Rencontre entre Liv Ullman et Erland Josephson filmée par Alexandre Barry (en anglais - sous-titré en français)
Je voudrais qu'il soit possible pour deux êtres de se développer ensemble, côte à côte, et de s'apporter mutuellement de la joie. Sans qu'il faille toujours que l'un des deux soit réduit à néant pour que l'autre puisse rester fort.
Je crois, personnellement, qu'il est parfois moins pénible de se réveiller seule et d'éprouver un sentiment de solitude parce que l'on est effectivement seule, que de se sentir seule alors qu'on se réveille à côté de quelqu'un d'autre.
Je vis, je me réjouis, je me désole, je lutte toujours pour devenir adulte. Et pourtant, chaque jour, pour une chose ou une autre que je fais et qui me touche, je l'entends en moi cette jeune fille. Elle qui fut moi, il y a de longues années. Ou celle que j'ai cru être.
C'est une voix pressante et qui proteste presque toujours,, mais parfois à peine audible, pleine de désir inassouvis et de tristesse. Je ne veux pas l'écouter, parce que je sais qu'elle n'a rien à voir avec ma vie d'adulte. Mais elle me fait douter.
Je me rends compte que j'ai été élevée pour être celle que les autres voulaient que je sois, ce qui leur aurait permis de m'aimer telle que j'étais, sans être importunés par ma présence.
Mais cette personne-là n'était pas moi.
Ironiquement, ma profession exige une exhibition quotidienne du corps, du visage, des émotions. Et pourtant, j'ai peur de me dévoiler. J'ai peur que ce livre ne me laisse vulnérable et m'ôte toute défense.
Je suis tentée de broder, de me montrer moi-même et ce qui m'entoure sous un jour favorable pour gagner la sympathie du lecteur. Ou, au contraire, de noircir les choses pour leur donner plus de sel.
Comme si je n'étais pas convaincue que la réalité est digne d'intérêt.
Penser que nous sommes sur terre toute une armée de femmes qui hurlent en silence, et toute une armée d'hommes aussi. Et nous nous entendons à peine les uns et les autres.
"Personne ne sacrifiera son honneur à son amour", dit Helmer.
Et Nora lui répond: "Des millions de femmes l'ont fait."
Peut-être est-il possible de changer à deux? De se développer à deux? Mais quand le miroir est trop clair, non seulement on se voit tel que l'on est, mais on est forcé de quitter celui qui reste à jamais le rappel de ce que l'on ne veut plus être.
Imaginer l'expérience dont on enrichirait son travail (elle est actrice), si l'on avait déjà eu l'occasion de mourir - pour ne rien dire de l'expérience que l'on y gagnerait pour vivre!
Sous de grands chapeaux, pour protéger notre visage du soleil, nous avons passé des journées entières à étudier nos rôles, donnant le spectacle d'une heureuse intimité qui ne transparaît à aucun moment dans le film, ou peut-être une fous, indirectement, dans une scène où deux femmes sont assises et nettoient des champignons, chacune fredonnant une mélodie différente.
C'était Alma et Elisabeth Vogler dans Persona, mais aussi Bibi et Liv 1965.