Estime de soi-Comment identifier le syndrome de l'imposteur-France Inter 2016
Et que d’efforts et d’énergie pour atteindre l’inatteignable ! J’ai utilisé précédemment l’image de l’iceberg. Et qui dit iceberg dit pour moi Titanic ! Ce paquebot était réputé comme étant à la pointe de l’élégance, majestueux, luxueux, insubmersible… parfait. Le Titanic a justement coulé. Se pourrait-il qu’en nous donnant l’attente et l’illusion de la perfection, nous ne fassions qu’augmenter les risques d’échouer ?
Le syndrome de l’imposteur trouve ses sources dans l’environnement familial notamment, puis il a ses activateurs à l’âge adulte. Il est important d’avoir ce regard a posteriori afin de bien comprendre les facteurs ayant pu être propices à son expression tout autant qu’à son maintien. Dans ma famille, j’étais étiqueté comme l’enfant « intelligent », mon frère comme l’enfant « artiste » : chacun sa case définie, chacun son rôle à jouer. À partir de mes lectures, j’ai pu comprendre que j’étais dans un environnement familial qui avait beaucoup, dans un premier temps renforcé mon intelligence et mes performances scolaires. J’ai assez rapidement développé une autonomie dans mes apprentissages, que j’ai pu utiliser plus tard durant mes études.
Cela rejoint en réalité peut-être un dénigrement de mes compétences. À dire vrai, j’ai pu me considérer comme un imposteur et j’ai pu me dire qu’un jour ou l’autre, les gens finiraient bien par se rendre compte qu’ils se sont trompés sur mon compte.
Le syndrome de l’imposteur est très hétérogène. Il y a autant de syndromes de l’imposteur que d’individus qui l’expriment. Cet ouvrage présente ainsi l’ensemble des outils utiles dans cette problématique. Mais toutes les fiches ne vous concerneront pas nécessairement. Il s’agira de vous saisir de celles vous convenant le mieux au regard de votre expression individuelle ainsi que de votre mode de fonctionnement. Vous pourrez ensuite aller à votre rythme pour les utiliser, évaluer vos progrès, changer de stratégie si nécessaire et atténuer vos sntiments d'imposture.
En parlant de vos sentiments d’imposture, vous incarnez ainsi un modèle, permettant aussi à autrui de s’autoriser à verbaliser et à partager ses propres sentiments. Tout le monde a en effet le droit, d’une part, de douter, d’autre part, de verbaliser ses doutes. En parlant de notre syndrome de l’imposteur, nous développons notre authenticité et nous diminuons notre impression de tromper. Nous ne jouons plus un rôle, nous nous incarnons. Vous constaterez ainsi qu’il y plus de chance d’être accepté pour ce que l’on est que d’être rejeté pour ce que l’on n’est pas.
En contrepartie, notamment lorsque le syndrome de l’imposteur commence à s’exprimer à forte intensité, la détresse est elle aussi tout à fait palpable. Elle commence par une pression de l’excellence, un inconfort dans les interactions sociales : présentation potentiellement erronée de soi, sentiment d’incohérence entre les retours extérieurs et l’évaluation personnelle, volonté de correspondre aux attentes, masque exacerbant un sentiment d’isolement et d’incompréhension.
Il nous est difficile d’accepter qu’une blessure psychologique ou émotionnelle ait besoin, aussi, d’un certain temps pour s’atténuer. Il nous est encore plus difficile d’envisager de faire appel à un professionnel de la santé mentale pour nous aider en cas de blessure importante et tenace : les stéréotypes sont tout aussi importants et tenaces. Également, certaines blessures psychologiques ou émotionnelles peuvent laisser des traces. Vous en conviendrez, c’est évident.
Il est très facile de se qualifier d’imposteur en estimant réussir grâce à des causes instables et hors de contrôle qui ne permettent pas de renforcer l’estime de soi ou la confiance en soi. La crainte d’être finalement remis à sa place par autrui ou par les circonstances n’en est que plus grande. Il est très facile de se qualifier d’imposteur en gardant un masque social afin d’être accepté par autrui, tout en craignant de se découvrir et être exposé.
Et, dans la mesure où les événements de la vie sont toujours complexes avec de multiples processus en jeu, nous sommes forcés de constater qu’il n’y a rien de plus toxique que la rigidité face à la complexité ;
– d’un autre côté, nous pouvons endosser tout un système de règles de vie autour de ces mêmes notions sur un registre rationnel, qui sont le reflet de préférences et de contextualisation interne et externe, et qui sont donc flexibles.
Le doute est légitime. Il nous permet effectivement d’avancer et de nous adapter grâce à nos remises en question. C’est d’ailleurs le propre de l’intelligence. Toutefois, notons qu’il existe une différence de taille entre douter de soi et douter de ses idées. Douter ne signifie pas nécessairement exprimer un syndrome de l’imposteur : il y a en effet plusieurs critères qui constituent ces sentiments.