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Citations de Léonora Miano (372)


Où aller en partant de nulle part ?
Je peinerais à leur expliquer ce qu'il m'est encore impossible de prouver, mais que je sens en moi: qu'être au monde confère le droit de vivre. Qu'exercer ce droit doit signifier un peu plus que repousser comme on peu la mort qui finira quand même par avoir le dessus.
Qu'il faut chercher ceux qui ne vous cherchent pas, marcher vers les autres. Il y aura bien quelqu'un, même ici.
Toutes les portes ne sont pas fermées. Tous les regards ne fixent pas ténèbres. Toutes les bouches n'appellent pas la fin du monde.
Tous les cœurs ne sont pas irrémédiablement glacés. Il y a encore un battement, quelque chose qui se dresse contre les apparences, qui voit par-dessus leur épaule, une autre vérité. Sur notre terr brûlée, quelque chose pousse encore. Je n'ai cessé de le voir, depuis que tu m'as chassée. J'ai rencontré Kwin, Ayané, Wengisané, Mme Mulonga. J'ai même appris de Kwédi. Elles ne pouvaient pas tout, mais elles pouvaient beaucoup. Elles étaient la lumière frêle mais indéniable, qui brille sur l'autre face de l'obscur.
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La colère est une illusion. Elle n'a rien à voir avec la force qu'elle simule mal. Ce que vous devez faire pour épouser les contours du jour qui vient, c'est vous souvenir de ce que vous êtes, le célébrer et l'inscrire dans la durée.
Ce que vous êtes, ce n'est pas seulement ce qui s'est passé, mais ce que vous ferez. Si la paix, qui est aussi l'amour, s'allie à la vérité, qui est une autre figure de la justice, ce que vous accomplirez sera grand.
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La peau du native American que l'on revêt à travers les accessoires popularisés par les films états-uniens notamment ne sert pas à communiquer avec lui. Elle n'est que le pelage de la bête sauvage abattue.
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La colonisation européenne eut bien un volet religieux, puisqu'elle consista à évangéliser des peuples ayant alors leurs propres croyances et relation avec le divin. C'est au nom d'un dieu plus vrai, dont le message se voulait universel, que les Subsahariens furent débarrassés de leurs objets culturels - que l'on conserva néanmoins. Le dieu véritable est désormais oublié dans la France qui continue à mettre en scène, dans ses musées, des artefacts jadis considérés comme sataniques. Ce n'est pas seulement le dieu chrétien qui est de nos jours mis au rebut, mais une bonne partie des valeurs, du mode de vie qui l'accompagnaient. La France de notre temps, qui se veut meilleure que celle de ses pères, en particulier par son progressisme - on reprendra le mot sans chercher à le définir tant sa signification est la plupart du temps insaisissable -, semble différente de celle qui s'abattit sur les Subsahariens, les forçant à un remodelage sans lequel ils se seraient condamnés à mort. Aujourd'hui, il faut réapprendre à faire partie du vivant, renoncer à c qui était présenté comme le sommet de la modernité, retrouver frugalité et naturel. Il convient désormais de combattre la forme de patriarcat que l'on imposa aux Subsahariens et qui sapa le pouvoir des sociétés de femmes. L'exposition par les femmes de leurs corps est dorénavant un acte de liberté, l'affirmation d'une souveraineté, quand celles de nos aïeules qui vivaient poitrine nue furent perçues comme sauvages. On informe les Subsahariens que les races n'existent pas, que la faute est imputable à l'ignorance des prédécesseurs, mais puisque cela ne modifie en rien leur quotidien, ils entendent conserver la race qui leur fut attribuée. On leur explique qu'il faut accepter toutes formes de sexualité quand beaucoup parmi eux le faisaient autrefois et qu'on leur apprit alors que le dieu véritable voyait en cela une abomination.
Et tandis que ce discours est tenu, ce que l'on ne mesure pas, c'est la violence réitérée. D'abord, on piétine les croyances de gens au nom des siennes propres qu'on amène à adopter. Puis, on explique que ce en quoi on disait avoir foi n'était que fadaises obscurantistes et qu'il s'agit maintenant de se montrer rationnel. Ce "Dieu Tout-Puissant" qui fut invoqué dans les premières lignes de l'Acte général de la conférence de Berlin, laquelle scella en 1885 le partage de l'Afrique entre Européens de l'Ouest, n'était-il qu'une mauvaise plaisanterie? Que furent alors ceux qui acceptèrent le christianisme et le transmirent à leur descendance? Qu'on le dise clairement, c'est le moment. Car ceux des Subsahariens qui s'en réclament sont nombreux et n'envisagent pas de le répudier. Ce que la blanchité voudrait à présent transformer chez les Subsahariens, c'est ce qu'elle leur apporta jadis comme vecteur de civilisation voire d'humanisation. A combien de mutations identitaires peut-on soumettre les autres, à quel rythme et au nom de quoi exactement, si ce n'est la supériorité de l'occidentalité? Ce que
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Dans ce propos dont j’assume la subjectivité, la dimension intuitive et l’hybridité formelle, Afropea incarne, dans l’hémisphère Nord, les peuples du monde brutalisés par l’Europe conquérante dès la fin du XVe siècle, puis par ce qui s’est appelé l’Occident. Une autre façon de désigner le capitalisme et sa violence. C’est la vénalité inhérente à l’occidentalité qui engendra la notion de race telle que nous la connaissons aujourd’hui. C’est à sa domination que l’on doit la racialisation des corps et des imaginaires. L’Occident ne se limite plus aux groupes humains ayant leurs racines en Europe de l’Ouest, bien qu’ils soient à l’origine de ce système et en restent les premiers bénéficiaires. L’Occident, c’est aussi la manière dont l’esprit qui a donné le jour à ce phénomène, se déployant à travers la planète en raison de l’influence coloniale, s’est acclimaté pour transformer la vision que l’on avait du monde, de soi dans le monde. P26,27
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Lorsqu’ils se trouvent dans leur ancien pré carré, les français d’ascendance européenne unique ne parlent que leur langue, sont capables de passer plusieurs décennies sur un territoire sans en maîtriser un seul idiome, envoient leurs enfants dans des écoles françaises, ne leur donnent jamais de noms locaux à moins d’être particulièrement excentriques. Et quelquefois, ils entrent sans visa dans ces pays, ce qui permet aux pédo-criminels et autres malfaiteurs de profiter sans états d’âme d’une indigence rampante. Les Français recevront chez eux ce qu’ils offrent aux autres. En matière d’assimilation, ils ne cessent de montrer l’exemple. Où qu’ils se trouvent dans le monde, même dans les pays frontaliers de la France européenne, leur premier réflexe est de s’établir en communauté, de s’assurer que le fromage ne manquera pas et que l’on pourra se passer d’apprendre une langue étrangère. P30,31
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Devant l’histoire des conquêtes coloniales et de l’esclavage, il n’y a plus de citoyens du monde, plus d’humanité universelle. Ne restent que la fabrique de la race , ses motivations et les gains que l’on fait fructifier en bon rentier de l’Occidentalité. C’est ce qui rend tellement intolérable l’évocation de cette histoire, une culpabilité se rapportant surtout à un héritage symbolique et matériel auquel il n’est pas question de renoncer pour fraterniser, c’est à dire commencer à rendre justice. D’ailleurs on estime l’avoir déjà fait, puisque l’esclavage a été aboli, acte par lequel la France se serait rédimée. Cependant, les abolitions de l’esclavage sont au premier chef l’aboutissement des luttes constantes des opprimés, ce que le discours français a encore trop tendance à éluder. De plus, l’argument révèle sa malhonnêteté lorsque l’on s’aperçoit que l’esclavage fut aboli en raison du projet que l’on avait de coloniser l’Afrique où l’on mettrait les populations au travail, y compris sous la contrainte. C’est en 1946 que la France abolira le travail forcé dans ses colonies d’Afrique de l’Ouest. Un siècle exactement après la deuxième abolition de l’esclavage, celle de 1848, censée avoir lavée la France de ses péchés. P42,43
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Qui songe à se passer des denrées coloniales que sont le café, le cacao, le thé ? Le premier repas du jour, y compris dans les demeures des nationalistes les plus résolus, consacre la longue incorporation de l’autre en soi. C’est à l’époque des conquêtes européennes et de l’esclavage que les produits coloniaux prennent place dans le quotidien des français et deviennent indispensables. Ils se naturalisent au point que l’on oublie les humains exploités au loin pour l’obtention de ces douceurs. En 1792, les Parisiens modestes prennent d’assaut les réserves de sucre des négociants, se livrant à un pillage en règle. Pas une pensée ne leur vient pour les insurgés de Saint-Domingue – qui deviendra Haïti – dont la révolution, qui débute en août 1791, cause la pénurie et la hausse des prix. Pourtant, le corps invisible des esclavagisés, leur souffrance et les ressources qu’ils mobilisent afin de contrer la violence qui leur est faite, sont ingérés par les consommateurs de sucre. Depuis, la chair des uns ne cesse de se mêler à celle des autres. Ce processus est bien plus profond que le croisement conçu par l’acception originelle du terme métissage. Les parisiens d’autrefois n’étaient pas pires que ceux d’aujourd’hui qui se massent à l’aurore devant les Apple Stores, sans une pensée pour les Congolais dont le labeur et souvent la mort irriguent les outils technologiques dernier cri. Même dysfonctionnelle, trop asymétrique, la relation entre les peuples est établie. Elle n ‘est pas la rencontre souhaitée, mais sa réalité ne se dément pas. Les plaintes, les éructations, n’y changeront rien. P60,61
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Pour comprendre les raisons qui font d’Afropea une proposition de fait non occidentale, il faut redire ce qu’est l’occidentalité. Je désigne ainsi le caractère de l’Europe conquérante et de ses extensions américaines, telles que l’humanité dut les endurer à partir de la fin du XVe siècle. Il s’agit d’une manière d’être au monde qui fonde les rapports avec les autres sur la violence: l’invasion, l’appropriation des ressources, la réification voire la mise à mort, l’hégémonie épistémique. L’occidentalité est ce qui arrive à cette Europe-là lorsque, s’épandant sur la terre, elle fait le choix de sa propre déshumanisation. C’est le capitalisme sauvage, l’invention de la race et des hiérarchies raciales, la dissonance cognitive qui permet de ruser avec les principes chrétiens notamment et de justifier que l’on commette les pires atrocités. P107
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Les commentateurs de l’actualité ne parlent pas de la France telle qu’elle est réellement, telle que ses conquêtes l’ont façonnée. Il leur est plus confortable d’omettre que ce pays n’est pas un hexagone mais bien un archipel, un territoire éclaté. Il leur est plus aisé d’effacer ces lieux où l’on massacra les indiens des Caraïbes, où l’on pratiqua l’esclavage colonial, où l’on recourut à l’engagisme, où l’on stérilisa des femmes – ce qui fut une pratique à caractère génocidaire, dans la mesure où elle porta atteinte à la survie de populations précises. Tels sont les traumatismes dont les mémoires minorées sont criblées. P126
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A propos de la manière dont les pôles blanc et noir se mirent en place dans le contexte colonial, les psychanalystes Sophie Mendelsohn et Livio Boni écrivent :
Alors que "Noir" n'est défini que comme signe du "non-Blanc", "Blanc" n'est jamais construit dans l'espace symbolique comme le signe du "non-Noir" : il y a un référent, Blanc, et il y a ce qui se construit en référence à ce référent, par comparaison avec lui. En tant que référent, Blanc opère à la limite des possibilités du symbolique comme un signifiant se signifiant lui-même.
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Convaincue que les femmes, qui mettaient au monde les enfants, étaient plus qualifiées pour prendre en charge les affaires de la cité, la reine voulut un gouvernement exclusivement féminin.
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Nul n’ose avancer que le goût de la conquête, en particulier quand celle-ci se révèle meurtrière, est nécessairement pathologique.
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Amina ne voulait pas être une femme libre mais vivre comme un homme dans une société patriarcale, ce qui n’est pas exactement la même chose.
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L’autre langue doit pouvoir dire que le goût pour le pouvoir n’est pas plus noble lorsqu’une femme en est affligée. L’exercice de la violence, quand il n’est pas défensif, n’est pas plus vertueux lorsqu’il est le fait d’une femme.
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Le féminisme, quant à lui, entre assez fréquemment en conflit avec le féminin qu’il semble prendre de haut. Il est avant tout la quête de l’égalité entre femmes et hommes au sein de l’environnement ayant vu naître cette doctrine : un milieu impérialiste et capitaliste. Avant que ne se créent les mille obédiences que l’on connaît aujourd’hui et qui arborent toutes les couleurs de l’échiquier politique, avant que ne se succèdent ses vagues dont la prochaine ne tardera pas, le féminisme veut permettre aux femmes d’être elles aussi des dominantes réjouies au sein de sociétés prédatrices.
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Déplorer le fait que les femmes habitent essentiellement le domaine privé, c’est dévaloriser les tâches qui s’y accomplissent, conférer un plus grand prestige aux activités dites masculines.
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Comme le dit le proverbe subsaharien : when there is no enemy within, the enemy outside cannot hurt you. Autrement dit, c’est de l’intérieur avant tout que les sociétés sont fragilisées.
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Louise a aimé trop tôt, trop fort. Perdu au jeu en amour. Il aurait mieux valu attendre. Terminer ses études. Gagnet de l'arget. S'installer. Vivre après. Faire les choses dans le bon ordre.
Elle lutte pour préserver sa conscience d'elle-même. Ne pas être seulement un cas social. Rester quelqu'un.
Louise se méfiera toujours de ceux qui communiquent sur la fraternité sans être capables de la vivre vraiment. Ceux dont les idéaux ne sont qu'une posture.
La protestation est l'apanage des ayants droits, des socialement insérés.
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[...] la sacralisation non pas du féminin mais de la maternité qui n'est pourtant qu'une éventualité, peut compliquer les relations entre femmes et hommes dans la période actuelle. Puisque la femme est surtout une mère sur le plan symbolique, il est attendu d'elle une capacité presque surnaturelle à endurer les frasques de celui qui ne peut être, dans le fond, qu'un enfant.
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