toujours la faim me tenaille, sans un instant de répit.
Toute la journée, à chaque instant, mon estomac gronde comme s'il se dévorait lui-même. Notre ration alimentaire a été progressivement réduite jusqu'au point où nous ne recevons plus qu'un petit paquet de 340 grammes de riz pour 10 personnes. Les rations de mes frères sont elles aussi tellement maigres qu'ils ne peuvent pas nous apporter grand chose. Ils essaient de venir nous voir le plus souvent possible, mais les soldats les font tellement travailler qu'il ne reste plus de temps pour les visites.

Le génocide perpétré au Cambodge par les Khmers rouges a donné lieu à peu de récits. Le livre de Loung Ung répare cette lacune.
Avril 1975: l'armée de Pol Pot envahit Phnom Penh, mettant un terme brutal à l'enfance de Loung Ung, alors âgée de cinq ans. La petite fille a grandi dans un milieu privilégié avec ses six frères et soeurs ; sa mère est d'origine chinoise. La famille doit fuir la capitale, errant bientôt de village en village en se faisant passer pour des paysans analphabètes. Afin d'avoir les meilleures chances de survie, Loung et les siens doivent se disperser et la fillette est enrôlée en tant qu'"enfant-soldat".
Les parents de Loung Ung et deux de ses soeurs disparaîtront, l'un après l'autre, dans la tourmente.
Tout au long de quatre années de cauchemar, quelle que soit la brutalité des épreuves, Loung Ung s'est toujours raccrochée à un immense amour familial, et n'a cessé de garder espoir pour elle-même et pour ceux qu'elle aime.
Ce témoignage d'une rare force d'évocation -qui offre un troublant parallèle avec les écrits d'Anne Frank dans l'Europe hitlérienne- nous fait plonger, intimement au jour le jour au coeur d'une des plus grandes tragédies du XXè siècle
Phnom Penh se réveille tôt, pour profiter de la fraîche brise matinale avant que le soleil brûlant ne perce la brume.