LA LUNE EST UN MONDE, un sol que l’on peut fouler. L’idée nous semble
évidente aujourd’hui, pourtant elle ne va pas de soi. Le premier à en avoir la
certitude fut le savant italien Galilée lorsque par une belle nuit toscane de 1609,
il eût l’idée géniale de pointer une longue-vue vers la Lune et y découvrit des
plaines, des cratères, des montagnes dont il calcula rapidement l’altitude grâce à
leurs ombres portées. Quel choc, quel émerveillement ce dût être d’être ainsi le
premier. C’était, déjà, un « bond de géant ». Galilée se doutait-il qu’il ouvrait
ainsi la voie au « petit pas d’un homme » à très exactement 360 ans
d’intervalle ? L’idée, je crois, lui a forcément traversé l’esprit.
La Lune a fait, depuis l’Antiquité – et probablement dès la préhistoire –,
l’objet d’études rationnelles. La régularité de ses changements de phase a servi
de métronome à tous les peuples de la Terre. Le calendrier musulman en est un
exemple, de même que les Pâques juive puis chrétienne ou, semble-t-il, les os
gravés de l’Aurignacien vieux de 34 000 ans dont certains préhistoriens pensent
qu’il s’agit de calendriers lunaires. Mais en cette fameuse nuit de 1609, quelque
chose avait changé. La Lune n’était plus un luminaire surnaturel, un « disque »
placé par les dieux juste derrière les nuages, mais littéralement un monde au
même titre que la Terre. C’était donc un endroit que l’on pouvait en principe
visiter, arpenter… en imagination du moins. Ce n’est pas un hasard si, à peine
huit ans après la mort de Galilée, Cyrano de Bergerac a publié son Histoire
comique des États et Empires de la Lune, dans lequel le narrateur voyage par des
moyens extravagants vers cet autre monde.
Alan voulait croire que le fait d'avoir envoyé un peintre sur la Lune avait été très bénéfique au programme. J'ai toujours été touché par cette remarque et je partage son avis, qui s'applique aussi à la présence d'un poète en orbite lunaire en la personne d'Al Worden sur Apollo 15.
On est partis pour explorer la Lune et nous avons découvert la Terre.
LA LUNE EST UN MONDE, un sol que l’on peut fouler.