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Citations de Laurent Seksik (822)


Le malheur déteint sur nous et nous ravit notre force. Mais il faut trouver le courage d'agir.
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Il se demande si le destin est écrit. Et s’il l’est parfois, imprimé dans les livres. Il songe que le destin s’amuse avec les hommes et qu’il se rit de lui.
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«Je peux vous poser une question plus personnelle ? » demanda-t-il.

Elle dit oui du bout des lèvres.

« Pourrais-je savoir pour quelles raisons vous avez choisi médecine ? »

Elle douta avoir réellement eu le choix. Elle songea que son père, et le père de son père, et Pavel, son arrière-grand-père, avaient peut-être décidé à sa place. Ou bien tout avait commencé dans le désert d'Alexandrie, un des membres de la tribu des Thérapeutes possédant des dons divinatoires avait inscrit Léna Kotev dans le Grand Livre de la Médecine. Et, comme elle se sentait en confiance, elle avoua, réalisant l'incongruité de son propos en même temps qu’elle prononçait ces mots :

« J'ai choisi médecine par esprit de famille. »
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Il se revit enfant, il écoutait son père lui faisant la lecture d'un texte du Talmud racontant qu'un ange veillait sans cesse le médecin dans son activité, l'ange Raphaël, un messager de Dieu censé inspirer chaque médecin dans ses choix.

Raphaël, expliquait son père, venait de l'hébreu. El, qui signifiait Dieu, et Rafa, Médecine. L'ange Raphaël était le Médecin de Dieu. L'ange, au dire de son père, se tenait toujours au côté du médecin, prodiguait à son oreille des conseils, murmurait le nom des meilleures prescriptions, et le médecin, affecté de l'orgueil et de la cécité des hommes, croyait que ces actes provenaient de son esprit, de son intelligence, de sa logique, tandis qu'il ne faisait que retranscrire la parole divine, n’était que le jouet du destin.

La main qui perçait l’abcès, tranchait dans la chair, retirait la tumeur était la main de Dieu.
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Il songe à ce qu’il vient d’entendre sur les ondes, aux discours de haine, au climat de terreur, à son nouveau statut de cible ambulante. Voilà dix ans, on élevait à Potsdam en son honneur la tour Einstein dont l’immense télescope était destiné à vérifier la validité de ses théories. La pureté des lignes de l’édifice le faisait considérer l’œuvre comme majeure de l’architecture expressionniste. Aujourd’hui, il risque son existence en sortant de chez lui.
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Mais, plus encore que Moscou, elle adorait Paris. Elle respirait le vent du soir en songeant à la France et se sentait transportée sur les Champs Élysées. Rien n’égalerait jamais Paris dans son esprit et dans son cœur. Sans jamais y avoir mis les pieds, elle se sentait déjà française. Quelle autre nation au monde serait prête à se déchirer pour l’honneur d’un capitaine juif ? Elle pensait à Dreyfus et elle aimait la France. Elle pensait à Paris et sa tristesse s’envolait.
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Oui, un instant Arieh Kacew, sachant qu'ils mourraient le lendemain ou le surlendemain, lui, sa femme Frida, sa fille Valentine, son fils Pavel, se souvenant combien il avait été heureux, entrevit le fol espoir que son fils, depuis les airs, allait les sauver, les libérer, arracher la Jérusalem lituanienne ou ses ruines des griffes du conquérant allemand, le lieutenant Roman Kacew, de l'escadrille du groupe Lorraine des Forces françaises libres, affilié au 137e Wing, stationné à Hartfordbridge, en mission avec son équipage, aux commandes de son bimoteur Boston III qui portait sous sa coque une tonne de bombes, son fils, officier de l'armée française, petit juif de l'armée des ombres, fils d'un simple fourreur de Wilno, volait juste au-dessus de sa tête, fol espoir des affligés, ivresse de ceux qui ont connu le bonheur en leur vie, déraison de ceux qui vont bientôt mourir, et Roman, à son poste de navigateur, était venu sauver son père, se récondlier avec lui, larguer ses bombes sur Wilno pour permettre à Arieh Kacew, fils de David Kacew, petit-fils de Mordechai Kacew, et aux survivants de sa famille de s'évader, de fuir, de vivre, trois mois, une semaine, de respirer encore le parfum de cette terre où ils avaient vécu, de remplir les poumons de la douceur de l'air en songeant à demain.
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Un jour, alors tout jeune médecin, Pavel s'était vu offrir par un patient une poule pondeuse en remerciement des soins qu'il avait prodigués. Il était revenu remettre ce cadeau aux siens, comme un symbole de réussite, un gage de sérieux, ému de rendre à ses parents le prix des efforts et des sacrifices consentis. Il avait rapporté, tout tremblant d'émotion, la caisse de bois où caquetait la poule - on allait pouvoir manger des œufs à volonté. Son père était parti dans une colère noire :
"Pavel, c'est aux banquiers, aux marchands de s'enrichir ! L'argent corrompt les âmes. Quel salaire, quelle obole seraient dignes des soins que tu as donnés ? Quel prix pour une vie sauvée ? Toute la fortune des Rothschild, les minerais de l'Empire russe, les porcelaines de Pétersbourg, les émeraudes de la tsarine n'y suffiraient pas. Même si le père d'un enfant guéri se dépouillait de tous ses biens, t'offrait sa maison, ses terres, ses chevaux en plus de ses poules, il te serait encore redevable. Ce que tu lui as donné vaut plus que l'or du monde. Alors n'accepte rien, jamais, en supplément de ton salaire ! Poule pondeuse ou pièces d'argent. Toi, tu n'es là que pour servir."
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Seul peut goûter la joie de contempler le monde
Celui qui plus rien ne désire…
Jamais la vie n’est plus étincelante et libre
Qu’à la lumière du couchant.
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Un père n’est pas celui qui donne la vie, un père est celui qui donne l’amour.
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"Vous savez, les gens ont tort de ne plus acheter de costumes et de robes, il va falloir s'habiller le jour de la victoire. car nous allons gagner, je dis "nous", entendez le "Peuple du Livre". Que peut contre nous le Peuple qui brûle les Livres ?...(p. 33)
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Vos livres sont comme des diamants éternels… vos livres nous parlent et vos livres nous racontent… vos livres ont la splendeur des âmes pures… vos livres sont comme la prière des hommes..
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Sans doute je me trompe. Si mon père pensait à moi, cela se saurait. La moindre de ses pensées est connue du monde entier. Celle-là serait remontée jusqu'à moi.

Mon père a dit : « L’essentiel dans l'existence d'un homme de mon espèce réside dans ce qu'il pense et comment il pense, non dans ce qu'il fait ou souffre. »

Merci du compliment, papa.
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Le programme d'extermination des malades mentaux allemands est sur la place publique depuis que l'évêque catholique de Berlin a dénoncé les « meurtres baptisés euthanasie ». Durant le mois de juillet 1940, tous les malades mentaux juifs hospitalisés du Reich ont été envoyés à Brandebourg-sur-la-Havel pour y être gazés. Puis le programme s'est étendu aux handicapés non-juifs. 50 000 malades auraient été assassinés par gazage à l'intérieur des hôpitaux. Le processus a été officiellement arrêté grâce à la pression de l'évêché allemand, relayé par un sermon de l'évêque de Munster, Clemens von Galen, diffusé sur les ondes de la BBC.
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Contrairement à l'opinion répandue, l'Amérique n’accueille pas Einstein à bras ouverts. Un groupe de pression important, la Woman Patriot Corporation, mène campagne pour lui interdire le droit d'entrée aux États-Unis. Une pétition organisée en ce sens a rassemblé des milliers de signatures. Le groupe et ses soutiens l'accusent de sympathies communistes. On lui reproche son pacifisme. Le FBI enquête.

Son opposition au régime nazi jette le doute sur lui. Ses articles parus dans la presse américaine dès 1925 contre la ségrégation raciale lui valent d'innombrables ennemis. On l’a prévenu, il ne sera pas facile d’obtenir la citoyenneté américaine. Les portes d'Ellis Island commencent à se fermer. L’administration Roosevelt exige pour tout immigrant juif allemand une attestation de bonne conduite délivrée par le gouvernement... nazi ! Le Département d'État refuse l'admission de tout réfugié fiché par la Gestapo.

Sa réponse aux attaques de la Woman Patriot Corporation a fait la une du New York Times : « Jusqu'ici, je n’ai jamais fait l'objet d'un tel rejet de la part du beau sexe, ou si cela m'est arrivé, ce ne fut jamais de tant à la fois. Mais n'ont-elles pas raison, ces citoyennes vigilantes ? Pourquoi ouvrirait-on sa porte à quelqu'un qui dévore les capitalistes sans cœur avec autant d'appétence ? »
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Porter un illustre patronyme peut être considéré comme une chance. On croit que la gloire rejaillira sur soi. On se trompe lourdement.
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Il avait été l'auteur le plus lu dans le monde entier. Même s'il était convaincu d'avoir moins de talent que Thomas Mann ou que Schnitzler, que Rilke et bien sûr que Joseph Roth - et il ne croyait pas un mot des propos de Freud qui affirmait préférer son oeuvre à celle de Dostoïevski.
Il était conscient de ses faiblesses, s'agaçait du schéma répétitif de ses nouvelles - cette technique du récit enchâssé dont il ne parvenait pas à se départir - et de l'issue irrémédiablement tragique de ses textes, héros et héroïnes achevant leur destinée dans la folie ou la mort.
Il avait vendu soixante millions de livres.
Il avait été traduit en trente langues, du russe au chinois en passant par le sanskrit.
Ses biographies occupaient un coin de chaque bibliothèque de France, de Russie, des Etats-Unis et d'Argentine.
Il avait été le librettiste de Richard Strauss.
Il avait encouragé Hermann Hesse à ses débuts.
Sans lui, Joseph Roth, enfoncé dans son désespoir, n'aurait jamais achevé sa Marche de Radetzky.
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Je n’ai pas vu mon père le jour de ma naissance. Aux yeux d’un physicien de renom, l’apparition de la comète de Halley est un événement autrement plus marquant que la venue d’un braillard dans la ville de Zurich. Comment rivaliser avec un astre ? Je m’emploie à résoudre cette question. Je suis né à Zurich, j’ai vécu à Zurich, je mourrai à Zurich. Je tourne dans la ville sans trop m’éloigner, comme lié par une force invisible. Je serai la comète de Zurich.
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Ne réalise-on jamais l’âge de sa mère, hormis à ses derniers instants. P 27
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Et puis était venu le prodige. Sa main avait retiré deux volumes des -Essais- de Montaigne. Sur la couverture était dessiné un portrait de Montaigne et ce fut comme si Montaigne lui souriait. Il avait pris les livres sous le bras, monté les marches quatre à quatre, s'était installé sous la véranda et avait commencé à lire, comme il l'aurait fait d'une lettre longtemps attendu d'un ami lointain. (p. 86)
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