous est délivré par le narrateur :

Leo Kall, professeur de chimie, nous annonce qu'il entreprend l'écriture d'un récit, celui de sa vie, depuis qu'il n'est plus un homme libre et qu'il évolue dans une société sécuritaire et déshumanisée d' un état totalitaire.



Les citoyens ne sont plus que des prisonniers, des camarades-soldats qui constituent un réservoir de main d'oeuvre corvéable à merci.

Leur vie professionnelle, domestique et privée est sous le contrôle total des différents organismes d’État (présence d'une assistante domestique en famille, obligation d'un Service Militaire quasi-journalier, enrôlement des enfants avec les camps de jeunesse …).

Chaque camarade-soldat est sous surveillance : la délation d'autrui ou de son voisin voire de son époux ou épouse est considéré comme un acte civique !



L’État Mondial considère les êtres vivants non comme des êtres humains mais comme des cellules d'un organisme (l’État étant cet organisme) et tout est fait pour que ces cellules restent saines !



Dans cet univers, notre professeur met au point un produit « révolutionnaire », une drogue (sérum de vérité) : la Kallocaïne. Celle-ci une fois injectée permet de libérer les pensées personnelles pour connaître ainsi toute la vérité : essentiel quand un Etat organise la traque aux traîtres de l'esprit !



Fort de sa trouvaille, Léo Kall arrive à contacter, en respectant scrupuleusement la hiérarchie, l'instance de Police compétente et à faire adopter sa découverte tant et si bien que bientôt une loi contre les crimes de l'esprit est adoptée et appliquée.



Les tourments de notre narrateur commencent alors (après avoir testé légalement la Kallocaïne sur des camarades-soldats affectés au Service des Sacrifices Volontaires et illégalement sur son épouse)  et, les doutes grandissent : une communauté différente existerait et le signe de reconnaissance serait le silence…



J'ai été particulièrement sensible aux réflexions de Linda, l'épouse du professeur Kall.

Elle développe la progression de ses idées face à la notion de maternité, de l'amour filial (bien sûr intolérable et interdite dans l'Etat mondial) et fait part à son mari de son cheminement intellectuel, car c'est avec sa troisième grossesse qu'elle en sera pleinement consciente.



A sa première grossesse, en tant que « citoyenne loyale », elle considère avoir fait son travail en donnant la vie à un garçon, un futur camarade- soldat (bien sûr officiellement les femmes sont les égales des hommes mais tant qu'elles sont indispensables à la reproduction…).



«  A la naissance d'Ossu, j'étais encore une mère entièrement dévouée à l’État, qui n'enfantait que pour lui. A celle de Maryl, j'étais devenue une femelle sauvage, avide et égoïste, qui portait son bébé pour elle-même avec la certitude d'avoir un droit légitime sur lui. »

« J'attendais mon troisième enfant, mais j'avais la sensation de n'avoir saisi jusque là ce que cela signifie de donner la vie. Je ne me percevais plus comme une machine reproductrice trop coûteuse, ni comme une propriétaire avide, alors qu'étais-je ? Je n'en sais rien »





Cette œuvre de Karin Boye écrit dans un contexte international tendu et grave (nazisme, totalitarisme soviétique) reste aujourd'hui toujours aussi percutante et transposable : elle nous amène à réfléchir sur le sens et l'éthique de nos sociétés modernes.



Je ne suis pas une adepte des dystopies, c'est un genre vers lequel je me tourne exceptionnellement, mais j'ai trouvé celle-ci très intéressante, et j'avoue qu'elle est très efficace.



Un roman qui donne donne envie d' hurler face à la bête, effrayant !



A noter que cette réédition d’Hélios bénéficie d’une nouvelle traduction réalisée par Léo Dhayer .



A découvrir de toute urgence (vu l'état... d'urgence)!
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Pour l'amour de l'arbre

La poésie de Karin Boye est hantée par "l’amour de l’arbre", elle s’élance dans un embrassement de l’arbre. Car pour cette jeune femme déchirée l’arbre est un axe, une force qui la tient droite et lui permet de relier la terre et le ciel : c’est l’arbre monde, Yggdrasil dont les racines peuvent atteindre les enfers et les branches la lumière sacrée. L’arbre voie de passage d’un monde à l’autre. 
Karin Boye, femme trop tendre, blessée dans sa sensibilité, attentive à tout ce qui vit, palpite, nous transmet dans ses poèmes la magie et la force de l’arbre qu’elle-même recherchait et qu’elle a peut-être cru possible de rejoindre dans la mort : par une nuit froide d’avril, elle a été trouvée sur un gros rocher dans une forêt où elle s’est endormie, à 41 ans après avoir pris une dose trop importante de somnifères.

«...je fends une mer dorée de miel que désire mes mains affamées» (Mûr comme un fruit)

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Kallocaïne

« S'habituer très tôt à se sacrifier pour de nobles causes, n'est-ce pas ce qui forge le mieux le caractère du camarade-soldat ? »



Effrayant, glaçant, éclairant, un roman qui me touche énormément. Il décrit un monde où l'individu n'est qu'une cellule d'un État-Monde. Chacune des cellules est faite pour assurer le bien suprême, le bien collectif. L'état de la cellule ? Peu importe. Elle 'doit faire', elle doit se sacrifier, elle ne doit pas penser autrement que dans l'intérêt général. Rien de personnel dans tout ceci.



Sauf que si, c'est très personnel tout ça. L'individu, l'être n'existe plus par lui-même. Mais à lire ce roman j'ai pris conscience que cet État-Monde était dans ma tête. A l'intérieur de mon crâne se tient cet État-Monde, cet État-Univers et je l'ai laissé grandir. Pour faire plaisir, pour espérer apporter un petit plus au bien commun, ma petite goutte d'eau, mais aussi pour obtenir une once de reconnaissance, le tout à mon corps défendant, à mon corps souffrant. Mais j'y allais, la fleur au fusil, parce que c'était bien.

Mais qu'est-ce que le bien quand il vous fait mal ? Alors j'ai compris que ce livre m'expliquait mon État-Univers. Il était en moi. Ma dictature. Cet auteur a su me parler, beaucoup plus que d'autres.



« L'organisation ? Répéta-t-elle. Nous ne cherchons pas à nous organiser. Ce qui est organique n'a nul besoin d'organisation. Vous bâtissez de l'extérieur, nous le faisons de l'intérieur. Vous vous utilisez comme des pierres de construction et vous vous effondrez, dehors comme dedans. Nous croissons de l'intérieur, comme les arbres, et entre nous s'établissent des ponts qui ne doivent rien aux matières mortes ni aux forces mortifères. De nous jaillit la vie. En vous n'entre que ce qui est mort. »



Je suis étonnée que ce roman ne soit pas plus lu car c'est une œuvre qui touche à la psychologie sous un angle atypique, une manière d'aborder l'individu dans un univers qui le nie. Mais ce livre entre dans votre tête. Il est entré en moi à la vitesse éclair, aspiré comme on peut l'être lorsqu'un bateau coule et engouffre les survivants dans le tumulte des flots. J'ai été tous les personnages, la maternité vous change, le travail vous pousse à ne plus être vous parfois et il arrive qu'un faisceau de lumière vous rapproche de Rissen. De son intérieur, qui est vôtre ...quand on y pense. Je lui laisse les mots de la fin de ce petit billet.



« Ce doit être la kallocaïne, je suppose, qui me remplit d'un espoir insensé – tout me semble clair, paisible, aisé... Je suis toujours en vie – en dépit de tout ce qui m'a été dérobé -, et maintenant je sais que ce que je suis subsistera quelque part. J'ai vu les puissances de mort se répandre sur le monde en cercles toujours plus larges – mais les puissances de vie n'ont-elles pas aussi leurs cercles, même si je n'ai pu les discerner ? Oui... bien sûr... c'est sous l'effet de la kallocaïne que je m'exprime. Mais pourquoi mes paroles en seraient-elles moins vraies ? »
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Kallocaïne

Dans un futur dystopique, Leo Kall est biologiste dans la ville Chimie-4 et entretient des relations distantes avec son épouse Linda et ses enfants. Il sert l’État, comme tout le monde autour de lui, et il se méfie de son chef Rissen qu’il soupçonne d’avoir une aventure avec Linda. Leo vit — et trouve normal de vivre — dans une société où le contrôle social est omniprésent, chacun surveillant son voisin ou son conjoint. Même les chambres sont espionnées, pour le bien d’un État en lutte contre un autre État. Dans une ville qu’on ne quitte jamais et sans aucun contact avec l’extérieur, on doit des jours de service à la police, on envoie ses enfants dans des camps où ils sont conditionnés et détachés de leurs familles, et les jeunes gens peuvent être arrachés à leurs proches pour être envoyés vivre ailleurs selon les besoins en main-d’œuvre. Cette société se voit comme l’étape ultime de la civilisation, chaque individu ne se justifiant qu’à travers le service de l’État.



Leo vient d’inventer une drogue extraordinaire, qu’il baptise la Kallocaine, en référence à son propre nom. Sous ses effets, les prisonniers confessent leurs pensées les plus secrètes, et les tests montrent que même les idées qu’ils n’osaient s’avouer à eux-mêmes font surface.



Leo est fier, très fier. Il a découvert le moyen infaillible de débusquer les ennemis de l’État. Bientôt, il va militer pour le vote d’une loi contre les crimes de la pensée, maintenant que son invention permet de les dévoiler. Pourtant, au contact de son chef Rissen qu’il méprise, et de sa femme Linda qui lui échappe à son grand regret, quelque chose s’éveille en lui. Une chose qui l’effraie, lui, le brave petit soldat de l’État : les sentiments pour autrui. Ce serait une catastrophe dans un univers réprimant les sentiments et les émotions comme asociaux.



Ce roman court mais dense — et assez littéraire dans sa plume — a été publié en 1940 par une auteure suédoise qui se suicidera l’année suivante : avant même d’ouvrir le livre, on sait que le ton sera grave et la fin sera sombre. Son testament est marqué par son époque : les pays totalitaires, le contrôle étatique sur les citoyens et la certitude d’agir pour le bien collectif au détriment de l’individuel.



Kallocaïne fait immanquablement penser à 1984, plus tardif, et qu’il a sans doute inspiré sans en posséder la richesse thématique ni la profondeur de la description de la société. Il n’en reste pas moins une vision glaçante d’un régime totalitaire diablement efficace car tous les citoyens sont endoctrinés dès le plus jeune âge, toute déviance est a priori impossible grâce au contrôle de chacun sur chacun. Les sentiments sont perçus comme asociaux, et rares sont ceux qui comprennent être prisonniers d’un système qui les prive de relations humaines véritables.


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Kallocaïne

Moins connu que 1984 de Orwell, ou Fahrenheit 451 de Bradbury, ce roman de 1940 n'a rien à leur envier et pourtant bien moins connu.

Un chimiste invente un procédé qui permet de connaître les pensées des gens, une drogue, La Kollocaïne. Une invention bienvenue dans un monde où la délation est vivement encouragée.



Un homme amoureux, persuadé de servir l'Etat Mondial en inventant cette drogue, pour le bien commun, sert en fait de manière inconsciente, ses propres intérêts parce qu'il pense que sa femme lui est infidèle. Et je n'en dis pas plus...



J'ai trouvé ce roman très riche en réflexions, très poétique et sensible.
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Kallocaïne

Kallocaïne est un chef-d’œuvre Suédois de la SF d'anticipation, injustement méconnu en France. Il est considéré comme un classique dans le monde anglo-saxon, à l'égal de 1984 d'Orwell ou du Meilleur des mondes d'Huxley. Certains pensent même que ce livre aurait pu inspirer Orwell, puisqu'il a été écrit neuf ans auparavant. Je dois avouer que j'étais un peu dubitatif, avant ma lecture, sur le fait qu'un livre aussi important puisse être totalement inconnu ici. Peut-être que les affres d'une mauvaise traduction précédente ou les aléas de l'édition sont à l'origine de cette injustice. Toujours est-il que ce livre mérite entièrement sa réputation !



Il met en scène un scientifique dans un État totalitaire qui ressemble grandement à l'ex URSS. Ce scientifique met au point une nouvelle drogue qui ressemble à un sérum de vérité : la kallocaïne. Celui qui en prend est obligé de dévoiler ses pensées les plus secrètes. Alors même que les citoyens étaient déjà très surveillés, de beaucoup de manières différentes, même jusqu'au sein du couple ; cette nouvelle drogue va devenir l'arme absolu du pouvoir. Mais cette drogue risque de déstabiliser tout le système. Elle est d'abord utilisée par les membres les plus hauts placés de l'appareil d'état, pour servir leurs propres intérêts. Sauf que cette nouvelle substance est tellement efficace qu'elle va vite échapper à leur contrôle. De plus, même avec une transparence totale, les angoisses paranoïaques du régime et du héros ne sont pas apaisées... car le mal est plus profond, il est au cœur de l'âme humaine.



Ce livre à l'écriture sobre est glaçant, et il mérite bien son rang de classique !
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Kallocaïne

Belle découverte que ce roman, un des quatre connus comme étant les textes fondateurs du genre dystopique. Nous y retrouvons un état totalitaire où le collectivisme prend le pas sur l'individu, ce dernier n'étant plus considéré en tant que tel. La surveillance est omniprésente et ce même dans les chambres, il n'est plus possible de dire ce que l'on pense dans l'intimité ni même de penser en toute liberté avec la nouvelle invention de Léo Kall : le sérum de vérité.



Comme toute dystopie, j'ai trouvé ce futur possible glaçant : jusqu'où peut-on contrôler la population et restreindre ses libertés ?



J'ai beaucoup aimé le prise de conscience qui émerge peu à peu chez le personnage principal, questionnant son mode de vie mais aussi et surtout les règles auxquelles il doit obéir.



J'ai dévoré ce roman qui se lit d'une traite et ai été admirative des réflexions de l'auteure, notamment en sachant qu'elle a écrit cette œuvre en pleine deuxième guerre mondiale, critique donc très osée et courageuse.
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Kallocaïne

Kallocaïne est un classique de la dystopie qui a été injustement oublié. L'auteure, déjà connue, s'est suicidée peu après la parution de l'ouvrage. Publié en 1940, où règne un contexte mondial tendu, le livre se fait donc l'écho des craintes de l'époque et dont la portée se poursuit aujourd'hui.



Leo Kall, scientifique, vit dans un Etat totalitaire où la paranoïa et la dénonciation dont des règles. Il crée un sérum capable de pousser les gens à révéler leurs secrets les plus profonds. Il offre donc à son gouvernement la possibilité de violer jusqu'à la dernière intimité des habitants, de briser définitivement toute forme de résistance.



La première question qui vient à l'esprit est comment n'importe qui serait capable de faire un acte aussi extrême et aussi évidemment néfaste ? le livre est écrit à la première personne et il s'agit du récit de Leo Kall lui-même. Au début, on se rend compte qu'il est totalement dédié à la cause de l'Etat mondial. Il manque de recul et d'esprit critique et représente tout ce dont il faut se méfier : il ne doute jamais vraiment et ne remet pas en question l'univers dans lequel il vit. Il est l'évidente victime d'un lavage de cerveau pernicieux et progressif.



On voit donc la situation du point de vue d'une personne qui est totalement dévouée à la cause, qui verra le manque de loyauté partout sauf en lui-même. Sa femme Linda. Son supérieur Rissen qui ne partage pas ses profondes convictions. Ses cobayes. Tous sont touchés par sa profonde méfiance. le personnage évolue cependant face aux rencontres qu'il fait et qui lui permettent de découvrir une autre façon de pensée. Ce changement est perceptible au fil de l'écriture. Au début, l'écriture est clinique et sans fioriture, traduisant aussi le côté scientifique de Kall que son aspect martial et respectueux des conventions. Mais petit à petit, il laisse de plus en plus à la rêverie et ses sentiments se font plus présents, plus envahissants. L'auteure parvient avec talent à montrer une évolution nette de son narrateur.



Le récit est aussi traversé de moments d'une grande poésie et d'une grande portée philosophique qui nous mettent face à notre place dans la société. Linda face à son rôle de mère, ces personnes qui sortent du carcan qui leur est imposé en fondant un ordre sans hiérarchie et sans insigne, Leo Kall qui évolue pour espérer l'existence d'une Cité où l'individu n'est pas annihilé face à l'intérêt du groupe, intérêt qui ne contente que quelques individus dans la population...



Kallocaïne est un récit dense qui fait écho à des temps complexes. Mais le livre est également universel car il touche à l'essence de l'humanité à bien des égards, une humanité tiraillée entre besoin de sécurité et de conformisme, et une autre qui a besoin de liberté et d'espoir pour s'épanouir. Bien que court, le récit met en scène des personnages complexes à travers l'oeil de son protagoniste, à la fois révoltant mais étrangement attachant. Car le parfait petit soldat que fut Leo Kall est un peu chacun d'entre nous.




Lien : https://www.lageekosophe.com
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Kallocaïne

Lu dans le cadre du challenge SFFF 2022, Kallocaïne est un livre qui décrit une société autoritaire sous la gouverne de l'Etat Mondial.

Les habitants sont sous surveillance et réduits à une existence qui doit être utile à la communauté.

Les dénonciations sont donc fréquentes vis-à-vis des citoyens soupçonnés d'activités contraires aux intérêts de l'Etat ou vis-à-vis de ceux susceptibles d'entretenir des idées dissidentes.

Dans ce cadre, l'invention par Léo Kall de la Kallocaïne, sorte de sérum de vérité, intéresse au plus haut point les autorités.

Se balader au fil des pages dans les pensées de Léo Kall, le protagoniste de cette histoire, est assez perturbant.

Ecrit en 1940, ce roman reflète une époque qui a vu la montée croissante de l'idéologie nazie et le début de la guerre 40 - 45. On peut sans doute parler de roman d'émancipation car, en 1940, je ne crois pas qu'on connaissait l'étendue des atrocités des SS.

Mais Kallocaïne est également étonnant de modernité.

Le lire à un moment où il y a une telle méfiance vis-à-vis des médias, de la politique, où la désinformation et la propagande sont au coeur des discussions, a provoqué un écho évident en moi, tant ces thèmes sont contemporains et amènent à la réflexion.

J'ai vraiment apprécié ce livre bien écrit et je le recommande donc vivement.



CHALLENGE SFFF 2022 : ÂGE D'OR DE LA SF

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Kallocaïne

Dans un décor claustrophobique qui n'est pas sans rappeler les heures sombres du stalinisme (l'autrice venait de visiter Allemagne nazie et U.R.S.S.), avec un climat de paranoïa aiguë liée à la mise sous observation de tous, à tout moment (y compris dans la chambre à coucher !), Karin Boye dresse le portrait d'un homme tourmenté, tiraillé entre son désir d'excellence et sa nature bien moins parfaite. Au point de passer sur tous ses principes, de commettre les actes les plus abjects, de servir bassement un Etat qui exploitera ses connaissances pour un but terrifiant.



Si le style est parfois un peu plat, et les digressions un peu longues, il faut se remémorer la date de parution de ce roman qui n'a pas pris une ride (la traduction a été refaite en 2016), d'autant que l'autrice ne l'avait ni daté, ni localisé. Par précaution envers la censure, certes, mais cela lui donne une sorte d'intemporalité qui l'empêche de vieillir d'autant que les thématiques sont encore, hélas, d'actualité dans certains endroits du monde. Mais en plus de l'aspect totalitaire, il comporte aussi une certaine vision des relations entre mari et femme, de l'incompréhension, des fantasmes, craintes, non-dits qui peuvent exister entre deux êtres. Et suscite cependant quelque espoir, enfoui au fond de chacun, considérant que le désir de liberté finira toujours par resurgir.



Certes, le thème de la dystopie n'est plus novateur de nos jours, mais le méconnu Kallocaïne fait partie des références du genre et se révèle encore et toujours, malheureusement, d'une actualité inquiétante.



Plus de détails sur mon blog
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Kallocaïne

Souvent comparé à Le meilleur des Mondes ou encore 1984, venant directement de Suède (pays duquel je ne connais pas encore bien la littérature) et datant de la première moitié du XXe siècle, cet ouvrage court est sorti assez rapidement de ma pile à lire. J’avais en effet hâte de comparer cette vision futuriste d’une société totalitaire de l’époque avec celle du monde actuel, et je n’ai pas été déçue !



La société que l’on découvre est issue de l’idée d’un système totalitaire poussée à l’extrême. L’État Mondial est un large territoire composé de plusieurs villes souterraines (pour se cacher des ennemis), qui abritent des camarades-soldats. Leur existence est entièrement dédiée à servir l’État. Dès leur plus jeune âge, les enfants sont envoyés au jardin d’enfants, puis au camp de jeunesse pour être éduqués à la discipline de l’État (conditionner à lui obéir quoi :p ). Les jeunes ne sont pas les enfants de leurs parents, mais appartiennent à l’État, qui en disposera comme il le souhaitera. Les citoyens sont formés dans un domaine dans lequel ils sont doués et passent leur vie à travailler en journée, à faire des rondes de surveillance quelques soirs/semaine et à assister à des fêtes et conférences organisées par l’État pour les divertir. Chacun de leurs gestes est filmé, leurs conversations sont enregistrées, afin de garantir leur sécurité et celle de l’État. Un mode de société qui fonctionne bien tant que l’individu ne réfléchit pas trop.



Le récit est le témoignage d’un scientifique de l’État Mondial. Ce personnage, Léo Kall, est un citoyen modèle, défenseur de l’État et de ses valeurs. Il a créé un sérum de vérité hyper puissant qu’il commence à tester sous la supervision de son chef Rissen sur des volontaires fournis par le système. L’expérience est une totale réussite : les sujets d’étude se dévoilent entièrement, sans retenue, aux scientifiques, et plus tard aux autorités auxquelles ils sont confrontés. Plusieurs problèmes se posent néanmoins : que fait-on des citoyens volontaires qui ont révélé des questionnements/doutes par rapport à l’État? Les individus testés se rappellent tout ce qu’ils ont dit sous l’effet de la drogue. Qu’en est-il des répercussions sur leur vie de tous les jours, après savoir s’être eux-mêmes trahis?



Un problème éthique se pose : doit-on condamner un citoyen par rapport à ses pensées? Il se peut que cette personne suive les règles à la lettre et respecte les lois, mais qu’il ait des pensées individualistes. À partir de quand un individu devient-il « à risque »? Au final, tout le monde pourrait être accusé pour des idées un jour pensées. Qu’en est-il aussi du problème de culpabilité par rapport à des pensées inconscientes? Une personne peut très bien réfléchir à certaines choses et les penser meilleures sans pour autant les appliquer à son quotidien. Léo va se poser de plus en plus de questions quant au bien-fondé de son invention.



J’ai trouvé la société décrite par l’auteure super intéressante et surtout très bien développée et du coup, très convaincante. Le quotidien des camarades-soldats est expliqué très clairement et en détail, ce qui nous permet une immersion totale dans ce système si différent du nôtre. J’ai aussi aimé les réflexions que cet ouvrage apporte. L’omniprésence de la surveillance constante par exemple m’a fait m’interroger sur les limites de la violation d’intimité. Je me suis aussi demandé si cet excès de mesures de sécurité ne pousserait pas aussi à la paranoïa par rapport aux autres citoyens? Si de tels systèmes sont en place, c’est qu’ils sont nécessaires, qui croire, à qui faire confiance?



La narration se fait sur un ton assez neutre, voire froid. Léo Kall est au départ entièrement dévoué à l’État et à l’aide qu’il pourrait apporter au système grâce à son invention. Son existence en tant qu’individu est totalement niée, mise au second plan, ce qui en fait un personnage assez réservé. Il a bien appris la leçon et se soumet aux règlements, tel un brave petit soldat bien dressé. C’est un orateur doué, il se lance parfois dans des discours pro-État, qui nous semblent un peu trop parfaits pour être sincères. Ce qu’il dit semble au final plutôt être déclamé pour le convaincre lui du bien-fondé de ce qu’il fait, plutôt que les autres. Il évolue au cours de l’histoire grâce notamment aux questions qui apparaissent par rapport à son expérience et aux personnes qu’il rencontre.



Une lecture très intéressante dans laquelle on découvre une société totalitaire poussée à l’extrême. L’auteure nous décrit en détail ce système au travers des yeux d’un camarade-soldat scientifique qui vient de créer une drogue, sérum de vérité absolu. Le récit soulève des questionnements importants et fait réfléchir sur des points qui sont en train d’évoluer dans notre société, tel que par exemple les méthodes de surveillance de l’individu de plus en plus omniprésentes. Entre sécurité et paranoïa, il ne reste qu’un pas à franchir. Une lecture assez courte, mais qui nourrit des réflexions passionnantes.
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Kallocaïne

"1984", "Le meilleurs des mondes", "Nous autres", "Fahrenheit 45" et "Kallocaine" qui doit-être moins bien connu ? Pourtant c'est un classique méconnu de science-fiction genre dystopie.

Paru en 1940..

La kallocaine à un côté soma du roman d'Huxley, non ?

Le chimiste Leo Kall crée un sérum de vérité afin de contrôler la population, chaque membre de la société à un rôle défini, un métier dans chaque secteur. l'état mondial a enfin réussi une autre étape dans la domination, décelé les rêves, secrets, de chacun..

Une société où les parents ne revoient plus leurs enfants, comme dans "Divergente", ils sont dans des secteurs, tout est contrôlé, les individus ont des uniformes selon leurs missions. C'est avec la Kallocaine que tout changera, que finalement, il est vu, que l'individu a des ambitions.. Le héros de l'histoire Léo se rendra compte de nombreuses évidences. Il est inexpressif vis à vis de sa femme et de ses enfants comme dans le film "Equilibrium" il a un idéal d'une société parfaite.. Mais avec cette drogue, il se rendra compte de différence et sera partagé entre ses idéaux et son propre être.

On retrouve beaucoup de référence reprise dans les livres et série de SF.

Une lecture qui donne à réfléchir dont la morale est encore d'actualité.

À lire, car c'est une référence..
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Kallocaïne

J’ai l’ambition au fur et à mesure des années de découvrir les classiques de la SFFF et même les classiques tout court même si cette deuxième catégorie sera encore plus rare que la 1ère car on a bien remarqué je pense que j’étais peu branchée littérature blanche (c’est l’euphémisme du siècle hein ^^) :



L’intrigue :

Bienvenue dans l’Etat Mondial où tout le monde espionne tout le monde, la police a des yeux et des oreilles partout jusqu’à la chambre à coucher parentale et il ne faut surtout pas parler seul à seul avec quelqu’un sous peine d’être suspect. La vie en communauté est obligatoire, être asocial est vu comme dangereux et les individus de ce genre sont extraits de la société, comprendre tués. Toute la société est standardisée, logement, alimentation, habillement sont identiques pour tout le monde, les temps de loisirs sont également planifiés tout autant que les exercices militaires et policiers chaque jour après le travail, autant dire que la population est totalement aliénée. Notre héros malgré lui, Léo Kall, reproduit une sorte de sérum de vérité qu’il appellera Kallocaïne et qui permettra de dévoiler les pensées intimes des gens, tout sera su, plus aucun jardin secret individuel ne subsistera.



La terminologie des citoyens appelés Camarades-soldats, l’obligation de vie communautaire, et les traits typés des personnages, me font penser que cette dystopie dénonce le communisme d’une Chine qui au temps de Mao était fermée sur elle-même mais ça ne colle pas trop sur les dates même si assez proche vu que le Parti Communiste Chinois est apparu en 1949, par contre le communisme soviétique est probablement l’influence de Karin Boye (c’est peut-être dit dans une pré ou postface, mea culpa je ne m’en souviens plus ^^).



Le personnage :

Notre ingénieur chimiste nous rapporte son histoire sur un journal intime, on sait qu’il est aux arrêts et n’a aucune nouvelle de ses proches depuis des années, on apprend quels évènements ont causé sa perte, il revient donc sur son passé.



Léo Kall, le chimiste qui met au point la Kallocaïne, est un pur produit de la société qui ne remet rien en question, il est même fier de sa trouvaille qui va sûrement lui permettre de grimper de nouveaux échelons. Avant la mise sur le marché il faut tester le produit, il aura donc à sa disposition du « matériel humain » ou autrement appelé Sacrifices volontaires qui après une bonne campagne de propagande sont prêts à faire avancer la science. On apprend qu’il est marié avec 3 enfants et le plus âgé de 8 ans est déjà embrigadé dans un camp de jeunesse. Le temps des tests se fait sous la supervision de son chef Rissen, Léo va de plus en plus le suspecter ainsi que sa femme et sa paranoïa ne sera pas sans conséquence.



En bref, clairement je n’ai pas envie de vivre dans une telle société de toute façon il y a longtemps que j’aurais passé l’arme à gauche les asociaux ne sont pas bienvenus ^^ entre les sociétés hyper individualistes et hyper communautarismes, il y a un juste milieu à trouver. Ce livre fait partie des références du XXème siècle avec 1984, Le meilleur des mondes et Fahrenheit 451 à part ce dernier j’en ai aucun dans ma PAL mais petit à petit je complèterai mon éducation dystopique.
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Kallocaïne

Au sein de l’Etat Mondial, chacun oeuvre pour le bien de tous. Pour le bien de l’Etat. La guerre contre l’Etat voisin est latente, on le sent, et tous les « camarades-soldats » occupent leur temps entre leur emploi et leurs obligations militaires quotidiennes.

Au sein de la Ville de Chimie n°4, l’un d’entre eux, un chimiste du nom de Léo Kall, a mis au point une substance qui sera l’arme absolue contre toute tentative de sédition. Il lui donne le nom de Kallocaïne.



Kallocaïne fût écrit en 1940, entre « Le Meilleur des Mondes » d’Aldous Huxley (1932) et « 1984 » de George Orwell (1949). Il s’agit d’une dystopie parmi les plus sombres : la communauté est absolue, le ministère de la propagande forge et force les esprits, le ministère de la Police impose une société de surveillance extrême (l’intimité des couples est limitée à quelques heures par semaine…) et toute tentative de dissidence est réprimée et neutralisée par la force.
Lien : http://les-carnets-dystopiqu..
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Kallocaïne

Un petit chef d'oeuvre bien méconnu du roman d'anticipation.

Moins abouti et prémonitoire que 1984 (mais écrit 10 ans avant !) sur la description d'un possible monde futur, il n'en est pas moins une formidable et fine réflexion sur l'utopie d'un monde égalitaire où l'individu n'a de place et d'utilité qu'au service d'un état Monde.



On pourrait se dire qu'à l'heure actuelle du culte de l'individu et de l'individualisme, on a échappé à tout ça. Mais... C'est aussi la force de ce livre, qui finalement garde toute sa modernité, de nous amener à voir le monde contemporain d'un autre... oeil (pas celui qui est dans les murs des habitations du roman).

La grande toile mondiale est elle si différente, ou sera-t-elle si différente de l'état Monde ? Espace de liberté ou gigantesque prison ? Ouverture d'esprit ou pensée superficielle contrôlée et surtout propagée telle quelle "au service de la communauté".

Quant à la Kallocaïne, sérum des vérités intimes et du dévoilement sans retenue, est elle si éloigné des réseaux "sociaux" ?

Sur ce point, l'auteur commet la même erreur d'anticipation que George Orwell : croire que la puissance supérieure aurait besoin de contraindre les gens à dévoiler leur intimité, à se mettre à nu. Ce qui n'est pas le cas, à l'heure ou plusieurs milliards "d'individus" offrent bien volontiers et volontairement leur vie et leurs pensées les plus intimes, chaque jour, à nos amis FB, Igram, G, etc... Donc au vu et au su de la Toute Grande Toile Mondiale.

L'oeil et l'oreille sont bien là, sauf que c'est nous qui les installons dans notre salon, et... dans notre chambre.



Je trouve que ce n'est pas assez dit, mais un autre sujet universel et intemporel occupe une place importante dans le roman de Karin Boye, avec une belle finesse et profondeur psychologique, c'est l'amour et les relations (complexes !) homme / femme. Et cette idée, dostoievskienne : quoi d'autre pour sauver l'homme, même si l'idylle confrontée à la réalité est tellement imparfaite ?



"On a beau considérer l'amour comme une conception romanesque et démodée, je crains bien qu'il ne contienne, dès le début, un élément d'angoisse indescriptible. A chaque pas que font pour se rapprocher un homme et une femme attirés l'un vers l'autre, ils sacrifient quelque chose d'eux-mêmes ; espérant des victoires, ils subissent une série de défaites."

Karin Boye



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Kallocaïne

Kallocaïne est une dystopie c’est à dire: un récit de fiction qui prend pour univers une société imaginaire organisée de telle manière que ses habitants ne peuvent accéder au bonheur. Elle est due à la mise en application d’une idéologie censée amener à un monde parfait et apporter le bonheur aux gens du moins du point de vue officiel. On y retrouve des choses aussi peu sympathiques que l’uniformisation de la pensée et bien sûr une perte évidente de liberté. Ce genre est le plus souvent une dénonciation des risques néfastes d’une idéologie. On retrouve bien tout cela dans Kallocaïne, écrit pendant la seconde guerre mondiale dans un pays confronté à la fois au nazisme et communisme.



Le monde décrit dans le roman est une société totalitaire où les citoyens vivent uniquement pour le servir et ce dès l’enfance. Les enfants vivent en camp de jeunesse très tôt et sont élevés dans le but d’être utiles à la société. Les gens n’ont aucun loisir, ils travaillent et une fois leur travail terminé, ils vont faire des taches au service de l’état. Tout est régi, décidé, formaté par le gouvernement en place.



C’est dans ce monde que vit Leo Kall, chimiste, et narrateur du roman. Il invente un sérum de vérité qu’il appellera kallocaïne en référence à son nom. Leo Kall est marié à Linda et ils ont 3 enfants. Il travaille au département des chimistes et son supérieur s’appelle Rissen. Il vit pour servir « l’état mondial » et c’est dans ce but qu’il met au point la kallocaïne. Ce sérum fait révéler à celui à qui on l’injecte ses pensées les plus intimes, il ne peut pas mentir, ni cacher quoi que ce soit. Leo a inventé ce sérum dans le but d’aider la société à traquer les criminels et à éviter le pire. Il a une vision totalement ancrée dans « l’état mondial » et ne pense même pas aux dérives possibles d’une telle drogue.



Il va petit à petit se rendre compte que la drogue peut lui être utile et l’utiliser sur sa propre femme. Ce passage est assez poignant et permet à l’autrice de parler de la condition féminine dans une société totalitaire, des douleurs et des difficultés des femmes. L’autrice parle aussi par ce biais du problème de la confiance entre époux, entre collègues et plus généralement dans la société. Comme toujours dans les dystopies, le personnage prend peu à peu conscience de la société dans laquelle il vit.



La fin du roman est un peu abrupte, le récit est sombre, avec peu d’espoir. Encore une fois ceci s’explique par le contexte dans lequel le roman a été écrit. Le propos n’en est que plus percutant et son propos est toujours d’actualité. Le monde décrit est oppressant et la kallocaïne fait froid dans le dos. Le roman est court mais nous fait réfléchir sur l’histoire et sur notre société. Un roman d’autant plus impressionnant qu’il n’a pas vieilli.
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Kallocaïne

Tout d'abord, détail qui n'en est pas un, c'est la nouvelle traduction intégrale de Léo Dhayer que j'ai lue. Et que j'ai trouvée très réussie.

Ça faisait longtemps que ce livre était sur ma liste des indispensables, mais je l'avais presque oublié... jusqu'à ce que je tombe sur la nouvelle traduction du texte intégral parue cette année chez Mnémos.

Gros choc, coup de poing, coup de coeur ! Ce roman a beau dater des années 40, il est cruellement d'actualité par certains thèmes abordés. Même si il semble évident qu'à l'époque où le livre a été écrit, on était plutôt sur une critique de l'URSS... comme quoi, L Histoire a tendance à se répéter, et pas forcément pour le meilleur.
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