L’ouvrage se compose de deux parties.
La seconde partie est la traduction commentée d’une chronique rédigée entre 1711 et 1718 par Leyb ben Ozyer : un homme d’influence de la communauté juive amstellodamoise, qui fut mêlé aux événements entourant le mouvement sabbatéen. Chronique fortement documentée, reposant sur de nombreux témoignages et quelques lettres originales, elle fait état de l’émergence des prétentions messianiques de Sabbataï Zevi et de la manière dont son mouvement se déploya à travers la partie orientale du bassin méditerranéen. Le chroniqueur insiste fortement sur les connaissances kabbalistiques hors pair de Sabbataï Zevi et sa capacité de séduction incroyable, mais surtout sur les mécanismes d’hystérie collective qui ont permis le succès de son mouvement. Captivant, le récit, suit les évolutions du mirage messianique jusqu’à la conversion de Sabbataï et au-delà.
La seconde partie de l’ouvrage est infiniment éclairée par la première, qui précise le contexte du mouvement sabbatéen. Nathan Wienstock resitue le mouvement à la fois dans la longue tradition des oppositions juives au judaïsme rabbinique et dans la tradition encore plus longue des messianismes contestataires. Il en montre aussi la pérennité, en soulignant les liens entre le mouvement sabbatéen et le messianisme de Jacob Frank. L’antinomisme, la conception paradoxale de la rédemption par le péché, les liens entre messianisme et kabbale, et de manière plus large les éléments propres au nihilisme sabbatéen, sont analysés un à un, permettant ainsi au lecteur de rentrer dans la complexité d’un phénomène de masse inouï.
Olivier Rota