Lecia Carris nous livre là son premier roman, qui est un thriller; je découvre, en même temps, une maison d'édition dont je n'avais jamais entendu parler et dont le nom poétique et amusant recèle tout un programme : "Les Editions des Mots qui Trottent". Je remercie Naïma (alias une_grande_lectriceee) qui a attisé ma curiosité avec sa chronique et je ne le regrette pas, bien au contraire.
L'action se passe dans un EHPAD des Alpes, la résidence Saint-François, qui accueille des pensionnaires frappés de la maladie d'Alzheimer. Plusieurs sœurs y sont assassinées et leur cerveau enlevé. Harmony Delange, médecin légiste, dont la mère est une patiente de la résidence, se retrouve à faire équipe avec un inspecteur qui vient d'être muté dans la région, Antoine Lassalle. Harmony est atteinte d'hyperosmie, qui est une exacerbation de l'odorat et qui va jouer un rôle important dans l'enquête.
L'atmosphère devient vite pesante, angoissante avec des malades dont on ne comprend pas les peurs, qui ne peuvent plus communiquer; la folie et les obsessions rôdent. Lecia Caris multiplie les fausses pistes, instille le doute jusqu'à une fin totalement inattendue, que je ne suis pas sûre d'interpréter correctement tellement c'est surprenant.
Lecia Caris a mis beaucoup d'elle-même dans ce thriller car sa propre mère a souffert de la maladie d'Alzheimer et les passages concernant les relations mère-fille sont empreints d'une profonde émotion. Le personnage d'Harmony est très humain, ce qui nous la rend proche.
Le style est recherché, souvent littéraire avec un vocabulaire riche, voire précieux comme, un exemple parmi d'autres, l'emploi de maugréer dans son sens vieilli de maudire; mais quelquefois, se glissent des erreurs comme "flagrance" au lieu de "fragrance" (p. 308) et l'adjectif "prolixe" associé au "regard"; les scènes d'amour partent un peu trop dans des envolées lyriques à mon goût.
Malgré ce tout petit bémol, ce thriller est une vraie réussite, il est addictif, difficile à lâcher une fois commencé; cette auteure mérite d'être suivie attentivement et j'attends donc impatiemment le prochain roman.
La musique classique s'inscrit dans un programme thérapeutique pratiqué par la psy. Cette méthode basée sur la « rééducation de l'écoute » traite es troubles liés aux déficits de l'attention, retards d'apprentissage, autismes, dyslexies, problèmes de langages. D'après elle, la musique permet de stimuler les réponses sensorielles, cognitives ou motrices. Une sorte de psychotonique du cerveau dans le coma.
Aveuglée par un nuage de mousse, elle évalue la distance et s'élance. Son pied droit s'empêtre dans le tapis, occasionnant une lourde chute à dix centimètres du but. Sa tête heurte le cadre du lit. Sa cheville plie sous es cinquante-huit kilos. Le tout émet un craquement qui résonne comme un sarcasme, alors que la sonnette du téléphone devient plus insistante.
Une heure plus tard, vaincue par l'insomnie, les neuf crânes des sœurs qu'elle n'avait pas eu le temps de ramener à l'institut reposaient sur la table basse face à elle. Dans ce huit clos morbide, Harmony menait la conversation.
L'odeur de chair lavée l'extirpa de sa torpeur végétative. Les images cauchemardesques de la nuit défilaient devant ses yeux, en créant un story-board animé. L'effet cinématographique accrut son vertige.
23h45...un rai de lumière traversa le salon inoccupé. Les douze chambres de la résidence alignées de part et d'autre exacerbaient ses pulsions névrotiques.