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Critiques de Lynn Johnston (1)
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Never Wink at a Worried Woman

Ce tome est le vingt-sixième collectionnant les comicstrips de la série For better or for worse. Il s'agit d'une série qui a été initialement publiée dans des quotidiens canadiens et américains de 1979 à 2008. Ce strip est écrit, dessiné et encré par Lynn Johnston. Il s'agit de strips en noir & blanc, ceux du dimanche ayant été aussi repris en noir & blanc, sans leurs couleurs initiales. Ce tome contient les strips parus du 08 juillet 2003 au 25 avril 2004. Il peut se lire sans connaissance préalable des personnages de la série.



Ces strips racontent l'histoire de la famille Patterson au travers de ses différents membres qui prennent de l'âge à peu près en temps réel. Chaque strip compte 4 ou 5 cases, et ceux du dimanche en compte une dizaine répartie en 4 bandes. Chaque strip se termine par une chute de nature comique. Au fil de ces 120 pages, il y a plusieurs situations qui se déroulent pendant plusieurs strips, composant à des tranches de vie. Le strip se déroule dans la ville fictive de Milborough, dans la banlieue de Toronto dans l'Ontario. Elly (née le 26 août 1951) & John Patterson (né le 17 février 1950) sont les parents de Michael (né le 28 avril 1976, marié, écrivain), Elizabeth (née le 26 juin 1981, célibataire, étudiante pour devenir professeure), et April (née le premier avril 1991, 13 ans).



Dans ce tome, Elizabeth doit se rendre au mariage d'Anthony (un de ses anciens amoureux), trouver un cavalier, finir son job d'été dans une petite entreprise d'aménagement paysager, poursuivre ses études de professorat et se faire évaluer. April va au collège et doit se rendre dans la librairie de sa mère après les cours. Elle constate que Kortney (une employée) tire au flanc. Jim (né le 21 mars 1921, le père de John) se cogne dans une porte et doit faire face à une perte temporaire d'autonomie. Elly doit trouver comment gérer son employée Kortney. April s'y entend comme une adolescente pour faire ressortir les petites contradictions de ses parents.



Il est donc assez difficile de résumer 10 mois de parution d'un tel strip. Lynn Johnson prend des petits moments de la vie qu'elle transcrit sous la forme de d'un gag en 4 ou 5 cases, tout en suivant la vie ordinaire d'une famille ordinaire, blanche, vivant en pavillon, dans une banlieue sans histoire. Toutefois la longévité de ce strip (près de 30 ans) indique qu'il a trouvé son public et que la voix de son auteure parle à ses lecteurs. Pour un lecteur ayant déjà lu d'autres tomes, c'est un plaisir de retrouver ces personnages qu'il suit depuis des années, avec leurs petits problèmes et leurs petites épreuves de tous les jours, et leur bienveillance. C'est l'un des points qui ressort à chaque page, la gentillesse de ces personnages, leur approche positive de la vie et le calme avec lequel ils gèrent leurs angoisses (essentiellement celle du futur).



Lorsque Jim (le grand-père) se casse le nez, il effectue un séjour à l'hôpital. Il n'y a pas d'inquiétude sur la facture à payer, sur les éventuelles séquelles ou sur la qualité des soins. Lorsqu'Elly se rend compte que Kortney ne travaille pas à hauteur de ce qu'elle la paye, il n'y a pas de risque de faillite de la librairie, juste une question morale. Lorsqu'Elizabeth se rend au mariage de son ancien amoureux, il n'y a que des sentiments apaisés, et une jalousie théâtrale de la mariée. Même lorsqu'Elly pense à la faim dans le monde en regardant un concours du plus gros mangeur, il y a une forme de résignation passive, comme une fatalité inhérente à l'humanité.



Le lecteur se laisse porter par ce quotidien inoffensif, et apprécie cette douce convivialité avec des individus bien équilibrés et plutôt heureux dans leur vie. Au bout de quelques strips, le lecteur doit également se rendre à l'évidence, la réplique de chaque dernière case de strips correspond à une touche d'humour, une chute comique. Le hasard du découpage de ce tome fait que ce n'est une évidence pour qui ne connaît pas For better or for worse, au vu du premier strip. L'humour de Lynn Johnston est aussi doux que les situations qu'elle met en scène. Il n'y a pas de provocation, de revendication, d'amertume, de méchanceté ou de critique. En soi ce n'est pas une mauvaise chose, c'est même un objectif particulièrement ambitieux et honorable que de faire rire sans que ce soit aux dépends d'une partie ou d'une autre de la population, sans jouer sur la discrimination ou la méchanceté.



Le fonctionnement de l'humour de Lynn Johnston repose sur le décalage de la dernière phrase, par rapport à la direction de la discussion des cases précédentes. Par exemple Michael déjeune avec sa mère dans un restaurant. Il lui explique que sa situation professionnelle s'est améliorée et qu'il est en mesure de rembourser une somme qu'il lui a empruntée. Il lui tend donc un chèque qu'elle prend. L'ensemble des cases développe l'amélioration de la situation économique du fils. La mère le prend en lui indiquant qu'il est hors de question qu'elle l'empoche car c'est une première dans la famille des Patterson qu'un enfant rembourse une somme empruntée à ses parents. Le décalage se produit entre la fierté du fils et la réaction de sa mère sans rapport avec l'amélioration de sa situation. Une autre situation : Elly et John prennent des vacances à Cancun et sont émerveillés en découvrant la décoration de leur hôtel. 4 cases pour les montrer appréciant le lieu, la dernière case avec un couple de touristes se plaignant à la réception. Il n'y a pas de jugement moral sur eux, ou sur la qualité de l'hébergement, juste un jeu sur le décalage entre le plaisir de la découverte des uns, l'appréciation de la qualité des prestations pour les autres.



Lynn Johnston réalise également quelques gags qui ne reposent pas sur la discussion, mais qui sont de nature visuelle. Lorsqu'Elly et John préparent leur bagage pour aller à Cancun, c'est par l'image que l'auteure montre la taille de la valise d'Elly, ce qui fait toute la différence avec celle de John. D'une manière générale, les gags du dimanche reposent plus sur la dimension visuelle. Par exemple, il en est ainsi de celui dans lequel un lapin mord les câbles électriques de la maison, sous les yeux des 2 chiens de la famille. Il n'y a pas un mot de texte, seulement quelques onomatopées. À ces occasions-là, le lecteur peut apprécier le savoir-faire de Johnston à raconter une histoire par les images, de manière claire, sans difficulté de compréhension.



La majeure partie des strips reposent donc sur des personnages en train de discuter de tout et de rien, avec une part de confidences. D'un point de vue visuel, cela peut faire craindre une monotonie, avec une enfilade de têtes en train de parler. Le lecteur découvre avec plaisir qu'il n'en est rien. Par contraste avec un strip comme Dilbert de Scott Adams, For better or fort worse présente une grande variété visuelle. Pour commencer les personnages sont dessinés de manière réaliste (parfois avec un nez un peu prononcé), des vêtements simplifiés, mais différenciés d'un personnage à l'autre. L'artiste a tendance à simplifier les traits des visages pour pouvoir mieux accentuer les expressions, et ainsi faire passer des émotions mieux marquées. Le lecteur voit les personnages accomplir des gestes divers et variés du quotidien : marcher, donner un cours, taper à l'ordinateur, tenir un bébé dans ses bras, manger au restaurant ou chez soi, prendre le train de banlieue, danser en soirée, lire la presse à scandales, etc. De ce point de vue, Lynn Johnston retranscrit le quotidien dans toute sa banalité, mais aussi dans sa richesse sans cesse renouvelée.



Toujours par contraste avec un strip minimaliste comme Dilbert, Lynn Johnston représente avec une grande régularité les décors en arrière-plan. Le lecteur n'a pas l'impression que les personnages évoluent comme sur une sorte de scène de théâtre, sans profondeur de champ, ou dans des décors factices et bon marché. Lynn Johnston ne conçoit pas son strip comme une sitcom un peu fauchée qui rognerait sur les décors, et les extérieurs. Au contraire, les personnages se déplacent, vont faire leur course, prennent des vacances, roulent en voiture, prennent l'avion, vont au spectacle, etc. L'artiste représente ces décors avec une précision satisfaisante, transcrivant à nouveau toute la diversité des lieux du quotidien d'une famille.



Il est vraisemblable que ce tome constitue une porte d'entrée aussi bonne que les autres dans le strip For better or for worse. Il n'y a pas besoin de connaître quoi que ce soit des personnages pour comprendre leur situation, ou pour apprécier les enjeux de leur quotidien. En ce sens ce tome est accessible à tout le monde. Lynn Johnston a pris le parti de raconter des gags en 4 ou 5 cases, sur la base du quotidien d'individus menant une vie normale, ou moyenne (si tant est que cela ait un sens) de canadiens de la classe moyenne. Elle a pris le parti de refuser le drame facile, et de se concentrer sur les petits riens du quotidien, dans tout ce qu'ils ont de banal, mais aussi de diversifié. Elle a également pris le parti très louable d'un humour qui ne repose pas sur le fait de tourner en dérision un groupe de personnes ou un autre. De ce fait, ces strips peuvent paraître un peu fades, sans jamais être convenus ou prévisibles.
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