Je détestais de nature, les décisions guidées par l’émotivité. Les mots et les choix lancés dans un moment de colère ressemblent dangereusement à la colère elle-même : leur bienfait est toujours éphémère et leur issue, généralement déplorable.
C’est probablement ce qui ronge le plus cette famille de l’intérieur : la tare ancestrale de l’obéissance aveugle aux commandements les plus injustes. Mon père avait obéi aux lois sociales vieillottes et obsolètes certainement héritées de ses arrière-grands-parents, ma mère avait obéi aux lois rigides et cruelles de mon père, et notre fratrie - en apparence si moderne – continue encore aujourd’hui à maintenir cette tradition pourrie d’obéir aveuglément à des ordres et des décisions issus d’une mentalité qui n’a plus rien à voir avec le bonheur des individus, mais qui cherche simplement à sauvegarder une image sociale bien-sous-tout-rapport. Même au détriment de notre propre bonheur. Et discuter un ordre ou une décision – même lorsqu’elle est complètement illogique et arbitraire – relève désormais du blasphème.
C’est quand tout, autour de toi, cesse d’avoir le moindre sens, que tu arrives à voir les choses qui ont réellement un sens – et une importance – pour toi. Le chaos a ce pouvoir-là sur nous, je crois ; celui de nous dépouiller de tous nos artifices, même ceux qu’on croit réellement être importants. Tu lèves la tête, au cœur même de la folie, et tu arrives soudain à discerner, avec une telle clarté, les choses qui ont une véritable signification. Sans chaos, on ne peut jamais acquérir la lucidité nécessaire pour faire le tri dans notre existence, entre ce qui est important et ce qui ne l’est pas.
« Il récolte ce qu’il a semé. Dieu l’a puni. Il n’a que ce qu’il mérite. »
Une grimace écœurée m’échappe.
« Je vois que papa t’a légué le poste de porte-parole de Dieu. C’est sympa. »
Je regarde droit devant moi. J’ai peur de lui renvoyer tout le dédain que j’ai pour sa profonde bigoterie, si jamais mon regard croise le sien.
Un mariage est fait de compromis, de patience, de concessions, d'indulgence, d'un souci commun de faire tourner la machine en dépit des désagréments de la vie, des erreurs qu'on commet ou qu'on pardonne, et aussi d'un respect mutuel et d'une affection sereine nés de toute les épreuves que vous avez tant bien que mal réussi à traverser ensemble.
Après tout, le rôle des vraies amies se résumait à cela : vous déculpabiliser et vous soutenir, en vous répétant que vous méritez mille fois mieux.
Tous ces mensonges censés vous mettre du baume au coeur , en gros.
Ses éclats se mêlèrent à ceux de son cavalier et elle pensa que, tout compte fait, le bonheur pouvait prendre bien des formes.
Comme celle d'une danse joviale, un soir, sous la lune, devant une vieille cabane.