Lémission « Poètes oubliés, amis inconnus », par Philippe Soupault, diffusée le 19 juin 1960 sur Paris Inter.
LA SIRÈNE
La vie appelle à soi la foule haletante
Des germes animés ; sous le clair firmament
Ils se pressent, et tous boivent avidement
À la coupe magique où le désir fermente.
Ils savent que l'ivresse est courte ; à tout moment
Retentissent des cris d'horreur et d'épouvante,
Mais la molle sirène, à la voix caressante,
Les attire comme un irrésistible aimant.
Puisqu'ils ont soif de vivre, ils ont leur raison d'être :
Qu'ils se baignent, joyeux, dans le rayon vermeil
Que leur dispense à tous l'impartial soleil ;
Mais moi, je ne sais pas pourquoi j'ai voulu naître ;
J'ai mal fait, je me suis trompé, je devrais bien
M'en aller de ce monde où je n'espère rien.
Thébaïde
Quand notre dernier rêve est à jamais parti,
Il est une heure dure à traverser ; c’est l’heure
Où ceux pour qui la vie est mauvaise ont senti
Qu’il faut bien qu’à son tour chaque illusion meure.
Ils se disent alors que la part la meilleure
Est celle de l’ascète au cœur anéanti,
Ils cherchent au désert la paix intérieure,
Mais cette fois encor l’espérance a menti.
J’ai voulu vivre ainsi sans amour et sans haine,
Et j’ai fermé mon âme au désir, qui n’amène
Que le regret, souvent le remords, après lui.
Mais je ne trouve, au lieu de la béatitude,
Au lieu du ciel rêvé dans l’âpre solitude,
Que la morne impuissance et l’incurable ennui.
Parmi les monuments de la sculpture grecque, ceux qui se rapportent à la religion sont les plus nombreux. Pour en comprendre le véritable caractère, il ne faut jamais perdre de vue la destination qu'ils avaient dans le milieu où ils se sont produits. La religion grecque a trouvé son expression dans la poésie d'abord, plus tard dans la sculpture. Les poètes et les sculpteurs ont été les véritables théologiens de la Grèce.
Depuis que les anciens Dieux avaient perdu leurs temples, leurs derniers fidèles, ceux qu’on appelait les païens, descendirent de plus en plus rares vers les demeures d’Hadès, apportant à la foule innombrable des morts qui les attendait sur le rivage de tristes du monde des vivants : « Que ceux qui ont laissé des fils sur la terre n’espèrent pas les revoir : nos fils ont renié le culte de leurs pères ; à leur mort, au lieu de passer le fleuve dans l’attente d’une résurrection prochaine et du paradis qu’ils disent fermé pour nous. Que ceux qui regrettent la vie se gardent de boire de Léthé : des peuples barbares couvrent la terre et, au nom du Dieu nouveau, on a détruit tout le divin travail de la pensée des vieux âges. »
La Grèce païenne ne connut jamais les disputes ni les persécutions religieuses. Le polythéisme classe toutes les conceptions particulières dans une unité sans hiérarchie, comme la nature dont l’harmonie résulte du concours des lois et des volontés ; unité républicaine, la seule que la Grèce pût admettre, parce qu’en religion comme en politique c’est la seule qui se concilie avec la liberté.
L'auteur analyse les formes du corps humain et montre comment l'art grec a su arriver à la beauté idéale sans jamais oublier son point de départ, l'imitation de la nature. Il ajoute que les traditions de l'antiquité n'ont pas toujours été suivies parles artistes modernes, mais sans expliquer dans quel sens et au nom de quels principes vrais ou faux la tradition antique a été abandonnée ou combattue.