À 36 ans, Benjamin Lacombe est l?un des illustrateurs les plus doués de sa génération. Il nous présente sa version du « Magicien d?Oz », qu?il publie aux éditions Albin Michel, conte écrit en 1900 par Lyman Frank Baum et réadapté pour l?occasion par Sébastien Perez.
Dans les pays civilisés, je crois qu'il ne reste plus aucune sorcière, ni aucun magicien, ni aucune enchanteresse, ni le moindre enchanteur. Mais, vois-tu, le pays d'Oz n'a jamais été civilisé parce que nous sommes coupés du reste du monde. Voilà pourquoi nous avons encore parmi nous des sorcières et des magiciens.
Bien sûr que je ne peux pas comprendre. Si vous aviez la tête pleine de paille, tout comme moi, vous habiteriez sans doute tous dans des endroits superbes, et le Kansas serait désert. C'est une chance pour le Kansas que vous ayez de la cervelle.
- Qui es-tu ? demanda l’Epouvantail après s’être étiré en bâillant. Et où vas-tu ?
- Je m’appelle Dorothy, et je vais à la Cité d’Emeraude demander au Grand Oz de me renvoyer au Kansas.
- Où est la Cité d’Emeraude ? Et qui est Oz ?
- Comment ? s’exclama la fillette, très étonnée. Tu ne le sais pas ?
- Non, je ne suis au courant de rien, répondit-il avec tristesse. Tu vois bien que je suis empaillé, alors je n’ai pas du tout de cervelle.
- Oh ! dit Dorothy. Je suis désolée pour toi.

Dans le grand champ de maïs qui s’étendait de l’autre côté, elle aperçut non loin de là un épouvantail perché sur un piquet afin d’éloigner les oiseaux des épis mûrs. Dorothy appuya son menton sur sa main et l’examina avec attention. Sa tête était formée d’un petit sac bourré de paille sur lequel étaient peints des yeux, un nez et une bouche. Le reste de sa silhouette consistait en un vieux chapeau pointu de couleur bleue, qui avait dû appartenir à un Munchkin, et en un costume bleu râpé, décoloré et lui aussi rempli de paille. Il était chaussé d’une paire de vieilles bottes à revers bleu, comme en portaient tous les hommes du pays, et un piquet enfoncé dans son dos le maintenait au-dessus des tiges de maïs.
Tandis qu’elle observait le visage peinturluré de l’épouvantail avec le plus grand sérieux, Dorothy eut la surprise de le voir lui adresser un clin d’œil. Elle crut d’abord s’être trompée, parce qu’au Kansas les épouvantails ne clignent pas des yeux ; mais bientôt le mannequin hocha la tête à son intention. Elle descendit alors de la clôture et marcha vers lui, pendant que Toto courait autour du piquet en aboyant.
— Bien le bonjour, dit l’Épouvantail d’une voix rauque.
— Tu as parlé ? demanda la fillette, stupéfaite.
— Certainement. Comment vas-tu ?
— Très bien, je te remercie, répondit-elle poliment. Et toi ?
— Je ne me sens pas très bien, dit l’Épouvantail en souriant. C’est très ennuyeux d’être perché là-dessus jour et nuit pour effaroucher les corneilles.
Même quand notre patrie est morne et grise, nous autres les êtres de chair et de sang nous préférons y vivre plutôt que dans le plus beau des pays étrangers.
Dorothée prit Toto solennellement dans ses bras, et après avoir dit un dernier au revoir, elle frappa trois fois les talons de ses souliers l’un contre l’autre, tout en ordonnant :
- Ramenez-moi à la maison, chez tante Em !
Dorothy now took Toto up solemnly in her arms, and having said one last good-bye she clapped the heels of her shoes together three times, saying:
“Take me home to Aunt Em!”
Si seulement tu avais un peu de cervelle dans la tête,tu vaudrais autant que tous ces hommes,et peut-être même davantage que certains d'entre eux.Le cerveau est le bien le plus précieux en ce bas monde,pour les corneilles comme pour les hommes.
Ce doit être inconfortable d'être humain, dit l'Epouvantail d'un air pensif. On est obligé de dormir, de manger et de boire. Mais enfin, tu as un cerveau, toi. Cela vaut bien quelques inconvénients.
Quand Tante Em était venue s’installer ici, elle était une jeune et belle épouse. Le soleil et le vent l’avaient changée, elle aussi. Ils avaient emporté l’étincelle de ses yeux où il n’était resté qu’un gris sobre, retiré le rouge de ses joues et de ses lèvres, et les avaient rendues grises elles aussi.
- Mais pourquoi ta tête est-elle hérissée de piquants? demanda l'Homme en Fer-blanc en remarquant les aiguilles qui dépassaient de la surface de son crâne.
- C'est la preuve que son intelligence est particulièrement aiguë, estima le Lion.