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Critiques de Karl Popper (15)
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La télévision : un danger pour la démocratie

Déçu, je m'attendais à une analyse plus incisive du danger que représente le brouillard opaque d'informations dans lequel nous plonge le quatrième pouvoir. En se limitant à un problème d'éducation sur la violence télévisuelle et en dédouanant les parents de leur responsabilité, Popper et les autres auteurs, ils sont quatre, ratent la cible.
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La télévision : un danger pour la démocratie

Dans ce pamphlet, Karl Popper expose les risques de la télévision notamment sur les enfants et par la suite sur la société, car l'évolution mentale des enfants en serait changée à cause d'elle. La TV ne produirait plus rien d'éducatif, plus rien d'intéressant mais deviendrait une boîte à sensation et à violence, mettant en danger les enfants (et leur développement) car ils distinguent difficilement le fictif du réel. Popper essaie pour cela de trouver diverses solutions (réglementations) aux problèmes que le pouvoir possédé par ce média peut engendrer.
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La logique de la découverte scientifique

Karl Popper critique la conception naïve de la science qui fige les connaissances scientifiques dans des certitudes absolues, laissant penser que la vérité scientifique établie pourrait être définitive. Malgré les années, ce livre constitue l'une des références de base en philo pour mieux développer sa pensée. Il faut juste ne pas s'attarder sur le texte de la physique quantique qui est dépassé.
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La connaissance objective

Dans ce livre composé de textes rédigés entre 1961 et 1971, Popper apporte des précisions , des approfondissements et des compléments aux enseignements concernant sa théorie de la connaissance exposés dans "La logique de la découverte scientifique", le "Post-Scriptum", et "Conjectures et réfutations", pour mettre en évidence son épistémologie évolutionniste.
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La télévision : un danger pour la démocratie

Le propos est extrême, sans concessions, mais résolument engagé et parfois un brin enragé ! Mais la réflexion est fondée et féconde pour le lecteur ! Attendez vous à avoir un débat d'opinion avec vous même après sa lecture !
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Des sources de la connaissance et de l'igno..

Un livre qui reprend le texte lu qu'il donna le 20 janvier 1960 à l'invitation de la British Academy lors de sa conférence philosophique annuelle). L'essentiel de son contenu reste toujours valable à notre époque, à propos des approches et des écoles de pensée actuelles qui existent au seins de la connaissance scientifique.
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Misère de l'historicisme



Popper prend un soin relatif à argumenter en faveur de l'historicisme pour le réfuter de manière plus convaincante et rigoureuse. Sa critique n'est pas indépendante de son falsificationnisme puisqu'il reproche à l'historicisme de mésinterpréter le fonctionnement de la recherche en science naturelle, qui fonctionne par la conditionnalité des prédictions (l'historicisme, plutôt que d'affirmer une loi de la forme "si A alors B", énonce soit une prédiction prophétique inconditionnelle prétendument imitée du naturalisme, soit une prédiction prophétique inconditionnelle reposant sur une méthode propre) et par le test falsifiable. C'est ainsi qu'il considère que les sciences humaines et sociales n'ont pas, en droit, un statut épistémologique différent des sciences naturelles, puisqu'il doit il y avoir des hypothèses conditionnelles testables dans diverses situations. Par là, on reconnait une critique de l'holisme. Mais une telle critique présuppose pourtant déjà a priori que la vérification de l'efficacité d'une intervention scientifique se mesure aux états des objets individuels, en ce qu'ils sont falsifiables.



Face à l'historicisme pronaturaliste, qui veut des lois de l'évolution inconditionnelles (ce qui repose sur ladite mauvaise compréhension de la nature des lois naturelles selon Popper), l'historicisme antinaturaliste affirme que les méthodes naturalistes ne peuvent pas fonctionner en sciences humaines et sociales. Ce sont bien ces deux historicismes que Popper critique. Popper soulève le point selon lequel l'intervention d'un test pour les sciences humaines et sociales viendrait déjà modifier la possibilité même de la prédiction, puisque tester un évènement à venir impliquerait déjà de modifier les conditions actuelles nécessaires à sa réalisation. D'ailleurs, l'évènement historique n'est pas répétable au sens naturaliste. À cela, il s'agit de dire qu'il n'y a pas de prédiction absolue à apporter, mais des prédictions conditionnelles, et ladite modification des conditions n'est problématique que pour l'holisme, car c'est dans l'holisme qu'il s'agit de modifier la structure générale de la société, de telle sorte qu'il ne soit ainsi plus permis d'observation falsifiable et conditionnelle sur les états des individus, en ce qu'ils s'adaptent alors à cette structure, par lesquels on mesure l'état de la société. Popper est anti-révolutionnaire pour cette raison. Dans des tests conditionnels non-holistes, on peut fonctionner par essais-erreurs en observant les effets d'une action limitée qui ne viendrait pas détruire le cadre de réalisabilité même d'un tel test, en ce qu'il ne modifierait pas les conditions des objets individuels vers qui est tournée cette action (quant à l'objection de la non-répétabilité des évènements, elle repose sur une erreur d'interprétation de la physique, qui ne fonctionne pas par confirmations, mais par falsifications). Mais c'est déjà-là supposer que ce sont les individus qui importent a priori, et qu'il n'est pas possible d'imposer un test "falsifiable" sur un tout sans changer les conditions qui permettent un tel test. Il apparait bien que, au contraire, la conformation des individus à la nouvelle structure manifeste une réussite du test d'efficacité imposée à cette structure, et que le sujet de l'historicisme n'est pas de comprendre ce qui accomplit les hommes, mais ce qui se déroule en fait structurellement. En revanche, une telle analyse doit en effet - Popper a raison - être conditionnelle pour être scientifique.
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La logique de la découverte scientifique

Un excellent ouvrage sur la manière de réfléchir à comment démontrer un élément dans les sciences ; aussi bien les sciences dures et celles dites "molles". Par moment, Popper est tellement dans sa réflexion que la démonstration est elle-même complexe à suivre mais dans tous les cas, il m'a permis de réfléchir à ma façon d'appréhender ma pratique scientifique.

Un ouvrage que je conseille à tous les étudiants universitaires.
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La logique de la découverte scientifique

J’ai souvent rencontré des difficultés à comprendre l’expression écrite des scientifiques : par exemple, leurs énoncés dans les examens nationaux me paraissent souvent contournés, et la compréhension de leurs formulations nécessite de passer par une hypothèse sur ce que le jury a « voulu dire et faire trouver » plutôt que par une analyse scrupuleusement sémantique de leur consigne. J’ai longtemps cru qu’il s’agissait chez moi d’une lacune personnelle notamment liée à ma spécialité de littérature, sorte de mésentente relative à un fonctionnement cognitif distinct, pourtant je fus toujours excellent en sciences, du moins jusqu’au lycée, lieu où les professeurs ne parvinrent plus à me représenter, concrètement ou en théorie, les concepts qu’ils prétendaient utiliser : à partir de ce stade, il fallait admettre des choses comme T/u=Cos Z, et seuls les esprits capables d’aliénation, j’entends, sans péjoration, qui ne requerraient aucun besoin de vraiment comprendre ce qu’ils appliquaient, poursuivirent dans ces voies arbitraires où ni visualisation ni représentation n’avait plus d’importance. C’étaient devenus des ensembles d’idées vides, des abstractions sans réalisation, auxquelles on effectuait diverses opérations, et l’on avait beau dire que ces calculs ressortaient à des évolutions tangibles des sciences, l’étudiant novice, pas encore enfoncé dans l’indiscutabilité de ces prémices jusqu’à admettre ce dogme du « nécessaire », en restait sceptique et ne réussissait pas à perdre tout à fait le désir que ces champs entrassent dans ce que je ne saurais mieux appeler qu’un « rapport » avec ce qui se pense ou ce qui se touche.

Il faut annihiler largement son sens critique pour explorer maints domaines des sciences « dures », et je n’ai pas trouvé en général qu’un mathématicien ou qu’un physicien quantique, hormis pour son domaine inexplicable et ses fidèles complices, soit une lumière s’agissant de faire comprendre le monde et les hommes, ou même de les comprendre. Mais j’ai souvent perçu combien ils se servent de leur réputation de sapience en leur intraduisible spécialité pour feindre de savoir beaucoup d’autres choses, notamment ayant trait à l’humanité : quelque aura glorieuse de savant ultraspécialisé impose à la société impressionnable qui réclame au singe virtuose de lui prédire l’avenir en des domaines bien plus délicats que le résultat d’une forme d’addition compliquée. Typiquement, ce fut le cas de Descartes, expert de son époque en dioptrique, qui prétendit avoir démontré l’existence de Dieu sur ce prétexte fallacieux qu’autrement on ne serait pas capables de l’imaginer, et l’on a interrogé Einstein sur des sujets dont il était manifestement incompétent, on le cite encore largement pour chacune de ses bafouilles médiocres. En somme, il ne faut pas présumer que les compétences d’un scientifique dépassent largement sa discipline, et l’on peut même postuler qu’un être dépensant toute sa vie spirituelle à tâcher de prouver des spécificités comme la quadrature du cercle n’a pas consacré assez de temps à des philosophies profitables aux hommes en termes d’enseignements généraux. Il est logique que les savants des abstractions soient presque toujours des esprits déséquilibrés, et sans doute ne me permettrais-je par de les critiquer avec tant de désinvolture si eux-mêmes ne l’avaient pas tant reconnu et écrit s’agissant d’autres « savants abstraits », par exemple les prêtres ou les mystiques.

Pire, à plusieurs occasions, je me suis aperçu que des scientifiques ne se comprenaient guère davantage entre eux, et même qu’ils tiennent, quand on peut témoigner de leur entente ou désaccord, à avoir l’air de ne pas se contredire plutôt qu’à se comprendre vraiment : ils espèrent conserver aux regards profanes le crédit d’une fraction d’usurpation qu’ils ne s’ignorent pas, et l’on peut parfois, rien qu’avec de petites connaissances, les prendre en défaut sur des questions de méthode. J’ai constaté par exemple qu’un énoncé qui relève de l’évidence pour un professeur de biologie n’est quelquefois d’aucune clarté pour un physicien qui, sans l’avouer, répond tout à côté de ce qu’on lui suggère et feint ensuite de se « rattraper » pour ne pas perdre contenance. Aussitôt, on rencontre chez eux une mauvaise foi qui s’accompagne d’une vexation manifeste : en général, partout où un scientifique est efficacement contredit, il se contrarie et quitte la partie – des imposteurs agissent pareillement pour ne pas être démasqués. Leur incompréhension mutuelle vient notamment, selon moi, de ce qu’ils ont souvent un rapport singulier, biaisé, voire difficultueux, à la langue verbale, plus complexé qu’il n’y paraît en dépit de ce qu’ils affectent, et sur deux points particuliers :

Le premier, c’est que le faible usage qu’ils font des sciences humaines dans leur travail ne les met pas en capacité d’intérioriser la logique mentale du discours – j’indiquerai plus loin des exemples où l’on entend combien ils se livrent à un exercice formel plutôt qu’ils ne tâchent à représenter avec exactitude les propositions qu’ils avancent. En réalité, ils peinent à formuler leur pensée : ce qu’on estime alors des raccourcis d’une stupéfiante et inconcevable fulgurance, et qu’on ne comprend pas, relève plutôt d’une incompétence à représenter l’idée par le langage verbal. C’est qu’on n’est pas écrivain comme on veut : il faut, pour produire un raisonnement en phrases, une capacité qui n’est pas forcément à la mesure de qui, pour l’essentiel, manipule des concepts chiffrés et des notions presque entièrement théoriques. Cette transmission d’une idée en mot, chez les scientifiques, se résume presque toujours à respecter les conventions de structures langagières apprises, mais ils ne comprennent pas réellement la logique à l’origine d’une explication réussie, souffrant de vraies lacunes, honteuses ou ignorées, à communiquer. Ce n’est pas qu’ils ignorent comment se mettre à la portée du quidam, c’est qu’ils ne savent pas comment mettre leurs connaissances à la portée de leur propre langue. C’est leur trouble, leur handicap ; mais aussi, pourquoi les humilie-t-on en les persuadant qu’un savant, parce qu’il sait mesurer la trajectoire des étoiles, est capable de décrire une étoile ? – ces facultés n’ont rien à voir, ils ont tort d’y miser leur fierté et d’y jouer leur honorabilité. Si l’écrivain ne suffit pas à faire évidemment un physicien, pourquoi voudrait-on que le physicien fît un littérateur ? Les sciences physiques n’englobent nullement les sciences littéraires : si ces facultés quelquefois se rejoignent par chance en un seul homme, elles peuvent bien plus probablement ne pas se trouver réunies.

Qu’on lise combien les ouvrages dits de vulgarisation sont généralement alambiqués et incompréhensibles sans qu’il en aille seulement de la difficile matière qu’ils traitent, mais bien parce que les tournures et la progression manquent de logique : l’auteur n’a pas la pensée nette de la manière dont il peut induire une réflexion dans un esprit qui n’est pas le sien ; pire, il n’a peut-être en vérité nulle idée nette de ces concepts qu’il retourne sans les rattacher jamais à une réalité ou à une logique tangible, de ces idées spécialisées qui ne concernent que des nombres et des abstractions, de ces futiles et extraordinaires sophistications qu’il est même impossible de dessiner ou de représenter. C’est ainsi qu’en tout métier rarement un professionnel explique-t-il du premier coup ce qu’il fait sur son lieu de travail : ce qui relève de la pratique n’est pas en relation directe avec l’usage du verbe, il faut un truchement lexical et psychologique ; relater même ses actions routinières implique de se mettre à distance. Le langage est en soi un problème qui requiert une spécialisation, et cette spécialisation ne se développe ni dans la considération d’énigmes tortueuses ni dans l’habitude de rapports normés destinés à des confrères entendus. On a donc bel et bien lieu de penser, quand un vulgarisateur est abscons et qu’on a apporté soi-même les preuves d’être un bon lecteur, que le scientifique est simplement inapte à transmettre ses idées, qu’il n’a peut-être pas tant qu’on le croit par indulgence et par humilité d’idée sur ses idées, au lieu de supposer qu’on est soi-même coupable d’un défaut de compréhension. A-t-on jamais vu une idée qui fût incommunicable, même au moyen de longues périphrases ? Ce que je conçois, je puis le verbaliser, et sans doute ne conçois-je même qu’en mots : personnellement, ou que mes idées soient toutes enfantines ou que j’aie le langage aguerri, je n’ai jamais échoué à en transmettre une.

Le second point réciproque à l’origine de la mauvaise expression des scientifiques, c’est qu’ils ont davantage acquis et cultivé l’usage d’un code mathématique et algébrique – ou de tout autre code préconisé dans leur domaine – que du langage vernaculaire, et qu’ils parviennent mal à transposer intelligiblement leur code connu dans la langue articulée qu’ils méconnaissent. Ce n’est pas seulement ici comme dans le premier cas qu’ils échouent souvent à être experts en langage verbal, c’est bel et bien qu’ils y trouvent une difficulté faute d’usage, qu’ils se réduisent souvent à perdre sa faculté à force de fréquenter et de maîtriser un substitut plus usité et valorisé dans leur domaine, de sorte qu’en une certaine manière leur langue natale devient pour eux une langue secondaire, que les mots leur sont plus étrangers que des équations. Il est ainsi fréquent de constater que la conférence d’un scientifique, même articulée devant un auditoire, consiste en un jargon abondant, en un répertoire enchaîné de termes appris, mais qui n’a pas la moindre correspondance avec l’usage des mots dans la langue ordinaire : c’est, à défaut de chiffres, un code dont ils n’ont pas conscience de la bizarrerie et même de l’horreur littéraire, du mélange proprement extraordinaire, infâme et verbeux – il est notable qu’on rencontre à l’identique cette spécificité chez des philosophes qui, pour renforcer le statut de savant, font un recours excessif à ces montages amphigouriques, comme Spinoza, Kant et Heidegger. Or, ces scientifiques, en dépit des complications de leurs discours, sont bien des êtres qui auraient comme chacun du mal à lire une œuvre de Racine ou de Huysmans. Ce n’est pas qu’ils sont trop hauts, c’est qu’ils sont à côté, c’est qu’ils ne se rendent pas compte que les mots qu’ils emploient consistent en acceptions exceptionnelles, souvent d’une incomparable laideur et qui ne leur permettent pas de se faire comprendre ; c’est encore sans dire combien ce code ésotérique leur offre l’avantage, conscient ou non, d’échapper à la critique quand, par exemple, un amateur leur conteste l’usage d’un terme et qu’ils renvoient à sa définition appuyée par telle autorité et selon tel ouvrage – il y a manifestement de l’épate à ratiociner avec une fausse évidence de ce qui relève évidemment de l’inappréciable, et l’on peut soupçonner, toutes fois qu’une phrase est inentendable, qu’elle recèle la vantardise de celui qui affiche son aisance plutôt qu’il ne partage une représentation. Il faut cependant souligner qu’un langage scientifique souffre de considérables difficultés de traduction, et qu’il ne s’agit pas seulement de recopier une pensée scientifique littéralement, parce qu’alors cette pensée même s’est constituée en ce code qui n’est pas celui des mots de la norme. En somme, on doit concevoir combien un scientifique est handicapé par la langue plutôt qu’il ne la maîtriserait tant qu’on ne pourrait le comprendre, de sorte que quand on s’interroge si un savant, que l’histoire et sa discipline reconnaissent pour un incontestable génie, s’exprime mal ou si c’est soi-même qui échoue à les entendre, en particulier dans leurs vulgarisations où l’on croit établi qu’il n’est guère besoin de connaissances spécifiques, la plupart des gens sont embarrassés de répondre et préfèrent penser avec humilité que ce sont eux qui ne sont pas à la hauteur. Or, un critique et philologue comme moi, acharné et minutieux, qui ne renâcle devant aucune peine et se met au défi constant, à défaut de tout comprendre, de savoir exactement d’où il ne comprend pas, est sans doute en droit de supposer, pour autant qu’il se soit bien appliqué à lire et que les rédacteurs prétendent user d’un langage littéraire, que ce sont eux, quelle que soit leur réputation, qui sont déficients, et non sa capacité d’entendement comme lecteur.

J’avoue que j’ai longuement hésité, lisant Popper, si le défaut s’accusait en ma faculté de compréhension ou dans la sienne d’expression – je n’ai quand même pas l’immodestie de me croire capable d’entendre tous les langages et toutes les langues, et il faisait longtemps que je n’avais pas entrepris l’ouvrage d’un scientifique – ; seulement, par les moyens logiques de la langue française, si j’achoppe, ma persévérance doit au moins finir par démêler de quel côté se situe le problème (j’admets par exemple mes limites en matière d’abstractions ou encore mes lacunes en expressions algébriques) : il m’a fallu persister jusqu’à la page 88 pour analyser les causes générales de cette difficulté systématique de communication, que j’impute finalement à l’auteur. Je crois qu’on distingue sans mal le problème intellectuel global dans un extrait comme celui-ci, ouvrant un chapitre entièrement neuf et pur de toute référence, et pour lequel, donc, il n’est pas nécessaire d’avoir retenu les principes généraux qui précèdent :

« Nous prendrons plus loin en considération la question de savoir s’il se trouve quelque chose qui ressemble à un énoncé singulier (ou « énoncé de base ») falsifiable. Je vais supposer ici que la réponse est positive et examiner jusqu’à quel point mon critère de démarcation est applicable à des systèmes théoriques, – pour autant qu’il soit absolument applicable. L’examen critique d’une position connue sous le nom de « conventionalisme » va commencer par nous poser des problèmes de méthode que nous résoudrons en adoptant certaines décisions méthodologiques. J’essaierai ensuite de caractériser les propriétés logiques de ces systèmes théoriques qui sont falsifiables – entendez falsifiables dans la mesure où nos décisions méthodologiques sont adoptées. » (page 76)

Ce paragraphe est d’expression singulière – j’ose dire qu’il est représentatif du livre (je ne l’ai pas élu pour sa complexité particulière) – ; je crois pouvoir affirmer que sa construction est notablement illogique et embrouillée – ce qui est de quelque inconvénient pour un ouvrage qui propose de distinguer ce qui relève de la logique propre aux sciences et ce qui est d’un ordre métaphysique. L’analyse linéaire simplifiée suivante en montre la tournure excessive et étrange, vaguement barbare : « Prendre en considération la question de savoir s’il se trouve », est, on en conviendra, d’une formulation qui retarde longtemps le propos, presque un charabia, mais ceci est peut-être lié à la traduction de l’allemand. Or que s’agit-il de trouver : « Quelque chose… » – c’en devient interminable – « … qui ressemble… » – quand en viendra-t-on au fait ? – « à un énoncé singulier falsifiable » – à ce stade, on ignore ce que c’est qu’un « énoncé singulier » ou « énoncé de base » et l’on n’a pas non plus encore l’idée de ce que signifie « falsifiable » dans l’esprit de l’auteur : cette « prise en considération » n’apparaît donc, à cet instant de la lecture, d’aucune nécessité pour celui qui ne peut appréhender le questionnement et la méthode : il ne sait tout simplement pas à quoi une telle considération peut servir. Puis, l’auteur suppose qu’il existe un tel énoncé : pourquoi par la « positive » plutôt que par la négative, avant de proposer une définition d’« énoncé » et de « falsifiable » ? C’est absurde d’admettre dans un sens et pas dans l’autre une construction dont on ne détient aucun des termes ; et de toute façon quel intérêt eût-il eu à proposer le critère de falsifiabilité si c’était pour commencer par mettre en cause sa pertinence : il commencerait par proposer de définir un « énoncé singulier falsifiable » à seule fin d’admettre aussitôt que c’est inutile ? Il va donc ensuite examiner « jusqu’à quel point » sa théorie est applicable, mais à condition que ce soit « absolument applicable » : quelle étrange proposition ! S’il l’examine, c’est plutôt, en toute franchise, parce qu’il estime a priori que c’est absolument applicable ! Là, il discutera un problème de méthode qu’il va résoudre non en le contredisant, mais « en adoptant des décisions méthodologique » – péremptoirement donc et non par arguments, parallèlement plutôt qu’en opposition à l’objection conventionaliste : il va juste « décider » (c’est le sens du terme dans la langue profane) ce qu’il préfère. Il proposera enfin la signification de « falsifiable » – ce tombera déjà un peu tard –, mais seulement si l’on « adopte » sa méthode : or, quel rapport ? Est-ce qu’il ne peut pas définir ce terme y compris dans la mesure où ses décisions méthodologiques ne seraient pas adoptées ? La formulation est bien obscure et mystérieuse. Est-ce pour donner l’illusion d’une modestie pour signifier : « dans la mesure où vous voudrez bien être d’accord » ? Est-ce qu’on ne pouvait pas supprimer toute la phrase, comme nombre de mots superflus et balourds de cet exergue ?

En vérité, je puis à présent l’expliquer en philologue : ce paragraphe a été écrit après ce qui suit ; c’est une forme obligatoire que l’auteur, pour complaire à des conventions issues des milieux spécialisés et universitaires, s’est contraint d’ajouter en tête de section, comme on fait l’introduction en tant de parties en hypokhâgne et à Sciences-Po ; et c’est la raison pour laquelle il est formé curieusement à partir d’éléments rédigés postérieurement qui, lors de la rédaction, s’étaient imposés avec plus d’urgence et de nécessité ; l’extrait préambulaire est une laborieuse refragmentation avec passages obligés pour ne pas déparer du « code ». Pour bien comprendre ce début de chapitre, il faut en lire le reste, et revenir à ce linéament qui résume ce qui, à ce stade, n’a pas encore été expliqué : tout s’éclaircit alors, on devine que le scientifique a rédigé après un compendium placé ici au commencement. C’est néanmoins particulièrement illogique dans la perspective d’un partage progressif avec le lecteur : celui-ci de toute évidence ne peut rien comprendre à ce prolégomène qui tient plutôt d’une conclusion. Voici ce qui advient quand un auteur succombe à des usages sans en interroger l’utilité, pour satisfaire à ses pairs.

On retrouve les mêmes problèmes de développement dans des annonces comme :

« Nous examinerons de manière plus approfondie dans le prochain chapitre les caractéristiques de ce que j’appelle « énoncés de base » ainsi que la question de savoir si eux aussi peuvent être falsifiés. Nous supposerons pour le moment qu’il existe des énoncés de base falsifiables. Il faut avoir à présent à l’esprit que lorsque je parle d’« énoncés de base », je ne fais pas référence à un système d’énoncés acceptés. Le système des énoncés de base doit plutôt, selon mon usage du terme, inclure tous les énoncés singuliers non-contradictoires ayant une forme logique déterminée ; tous les énoncés factuels singuliers concevables, en quelque sorte. Le système groupant tous les énoncés de base contiendra donc beaucoup d’énoncés incompatibles. » (page 83)

On y rencontre la même façon d’emblée d’admettre ce qui est justement en question, vice logique qu’en rhétorique on nomme « pétition de principe » ; et ce défaut se complexifie par la manière excessivement ramassée de superposer des définitions comportant chacune une multiplicité de termes eux-mêmes indéfinis : songer qu’ici on ignore ce qu’est un « énoncé de base », mais qu’on s’attache déjà à faire entendre non seulement son « système » mais ce qu’il « inclut », à savoir « tous les énoncés singuliers non-contradictoires ayant une forme logique déterminée », idée qui est suppos
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La logique de la découverte scientifique

Une expérience tout en paradoxe pour moi. D'un côté, une lecture relativement ardue qui demande un effort non-négligeable pour aller au bout. De l'autre, un texte ô combien nécessaire d'un point de vue épistémologique, qui permet de distinguer la science en tant que méthode de toute autre construction intersubjective tel qu'un système idéologique ou encore la psychanalyse freudienne. Essentiel à bien des égards, y compris à l'époque actuelle où la connaissance scientifique est tant décriée (aussi bien qu'incomprise).
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L'univers irrésolu

Ce livre dont j’avais lu des critiques en marquant l’importance se divise en 5 parties : Les différentes sortes de déterminisme/Le déterminisme scientifique/Une défense de l’indéterminisme/Problèmes métaphysiques/ L’indéterminisme n’est pas suffisant. Sa lecture m’a été très pénible car beaucoup de notions débattues me dépassent . J’ai tout de même retenu que que le monde ne peut pas être pensé d'une façon qui le réduirait à n'être qu'une horloge.
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Conjectures et réfutations

Selon Karl Popper, le critère de démarcation qui permet de distinguer les sciences des pseudos sciences c’est leur falsifiabilité. Ce livre présente bien cette position.
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A la recherche d'un monde meilleur

Cet ouvrage recueille 16 conférences de Karl Popper, et offre l'accès à un contenu très accessible, y compris pour les non-initiés à la pensée du philosophe autrichien. Nécessité de l'examen critique, du pluralisme, de la tolérance, d'une lutte contre le relativisme tout autant que contre les prophètes du déclin : autant de thèmes centraux chez cet auteur qui sont ici présentés d'une manière toujours claire, conformément à la nécessité, rappelée plusieurs fois par l'auteur, que les intellectuels abandonnent toute volonté de "grandiloquence" ou de "grandes phrases" dans leur écriture.



L'ouvrage permet de disposer d'une vue synoptique des différentes idées majeures de la pensée de Popper. La première conférence dont il reproduit le texte, "Connaissance et modelage de la réalité" (qui est d'ailleurs sans doute la plus difficile et la plus intéressante de l'ouvrage), montre que l'exigence de critique constitue, au sein de l'espèce humaine, la continuité tout comme le dépassement des séries de sélections opérées biologiquement au cours de l'évolution. Continuité car c'est en sélectionnant de nouvelles niches écologiques que le vivant a toujours évolué ; dépassement car la capacité à créer et à choisir le meilleur peut, grâce au langage humain, se faire aujourd'hui sans violence physique aucune.



S'ouvre ainsi la possibilité d'un "sens de l'histoire", non pas en tant que dessein caché du devenir historique, mais, comme l'indique la douzième conférence, en tant que capacité humaine à défendre avec de plus en plus de réussite les valeurs de liberté, de tolérance, d'émancipation par le savoir, que prônaient déjà les philosophes de l'Aufklärung (dont Kant est ici le plus éminent représentant), et qui deviennent effectives dans un Occident au sein duquel Popper ne voit par conséquent pas le moindre déclin.



L'ouvrage n'est toutefois pas sans défauts : en tant que compilation de conférences, il tend à se répéter très fortement d'un chapitre à l'autre. Plus embarrassant sans doute, il peut avoir tendance, au mépris des idéaux pourtant invoqués par Popper, à rester assez vague dans la critique qu'il formule de certains courants philosophiques manifestement peu appréciés de l'auteur. Ainsi, s'il est sans doute pertinent de critiquer la "soupe hégélienne" qui infuse dans toutes sortes de philosophies, il l'est peut-être moins d'expédier la philosophie de Hegel lui-même en quelques phrases, sans qu'on comprenne trop exactement en quoi il est aussi relativiste que ce qu'en dit Popper.



De même, on comprend, dans la conférence "Comment je conçois la philosophie", que Popper n'adhère pas à ce qu'elle est pour Wittgenstein, mais on ne saisit absolument pas ce qu'il a à lui répondre. Affirmer que "la tâche essentielle de la philosophie, telle que je la vois, consiste à méditer de manière critique sur l'univers et notre place en lui, ainsi que sur la dangereuse puissance de notre savoir et le pouvoir bénéfique et maléfique qui est le nôtre" (p. 251) constitue tout de même une définition assez vague de l'activité philosophique.







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La quête inachevée

Fécond et plus accessible que les autres ouvrages de Popper, les sentiers escarpés de l'épistémologie peuvent dissuader plus d'un lecteur courageux. La découverte scientifique, la validité d'une proposition et son accès à la vérité scientifique sont autant de sentiers escarpés mais cet opuscule est fort encourageant par ses premières lignes, l'auteur affirme que les moments passés auprès d'un ébéniste lui ont plus appris que les livres... Il faudra vérifier la précision de ce commentaire et retrouver les termes de l'auteur lui-même dans cette affirmation citée en substance et non dans les mots mêmes de Popper.
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A la recherche d'un monde meilleur

Recueil de conférences destinées aux publics les plus divers et de lecture facile, A la recherche d'un monde meilleur constitue une bonne introduction à la pensée de Karl Popper.
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