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Critiques de Kathleen Winter (87)
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Annabel

""Ce qui frappe le plus dans ce livre une fois qu'on l'a reposé avec l'envie de le recommencer, mais dans le désordre, c'est une forme d'indécision dans la trame et les personnages. Ce n'est pas exactement de l'indécision, mais ce que les éléments peuvent imposer de détours et d'improvisations au vol d'un oiseau qui finira pourtant par se poser là où il avait la vague impulsion de le faire au moment où il a pris son envol. Et ce que le récit a d'erratique, de fragmenté parfois, épouse parfaitement le propos du roman, qui est d'accompagner cette chimère bien réelle qu'est un hermaphrodite dans son évolution tâtonnante. (…)

L'enfant naît en 1968 au Labrador, d'un père trappeur, Treadway, trappeur de père en fils, et d'une femme, Jacinta, qui a grandi à Saint-Jean-de-Terre-Neuve, la plus grande ville de cette région septentrionale du Canada. La voisine qui l'aide à accoucher dans sa baignoire en compagnie de deux autres amies s'appelle Thomasina. Elle est la première à s'apercevoir que le bébé est doublement déterminé. Pendant quelques jours, les deux femmes ne savent trop que faire de cette nouvelle, et elles n'en parlent pas à Treadway. Jacinta préfèrerait laisser les choses aller leur cours. Mais Treadway, sans qu'on lui dise rien, devine que son enfant a une double nature. C'est lui qui décide que ce sera un garçon et qu'il s'appellera Wayne. Alors commence le long parcours opaque fait de chirurgie, de traitements hormonaux lourds et de non-dits, d'un petit garçon qui renferme, chirurgicalement occultée, une petite fille. À l'adolescence, la partie enfouie de Wayne se manifeste par une indétermination qui met son père sur des charbons ardents, par une amitié féminine au lieu de la sociabilité masculine de rigueur, mais pas seulement. Treadway, la personne la plus positiviste du récit, et qui l'est jusqu'à l'aveuglement, ne peut rien contre le formidable entêtement biologique de la vie, qui ne cesse de contredire l'éducation opiniâtre qu'il impose, avec amour, à ce fils qui est, qu'il le veuille ou non, son fils-fille. (...)

Ce roman est remarquable à bien des égards. D'abord, comme la vie même, il se contente d'entreposer en désordre des faits et des liens de causalité plus ou moins décousus. Il nous abandonne à certains moments paroxystiques, faisant confiance à notre imagination pour reconstituer les scènes absentes. (…) Comme une ligne de trappe, comme une existence, la progression du récit peut être masquée par la neige, détournée par une rivière, arrêtée par un éboulis, modifiée et contournée. Chacun des trois personnages principaux, Wayne-Annabel, Thomasina et Treadway, suit son propre chemin, sans jamais s'éloigner des autres, qui forment une composante essentielle de son propre paysage. Thomasina joue le rôle d'un phare, Wayne-Annabel apprend à vivre dans un monde sans merci. Paradoxalement, c'est son père trappeur qui lui donnera les outils de son indépendance, tandis que Thomasina sera, d'une certaine façon, son guide. Treadway, lui aussi, apprend à vivre. Cet homme qui passe sa vie à tuer et construire, en symbiose totale avec son milieu, quand il ne sait à qui se vouer, demande conseil aux rapaces. Mais surtout, il écoute leur avis. (…)

Si bien qu'au bout du compte, nous aussi pouvons élargir ce dilemme absurde à toutes les formes d'identités qui en nous ont besoin, pour accéder à l'existence, d'en éliminer une autre. Wayne-Annabel n'est pas un homme, ni une femme. le fait d'être à la fois l'un et l'autre fait de lui une créature composite qui n'est pas l'addition de deux identités, mais une autre identité. Et comme Thomasina, la lectrice-lecteur « … voit dans la différence de l'enfant une grâce étrange qu'il faut protéger. Un atout fragile, peut-être même un pouvoir. »"

Lonnie dans Double Marge (Extrait)
Lien : https://doublemarge.com/anna..
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Annabel

« Lorsque l’enfant parait, le cercle de famille applaudit à grands cris », nous a clamé Victor Hugo.

Mais ici, lorsque le bébé de Jacinta et de Treadway nait, il y a comme une gêne. Oh, bien sûr, personne n’en saura rien, à part Thomasina, la sage voisine qui a accouché la jeune mère. C’est elle qui « se plaçant comme un arc bienveillant » au –dessus de Jacinta, lui révélera l’anomalie.

Mettons tout de suite un mot sur cette anomalie : il s’agit de l’hermaphrodisme.



Si Jacinta accepte cela, son mari par contre est bloqué. Non, il ne faut pas que le reste de la communauté « sache », non, l’enfant ne doit pas côtoyer les autres muni de ses 2 sexes. Quelle honte, quelle infamie ! Et pourtant, Treadway est foncièrement gentil, mais il a peur. Lui qui sillonne plusieurs mois par an ses lignes de trappe, - nous sommes au Labrador, et les grands espaces sont le domaine des hommes pendant que les femmes restent seules à la maison - , il est incapable de communiquer ce qu’il ressent. Mais une chose est sûre pour lui : ce bébé doit avoir l’apparence d’un garçon. Et c’est parti pour l’opération, les pilules...



Nous suivons pas à pas l’évolution du bambin qui se révélera très sensible, très ouvert au monde et à l’art. Attentive et aimante, Jacinta fait preuve d’une grande psychologie envers son enfant.

Thomasina veille...

C’est à l’adolescence que la paix relative se brisera et provoquera une onde de choc.



Ce roman très pur, plein de lumière et de silence, de musique et de beauté, raconte le heurt entre la vie rêvée et la réalité. Chacun, à sa manière, doit faire front. Et c’est difficile, très difficile. La deuxième moitié du roman est d’ailleurs beaucoup plus dure et sombre souvent dans la noirceur.



Ce roman nuancé et subtil raconte l’intime face à une société conservatrice et millénaire.

Il raconte la difficulté d’être, pour tous.

Il raconte les joies, les peurs et les rêves d’un jeune tiraillé entre ses deux facettes.

Finalement, il atteint l’universel.

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Annabel

'C'est l'histoire d'un enfant qui , en 1968, au sein d'un bourg côtier du Labrador, au Canada , naît , ni garçon ni fille : Hermaphrodite.......seuls ses parents , et Thomasina, une voisine très proche sont au courant .

On décide de faire opérer l'enfant : ce sera Wayne-----le choix du père-----

C'est un livre fin , rare,qui prend un relief particulier dans ces contrées ancrées dans la nature sauvage, froide et inhospitalière du Labrador avec ses coutumes et ses rituels, ce qui confère encore plus de mystère .........

L'auteur nous fait partager , sans pathos , avec une tendresse et une grâce sans pareils, tout au long, avec dignité , émotion et doigté , l'évolution de Wayne, le rapport qu'il entretient avec son corps, ses souffrances , ses doutes, ses espérances, ses choix à l'adolescence, il n'a personne à qui se confier ........entre un père incapable de communiquer, taciturne, qui chérit la nature sauvage , qui se fond presque en elle et une mère aimante , à l'écoute , qui perdra parfois ses repères et l'énergie qui était la sienne .......



On sent le vertige , le trouble intérieur d'un corps qui ignore sa différence et la découvre peu à peu ......., la détresse et la tristesse de Wayne ........

Ce que j'ai surtout apprécié c'est la façon dont l'auteur décrit sans juger, sans nous imposer quelque message que ce soit ni sa propre vision ........

Le style poétique est imagé .L'écriture délicate , intimiste, précieuse nous fait découvrir la force du corps sur le psychisme .

La pudeur dont l'auteur use pour décrire son personnage est remarquable .

C'est une oeuvre totalement originale , un texte hors du commun, élégant et sensible qui nous invite à la réflexion et à la tolérance, à sortir de notre méfiance et de nos préjugés , à propos de la perception de la "Différence ".

Une oeuvre pétrie de lumière qui conte les désillusions, les peurs et les doutes d'un jeune homme très courageux tiraillé par sa double identité !

Je remercie l'amie de Babelio ( elle se reconnaîtra ) qui m'a incitée à acheter ce livre rare , à part .

Un ouvrage à relire , qui restera longtemps dans nos mémoires !
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Annabel

Sa naissance a lieu dans la région du Labrador au Canada, en mars 1968. Jacinta, sa mère, met au monde l’enfant dans sa baignoire, assistée de sa meilleure amie, Thomasina. Lorsque cette dernière la libère, elle constate que le nouveau-né est hermaphrodite.

Son père, Treadway, décide qu’il sera un garçon et qu’il s’appellera Wayne. Sa mère nommera l’enfant, ma fille, dans l’intimité, et Thomasina, Annabel, du nom sa fille décédée auparavant.

Kathleen Winter raconte l’histoire de cette personne avec une intelligence rare, une vérité naturelle, une simplicité qui enlève tout envie de contester ou d’être scandalisé, qui annihile toute répulsion. Il n’est pas question de sensationnalisme, ni d’en faire un drame. Non, le drame c’est plutôt les autres.

C’est l’histoire d’un enfermement, celui d’une fille prisonnière du corps de garçon que lui ont façonné la science des traitements hormonaux et d’un père, ancré dans sa lutte pour la survivance au milieu d’un monde hostile, à la logique darwinienne. Dans ce monde-là, la troisième possibilité est obligée de se frayer un chemin sous couvert d’anonymat, silencieusement. La dualité des identités est consentie, acceptée. Il y a connivence entre Annabel et Wayne. La fille et le garçon coexistent et apprennent à se découvrir au fil des années.

Thomasina décrit parfaitement cette troisième possibilité :

« Je n’appellerais pas ça une maladie. J’appellerais ça une différence. Une différence signifie une tout autre manière d’être. Ça pourrait être fantastique. Ça pourrait être d’une incroyable beauté si les gens n’avaient pas si peur. »

« Annabel » de Kathleen Winter fait partie des rencontres heureuses que l’on peut faire en tant que lecteur. Il enrichit un débat qui n’a jamais autant été présent dans notre société, celui des identités et du caractère schizophrénique de chaque individu.

Un roman que je recommande vivement.

Traduction de Claudine Vivier.

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Annabel

Roman sur la quête d'identité, telle qu'elle soit, sur la quête de liberté individuelle, sur la quête du soi-même, sur l'acceptation.

Wayne est au centre de l'histoire mais n'est pas, selon moi, le personnage principal unique : autour de lui gravitent Wally, Thomasina, Treadway.

Au final, ce roman est la construction intérieure de chaque personnage, que ce soit individuellement ou les uns envers les autres. Chaque être évolue au fil du temps. Chacun en quête de sa propre vérité, de sa liverté et surtout de sa sérennité.

J'ai beaucoup aimé l'écriture de Kathleen Winter. J'y ai retrouvé un style apaisant qui m'a fait penser à Tracy Chevalier.

En revanche, la couverture de cette édition ne m'a pas parlé, elle m'a même limite dérangé, perturbé. Face à cette couverture, j'ai ressenti un certain malaise qui ne représente absolument pas ce roman et le sentiment que dégage cette histoire. J'aurai plutôt misé sur un paysage du Labrador avec des silhouettes au loin...

Donc, après avoir passé le cap de cette couverture, j'avoue avoir fait une très belle découverte littéraire que je conseille fortement.
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Annabel

Ce roman parle d'identité, de différences, de tolérance, de notre capacité à regarder et accepter les autres, tels qu'ils sont et non pas tels qu'on souhaiterait qu'ils soient. Ce roman parle d'hommes et de femmes de tous les jours qui nous ressemblent un peu. Avec ces peurs, ces faiblesses, ces failles mais aussi cet amour qui parfois peut rendre plus fort.

Kathleen Winter nous raconte l'histoire, fin des années soixante, dans un petit village canadien, d'un enfant né différent : un hermaphrodite. le père prendra la décision de l'opérer et que ce soit un garçon ; un choix que sa mère aurait préféré autre.

Ses parents, pour le protéger du regard des autres, de leur jugement, garderont pendant des années cette différence secrète et, même entre eux, ils n'en reparleront plus pendant longtemps, jusqu'à ce que la nature les rattrape.

On voit ce petit garçon grandir, évoluer, découvrir le monde. En même temps que ses phases d'apprentissage, émergent son caractère, son intelligence, sa sensibilité, ses questionnements, sa propre personnalité et identité.

On aime rapidement cet enfant et, comme ses parents, nous aussi, on veut le protéger des autres. Et on se demande, forcément, ce que nous aurions ressenti, ce que nous aurions fait, comment on se serait comportés ?

Ce roman parle de rencontres, celles qui nous portent, celles qui blessent. de moments de la vie quotidienne, ceux qui marquent, ceux si significatifs de ce qu'on est ou de ce qu'on sera. Ce roman parle de la nature, telle qu'elle est, à la fois rude, sauvage, glaciale mais aussi tellement belle et lumineuse.

C'est fait de solitude aussi, de silence, de mots simples, comme la vie, avec toutes ces joies et ces peines.

C'est un roman plein de justesse, de finesse, de poésie et de beauté. Un roman sur la vie, sur nos vies, avec ces moments douloureux, et ces autres magiques où le coeur palpite. de ces jugements qu'on s'est fait au début du roman sur certains de ces personnages et qu'on découvre peu à peu, au fil des pages, plus complexes et tout autre. Des personnages d'une réelle profondeur, certains qu'on a plaisir à retrouver, d'autres qui nous bouleversent. Une amie, une voisine, un père...

Sans aucun larmoiement, sans aucun voyeurisme, c'est un roman touchant, empli d'émotions et qui ne laisse pas indifférent, tout au contraire.
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Annabel

Titre : Annabel

Auteur : Kathleen Winter

Année : 2014

Editeur : Christian Bourgois Editeur

Résumé : En 1968 sur les côtes du Labrador, un enfant naît. Il se nomme Wayne et il est hermaphrodite. Ses parents, Jacinta et Treadway, décident de garder le silence sur cette particularité et vont élever Wayne comme un garçon.

Mon humble avis : Parfois, il semble que des auteurs soient touchés par la grâce. Parfois, certains textes sont si beaux qu’on a du mal à s’en défaire. Parfois, on aimerait avoir le talent, la persuasion nécessaire, pour inciter son entourage et ses fidèles lecteurs à se jeter sur un bouquin. Tout cela est bien rare, mais c’est indéniablement le cas avec Annabel de Kathleen Winter, un livre rare, puissant, délicat et d’une force incroyable. Il m’est difficile de parler de ce roman sans tomber dans les superlatifs, difficile de décrire à quel point certains personnages – notamment le père Steadway – m’ont ému, touché, pour ne pas dire bouleversé. Outre ses qualités littéraires évidentes – précision du style, superbes descriptions – le texte de Winter touche au coeur sans jamais versé dans le pathos. Sans artifices, avec pudeur, l’écrivaine Anglo-Canadienne réussit parfaitement à allier un souffle rare, une poésie et une finesse hors-normes. Avec Annabel, Winter nous parle de la différence, elle nous parle aussi de tolérance, d’espoirs déçus mais avant tout, elle plonge sa plume dans l’humain, jusqu’aux tréfonds de l’âme humaine. C’est extrêmement brillant, d’une délicatesse incroyable et rempli de lumière. A travers le récit d’un destin, pas si tourmenté que ça finalement – l’une des qualités de ce roman est de ne jamais versé dans l’excès – Winter nous raconte la difficulté de vivre tout simplement, les tiraillements intérieurs liés à l’hermaphrodisme, les espoirs déçus et le courage face à l’adversité. Vous trouvez que j’en fais trop ? Lisez-le et comme moi, j’en suis presque sûr, vous garderez longtemps en mémoire les paysages du Labrador, la profondeur des sentiments évoqués et des personnages incarnés avec un talent de dingue. Avec Annabel, Kathleen Winter touche au sublime et c’est tellement rare qu’on ne peut que s’incliner devant un tel talent.

J’achète ? : Ai-je vraiment besoin de rajouter quelque chose ? Ce serait vraiment dommage de passer à côté de ce grand roman.
Lien : https://francksbooks.wordpre..
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Annabel

Jacinta et Treadway Blake vivent dans un village perdu du Canada. Lui est trappeur et passe la moitié de l'année à trapper pour ramener viandes et fourrures qui leur permettront de passer l'hiver. En 1949, Jacintha accouche d'un premier enfant qui nait hermaphrodite. Le chirurgien de la ville explique à Jacintha qu'une opération règlera le problème. L'enfant sera baptisé sous le nom de Wayne et élevé comme un garçon. Il n'y a que Thomasina, une voisine et amie de la famille qui vient de perdre mari et fille dans un accident de pêche, présente à l'accouchement, qui le surnommera Annabel, du nom de sa petite fille disparue.

Mais Wayne grandit, et sa part féminine resurgit.





Je n'ai pas été convaincue par Annabel. Les choix de l'auteur concernant le passage du temps m'ont paru maladroits (100 pages pour la naissance, puis l'enfant à 5 ans, et l'on ne sait rien de ce qu'il s'y est passé). Or, la construction de l'identité, sexuelle ou non, se fait, à mon avis, au jour le jour.

Le livre est écrit sur un registre factuel et descriptif, presque journalistique. Racontée au présent de l'indicatif, il manque de sentiment et d'émotion. Enfin et surtout, je n'ai pas compris l'objectif de l'auteur : il me semble que n'importe quel enfant, dans cet environnement géographique et familial, aurait connu des difficultés pour se construire : une situation isolée, une mère dépressive qui n'arrive pas à faire le deuil de sa fille, un père absent dont la rare présence se limite à faire correspondre son enfant aux canons de la virilité... On sait tous aujourd'hui la portée destructrice du secret de famille, surtout lorsque ce qui est caché a trait au mystère de la naissance de l'enfant.

Peut-être l'idée de K. Winter était d'arriver à montrer que "l'hermaphrodite" est un être humain comme les autres. Moi, je n'en doutais pas, alors 600 pages sur le sujet, c'est long, et j'en viens à me dire que d'autres personnages auraient peut-être plus mérité de porter le livre : Thomasina par exemple, une femme pas comme les autres, ou Wallie, la petit compagne aux cordes vocales lacérées qui rêvait de chanter.
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Annabel

Annabel est très différent de Middlesex dont il reprend le thème, l'hermaphrodisme. Très loin de la flamboyance amusée et ironique de Middlesex, où la malformation génétique de Calliope alias Cal se raconte comme un mythe grec qui se serait quelque peu "drag queenisé" au contact du Nouveau Monde, et qui passe en revue les grandes dates de l'histoire américaine et de la diaspora grecque et arménienne...



Annabel est un livre du grand Nord, ancré dans la nature sauvage et peu hospitalière du Labrador. Un livre secret, apparemment simple comme le bouquet de fleurs du Labrador offert à Wally par Wayne à la fin du livre.



Un bouquet fait de" feuilles de thé au dessous orangé" et aux "ombelles blanches" qui , une fois cassées, dégagent un parfum violent et capiteux, mêlé à" la pourpre asymétrique du rhododendron sauvage", aux " droséras et sarracénies carnivores et dangereuses"..Un bouquet moins simple et moins anodin qu'il n'en a l'air.



Annabel est un livre qui parle à l'oreille des trappeurs.



Un livre profond et rustique à la fois, qui saisit la poésie des choses ordinaires: les patates qui germent, les pieds qui pèlent, le bois à corder, les fleurs à crocheter. Mais aussi les ponts à habiter, les partitions à chanter, les danses à danser, les nages à synchroniser.. comme l'amour paternel, conjugal, filial si souvent à contre-temps!



C'est un livre qui parle sans mélo, sans drame mais avec une attention pudique et sensible du trouble intime , du vertige intérieur d'un corps qui ignore sa propre "monstruosité" et la découvre peu à peu, et du trouble extérieur que le poids d'un secret et celui du silence font peser sur toute une famille.



Wayne est né fille et garçon. Son père décide qu'il sera un fils, sa mère regrette sa fille secrète, la voisine, Thomasina, lui donne en secret le nom d'Anabel, sa fille disparue.Tous, avec la meilleure foi du monde, aiment Wayne-Anabel comme ils le peuvent, et l'empêchent d'être ce qu'il est en le rêvant autre qu'il naît.



Wayne, lui, -ou elle- hésite, souffre, devine, découvre, espère, choisit, regrette, désespère...



Comme les choses, les objets, comme la nature si présente dans le récit, les personnages aussi ont une réelle épaisseur: on vibre donc à l'écoute de cette histoire d'une reconnaissance chorale - sans jamais jeter l'anathème sur aucun d'eux.



Ni sur le père, pas aussi homme des bois qu'il n'y paraît, ni sur la mère pas aussi lâche, ni sur la voisine pas aussi fugueuse, et encore moins sur Wayne, pas aussi paumé, pas aussi perturbé par ce que son corps lui apprend de lui, et qui sait toujours trouver un point d'appui ou d'écoute pour affiner sa quête d'une identité difficile.



Un beau livre, poétique, dense et bien écrit, parfois triste mais jamais pesant, toujours confiant dans la nature -qu'elle soit humaine ou non.









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Annabel

Pas de résumé pour commencer ce petit billet: ça ne donne pas toujours envie de lire la suite quand on connait déjà l'histoire..

C'est le genre de livres qu'on offre aux amis avec qui on aime partager les belles choses. Vous avez compris: "Annabel" est un coup de coeur !

Bref résumé quand même: Un enfant naît hermaphrodite, nous sommes dans les années 60, au fin fond du Labrador. Le décor est planté: le"problème" ( la différence), le conteste (l' époque, le lieu) et, au fil des pages, nous allons vivre avec William dont on a voulu faire un garçon, mais dont l' alter ego Annabel se manifeste par mille signes.

Sujet délicat qui fait craindre le trash, le voyeurisme ou le mélo.: ce n'était manifestement pas le propos de l'auteur. C'est un livre pudique mais qui n'élude rien, même le plus terrible. Les personnages , gens simples, dépassés par la situation, sont finalement de "belles personnes" dont l'attitude va évoluer au cours du récit. La nature omniprésente ( très belles descriptions) y joue sa partition en influençant émotions et sentiments.

J'ai vraiment ressenti une émotion indéfectible à la lecture de ce roman que je recommande à tous car il traite en fin de compte du thème universel du droit à la différence et ne vous laissez pas rebuter par la photo de couverture qui, à mon humble avis, est plutôt moche ! ! !
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Annabel

En tout homme et en toute femme réside une part du genre opposé. Mais chez Wayne, cette féminité prend une autre dimension... Né hermaphrodite et opéré peu après sa naissance pour tenter d’effacer cette difformité, le désormais jeune garçon a grandi dans l’ignorance la plus complète de sa double sexualité. Par peur de la différence et du rejet Jacinta et Treadway, ses parents, ont décidé de taire cet étrange secret, ne laissant que Thomasina, la meilleure amie de sa mère, dans la confidence.





Mais au fur et à mesure qu’il grandit dans cette petite bourgade au nord du Canada, Wayne sent croître en lui cette double identité et peu à peu, sa part féminine tente de prendre le dessus. Jusqu’au jour où la terrible vérité éclate…





L’hermaphrodisme… Kathleen Winter s’empare d’un sujet délicat et peu commun pour en faire quelque chose de tendre, de beau et d’émouvant. Avec des mots simples et néanmoins minutieusement choisis, elle nous dépeint le quotidien de cette famille qui se délite, rongée par les non-dits. Un père aimant mais maladroit, qui peine à comprendre et à établir un lien avec son fils, une mère rongée par le doute et la culpabilité d’avoir pris la mauvaise décision. Seule Thomasina, l’amie bienveillante semble assumer sa vision des choses, incarnant la liberté et l’ouverture d’esprit. Mais il n’est pas facile de se détacher du regard des autres, lorsque l’on vit dans un petit village où tout le monde se connait et s’épie…





Les personnages imaginés par Kathleen Winter sont forts et attachants par leur profonde bonté, leur désir d’agir au mieux malgré leurs failles et leurs faiblesses. Ils se déploient au fur et à mesure, gagnant en profondeur et en intensité. La nature quant à elle est omniprésente. Elle prend vie sous la plume de l’auteur, se révélant avec une magnificence à la fois sauvage, impitoyable et d’une incroyable richesse. « Annabel » est un magnifique roman, plein de charme et de poésie sur l’identité et la différence. Un texte à la fois fort et sensible, rempli de finesse et d’élégance qui invite à l’ouverture d’esprit, à la tolérance et à sortir de nos préjugés. Un récit à lire absolument et dont on sort grandi !







Challenge Variétés : Un livre dont le titre est composé d’un seul mot
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Annabel

Plonger dans Annabel c'est se confronter à ses propres ambiguïtés, à son rapport à soi et à celui aux autres, à la place que l'on accorde aux apparences, Annabel c'est tout cela à la fois.

Annabel c'est qu'aurait du être Wayne si seulement son père n'avait pas insisté pour qu'il devienne un garçon. Car Wayne est un enfant né hermaphrodite. Mais quand la vie décide de ce coup du sort, dans le Canada profond et sauvage du Labrador des années 60, au milieu des trappeurs solitaires, plus proches de la nature que de l'homme, et bien le choix d'un fils est vite fait. Wayne sera un garçon, contre l'avis de sa mère, contre l'avis de la voisine qui seule connaît ce secret. Mais ressort-on indemne d'un tel choix, quand l'enfant n'est pas sollicité et est amputé d'une part de soi, de ce qui fait sa singularité ? Kathleen Winter donne voix à Wayne qui grandit sans savoir mais qui pressent au plus profond de lui que quelque chose ne va pas. Un enfant puis un adolescent enfin un adulte à part qui ne trouve pas sa place dans le foyer pudique constitué d"une mère qui culpabilise et d'un père qui rejette la génèse de son fils et ne sait pas lui témoigner tendresse et amour.

Superbe roman sur la différence, sans manichéisme, tout en nuances, Annabel nous interroge sur le destin et la fatalité, sur le pouvoir du subconscient qui nous confronte à notre moi profond. Wayne est un homme, une femme qui désirent vivre selon ses propres aspirations dans un monde qui n'est pas encore prêt pour cela. Roman d'une renaissance, roman d'apprentissage, tragédie grecque, Annabel est un texte puissant qui nous emporte au coeur d'un Canada sauvage et dur, inhospitalier tout en exerçant une véritable fascination sur la lectrice que suis, ébahie devant la beauté des paysages décrits par la plume sobre et lyrique de Kathleen Winter. Pour traiter d'un tel sujet, seul un talent aussi discret pouvait lui rendre hommage.
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Annabel

C'est à la suite des critiques lues ici même que j'ai conseillé ce roman à ma mère. Elle l'a dévoré et adoré, ce qui m'a convaincu de le lire également, et je ne regrette pas cette lecture, bien au contraire !



Dans les années 60, dans un petit village du Labrador, un enfant naît hermaphrodite. Ses parents décident de l'élever en tant que garçon et pour le protéger (ou se protéger) lui cachent le secret de sa naissance. Mais le petit Wayne grandit et commence à s'interroger.



J'ai trouvé ce livre très surprenant au premier abord. Je m'attendais vraiment à un livre exclusivement centré sur la quête d'identité de Wayne, et pourquoi pas, sur la lutte pour la reconnaissance des genres non binaires. Mais non, ce livre n'est pas un plaidoyer, il s'agit simplement de l'histoire d'une vie, presque banale finalement, et de celles des personnes qui gravitent autour de Wayne.



Nous suivons en effet le petit Wayne alors qu'il grandit et découvre le monde. On le voit petit à petit prendre conscience de lui-même et de ses différences, accompagné tant bien que mal par des parents qui essaient de faire de leur mieux sans pouvoir éviter les erreurs. On s'attache évidemment très facilement à Wayne, qui est extrêmement touchant.



Mais j'ai beaucoup apprécié que l'auteur ne nous dépeigne quasiment aucun personnage comme fondamentalement mauvais (j'ai bien dit quasiment). Ce sont de vrais être humains capables d'évoluer et de changer d'avis. Le père de Wayne est à ce titre très intéressant et bien écrit, et c'était l'un de mes personnages préférés à la fin du livre alors que j'étais persuadée que j'allais le détester.



L'écriture de l'auteur, à la fois sensible et détaillée, est absolument parfaite pour nous raconter cette histoire et nous plonger dans le décor de cette région du monde isolée, où la vie est rude, tout comme les gens, qui restent cependant profondément humains.



C'est un roman à la fois simple et profond, un peu mélancolique parfois mais surtout optimiste. C'est un hymne à la tolérance qui ne laissera sûrement personne indifférent, et je remercie tous ceux qui m'ont encouragé à le lire, ce fut une très belle découverte.



Challenge Variétés 2015
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Annabel

Difficile de parler de ce roman qui a exercé une telle fascination sur moi. Et pourtant, le début a été un peu déstabilisant. Mais j’ai été envoûtée dès le début par l’écriture de Kathleen Winter. On fait connaissance avec Wayne, hermaphrodite, de sa naissance au commencement de sa vie adulte. Nous sommes à la fin des années soixante et pour choisir le sexe, ça ne tenait qu’à une mesure. Il sera choisi homme.

Dans un petit village au fin fond du Labrador, les parents, Treadway et Jacinta, vivent avec ce lourd secret. Il est partagé par Thomasina, une voisine et amie. Winter passe d’un personnage à l’autre et se plait à décrire les relations entre chacun. Winter nous fait pénétrer les pensées de Wayne essentiellement mais aussi de son entourage. Entre Treadway qui veut renforcer le côté masculin de son fils et Jacinta qui imagine sa fille rêvée, Wayne grandit avec des questions qui ne trouveront pas de réponse immédiatement. Le rôle de Thomasina, souvent lointaine, est aussi important dans le développement de la mentalité de Wayne ainsi que celui d’une amie de son âge, Wally.

Une histoire de silence, de non-dits mais aussi une histoire sur la recherche d’identité. Un grand roman, pris dans son ensemble qui m’a plu, pour ce ton posé, cette tranquillité... Et j’ai aimé aussi cette nature qui a une grande place au cœur du roman. Je n’ai pas jamais trouvé Annabel lassant. A découvrir. Je guette le prochain livre de l’auteur.

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Annabel

Il y a des livres qui vous bouleversent par leur grâce, leur sensibilité et la beauté de l'écriture. Des livres où vous aimeriez annoter des pages entières tant vous êtes touché en plein cœur et en pleine âme. Des passages porteurs de sens, reflets de notre société, tellement justes sur la difficulté d'être soi par sa différence, par le regard des autres ou leurs attentes. Ce sont des livres rares et Annabel en fait partie.



1968, Labrador au Canada. Dans un village reculé, Jacinta Blake met au monde son premier enfant. Son amie et voisine Thomasina l'aide. Le bébé présente les caractères sexuels d'un garçon et d'une fille. Il est ce qu'on appelle hermaphrodite. Jacinta aime d'emblée son enfant, son mari Treadway pense tout de suite qu'il faut que personne d'autre ne soit au courant.Il sait à quoi la différence peut amener. Les médecins consultés sont d'avis à ce que l'enfant soit un garçon.



Ainsi Wayne grandit dans un corps qui habite l'âme d'une fille. Doué pour le dessin, aimant la pureté des symétries, ses premières années se déroulent sans que le secret ne soit éventré et poussé par le vent gagnant les oreille des autres habitants de Labrador. Son comportement n'a rien de celui d'un garçon, il n'aime pas les jeux de ses camarades et préfère la compagnie de Wallie qui voue au chant une passion. Treadway l'élève comme un fils du Labador, ce père absent une partie de l'année qu'il passe dans la forêt à chasser. Jacinta voit dans Wayne la fillr qui se manifeste par ses goûts. Thomasina a perdu son mari et sa file Annabel et voyage à travers le monde expédiant à Wayne des cartes postales représentant des ponts des pays où elle met les pieds, apprend, s'émerveille des cultures. Malgré les médicaments censés développer son physique masculin, la féminité de Wayne est perceptible. Un jour, Wayne souffrant de maux au ventre doit être transporté à l'hôpital. Thomasina est rongée par la certitude que Wayne doit savoir alors que son père s'y oppose farouchement. Tandis que Jacinta culpabilise d'avoir fermé la porte à la féminité de son enfant et se détache peu à peu de son mari. : " C'est le corps de Treadway qui exprime son jugement. Il déplace ses membres avec une précision exagérée, les traits figés par la désapprobation. Il se met hors d'atteinte, mai son corps parle pour lui et Jacintha déteste cela. Elle veut que les mots sortent de sa bouche mais il sortent de ses os. Ses os qui lui disent : tu peux bien être indulgente ou aveugle, mais moi, je ne suis ni l'un ni l'autre."

Wayne ressent la tension entre ses parents, essaie de percer ce mal-être. Est-ce de sa faute? Je n'en dirai pas plus sur l'histoire qui se déroule jusqu'à l'âge où Wayne devient adulte, prend sa vie entre ses mains, et découvre un espace de liberté.



Ce magnifique roman est porté par une écriture aux accents poétiques, où la nature s'intègre comme personnage à part entière. L'entité de la beauté, que chacun nous définissons selon nos propres critères est développée par sa multiplicité. Beauté de la nature sauvage, d'une vie qui s'épanouit ou d'un être humain différent qui possède une beauté propre. Un roman où les préjugés sont abattus et les œillères écartées.



Kathlenn Winter nous dépeint des personnages dont les vies sont simples. Ils ne courent pas après le matériel et Treadway cache sous son silence ou son comportement maladroit autant d'amour que son épouse pour son enfant. Les sentiments de tous les personnages, leurs ressentis, les descriptions de la nature, de l'amour d'une mère pour son enfant, ou la bienveillance de Thomasina, découlent avec finesse et délicatesse. Il y a cette beauté si pure, cette grâce si touchante de l'écriture que j’ai en ai pleuré ! Le livre débouche sur sur Wayne qui a su devenir lui-même et j'ai terminé cette lecture avec un sentiment de plénitude. Un gros coup de cœur ! A noter l'excellente traduction !
Lien : http://fibromaman.blogspot.f..
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Annabel

Y a t il plusieurs humanités ? Peut être un jour en existera t il une qui portera en elle le fruit de sa propre origine ? Des êtres comme Wayne, comme Annabel. D'un genre qui nous est encore à ce jour méconnu. D'un genre particulièrement équilibré. Parfaitement organisé. S'étant soustrait du dogme de toute dualité, et donc de l'enfer de toute duplicité.

Des enfants d'Hermes et d'Aphrodite. Non pas moitié homme, moitié femme, non pas des êtres tronqués, ni à demi castrés mais des êtres enfin reconstitués.

Ils existent.

Wayne-Annabel existe.

Et c'est le parcours de son humanité que vous rencontrerez.

Ille, èl, qu'elle que soit le pronom singulier que vous lui donnerez, est né dans le Grand Nord.

Une terre où on a jamais vu personne survivre sans vérité.



Astrid Shriqui Garain

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Annabel

Annabel, c’est le nom de la fillette de Thomasina, morte noyée dans un lac glacé du Labrador. Annabel, c’est aussi comme cela qu’aurait pu se nommer Wayne si, à la naissance, face à un choix impossible, son père n’avait décidé qu’il serait un garçon.

Né hermaphrodite, l’enfant possède un pénis et un utérus. Seuls les parents et Thomasina, qui a aidé à l’accouchement, sont au courant de cette anomalie. Pour Jacinta, sa mère, l’enfant est parfait et elle déploie un amour maternel inconditionnel face à la singularité du nourrisson. Elle aimerait que cette complétude ne soit pas abimée, qu’on ne cède pas aux normes, à l’ordinaire. Treadwick, le père, ne l’entend pas ainsi : il se projette dans le futur de cet enfant et ce qu’il anticipe le broie. Alors, il fait un choix, celui qui lui semble raisonnable, qui correspond aussi à ce qui lui paraît le plus visible dans la morphologie de l’enfant – son pénis.

Annabel, c’est le roman de la construction identitaire, du corps dans lequel on ne se reconnait pas, qu’on contraint à coup de traitements qui n’ôtent rien au malaise. Wayne, enfant, a du mal à s’intégrer au groupe de pairs. Fasciné par la natation synchronisée, le dessin, l’étude, la rêverie. Il trouve auprès de Wally, sa camarade de jeu, la douceur et la beauté, la magie du chant qu’elle pratique en autodidacte. Ensemble, ils partagent de longues après-midi dans une cabane qu’ils ont aménagée et décorée. Cette amitié déplait à Treadwick, il préférerait que son fils court la forêt avec des garçons de son âge, qu’il soit davantage conforme.

Les années passent, Wayne est confronté à cette ombre intérieure qui lui murmure sa différence, des aspirations et des sensations qui le portent vers sa féminité.

C’est un formidable roman, qui met en scène des personnages humains, aux prises avec une situation d’une rare complexité, qui les oblige à aller chercher au plus profond d’eux-mêmes des ressources pour répondre le plus justement possible. La finesse de l’auteur est de décrire des parents fragilisés par la différence, ébranlés par l’anomalie de Wayne mais qui secouent toutes leurs certitudes et parviennent à sortir sortent d’une zone de confort social pour l’amour de leur fils. Treadwick - trappeur qui ne vit parfaitement que dans la solitude des bois – observe, écoute, se débat, tente les réponses classiques d’un père, la virilité, la force, le labeur davantage pour éviter la mise au ban social de Wayne que par peur du regard de l’autre. Jacinta soutient Wayne dans ses élans, tout comme Thomasina qui voit en cet enfant l’intelligence, les compétences, la rareté. Des adultes bienveillants qui cherchent la meilleure voie.

Le seul bémol, le style très travaillé m’a parfois empêchée d’être complètement dedans, j’ai eu le sentiment de rester un peu en extériorité, de ne pas éprouver l’émotion que certaines scènes auraient dû susciter.



Challenge Plumes Féminines

Challenge ABC – 2018/2019

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Annabel

Annabel est un livre que je qualifierai de petit bijou. C’est le genre de livre qui ne peut pas laisser indifférent, il nous remue, nous interroge et nous met à l’épreuve...



En quelques mots, ce livre vibre … Il est bourré de poésie, on y trouve également du bon sens, des sentiments profonds et des personnages incroyablement vrais. Ce judicieux mélange donne un livre formidablement réussi : il vaut vraiment le détour. Cependant, ce livre ne viendra jamais agresser jamais malgré un sujet délicat : c’est un livre laissera des traces.



C’est compliqué de parler d’un livre s’en trop vous en dévoiler le contenu… Mais je vais essayer. Annabel est né(e) hermaphrodite : cela nous paraît tellement simple scientifiquement mais comment dans la vraie vie vivre avec cette différence. Le livre souligne la difficulté des médecins à « régler » ce problème, met en évidence la détresse des parents qui feraient tout pour leur enfant et la gestion du regard des autres. Treadway et Jacintha sont des parents aimants et formidables qui donneraient tout pour leur enfant mais qui savent que la vie ne va pas épargner leur fils (fille). Ils essayent par tous les moyens de le protéger. Ce livre nous amène même à nous interroger : qu’aurions nous fait ? Chaque parent qui lira ce livre ne peut que se sentir concerné, interloqué, ou même dérangé. Notre instinct nous dicte que nous sommes là pour protéger nos enfants quoi qu’il arrive mais comment réagir quand la nature s’acharne. Un livre à lire A-BSO-LU-MENT.



Kathleen Winter est un auteur à suivre. Pour ce livre elle a été plusieurs fois finaliste : Le Giller Prize, le prix Orange et le prix du Gouverneur général.



Pour finir, et c’est rare que je fasse cela, je vais reprendre le commentaire de Marine Landrot, Télérama : " On a tous un roman un peu rare, un peu bizarre, totalement à part, qu'on offre à ceux qui semblent le mériter. Un livre cher qu'on partage avec les personnes dignes de confiance, qui auront interdiction d'exprimer la moindre déception sous peine de vous blesser déraisonnablement. Annabel fait partie de ceux-là."
Lien : http://ideeslivres.jimdo.com..
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Annabel

Le livre démarre superbement, exactement comme j'aime : grands espaces, des personnages tendres, un peu de sagesse et de magie, un peu de souffrance mais sans mélodrame, la douceur de la neige, l'appel de la forêt et un être qui arrive au milieu de tout ça, différent, d'une différence telle qu'il faut la cacher, d'une différence telle qu'elle bouleverse tout ce bel équilibre.

On gomme cette différence et l'on impose la normalité à un corps qui n'en a pas les moyens et cette différence ne demande qu'à sortir... un peu tout le temps. Cette différence étouffée sourd de tous côtés et brûle les protagonistes...

J'étais partie pour une lecture formidable... et malgré tout, une petite pointe de déception quand le livre s'étire dans les méandres d'un quotidien un peu vide et quand la fin un peu abrupte n'apporte aucun éclairage neuf sur l'acceptation de la différence, sur la difficulté à être, sur le jugement des autres si ce n'est trop caricatural...

Alors que tout démarrait si bien, j'ai trouvé finalement que cela manquait un peu de profondeur et de finesse...
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Annabel

Ce livre, très intimiste et touchant, raconte l’histoire d’un couple qui va devenir parent et qui découvre, à la naissance de leur enfant, que celui-ci est hermaphrodite. Il exprime la difficulté d’expliquer la différence à un enfant, à essayer de le protéger des autres.

Le père, Treadway est un taiseux, vivant au milieu de la nature, partant pour de longs mois, trappant et lisant des livres au fond de sa cabane. La mère, Jacinta, très sensible et très seule, gère le quotidien, et surtout, le mal être qu’elle ressent d’avoir laissé son mari déterminé le sexe de leur enfant, qui sera un fils. Tout cela pèse sur les relations entre les membres de la famille.

Mais qu’en pense Wayne qui découvre tardivement la différence qu’il a toujours ressentie, lui qui a toujours eu l’impression d’être une fille au fond de lui, Annabel ?

Comment va-t-il surmonter cette hétérogénéité, à qui se confier, sinon à Thomasina, amie de la famille qui était là à sa naissance ? Comment va-t-il se construire ? Toute l’histoire est là.

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