
Lorsqu'il se releva, pendant un instant, il ne vit rien d'autre que Kelley qui le dévisageait, bouche bée.
- Sonny ! s'écria-t-elle en s'élançant vers lui.
Il ouvrit les bras pour l'étreindre une dernière fois avant de se séparer, mais la jeune fille passa à côté de lui. Elle ramassa une branche morte sur la berge pour frapper un bonnet-rouge. Le bois se brisa en deux sur la tête bosselée de l'affreuse créature avant que celle-ci ait eu le temps de plonger son couteau à longue lame dans le dos de Sonny. Le troll s'effondra par terre.
- Merci, dit Sonny, surpris.
- Je suis désolée d'être partie sans te dire au revoir.
Elle tenait sa batte de base-ball improvisée si fort que ses phalanges en étaient livides.
- Je suis désolé de t'avoir laissée faire, répondit Sonny.
Il tendit de nouveau les bras vers elle. Cependant, alors que Kelley avançait vers lui, Sonny perçut un mouvement du coin de l'oeil. Il l'attrapa par les épaules et la poussa vers Fennrys.
Kelley posa la tête contre le mur carrelé. La bonne nouvelle, c'était qu'elle ne s'était pas noyée. Que disait le proverbe, déjà ? La fortune sourit aux bonnes poires, c'est ça ? Tout ça à cause de ce stupide cheval. Elle espérait qu'il avait au moins réussi à rentrer à la maison. Lorsque l'eau commença à tiédir, Kelley ferma les robinets à contrecœur, ouvrit le rideau de la douche...
Et hurla.
Ce stupide cheval se tenait devant elle, emplissant presque tout l'espace de la petite salle de bain de son corps massif et dégingandé. Ses jambes arrière et une partie de son dos étaient toujours dehors. Il était à califourchon sur le rebord de la fenêtre, entre la pièce et le palier de l'escalier de secours. De la vapeur s'échappait de son corps pour se dissiper dans l'air froid du soir. Hennissant doucement, le cheval donna un coup de museau dans l'épaule de Kelley.