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Citations de Lionel Shriver (667)


- On pourrait penser que les transports ne sont qu'une histoire de mécanique, alors qu'il s'agit d'émotions. Aucun autre aspect de la vie urbaine ne suscite de sentiments aussi forts. Dans certaines rues, si on supprime une voie de circulation pour la transformer en piste cydable, cela peut soulever une émeute. Il suffît d'un feu piéton mal réglé qui dure deux bonnes minutes pour qu'on entende les automobilistes tambouriner sur leur volant, toutes vitres fermées. Le bus qui met une heure à arriver quand la température est négative... Le métro coincé indéfiniment sous le tunnel de l’East River sans qu'aucune explication soit fournie... Une rampe d'accès à une autoroute conçue de manière aberrante parce qu'un virage empêche de voir les voitures arriver... Une signalisation pas très claire qui vous expédie sur l'autoroute à péage du New Jersey pendant 32 kilomètres sans possibilité de sortir alors qu'on voulait prendre la direction du nord et qu'on est déjà en retard.
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... Dans la chambre, il m'a laissé le déshabiller et quand je lui ai demandé quel pyjama il voulait mettre, au lieu de lever les yeux au ciel en grognant : "M'en fiche," il a réfléchi un instant avant de murmurer, d'une petite voix : "Celui de l'astronaute. J'aime bien le singe dans la fusée." C'était la première fois que je l'entendais dire qu'il aimait une pièce de sa garde-robe, et quand je me suis rendue compte qu'il s'agissait de l'unique pyjama se trouvant au linge sale, j'ai été plus que désemparée en l'extirpant du panier avant de vite revenir lui promettre de le laver le lendemain pour qu'il soit comme neuf. J'attendais un "Pas la peine," au lieu de quoi - autre première - j'ai entendu "Merci." Quand je l'ai bordé, il s'est niché volontiers, en remontant la couverture sous son menton, et quand j'ai glissé le thermomètre entre ses lèvres écarlates - son visage était criblé de rougeurs de fièvre - il a léché l'extrémité en verre à coup de minuscules succions, comme si finalement, à dix ans, il avait appris à téter. Sa température était élevée pour un enfant - plus de 38°4 - et lorsque je lui ai tamponné le front avec un linge humide, il a ronronné.

Je ne saurais dire si nous sommes moins nous-mêmes quand nous sommes malades, ou plus. Mais ces deux semaines hors du commun ont été pour moi une révélation. (...) Je sais bien que nous changeons tous, dans un sens ou dans un autre, quand nous sommes malades, mais Kevin n'était pas seulement sur les nerfs ou fatigué, il était une personne radicalement différente. C'est d'ailleurs ce qui m'a permis d'évaluer la quantité d'énergie et de volonté qu'il devait dépenser le reste du temps pour être un autre enfant (ou d'autres enfants). (...) J'avais cru immuable le registre émotionnel qui le gouvernait depuis sa naissance. Rage ou colère, la seule variante était le degré d'intensité. Or, sous les couches de fureur, je découvrais, avec stupéfaction, une strate de désespoir. Il n'était pas furieux. Il était triste. ...
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Lionel Shriver
En tant que lectrice, je ne suis pas très sûre que je choisirais un livre pour qu'on me fasse la leçon ou me sermonne.
En tant qu'écrivain, je souhaite en revanche explorer un ensemble de problèmes qui font partie du quotidien de beaucoup de gens.
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Mais l'époque n'est pas aux romans. Rien de ce qu'on peut inventer n'est plus intéressant que ce qu'on vit. On est dans un roman.
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Après le flower-power, le farine-power, railla Lowell, mais ni Willing ni sa mère n'avaient regardé suffisamment de documentaires sur les années 1960 pour saisir la plaisanterie. tu veux dire que ces pénuries sont artificielles? Il y aurait suffisamment à manger si les gens contentaient d'acheter un seul pot de mayo...
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On ne peut atteindre quelqu'un que s'il possède une conscience. On ne peut punir quelqu'un que s'il a des espoirs que l'on peut contrarier, ou des attachements que l'on peut rompre ; quelqu'un qui se soucie de ce que l'on pense de lui. On ne peut punir que des gens qui ont déjà un tout petit peu quelque chose de bon en eux.
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Car la clé de la bucket list n'était pas de cocher les choses à faire, mais d'arriver à balancer la liste à la poubelle. C'était excitant d'envoyer balader tout ce bazar - avec réticence d'abord, puis avec joie.

C'était excitant de mourir graduellement. Elle avançait vers l'apathie les bras grands ouverts. Elle n'allait pas le crier sur les toits - ça ne valait pas la peine de se disputer pour si peu - mais Serenata ne se sentait pas obligée d'être concernée par le changement climatique, les espèces en voie de disparition ou la prolifération nucléaire. Elle gardait un œil sur la porte de sortie et avait bon espoir d'échapper au jour prochain où l'humanité devrait certainement rendre des comptes. La fois précédente où c'était arrivé datait vraiment, et la nouvelle mise au point n'avait que trop tardé. Toutes les civilisations produisaient les graines de leur propre effondrement et l'espoir d'esquiver les ravages meurtriers qui se profilaient au coin de la rue, juste parce qu'on était née un peu plus tôt que les malheureux petits nouveaux, était sans doute un peu sournois.
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— Tu as remarqué dans ces émissions culturelles, nota Remington au mitan de l'été alors qu'ils faisaient la vaisselle du déjeuner en écoutant en fond sonore NPR, la radio de service public, le nombre de fois où tu entends : « On ne pourrait plus dire ça aujourd'hui » ? Alors qu'on parle généralement d'un film ou d’un spectacle de stand up qui n’a pas plus de trois ou quatre ans.

« On ne pourrait plus dire ça aujourd'hui. » Bientôt, on ne pourra même plus dire ce qu'on n’a plus le droit de dire. On sera persuadés que s'exprimer est extrêmement risqué et l'espèce deviendra muette.
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(…) quiconque se retrouvait exactement là où il avait commencé sa vie ne pouvait s’empêcher de redouter de n’être allé nulle part entre-temps.
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Je veux dire que, du temps de mon enfance, les parents faisaient la loi. Aujourd'hui, je suis parent, et c'est les enfants qui font la loi. On se fait baiser à l'aller et au retour.
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..., et peut-être est-il inévitable que ce qui nous a d'abord séduit chez quelqu'un soit précisément ce qui nous agace ensuite.
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Kevin s’est penché en avant et a baissé la voix pour susurrer : « Est-ce que tu te souciais beaucoup de savoir les filles qui me plaisaient et celles qui ne me plaisaient pas, avant que j’en bousille une ou deux ? Est-ce que tu te souciais de ce qui se tramait dans ma tête tant que rien n’en sortait ?
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Une bucket list, a-t-elle répété en reculant sa chaise. Où j'ai été pêcher ça ?

Le fait d'utiliser une expression à la mode était l'illustration même de ce manque d'originalité, de ce comportement moutonnier qui la mettait en rage. (Et ce n'était vraiment pas rendre justice aux moutons. Comment ces pauvres bêtes étaient-elles devenues la métaphore du conformisme ?) D'accord, il n'y avait pas de mal à adopter une nouvelle expression. Ce qui était horripilant, c'était cette façon dont tout le monde évoquait soudain sa bucket list, ses cent choses à faire avant de passer l'arme à gauche, sur un ton à la fois léger et entendu, pour bien montrer que l'usage de cette expression lui était parfaitement familier.
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Ils avaient eu des divergences, en particulier à propos des enfants qui, tous deux, étaient devenus pour le moins étranges. Il n’en demeurait pas moins que l’unité de mesure d’un mariage était militaire : un bon mariage, c’était une alliance.
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Avec constance et de plus en plus vite au cours des vingt dernières années, le conformisme avait envahi l’activité physique sous toutes ses formes. Elle l'entendait presque, ce grondement à l'intérieur de son crâne, semblable à la cavalcade migratoire de gnous fonçant dans sa direction, la poussière s'accrochant à ses narines, le martèlement de leurs sabots tambourinant depuis l'horizon. Cette fois, les masses ne se contentaient plus d'imiter ses goûts musicaux et littéraires dans l'intimité de leurs foyers. Cette fois, on les repérait en agrégats, en foules piétinant les creux et les bosses des parcs publics, barbotant de concert dans les quatre couloirs de la piscine de son quartier, vociférant avec les fanatiques, pédalant tête baissée en nuées de cyclistes, chacun voulant à tout prix dépasser le vélo qui le précédait, pour mieux s'arrêter au prochain feu rouge - où la meute s'ébrouait, chacun de ses membres prêt à sauter sur son coreligipnnaire telle une hyène chargeant une proie. Cette fois, l'incursion dans son territoire n'était pas métaphorique mais pouvait se mesurer en mètres carrés. Son cher mari avait rejoint le gros du troupeau des clones décérébrés.
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Pour beaucoup de couples qui se disputent, ce qui les oppose peut rester assez flou, une sorte de ligne, une abstraction qui les divise - un passé, une vague rancune, une lutte inconsciente pour le pouvoir, qui leur échappe : un écran de fumée.
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Il y a quelque chose de nihiliste dans le fait de ne pas avoir d’enfants [...] Comme si on n’avait pas foi en l’humanité. Si tout le monde faisait comme nous, l’espèce disparaîtrait en cent ans.
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- S’il te plaît, jure-moi que tu n’écoutes pas cette Shriver. Elle est hystérique. Elle m’horripile à être aussi contente d’elle, on dirait qu’elle souhaite l’effondrement de la civilisation uniquement pour prouver qu’elle avait raison. Je ne supporte pas le son de sa voix.
Effectivement, une Américaine expatriée insupportable – encore une de ces Yankees anglophiles qui refusaient de retourner chez elles – répétait à l’envi sur Radio 4 qu’elle avait prédit la débâcle en cours dans un de ses bouquins. Une poignée de groupies crédules considéraient cette foldingue comme un Nostradamus des temps modernes. Les Madrigal ou un titre approchant, que Kay n’avait aucune envie de lire, n’évoquait absolument pas de pandémie, l’autrice en autopromotion essayait seulement d’écouler davantage d’exemplaires de son pamphlet d’un alarmisme irresponsable. (p.220-221)
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Le problème tenait au fait qu'un universitaire n'avait pas nécessairement des talents de comédien, or l'enseignement était du théâtre.
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En fait, Mary semblait mal cerner le problème. La question n'était pas de savoir qui était puni, et de quoi. Le problème était que sa fille était morte. Malgré l'immense sympathie qu'il m'inspirait, son fardeau était impossible à décharger sur une tierce personne.
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