L'écrivain Nicolas Gogol et l'artiste Kasimir Malevitch incarnent pour vous la culture russe ? Ils sont pourtant nés en Ukraine et font l'objet d'une violente bataille culturelle entre les deux pays.
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Les centimètres du goût, « plaire » et « déplaire » n’y sont pour rien, d’autant plus qu’ils sont toujours subjectifs, et de plus, le goût n’est pas tout à fait ce qu’on croit. Ce n’est pas l'élément qui a bon goût, tel quel ; toutes les choses, qu’elles aient bon goût ou mauvais goût, créent l’harmonie : le sel, le sucre, le vinaigre, la moutarde (...). Quand elles recourent au centimètre du goût, la société et la critique rejettent telle ou telle œuvre, parce qu’elles la trouvent de mauvais goût, parce qu’elle leur déplaît. Avec cette mesure, la société aurait pu manquer tout et se limiter aux poires, aux oranges et aux gâteaux qui ont bon goût, que le reste aille au diable ; seulement, comme on le sait, il y a du sel partout et (…) il a aussi bon goût.
Chaque changement d'idée s'accompagnait de la peur de perdre ce qui avait été acquis, aussi le système du capitalisme est-il imparfait. Le socialisme du système non-capitaliste est plus proche du but, mais le plus proche est le système de la fabrication de la perfection, de l’intégration des canaux de la force éternelle au mouvement de la production et de l'autoproduction humaine existante. Le danger de la paresse est grand, car elle est une force capable de tout transformer en non-être, c'est à dire que le non-être vaincra l'homme.
p34 (Edition Allia)
“Le travail doit être maudit, comme l’enseignent les légendes sur le paradis, tandis que la paresse doit être le but essentiel de l’homme. Mais c’est l’inverse qui s’est produit. C’est cette inversion que je voudrais tirer au clair.”
Seuls les peintres bornés et impuissants dissimulent leur art sous la "sincérité".
Dans l'art, il faut la vérité et non la sincérité.
Le système socialiste développera davantage encore la machine, c’est là tout son sens. Son sens consiste à libérer le plus possible la main d’oeuvre du travail, en d’autres termes, de faire de tout le peuple travailleur ou toute l’humanité un maître aussi oisif que le capitaliste qui reporte sur les mains du peuple tous ses cals et tout son travail. L’humanité socialiste reportera ses cals et sa sueur sur les muscles des machines et garantira aux machines un travail illimité, qui ne leur laissera pas une minute de répit. Dans l’avenir, la machine devra se libérer et reporter son travail sur un autre être, se débarrassant du fardeau de la société socialiste, se garantissant elle aussi le droit à la “paresse”.
LETTRE A ALEXANDRE BENOIS (1916)
Votre collègue M. Merejkovski a écrit que le futurisme était un mouvement de goujats qui menaçaient le sacro-saint art. Ce qui a le plus outragé M. Merejkovski a été que le goujat ait renié "la belle Psyché éternellement féminine au profit de la multiplication mécanique de l'homme". M. Merejkovski a découvert sa crainte que le goujat menaçant ne lui arrache sa femelle, et il a hurlé, fait des scènes de jalousie, comme un véritable mandrill ou un Hottentot, accoutumé à sa femelle et à ses habitudes.
Toute la philosophie du travail consiste à libérer la paresse, mais tout le monde pense que le travail sert à atteindre une autre félicité. Aussi, peut-être pour la première fois, je porte le nom de paresse, ou "mère de tous les vices" sur la place publique, sur cette même place où on l'a clouée au pilori. Et pour la première fois peut-être, j'ai touché le front de sa sagesse ou de la sagesse de l'homme en elle, et j'ai effacé le sceau d'infamie. Puisse-t-on lire tracé sur son front qu'est le principe de tout travail, que sans elle il n'y aurait pas de travail. Elle était aux origines mêmes, et par la malédiction du travail, elle doit restaurer son nouveau paradis. La paresse épouvante les peuples et ceux qui s'y adonnent s'en trouvent persécutés, et cela parce que personne ne l'a comprise comme vérité, mais qu'on l'a appelée la "mère de tous les vices" alors qu'elle est la mère de la vie. Le socialisme est porteur de la libération au niveau inconscient, mais lui aussi la calomnie, sans comprendre que c'est la paresse qui l'a engendré. Et ce fils, dans sa folie, la qualifie de mère de tous les vices. C'est n'est pas encore ce fils-là qui supprimera l'anathème, c'est pourquoi, avec ce petit écrit, je veux réduire à néant la calomnie et faire de la paresse non la mère de tous les vices, mais la mère de la perfection.
15 février 1921, Vitebsk
Toute la peinture passée et actuelle avant le suprématisme (sculpture, art verbal, musique) a été asservi par la forme de la nature et attend sa libération pour parler dans sa propre langue et ne pas dépendre de la raison, du sens, de la logique, de la philosophie, de la psychologie, des différentes lois de causalité et des changements techniques de la vie.
C'était alors de temps de la confusion babélienne en art.
Dans ce monde où seuls quelques créateurs isolés pouvaient être sensibles à la portée formelle de sa peinture et à la dimension philosophique de sa pensée, Malevitch avait peu de chances de susciter un dialogue, de trouver un écho à ses idées.
Il ne peut être question de peinture dans le suprématisme. La peinture est périmée depuis longtemps et le peintre lui-même est un préjugé du passé.