Chaque millimètre de sa peau était sensible. Dans la lumière voilée, toutes les couleurs de cette journée de novembre à Venise se déployaient, flatteuses et reposantes. Le contraire du noir ce n’était pas le blanc, mais bien la couleur.
C’était simple, mais elle ne le découvrait que maintenant.
Derrière une apparence posée, elle semblait mener un combat intérieur, une course en solitaire pour attraper l'étoile au bout de la nuit...
Toute réalité, même la plus terrible, est préférable à l'illusion car on peut en faire quelque chose.
Depuis qu'elle était arrivée à Venise, en quête d'évidence, elle se trouvait confrontée à chaque coin de ruelle à des conversations étranges, des zones obscures et marécageuses. En sortirait-il une nouvelle clarté ?
Ne pas entendre le bonheur d'un homme... Ni de personne. Juste de la vie.
C'est ainsi que Leonardo avait fait la connaissance d'Angelo. Au départ, rien ne prédestinait ces deux-là se lier d'amitié. Angelo était bien plus jeune que le vieux gardien et avait fait de longues études d'architecte, alors que Leonardo se vantait d'avoir été formé sur le terrain, par son père déjà gardien des défunts. Ce qui les avait particulièrement rapprochés, c'était ce concert, deux ans auparavant. Un petit matin de décembre, le cimetière était quasiment vide et il avait neigé dans la nuit. Les tombes étaient recouvertes d'une fine couche de poudre blanche. Comme souvent, Angelo était le seul visiteur. Leonardo lui avait demandé s'il acceptait de se joint au spectacle qu'il organisait pour ses pensionnaires afin de réchauffer l'atmosphère, une sorte fête avant Noël. Il avait installé une petite chaîne dans l'allée centrale au milieu des sépultures, branchées à un groupe électrogène. Angelo avait trouvé cette idée généreuse. Et, dans cette matinée blême au milieu des cyprès refroidis par le givre hivernal, s'était élevé "Les quatre saisons" de Vivaldi. Tous les pensionnaires étaient ravis, même Stravinski qui ne s'était pas montré jaloux. La neige semblait fondre sur les tombes. Ce moment de grâce avait scellé leur complicité.
J'aime votre histoire de lumière. Tout est là. La lumière n'est pas forcément quelque chose que l'on voit, même si elle nous fait tout voir.