Vidéo de Lygia Fagundes Telles
Il m’emmena dans son appartement....un appartement minuscule au dixième étage d’un très vieil immeuble, toute sa fortune était cette chambre avec une salle de bain grande comme un mouchoir de poche.Il me raconta qu’il avait reçu l’appartement en héritage d’une tante cartomancienne.Un autre jour, il me dit l’avoir gagné à la suite d’un pari, et quand une troisième fois il se lança dans encore une autre histoire, je l’interrompis et il se mit à rire: « Il faut varier les histoires, Luisiana, c’est amusant d’improviser, l’imagination ne nous a pas été donnée pour autre chose.C’est trop triste lorsqu’une histoire reste la même la vie entière ... »
( Seulement un saxophone )

(« As Meninas » - lu en V.O., traduction libre)
J’étais si heureuse en train de ne penser qu’à des lettres, et voilà que tout à coup celles-ci se sont regroupées, si dangereuses quand elles se mettent ensemble. Pourtant désinvoltes à la base. Des enfants, A, B, H, M, O…Tellement rare le X. En déperdition, le Z, roi sans mémoire, son frère jumeau S possède lui la malice de l’usurpateur. Je pose mon doigt sur le F éventré que Sœur Bula avait brodé, les lettres aussi reçoivent des coups de poignard au ventre, de pistolet dans le cœur, coups-de-poing, flétrissures, coups-de-pied… - aussi les lettres sont-elles lancées à la mer, dans les abîmes, dans les poubelles, les égouts, falsifiées et décomposées, torturées et emprisonnées. Certaines en meurent, mais cela n’a aucune importance, elles reviennent sous une autre forme, comme les morts.
Estava tão contente pensando só em letras e de repente elas foram se compondo, tão perigosas quando se juntam. Mas na raiz são descomprometidas. Umas crianças, A, B, H ; M, O…Tão raro o X. Em declínio o Z, rei desmemoriado, o irmão gêmeo S com a astúcia de um usurpador. Ponho o dedo em cima do F desventrado que Irmã Bula bordou, as letras levam também facadas no ventre, tiros no peito, socos, agulhadas, coices – também as letras são atiradas ao mar, aos abismos, às latas de lixo, aos esgotos, falsificadas e decompostas, torturadas e encarceradas. Algumas morrem mas não importa, voltam sob nova forma, como os mortos.
La conquête d'un chat est chose difficile, complexe, qui n'a rien des amours impromptues : un geste d'approche de plus et il file comme le vent.
Le courage vertu majeure. Le courage d'aimer et de désaimer, le courage de mourir et de renaître, le courage de dire sa colère, celui d'être triste.
[Le chat] Sa présence paisible agissait sur moi comme un tranquillisant, tout va bien, oui tout va bien.
Je recueillerais volontiers le petit scarabée dans la paume de ma main pour aller le déposer dans une des jardinières de samambaia, mais est-ce que là il sera plus content ? J'hésite, ce qui est bon pour moi peut ne pas l'être pour lui. L’ambiguïté du bien.
Elle écrivait ses poèmes en cachette, recluse dans sa chambre, l'écriture tremblée, l'encre violette. [...]
Mais laquelle alors prenait le risque de braver la famille, la société ? Ici, au Brésil, elles ont été bien peu nombreuses celles qui ont réussi à se manifester. Ailleurs, sous d'autres cieux, il a été assez significatif le nombre des artistes femmes sur le modèle d'une George Sand qui assuma travail et sexe avec une totale arrogance. Mais en passant sur l'autre rive : amie des hommes, elle signait ses écrits d'un nom d'homme, elle s'habillait comme un homme et fumait tranquillement ses petits cigares. Une même époque. Deux styles.
Mais Oriana s'est aperçue que j'étais sur mes gardes. Elle a flairé ma méfiance, ma sagacité. Dès lors, ses visites se sont faites plus rares. Plus rares les coups de fil. En gros, elle n'a plus osé m'adresser la parole. Même pas ce matin-là. Quand elle est entrée, livide, avec sa brassée de roses, tremblante de la tête aux pieds, l'oeil convulsé, hurlant son cri muselé, suppliant (dans un silence de terreur) que je démente, que je nie, dise que ce n'était pas vrai, non, ce n'est pas arrivé! ...
Je ne voudrais pour rien au monde vivre dans un pays privé de ces animaux : chat ou chien, ils sont toujours un fragment du Paradis perdu.
"Je suis pieds et poings liés, Lena, je ne peux pas aider Ana Clara. Si je m'investis auprès de quelqu'un qui se drogue, ce serait même ma propre soeur, je ne peux pas, là où il y a des trafiquants et des drogués, il y a des flopées de flics, ils ne cherchent que ça, nous mélanger. Ca leur facilite la tâche. Je sais qu'elle est malade mais c'est une maladie qui me donne envie d'étrangler le malade. Ils s'enfoncent; se noient avec leur air ahuri, les uns à la suite des autres, tu les prends par le bras, les cheveux, tu cries, tu menaces, tu fais l'impossible et tu les voies qui sombrent d'un coup comme un bloc de ciment dans un marécage. Ce ne sont pas des bêtes, Lena, car les bêtes réagissent, elles regimbent. Eux non, Ils sombrent avec cet air hébété, morts en dedans. Que faire ?