AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Ziliz


L'enfant ouvrit la bouche et le début d'un son sortit. Un « Je » aurait-on dit, ou un « J'ai ». Ce son fut suivi par un silence. Mais pas n'importe quel silence : un silence brusque, lourd, déchirant. Ses yeux étaient rivés sur le bitume face à lui, sa mâchoire serrée, ses poings fermés. Je distinguais le va-et-vient rapide de sa petite poitrine en manque d'air. Il leva la tête vers moi, la détourna. Cet enfant parvenait plutôt bien à donner le change, et rien au monde ne pouvait davantage me toucher : ce courage, cette bataille, ces ruses que déploient les enfants pour ne pas perdre la face. Le garçon leva les yeux vers le ciel, comme absorbé dans ses pensées, comme pour réfléchir à ce qu'il voulait dire, mais je n'étais pas dupe. J'avais, voilà bien longtemps, participé à un programme de recherche sur le bégaiement et le souvenir des enfants avec lesquels j'avais travaillé, principalement des garçons, était encore vif dans ma mémoire, ces garçons pour qui la parole était un terrain miné, une impossibilité, une cruelle condition nécessaire aux interactions humaines.
Alors j'inspirai profondément.
« Je vois que tu as un bégaiement, lui dis-je. Prends tout le temps qu'il te faut, vraiment. »
Son regard se tourna instantanément vers moi et sur son visage apparut une expression incrédule, abasourdie. Voilà une autre chose dont je me souvenais. Les enfants n'en revenaient jamais lorsqu'on s'adressait à eux en toute décontraction.
(p. 37)
Commenter  J’apprécie          170





Ont apprécié cette citation (15)voir plus




{* *}