Quoi qu'il en soit, une visite de Thomas Bowman signifiait qu'il faudrait aussi supporter la présence de ses filles. Lillian et Daisy illustraient cette tendance déplorable qu'avaient les héritières américaines à venir en Angleterre chasser le mari. L'aristocratie britannique se voyait assiégée par ces demoiselles ambitieuses, qui ne cessaient de se répandre en compliments sur elles-mêmes avec leur abominable accent, et manœuvraient pour figurer dans les chroniques mondaines des journaux. Ces jeunes femmes bruyantes, sans grâce et suffisantes cherchaient à acheter un titre avec l'argent de leurs parents... et y réussissaient souvent. Marcus avait fait la connaissance des sœurs Bowman lors de leur précédente visite à Stony Cross Park, et ne trouvait pas grand-chose à dire en leur faveur. L'aînée, Lillian, était tout particulièrement devenue l'objet de son aversion quand, avec ses amies, elle avait tendu un piège à un aristocrate présent pour le contraindre au mariage. Marcus n'oublierait jamais le moment où le plan avait été éventé. « Seigneur, existe-t-il une seule chose à laquelle vous ne vous abaisseriez pas? » avait-il demandé à Lillian. À quoi elle avait rétorqué : « Si elle existe, je ne l'ai pas encore découverte. » Son insolence extraordinaire faisait d'elle une femme différente de toutes celles qu'il connaissait. Ajouté à cela la partie de rounders en sous-vêtements, et il avait été convaincu d'avoir affaire à un trublion. Or, une fois son opinion faite, Marcus en changeait rarement. Le front plissé, il réfléchit à la meilleure façon de se comporter avec Lillian Bowman. Il se montrerait froid et détaché, quelles que soient ses provocations. Cette indifférence la rendrait certainement furieuse.