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Critiques de Lasha Otkhmezuri (45)
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Joukov : L'homme qui a vaincu Hitler

Même si les mémoires de Joukov sont parues, il ne faut pas s'y fier, entre censure et réécriture de l'Histoire selon les auteurs, qui ont effectué un travail important sur ce personnage hors normes et le mettre à portée de tous. J. Lopez, spécialisé dans la seconde guerre mondiale, à commis différents ouvrages à ce sujet de grande qualités.

Même si la biographie est celle du maréchal Joukov, l'ombre de Staline rodé dans toute l'œuvre tellement leurs destins sont imbriqués.



Première partie un peu lente, détaillée, mettant en parallèle la montée de la carrière de Joukov avec l'avènement et la consolidation du régime bolchevique de la Russie de l'entre deux guerres. Joukov n'est pas encore suffisamment important pour avoir été victime des grandes purges politiques qui décapitèrent l'armée. Même si le sujet est intéressant il reste présenté de façon académique et presque ennuyeuse.

Vu le pavé, là le lâche abandon guette.



Mais...



La deuxième partie, celle de l'avènement du chef de guerre Joukov, jusqu'aux plus hautes fonctions militaires et étatiques, est passionnante.

Les différentes batailles sur le front de l'Est sont bien exposées, ainsi que les batailles militaro-politiques et celles des egos entre les grands chefs d'armée, orchestrées le plus souvent par un Staline omniprésent.

Un reproche, la bataille pour Stalingrad est trop vite abordée à mon goût, heureusement il existe des ouvrages specifiques sur ce tournant historique de la WW2.

A mon avis, sur ce chapitre, l'œuvre ne met pas assez en exergue l'effroyable coût humain de toutes ces batailles ; elle reste très descriptive, distanciée.



Grandeur et déclin d'une icone militaire et guerrière.

La troisième et dernière partie raconte le destin après guerre de celui qui aurait pu être le maître du Kremlin s'il avait été plus politique, selon les auteurs.

Cette partie est plus superficielle et présente parce que la vie et l'œuvre de Joukov ne sont pas terminées, mais elle semble superfétatoire. La légende Joukov, chef de guerre majeur de la WW2, atteint son zénith avec la prise de Berlin ; la vie politique désordonnée d'un militaire jusqu'à la moelle, personnage d'envergure imprégné de stalinisme, n'a que peu d'importance s'il ne peut simposer au sommet ; il est et restera celui "qui a vaincu Hitler " militairement.



Les auteurs, tout en restant plutôt favorables à Joukov sans verser dans l'hagiographie, mettent bien en exergue ses nombreux défauts, dont son incommensurable vanité, et livrent une biographie qui intéressera fortement les passionnés de cette époque.
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Barbarossa : 1941. La guerre absolue

Jusqu’à présent, aucun adversaire, a l’Ouest comme à l’est, n’a été à la hauteur de notre volonté de vaincre, de notre instinct pour l’attaque. Ces unites, parmi les plus médiocres, pénètrent en Biélorussie.

Après des combats devant Sloutsk et Bialystok qui lui coûtèrent 186 pertes. Avant qu’une délégation n’atteigne le village , les habitants sortirent leur drapeaux blancs. Ils offrent le pain et le sel, en signe de bienvenue pour les 2000 juifs assassines Quelques jours après le massacre de Bialystock. le général Pavlov est arrêté par le NKVD puis est torture par le Torquemada rouge. Des deux côtés des troupes politiques sont sur le terrain et monopolise l’effort de guerre. Les allemands tentent de présenter leur invasion comme une opération pan européenne en appelant à eux des contingents venant des pays occupés. L’enfer de Dante lui meme est inspire de cet épisode. Hitler choisit de coopérer. Il est issu d’un monde alpin dont les préoccupations sont éloignées de celles de la Prusse, des baltes allemands. Jamais il n’avouera de sympathie pour le monde russe. Il préférait le vieux reich. Il préférait aller à pied dans les Flandres. Aucun auteur russe n’existe dans sa bibliothèque. A la différence d’un Himmler dont le père a été précepteur de russe. Existe t’il pire moment pour découvrir un pays. Depuis la guerre d’Ukraine, je n’ai jamais connu comme d’autre, la géographie de ses contrées. L’oblast de Tchernobyl me fait peur.

J’entends Tchernobyl. De la signature du pacte Ribbentrop-Molotov, en août 1939 jusqu’à l’effondrement français de juin 1940, la politique affichée va bien au- dela. La raspoutitsa est la période des sans chemins. La Russie est une noix très dure.
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Joukov : L'homme qui a vaincu Hitler

En ce qui concerne la seconde guerre mondiale, en France le front Est n'est pas très connue. On en retient l'image d'un carnage de vingt-cinq ou trente millions de morts dans la neige et la boue, de la Baltique à la mer Noire. Pour les batailles, Stalingrad. Pour ceux qui en savent un peu plus, le siège de Leningrad. A partir de Koursk, on touche aux experts. Mais l'ignorance devient presque total quant aux généraux qui dirigeaient les gigantesques masses d'hommes et de chars soviétiques. Un seul nom émerge parfois : Joukov.



Naît dans une famille pauvre, il est recueilli par l'un de ses oncles, artisan, qui le prend comme apprenti. Mobilisé pendant la première guerre mondiale, il voit ses premiers combats, s'y distingue, est blessé – et également marqué par le degré d'anarchie et de corruption de l'armée russe. A l'arrière au moment de la révolution, il rallie les bolcheviks, participe à la guerre civile, s'y distingue, est promu officier.



Il participe avec enthousiasme à la construction de l'armée rouge, se passionne pour les nouvelles théories, notamment celles sur l'usage des blindés du grand maréchal Toukhatchevski, les met en pratique pendant la guerre russo-japonaise de 1939. Dans l'univers totalement orwelien de l'URSS, il survit à toutes les campagnes de traque des « ennemis du peuple », et même aux grandes purges de l'armée, durant lesquelles le corps des officiers est décimé - Toukhatchevski lui-même est exécuté.



Quand Hitler attaque, l'armée rouge est donc dans un état de désorganisation total. L'attitude de Staline, qui pendant les premiers jours refuse de croire qu'il s'agit d'une attaque et interdit toute riposte, n'est pas pour améliorer les choses.



Quand il accepte enfin la réalité, l'URSS est dans une position désespérée. Ses armées ont subi des pertes phénoménales ; les panzers foncent sur Moscou ; les grandes villes tombent les unes après les autres. Vorochilov, Boudienny, Ieremenko, tous les militaires survivants de l'entourage de Staline sont totalement dépassés. Dans cette situation, un seul nom s'impose pour faire face : Joukov.



C'est à lui que revient la lourde tâche de sauver la Russie des nazis. Pour l'épauler, on ressort des officiers du goulag ou des geôles du NKVD – certains en assez piteux état, notamment le futur maréchal Rokossovski, qui malgré une mâchoire et trois côtes cassés suite aux interrogatoires reprend son poste comme si de rien n'était.



C'est Joukov qui mènera la défense de Moscou. Lui qui mènera la défense de Léningrad. Lui encore qui conçut le plan pour sauver Stalingrad. Il commit des erreurs stratégiques qui coûtèrent inutilement la vie à des milliers de soldats soviétiques, mais globalement, il n'est pas sûr que l'URSS aurait pu survivre à l'invasion s'il n'avait pas été à la tête de ses armées sur tous les points critiques. Tout au long de la guerre, il se heurta à la méfiance paranoïaque de Staline, qui le plaça en résidence surveillée après 1945. Après la mort de Staline, sa stature de héros fit de lui un enjeu politique pour les différentes factions s'affrontant au sein du Komintern.



Encore aujourd'hui, ses biographies sont rares. Celle-ci est un magnifique travail d'historien, et nous offre une incroyable plongée dans l'URSS et le front Est.
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Barbarossa : 1941. La guerre absolue

Cet ouvrage de 1682 pages (oui, oui, vous avez bien lu) évoque la première partie de l’opération Barbarossa qui se déroule du 22 juin 1941 à fin décembre 1941 quand la Wehmacht comprend qu’elle ne pas avancer plus avant, qu’elle ne pourra pas anéantir l’Armée Rouge, considérée pourtant comme une armée d’incapables. Après un long préambule sur les atermoiements de Hitler qui tient à attaquer l’URSS mais sans ennemis dans le dos (il va même jusqu’à envisager une alliance avec la Pologne) et les craintes de Staline qui sait les faiblesses de son armée et qui aimerait gagner du temps -d’où le pacte de non-agression-, les deux auteurs déroulent l’invasion de l’URSS et surtout la violence inouïe qui va s’abattre sur les soldats et la population soviétique, faisant 5 millions de morts en 200 jours.



Ce qui est frappant dans cette longue démonstration historique, c’est le choix de la violence par les Allemands. Or, certaines populations (notamment les Ukrainiens) ont accueilli l’arrivée de la Wehmacht avec beaucoup d’espoir, celui de pouvoir se débarrasser des communistes. Mais les Allemands ne l’ont pas compris, dans leur arrogance et leurs préjugés, ils ont multiplié les exactions, s’aliénant ainsi les territoires occupés. Du côté de l’Armée rouge, on est effaré par l’impréparation des soldats, la médiocrité voire l’absence de communications entre les différentes unités, groupes de combattants qui attaquaient sans savoir où se trouvaient ennemis ou amis. Sans oublier la violence exercée par la Stavka, le haut commandement où siège Staline en personne, qui impose les mouvements de troupes, les positions à tenir ou à enlever sans tenir compte de la réalité du terrain, des forces en présence et envoyant comme chair à canon des milliers de soldats peu armés (parfois, les soldats doivent partager des fusils…), mal commandés et qui sont pris entre le feu des Allemands et celui du NKVD. Malgré tout, l’Armée rouge résiste, se réorganise et tient face aux armées allemandes qui vont s’enliser dans ces territoires immenses. Les survivants accuseront plus tard dans leurs mémoires le fameux hiver russe pour justifier leurs échecs mais ce sont leur aveuglement, leur arrogance et l’immensité du territoire qui les ont fait perdre.



1682 pages… C’est long mais j’ai appris des faits que j’ignorais encore.



Challenge Pavés 2024

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Joukov : L'homme qui a vaincu Hitler

Je viens de terminer, péniblement,la longue et très interessante biographie de Joukov, " l'homme qui a vaincu Hitler", je dis péniblement car non seulement l'ouvrage comporte plus de 650 pages mais il nous plonge, au delà de l'histoire militaire, dans les méandres de soixante ans d'Histoire russe,soviétique surtout, et ce n'est pas ---pour un lecteur français--- son côté le plus attractif . Je me suis donc accordé de longues poses, alternant avec la lecture d'autres livres très différents et revenant régulièrement à cette Histoire au long cours .Comme le fait remarquer très justement un de mes petits camarades (et ami ), c'est la première bio de Joukov en français et elle s'impose par le sérieux de sa documentation et le talent de son principal auteur, Jean Lopez dont je vais maintenant "attaquer" "Koursk,les quarante jours qui ont ruiné la Wehrmacht" . Je ne vais pas raconter ici la vie de Gueorgui Konstantinovitch Joukov, maréchal de l'Union Soviétique, vainqueur de l'agression hitlérienne et survivant des innombrables soubresauts des ères stalinienne et post-stalinienne . Qu'il me suffise de dire que le début est lent, que la période la plus interessante est ,bien sûr, celle de "la grande guerre patriotique" (pour employer la terminologie locale ) et que la fin du livre, la fin de vie en fait, est assez pénible . Il n'empêche, ce livre est un monument dont la lecture n'interessera que les passionnés d'Histoire (dont votre serviteur ) et je répète que je salue bien bas le travail de Jean Lopez, j'ignore la part exacte prise par monsieur Lasha Otkhmezuri .
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Barbarossa : 1941. La guerre absolue

Il n’est pas et il n’y eut jamais de guerre « propre » mais certaines repoussent les limites de l’horreur et de la folie humaine. L’invasion de la Russie Soviétique par l’Allemagne nazie atteint un degré inégalé dans ce domaine. Les auteurs de cette somme (900 p.) en analysent de manière précise et documentée les préparatifs,le déroulement et tous les aspects ( militaires, économiques , géopolitiques, humains). De cette lecture , il ressort plusieurs faits : le calvaire vécu par les peuples des régions impliquées pris entre la mégalomanie raciste d’Hitler et la paranoïa stalinienne , l’incompétence , l’aveuglement , la soumission des castes militaires et politiques, l’ensauvagement des troupes soumises à des conditions intolérables. Ne pas oublier aussi le prix exorbitant que paya le peuple russe en usant l’armée allemande ce qui permis la victoire finale .Un remarquable travail d’historien qui éclaire le passé et rend plus lisible le présent.
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Joukov : L'homme qui a vaincu Hitler

Une biographie du général Joukov ? Mais qui donc est le général Joukov… ?



Même sans être spécialiste de la seconde guerre mondiale, tout le monde connait les généraux Eisenhower, Montgomery ou Patton côté Alliés, Rommel, Guderian, Manstein ou Von Rundstedt côté allemand. Mais qui connait le nom d’un général de l’armée soviétique ?

Et bien Joukov est tout simplement le plus grand général de l’armée rouge, celui qui a arrêté les allemands devant Moscou, puis contribué à toutes les opérations qui ont mené les soviétiques jusqu’à Berlin.



Mobilisé en 1915 dans la cavalerie de la Russie tsariste, il fera ses premières armes sur le front Ukrainien contre les Autrichiens, avant de prendre part, dans les rangs bolcheviques, à l’immense conflit de la guerre civile russe. Porté au sommet de l’armée rouge par ses qualités, mais aussi par l’ « appel d’air » créé par les grandes purges de l’armée en 37/38, Joukov a été de toutes les batailles de la seconde guerre mondiale : désastres de 1941, contre-attaque de Moscou, Front de Leningrad, Bataille de Mars et de Stalingrad, Koursk, Opération Bagration et bien sûr bataille de Berlin. Il était un peu le « pompier » de l’armée rouge, et Staline, qui avait toute confiance en lui (Incroyable, pour un paranoïaque maladif comme lui) l’envoyait sur tous les points chauds de front de l’est.



A travers le parcours de ce général, l’auteur nous entraîne dans un demi-siècle d’histoire et de pensée militaire soviétique. Il nous explique les théories de l’art opératif des penseurs soviétiques des années 30, nous explique les insuffisances de l’armée rouge du début de la guerre, le pourquoi des grandes décisions de Staline et les véritables objectifs de chaque opération. C’est passionnant !



On finit même par s’attacher à ce grand général, bien qu’il ait toujours été bolchevique, fidèle à Staline, brutal avec ses subordonnés, et peu regardant sur l’importance des pertes humaines. Son énorme courage physique, sa force de travail colossale, son niveau d’exigence très élevé (dans une armée gangrenée par le laxisme), sa volonté de redonner la prééminence aux militaires sur les commissaires politiques, sa sobriété (!) forcent l’admiration. Il était également le seul à ne pas avoir peur de dire la vérité à Staline, ce qui en dit long sur son courage !

Son parcours après la guerre ne fait pas non plus tâche sur son CV : il s’efforce de réhabiliter les militaires déchus pendant la grande purge de 37 (du moins ceux qui sont toujours en vie…), se préoccupe de la condition des vétérans, participe à la déstalinisation aux côtés de Krouchtchev, avant d’être disgracié par le même M.K., qui avait finit par le trouver dangereux : trop populaire...



Par ailleurs, le livre est bien écrit et se lit facilement, presque comme un roman. La vie privée du personnage ne prend pas trop de place, et les différentes époques sont traitées de façon équilibrée. On pourra cependant déplorer certaines longueurs dans la démonstration des failles et incohérences de la biographie de Joukov, ainsi que le peu de place accordée à Stalingrad et à l’opération Bagration. Mais le propos de l’auteur n’était pas de réécrire l’histoire de ces batailles, par ailleurs bien connues. Pour plus de détails, on pourra se référer à « Stalingrad » d’Anthony Beevor ou à « Opération Bagration » du même Jean Lopez.



Un très bon livre donc pour tous ceux qui s’intéressent au conflit germano-soviétique et à l’histoire militaire soviétique. Même les plus calés approfondiront leurs connaissances !

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Barbarossa : 1941. La guerre absolue

Ce livre fait partie de ceux que j'ai vraiment adoré lire sur la longueur, goûtant chaque référence.

J'aime cette période et j'ai déjà lu nombres d'ouvrages sur l'opération Barbarossa et j'apprécie vraiment cette "mini" bible...

L'opération Barbarossa, qui s'ouvre le 22 juin 1941, ne ressemble à aucune autre opération militaire dans l'Histoire. Elle met aux prises les deux systèmes militaires les plus puissants et les deux régimes les plus brutaux du moment.

D'échec, en mauvaise décision, de vengeance en malchance... de politique en géopolitique, d'égo en généraux dépassés (ou peu écoutés), cette période est fascinante et ce livre fait parti de mes livres de chevet sur la période (comme Koursk 1943, paru récemment).
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Barbarossa : 1941. La guerre absolue

Jean Lopez, directeur de la rédaction de Guerres & Histoire, et Lasha Otkhmezuri, docteur en histoire, ont commis une étude magistrale intitulée Barbarossa et sous-titrée « 1941, la guerre absolue ». Nous avons en toute vérité énormément apprécié cette somme de 960 pages qui fourmille d’anecdotes, d’explications et d’analyses des plus éclairantes. Cette campagne peut en effet, de prime abord, sembler difficile à saisir dans son ensemble, car elle cumule les fronts, les attaques, les contre-attaques, les sièges, les retournements de situation les plus exceptionnels et improbables. Elle engloutit les soldats et ravage les terres. Des milliers de chars et d’avions entrent en service pour détruire l’ennemi. L’opération Barbarossa reste à ce jour la plus grande invasion de l’histoire militaire en termes d’effectifs engagés et de pertes cumulées.



Lancée le 22 juin 1941, un an jour pour jour après la signature de l’armistice avec la République française, Barbarossa fixe à quatre mois le délai nécessaire à l’anéantissement militaire de l’Union Soviétique. Pour l’anecdote, il faut savoir que Napoléon inaugura sa campagne de Russie le 24 juin 1812 avec la réussite que chacun connaît. De fait, les Allemands, conscients malgré tout du potentiel militaire russe à venir, veulent détruire rapidement les forces armées soviétiques, avant que celles-ci ne puissent déployer leurs forces dans toute leur étendue, et en exprimer toutes les dimensions.



Dès les premières lignes, nous lisons : « la Wehrmacht entame une guerre d’extermination et de colonisation ; l’Armée rouge et la population soviétique se vident de leur sang, prises entre les feux d’un ennemi sans pitié et les assauts de la terreur stalinienne ». Même au plus fort du conflit, Staline et les siens craignent des complots de l’intérieur alors que la majorité de la population russe ne pense qu’à une seule chose : survivre. Ainsi, les commissaires politiques soviétiques emprisonnent de nombreux russes, ce qui renforce leur défiance à l’endroit du régime. Des millions de prisonniers, politiques ou non, tentent de survivre au Goulag, tandis que la police politique - présente partout - est haïe. Sous le régime des soviets, la délation demeure une règle de savoir-survivre pour être bien considéré par les autorités.



Comme l’expriment très bien les deux auteurs, « l’opération Barbarossa cumule les particularités. A ce titre, elle occupe une place à part sans l’histoire militaire. Jamais, depuis les guerres de religion, un conflit militaire n’a été idéologisé à ce point. Des deux côtés des troupes politiques — SS/SD et NKVD – poursuivent des objectifs propres, dont de nombreux éléments sont néanmoins intériorisés par l’encadrement et la troupe. Les Allemands tentent de présenter leur aventure comme une croisade paneuropéenne, en appelant à eux armées de l’Axe et contingents venus des pays occupés ; les Soviétiques font donner partout les partis communistes, leur cinquième colonne. »



Lopez et Otkhmezuri relèvent également les caractéristiques propres des belligérants : « Les Allemands apportent dans leurs bagages une tradition de violence contre les civils ennemis, l’obsession des francs-tireurs et des partisans, la primauté donnée au combat sur toute autre forme d’engagement militaire. L’Armée rouge est la créature d’un parti politique, dont elle intègre les organes et les méthodes de surveillance et de répression ; elle est indifférente au sang versé par ses soldats ou aux souffrances de ses propres citoyens. »



Les nationaux-socialistes et les soviétiques s’appuient d’une même façon sur une vision politique qui se revendique absolue, totale, et seule légitime, juste et même bonne. Les auteurs estiment que « les deux adversaires se nourrissent de mythes puissants - judéo-bolchevisme et complot capitaliste - qui marquent les opérations, la diplomatie, les buts de guerre. » Cependant, avant d’en arriver à se combattre jusqu’à la mort, les deux blocs entretiennent des échanges cordiaux, qu’ils soient diplomatiques, politiques et économiques. Les auteurs démontrent avec des arguments et des preuves irréfutables que les deux gouvernements ont cherché à trouver des terrains d’entente. Prenons le temps de mentionner la signature du Pacte germano-soviétique, officiellement traité de non-agression entre l'Allemagne et l'Union soviétique, qui regroupe un ensemble d'accords diplomatiques et militaires signés le 23 août 1939 à Moscou, par les ministres des Affaires étrangères allemand, Joachim von Ribbentrop, et soviétique, Viatcheslav Molotov, en présence de Staline. Jusqu’à la fin de l’année 40, les diplomates allemands et russes discutent pour que les deux « empires » soient alliés.



Dans le même ordre d’idée, et ce n’est malheureusement pas enseigné par oubli volontaire ou par méconnaissance historique, les soviétiques dans le cadre des accords commerciaux signés avec les nationaux-socialistes, leur ont livré du pétrole, des céréales et des matières premières. Les chiffres donnent le tournis : 900 000 tonnes de pétrole, 1,6 million de tonnes de céréales et 140 000 tonnes de minerai de manganèse. Paradoxalement, les Russes ont donc participé à l’effort de guerre contre leur pays. Ces captivantes péripéties sont parfaitement décryptées dans l’ouvrage. Elles permettent de saisir tous les enjeux diplomatiques des années 30, trop souvent réduites dans l’enseignement officiel à un affrontement du bien contre le mal.



Toutefois, l’antagonisme pesait trop lourd entre le Reich et l’URSS pour qu’ils n’entrassent pas en conflit tôt ou tard. Lors de la montée des tensions débouchant sur la guerre totale, nous notons que « des deux côtés on se berce d’illusions : de soi-disant fragilité, d’origine raciale, du système soviétique, ou de solidarité attendue des ouvriers sous uniforme allemand ; l’on sous-estime l’adversaire et l’on surestime ses propres forces à un point qui défie tout bon sens militaire ; l’on croit à une guerre courte et peu sanglante pour soi-même ; l’on applique des plans d’opérations ineptes, comme conçus par des dilettantes œuvrant dans un monde de purs concepts ; l’on croit détenir la formule magique de la victoire, qu’on la nomme Blitzkrieg allemande ou pensée opérative soviétique ». Il existe souvent un monde d’écart entre les discussions dans les bureaux confortables de l’état-major et la réalité du terrain comme l’apprennent à leurs dépens des millions de soldats. Un des nombreux points qui a également retenu notre attention : la volonté des auteurs de détailler les erreurs stratégiques et tactiques commises par les différents acteurs de ce drame.



Lopez et Otkhmezuri rappellent que « le résultat de cette moisson de superlatifs est la création d’un brasier de proportions monstrueuses. Combats, exécutions, famines délibérées tuent en deux cents jours plus de 5 millions d’hommes, femmes et enfants, soldats et civils. Mille morts à chaque heure, nuit et jour. C’est, sur un seul front, le semestre le plus létal de la Seconde Guerre mondiale, et, sans doute, dans toute l’histoire humaine. »



Les auteurs usent d’une métaphore pour montrer la réalité de cette guerre : « l’enfer de Dante est une tiède géhenne comparé aux grands mouroirs à ciel ouvert qui s’égrènent le long de la ligne de front, dans Leningrad assiégé, dans les 200 camps de prisonniers de guerre soviétiques, dans les villes occupées, ravagées par la faim. Le nazisme et son armée donnent la pleine mesure de leur potentiel de destruction, de nature centrifuge : on tue l’autre. Pour survivre à l’assaut, le bolchevisme stalinien radicalise sa violence, de nature paranoïaque et centripète : on tue d’abord parmi les siens. Il utilise les armes avec lesquelles il a édifié une industrie, collectivisé l’agriculture, éliminé des classes sociales entières. Contrairement à ce que certains intellectuels soviétiques ont ressenti pour eux-mêmes, la guerre ne change pas le stalinisme : elle l’exalte. »



Pour rédiger ce passionnant ouvrage les auteurs ont pu s’appuyer sur des authentiques sources d’informations. Ils nous disent que « les matériaux abondent. Archives militaires et diplomatiques, mémoires, journaux d’unités et écrits personnels, rapports, enquêtes, interviews de vétérans menés par nous-mêmes, sont mis à profit, qu’ils aient été écrits en russe, en ukrainien, en allemand, en anglais, en géorgien, en italien ou en espagnol. » Lopez et Otkhmezuri prennent le temps de décrypter leurs méthodes de travail. C’est vraiment intéressant de savoir que leurs recherches reposent sur l’étude de nombreux et différents types de documents, de surcroît écrits en plusieurs langues. Ils ajoutent que « les journaux intimes constituent aussi des sources précieuses, notamment pour saisir les mouvements de l’opinion et ce produit phare de la société soviétique, la rumeur. »



Ce livre répond à de nombreuses questions. Nous en reproduisons certaines : « Comment l’Armée rouge, monstre pataud, dominée de la tête et des épaules, détruite deux fois, reconstruite deux fois, a-t-elle pu se sauver d’un désastre qui semblait au monde entier inévitable ? Comment la Wehrmacht a-t-elle pu pousser son effort jusqu’à tomber littéralement en morceaux ? Qui, comme Staline, s’est fait surprendre par une attaque qui se dessinait son nez, jour après jour et pendant des mois, et dont il avait été averti cent fois ? Qui, comme les chefs de la Wehrmacht, s’est refusé à voir que cet adversaire que l’on donnait pour mort allait sortir du tombeau et frapper avec vigueur ? » Les réponses à ces pertinentes interrogations se trouvent dans cette production intellectuelle d’excellente facture.



Il ne faut pas perdre de vue que « l’échec de l’opération Barbarossa a engendré des conséquences considérables et à longue portée. Elle renverse le sablier du conflit et permet d’apercevoir le terme de l’aventure nazie. L’Etat soviétique, suicidaire du fait des dérèglements même du système stalinien, prolonge son existence de quarante ans par sa victoire et le retentissement qu’il sait lui donner. » Lopez et Otkhmezuri estiment avoir « voulu présenter une vision équilibrée des deux camps - et de leurs alliés respectifs -, passant du Kremlin à la Redoute du loup, des états-majors des Fronts à ceux des groupes armées, du NKVD aux Einsatzgruppen, des unités en marche aux usines et aux fosses d’exécutions. » Néanmoins, ils précisent que « la vision équilibrée signifie que les adversaires ont droit à une place équivalente, non que nous les renvoyions dos à dos. » Ils ajoutent que pour eux « les morts de l’opération Barbarossa sont bien à la charge de l’Allemagne, le pays agresseur ».



Cette dernière idée exprimée peut quand même surprendre, étant donné que tous les spécialistes de cette période partent du principe, que tôt ou tard, les soviétiques auraient attaqué les nationaux-socialistes. De même, dans un souci de vérité et de justesse historiques, il s’avère effectivement impossible de renvoyer dos à dos deux systèmes politiques dont l’un a duré de 1933 à 1945, soit à peine douze ans, tout en étant limité à l’Allemagne ou à l’Europe centrale, alors que l’autre naquit en 1917 et a fini balayé par un vent de liberté en 1989 – soixante-douze ans de durée de vie - après avoir essaimé en Chine, Corée, Vietnam, Cambodge, Cuba, Vénézuela, etc. Aujourd’hui encore, certains pays se réfèrent toujours au communisme. Ce constat est quand même très inquiétant au vu du bilan humain de ces différents régimes…



En définitive, comment est-il possible de comprendre cette terrible tragédie ? Les mots manqueront toujours pour décrire l’horreur de la guerre et la folie des hommes. Pourtant, les deux historiens parviennent, grâce à un labeur de quinze ans, à restituer tous les enjeux de cette campagne militaire sur le sol russe en proposant une véritable enquête remontant aux origines du communisme et du national-socialisme. Ils analysent également la chronologie implacable de 1917 à 1940, quand tout se joue après la défaite de la France. Cette fresque historique retrace d’une manière limpide, nonobstant la masse d’informations à analyser et à comprendre, ce semestre effroyable où l’héroïsme se mêla aux plus viles actions humaines. Le récit se veut clair, pédagogique et véritablement instructif. Le lire permet de comprendre cette opération Barbarossa opposant « les deux systèmes militaires les plus puissants et les deux régimes les plus brutaux » de l’époque…







Franck ABED



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Joukov : L'homme qui a vaincu Hitler

En France, on nous fait croire que ce sont les Etats-Unis qui ont vaincu Hitler. (Interrogez les gens autour de vous.) Or, plus des trois quarts des forces allemandes en hommes et matériels étaient sur le front russe, avec des pertes en proportion. Il est vrai que le débarquement et la bataille de Normandie ont eu une importance particulière pour la France, mais il y a eu à l'est une dizaine de batailles gigantesques, comparables ou supérieures à celle de Normandie, où les morts se sont comptés par centaines de milliers de part et d'autre. Cf. par exemple ce graphique :

https://bit.ly/2UykcJF

Alors le vainqueur d'Hitler serait plutôt Staline ? Non, c'est bien sûr la totalité des millions de personnes qui ont participé à la lutte dans différents pays, mais s'il fallait ne retenir qu'un nom ce serait sans doute Joukov, puisqu'il dirigeait les armées soviétiques lors des principales batailles. (Staline ayant eu la lucidité, contrairement à Hitler, de se rendre compte que ses généraux pouvaient être plus compétents que lui.)

Cette biographie m'a semblé contribuer de manière très satisfaisante à combler partiellement une lacune dans le déficit d'informations sur le front de l'Est (en ce qui concerne les livres en français). Et j'ai trouvé ce livre agréable à lire !

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Joukov : L'homme qui a vaincu Hitler

La lecture de cette biographie est une utile épreuve. En effet, le grand général Joukov fait ses premières armes dans l'armée russe incroyablement désorganisée et brutale de la guerre de 14. Il survit, toujours militaire, au léninisme et au stalinisme, et se distingue dans l'atroce seconde guerre mondiale. Mais en 1945, il n'était pas tiré d'affaire et, pour paraphraser Art Spiegelmann, "ses ennuis ne faisaient que commencer" : la gloire militaire, dans une tyrannie orientale comme celle de l'URSS, fait apparaître Joukov comme un homme dangereux aux yeux du meurtrier paranoïaque qui gouverne le pays. Ayant survécu à tout cela, Joukov quitte enfin ce monde en mourant dans son lit, non sans avoir essuyé disgrâces et humiliations pour prix de sa victoire sur Hitler.

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Barbarossa : 1941. La guerre absolue

Enfin un ouvrage, structuré qui laisse à considéré la vision " scientifique ", preuves à l'appui. Un travail de géant qui n'oublie rien, d'un coté comme de l'autre, la gigantesque épreuve de force qui a opposées deux totalitarismes.

La seule chose que je puis dire, et c'est tout l'intérêt de cet ouvrage Universitaire, c'est que j'ai compris ce qui a animée l'âme russe, qui excelle dans la souffrance, mais qui au bout du compte est aussi négationniste que l'Hitlérisme.

La joie dans la souffrance, aucun peuple européen ne peut s'en prévaloir. 1 Allemands pour 7 Russes, voilà le constat chiffrable.

De plus la politique aberrante d'un Adolf auréolé de sa magnifique stratégie à l'ouest : Merci Manstein, lui a donné les éléments inappropriés pour s'envisager comme Alexandre.

On voit bien que la victoire a été gâchée devant Moscou, en dépit de l'excellence de ses techniciens, ainsi que du commandement qui donne libre court, au début, à l'initiative personnelle.

Cette volonté romanesque de mettre la volonté comme moteur de toute action, a paralysé une formidable machine de guerre à la dernière station de tram de Moscou.

L'introduction de ce choc de titans mérite une suite, car dans notre France pacifique, nous n'avons accès qu'à des mémorandum anglo-saxon qui ne laisse poindre aucunement la simple réalité des faits.

Enfin un ouvrage de référence, qui peut être pris comme référence et qui surtout, nous fait admettre que sans les russes l'Europe serait, peut-être germanique.

Mais cela reste, bien entendu, du registre du fantasme.

Cette attaqué cruelle, sans morale, dictée simplement par des considérations de races, ne trouve pas dans nos confortables gourbis occidentale, l'échos que ce choc a révélé sur les décennies à venir.

Merci messieurs Lopes et Otkhmezuri pour ce travail conséquent, qui peut être considéré comme une référence, je le redit, un manuel pratique pour l'historien qui s'aventure dans les contrées sombres de l'Est.

Une suite s'impose sur l'implosion du commandement ,nazi, les erreurs tournées en en accumulation de connaissances, grâce au brutal Joukov, une cohésion opérative qui trouve son succès en 44 avec l'opération Bragation.

Les réalités d'aujourd'hui me font penser que le russe se soigne qu'avec des pis à lait, et que les erreurs d'aujourd'hui, face à l'Ukraine ont comme un goût de déjà-vu : La masse ne compense pas la qualité.

De plus l'Ukraine se bat pour son sol, comme les russes le 22 juin 41.
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Les maréchaux de Staline

Voilà un beau livre à lire et à posséder. 🛑LES MARÉCHAUX DE STALINE de Jean Lopez et Lasha Otkhmezuri aux @editions.perrin

Plusieurs portraits dans cet ouvrage unique en son genre, qui s'appuie sur des sources exclusivement russes, explique la logique à l'oeuvre dans les choix militaires et humains de Staline. Il donne à suivre des parcours individuels stupéfiants, parfois tragiques, quelque fois rocambolesques, toujours inattendus. Le récit de ces dix-sept vies parallèles compose ainsi une fresque immense qui va de la Première Guerre mondiale à la crise des fusées à Cuba, de l'océan Pacifique à Berlin, des défilés glorieux sur la Place rouge aux geôles de la Loubianka.



🛑C'est sur ROKOSSOVSKI que j'ai décidé d'écrire. "Je suis le maréchal le plus malheureux. En Russie on me considère comme un polonais et en Pologne comme un Russe."Bel homme d'1m95, yeux bleus, voix douce, poli, solide, mâture, patient, intègre, courageux,diplomate. Il est proche du prince charmant 🤴😁. Il sera récompensé d'une montre en or gravée à son nom.

Arrêté par le NKVD pour trahison il sera enfermé à la prison Kresty de Leningrad. Battu jour et nuit durant des semaines il perdra toutes ses dents. Il refusera pendant ces 34 semaines d'avouer quoi que ce soit. Il sera libéré sans explications en mars 1940 restauré dans son grade et son commandement dans la cavalerie.

🛑 Alors que la guerre avance avec ses batailles, il sera le plus proche de Berlin mais Staline l'appelle et lui dit "C'est Joukov qui prendra Berlin".



🛑 ROKOSSOVSKI sera reçu par STALINE en 1948 lui avouant avoir du mal à le regarder dans les yeux car il a été arrêté injustement et cela l'inquiéte beaucoup.Il lui offrira 12 bouteilles de vin 🍷et 3 bouquets de roses🌹qu'il a confectionné lui même, les mains en sang.

Il eu l'honneur de commander la parade de la victoire sur la place Rouge le 24 juin 1945.

Après-guerre, en Pologne, il devient maréchal et ministre de la Défense de ce pays.

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Barbarossa : 1941. La guerre absolue

Peut-être le livre le plus épais que j’aie lu, et pourtant assez rapidement (pour moi) et avec plaisir. Un vif regret, que je n’avais pas compris en l’achetant : il s’arrête en 1941, et n’inclut donc absolument pas ce qui fait la célébrité de la bataille de Russie, à savoir Stalingrad.



Première fois que je lis un ouvrage de stratégie « polémologique », avec récit détaillé à l’extrême des batailles, des mouvements de troupes, noms des officiers impliqués, description minutieuse des matériels, etc. Le résultat est tout à fait passionnant. D’autant que l’ouvrage, honnête au plan politique — malgré deux ou trois propos affiliant directement Staline à Lénine, et faisant donc de ce dernier, à tort, un dictateur totalitaire — permet de démonter les mythes pro-Wehrmacht habituels (la défaite est due à l’hiver, les Russes étaient des sauvages, etc.). La tonalité m’a toutefois un peu gênée s’agissant des officiers nazis, décrits en termes tout à fait élogieux. Si les auteurs entendent détruire le mythe de la Wehrmacht « propre » entraînée dans les atrocités par les méchants politiciens hitlériens (en vérité, elle les a avalisées sans coup férir), ils y sacrifient un peu malgré eux en décrivant les aristocrates prussiens sous des dehors positifs (« courageux », etc.). Ça surprend et je ne suis pas tout à fait sûr que ç’eût été possible après-guerre : nous avons changé de régime d’historicité et il est de bon ton depuis la contre-révolution conservatrice (et la remontée du fascisme en Europe) de nuancer les condamnations du camp allemand (le film La chute est, de ce point de vue, un modèle de relecture historique visant à atténuer les torts du peuple allemand que je trouve assez scandaleux et qu’on pourrait à mon sens qualifier de révisionniste).



Un autre mythe auquel ce livre tord le cou est celui de la nullité proverbiale de l’Armée rouge. Si les auteurs montrent le gâchis humain, et les effets très néfastes des ordres de Staline (qui guerroie comme il industrialise ou collectivise, disent-ils, avec les traits de la doctrine bolchévique, volontarisme, grandiloquence, obsession pour l’offensive à outrance…), ils montrent aussi la qualité du matériel soviétique, l’abnégation presque sacrificielle des soldats russes qui étonna les Allemands. Qui le sait, aujourd’hui où l’on décrit trivialement l’Union Soviétique comme un régime ubuesque, absurde, haï, ridicule, etc. ?



J’ai noté, à mon grand regret, un propos absolument inacceptable, osant assimiler Nazis et Soviétiques quant à leurs intentions génocidaires vis-à-vis des minorités balkaniques. Autre point qui m'a gêné : les uchronies, ou tentatives d'imaginer "ce qui se serait passé si" (si Hitler et Staline n'avaient pas scellé leur pacte, si Hitler n'avait pas ouvert un second front, etc.). J'ai tendance à voir dans ce type d'exercice des élucubrations peu intéressantes. Par définition, nous ne savons pas et ne pouvons pas savoir ce-qui-se-serait-passé-si. Cela n'empêche pas l’ensemble d'être passionnant pour le néophyte que je suis.
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Barbarossa : 1941. La guerre absolue

Barbarossa n'est pas seulement la plus grande opération militaire de tous les temps, c'est l'affrontement de deux totalitarismes sanguinaires, de deux monstres dictateurs et une guerre inédite raciale et exterminatrice.



Jean Lopez et Lasha Otkhmezuri décrivent cette folie en près de 1000 pages, depuis les préparatifs aussi bien matériels qu'idéologiques jusqu'à l'échec allemand devant Moscou fin 1941. On imagine la somme de travail pour aboutir à cet ouvrage qui combine une vue panoramique du contexte et des opérations, associée à mille et un détails explicatifs tout en offrant une grande facilité de lecture.



Ce qui frappe d'abord c'est la démesure , celle des effectifs immenses des armées, de l'espace infini à parcourir et de la souffrance endurée par les peuples.



Ensuite la folie de Hitler et des nazis qui ne veulent pas seulement conquérir un territoire mais aussi massacrer ses habitants, qui n'hésitent pas à utiliser la famine comme arme contre les populations et les prisonniers, sans parler bien sûr de l'extermination des juifs.

Folie de Staline qui sacrifie en masse et instaure un climat de paranoïa en faisant exécuter tous ceux faiblissent à ses yeux, tout en continuant à purger les pseudos ennemis du peuple.

On sort de Barbarossa abasourdi par tant de violence, d'inhumanité, de sang, de sueur et de larmes.



Plusieurs idées reçues majeures sont réfutées par Lopez et Otkhmezuri : l'hiver n'a pas battu l'armée allemande, sa défaite était inévitable, l'industrie soviétique était supérieure à celle de l'Allemagne, la wehrmacht n'a pas les mains propres et fût aussi massacrante que les SS..etc.



Même s'il n'y a jamais de livre définitif on peut parier que celui-ci fera référence dans l'historiographie de la 2ème guerre mondiale.
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Barbarossa : 1941. La guerre absolue

Une somme d’histoire militaire et politique qui comble un vide réel subsistant jusqu’ici dans le travail en français sur la deuxième guerre mondiale.



Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2020/03/03/note-de-lecture-barbarossa-1941-la-guerre-absolue-jean-lopez-lasha-otkhmezuri/
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Les maréchaux de Staline

Une belle brochette de maréchaux avec des brochettes de médailles, comme dans mon souvenir. Les simples soldats en avaient nettement moins, mais ils les arboraient pour les fêtes de la victoire. Ces généraux ont eu une existence hors du commun, sauf ceux qui ont été fusillés. L’auteur, outre les faits d’armes de la “grande guerre patriotique, montre comment Staline régnait par la terreur, quand on entrait dans le bureau du Vojd’ on ne savait pas les conditions de sortie. Les rivalités entre les maréchaux étaient violentes, on connait surtout celle de Joukov et Koniev, mais les autres se détestaient à de rares exceptions. Beaucoup étaient brutaux et peu avares de la vie de leurs soldats, allant pour certains jusqu’à les frapper. Beaucoup d’erreurs ont été commises, avec à la clé des centaines de milliers de victimes. Mais comme a dit Staline, on ne juge pas les vainqueurs… ni les vingt-cinq millions de victimes.
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Joukov : L'homme qui a vaincu Hitler

C’est un monumental ouvrage que nous livrent les auteurs : seule une connaissance intime et exhaustive de la civilisation soviétique peut permettre une telle fresque sur le terrible XXème siècle de l’URSS, en même temps que ces analyses fines qui rétablissent la vérité souvent travestie par les censeurs.



Le Maréchal soviétique qui, le 8 mai 1945, a reçu la reddition allemande est auréolé d’une gloire légitime. Même si, comme l’a dit l’un des fils de Dwight EISENHOWER, « le vainqueur de ce conflit a été le simple soldat russe », JOUKOV a symbolisé la victoire sur le nazisme : il l’a payé cher, faisant l’objet, de la part de Staline et de ses médiocres successeurs (KROUCHTCHEV notamment) d’une constante méfiance : n’allait-il pas remonter sur son cheval blanc pour prendre le pouvoir, tel un Bonaparte russe ?



Il semble bien qu’il ait été plus animé par le sens du devoir que par l’ambition politique : depuis le petit sergent fils de cordonnier de village jusqu’au Maréchal en charge de commander à Stalingrad et devant Berlin, JOUKOV est d’abord un perfectionniste : il se forme et veille à la qualification des troupes, sujet sur lequel il sera toujours insatisfait, la Russie étant ce qu’elle est.



Il subit sans broncher les humeurs menaçantes et fluctuantes du «Vojd», c’est a dire du «Guide» (Staline), ainsi que les intrigues du Haut Etat-major : lui-même est-il indemne de coups montés ? Les auteurs soulignent que JOUKOV n’est pas un saint : il sait être brutal et dépense sans compter les hommes qui lui sont confiés.



Le livre est riche de détails sur cette machine à broyer que fut la guerre germano-soviétique de 1941-45 : il montre comment Staline a méthodiquement détruit, en 1937, la meilleure partie de ses cadres militaires, derrière TOUKHATCHEVSKI, le théoricien, comme GUDERIAN, de GAULLE et LIDDELL HART, de la guerre des blindés. Il donne des chiffres sur l’état des forces en 1944, quand les Soviétiques entrent en Pologne : 500.000 Allemands contre 1.200.000 Soviétiques, 500 chars contre 4000, et 600 avions contre 5.300.



Enfin, il nous fait profiter de l’ouverture des archives de l’est, contredisant les Mémoires officielles avec les carnets de rendez-vous de Staline, désormais disponibles.



Un excellent livre pour tous ceux que passionne la Seconde Guerre mondiale.
Lien : http://www.bigmammy.fr/archi..
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Joukov : L'homme qui a vaincu Hitler

Voilà un travail d’historien comme on aime : sérieux, riche en faits, sans imprécations ni indignations, gardant ses distances avec son objet ; et qui prend néanmoins le risque de porter des jugements après un travail d’investigation minutieux.

La biographie de Joukov dépasse l’histoire de son personnage puisqu’elle se confond en large part avec celle de la Deuxième Guerre mondiale. Joukov n’a certes pas vaincu Hitler seul, mais son rôle a été probablement le plus important dans l’ensemble des généraux des forces opposées à l’Allemagne.

À propose de Staline, nos auteurs échappent à une diabolisation réductrice sans éluder sa responsabilité dans l’impréparation militaire de l’URSS à l’agression nazie (purge de la moitié des officiers supérieurs, myopie quant aux intentions de Hitler). Joukov n’est pas totalement épargné dans la mesure où il joué un rôle majeur à l’état-major général durant les cinq mois qui ont précédé la guerre. Le livre, prenant la hauteur suffisante, explique que l’Union soviétique a abordé la guerre avec une doctrine militaire rudimentaire créée dans l’urgence de la Révolution lorsque l’armée rouge manquait cruellement de responsables qualifiés, la majeure partie des officiers ayant rejoint les armées blanches. Comme dans les premiers temps des guerres de la Révolution française, une doctrine délaissant les manœuvres savantes pour favoriser l’offensive avec de gros bataillons ; et ne préparant nullement à une stratégie défensive. Staline pense à tort (mais il n’est pas le seul à l’époque), que la guerre de l’Allemagne contre la France et l’Angleterre sera longue, que les deux adversaires s’épuiseront mutuellement.

Dans les dix premiers jours de l’invasion, du 22 au 31 juin, Joukov joue un rôle essentiel pour mettre en place ce qui permettra peu à peu à l’URSS de survivre à la terrible débâcle : mesures de court-terme avec l’organisation de contre-offensives locales (d’ampleur forcément limitée), création de la Stavka, avec un Staline comme « guide » direct pour alléger la lourdeur des procédures ; mesures de long-terme avec des plans de création de plusieurs échelons de résistance dans les lignes de défense.

Joukov ne fume ni ne boit ; maniaque dans la perfection professionnelle, il met la discipline au-dessus de tout. Il veut tout voir, mais il sait déléguer. Un homme capable de dormir deux heures par jour pour abattre le travail de cinquante ; dur pour lui et les autres, parfois de façon contre-productive. Avec le courage de s’opposer à Staline pour faire prévaloir son point de vue. Mégalomane ? Sûrement, mais il a quelques raisons de l’être. "Le 24 juin 1945, presque quatre ans jour pour jour après l'invasion allemande, Joukov connaît son apothéose de soldat. Sous une pluie fine et un ciel bas, il pénètre à 10 heures sur la place rouge, immense, frémissante d'oriflammes. Mille quatre cents musiciens entament le " je suis glorifié" de Glinka, cher au coeur de tout Russe.



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Les maréchaux de Staline

Un chapitre, un maréchal. L'idée était bonne car du coup, le livre peut se lire dans le désordre pour un sujet passionnant.

Hélas le livre est un véritable calvaire à lire. le style est lourd et fait trop la part belle aux opérations militaires et laisse de côté une description psychologique des protagonistes.

J'ai donc abanndonné la lecture du livre, peut-être en reprendrais-je la lecture plus tard dans de meilleurs dispositions.

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