Depuis le jour illustre où, vainqueur d’Antoine et rapportant à Rome, avec le trésor des Ptolémée, une gloire qui, désormais, n’aurait plus de compétiteurs ni de jaloux, Octave, à son retour d’Actium, ferma le temple de la Guerre et, mettant fin aux discordes civiles, annonça la « Paix Romaine » à l’Univers ! depuis le jour où, souveraine du Monde, ayant détruit Carthage et maîtrisé la Gaule, la Ville de César, après un labeur plusieurs fois séculaire, entra dans sa magnificence et promulgua des lois, tous les peuples qui, tour à tour, sont entrés dans l’Histoire, ont eu l’ambition de fermer, comme Auguste, le Temple symbolique, de fonder pour toujours l’ère du travail et de la paix.
Les plus rudes soldats, les tragiques moissonneurs de cadavres, les guerriers pour qui la bataille est un jeu où s’accoise leur manie homicide, ont eux-mêmes, entre deux carnages, appelé ces jours bénis. Les princes politiques et les furieux capitaines en ont uniformément rêvé. Charles XII et Napoléon, Cromwell et Frédéric le Grand, au milieu des gestes sanguinaires, des hécatombes humaines, des sièges, des combats, des sacs et des exterminations, tendaient à l’apaisement universel, demandaient aux armes la réalisation d’un idéal pacifique, la réunion de tous les hommes dans le même bercail, sous la houlette d’un pasteur magnanime et triomphant. Cette ambition des rois, des princes, des chefs militaires, les peuples, aujourd’hui, l’ont reprise à leur compte. Justement parcimonieux de leur vie et de leur fortune, ils demandent, pour trancher leurs différends et juger les procès de nation à nation, un tribunal plus équitable, une justice plus humaine que le hasard des combats. Au patriotisme étroit, agressif et borné des époques lointaines succède le patriotisme intelligent, respectueux du droit universel, qui n’estime pas absolument nécessaire de tuer ou de mourir pour vider une querelle et revendiquer son bien. Le pacifisme a conquis les plus nobles intelligences, ému les cœurs d’un zèle fraternel. La Conférence de La Haye, où savants, hommes d’État, légistes et docteurs ont préparé le Code pacifique, la législation qui mettra fin aux victoires sanglantes, aux entreprises meurtrières, marque une étape glorieuse de l’Humanité.