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Critiques de Margaret Mazzantini (140)
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La mer, le matin

Une illustration de couverture, vieille barque fichée dans le sable, baignée de couleur bleue, très pâle, presque grise, avec la mer au loin comme une ligne blanche qui se confond avec l’horizon.

Un titre, « La mer, le matin », et le sentiment de paix grave, d’apaisement mélancolique, de sérénité triste que les deux mots accolés produisent au creux de l’oreille lorsqu’on les prononce à voix haute, comme un murmure de vagues dans l’aube naissante.

Un premier paragraphe : « Farid n’a jamais vu la mer, il n’a jamais mis les pieds dans l’eau. Il se l’est imaginée des milliers de fois. Piquée d’étoile comme le manteau d’un pacha. Bleue comme le mur bleu de la ville morte. »

Et l’envie de plonger dans les remous de la lecture…



C’est un livre qui parle de la Lybie et de l’Italie. De leur destin commun. De leur passé partagé. Du sang qui abreuve leur sol. Histoire lourde, d’amour et de haine, de partage, de violence, de chaleur, d’amertume. Histoire de guerre et de colonialisme que ces deux pays détiennent en héritage, par-delà les flots bleus de la Méditerranée.

Et comme toujours, la grande Histoire qui télescope la petite, et qui va broyer des destins, et écraser des vies, et malmener des êtres, dans des récits d’exil, de déracinement, de déchirure.

Lybie et Italie, deux terres qui seront tour à tour sœurs ou ennemies, complices ou rivales, adversaires ou associées, toutes deux laissant la marque de leur histoire creusée comme une cicatrice dans les vies de Jamila et d’Angela, les deux mères-courage de « La mer, la matin ».



Tandis que Jamila et son petit garçon Farid s’embarquent sur un bateau de fortune pour tenter de joindre la Sicile, contraints de fuir la Lybie depuis que la guerre civile a éclaté, Angela et son fils Vito ont entrepris le voyage inverse. Peu avant que le pays ne sombre dans le chaos, profitant des relations cordiales entretenues entre Kadhafi et Berlusconi, ils ont quitté les côtes siciliennes pour accoster sur les rives de Lybie, un pays qu’Angela connaît bien puisqu’elle y a vécu les onze premières années de sa vie. Angela fait partie de cette catégorie d’italiens de Tripoli dont les grands-parents ont débarqué en Lybie avec la vague migratoire des années 1930. Ils s’y sont installés, y ont bâti leur vie, ont aimé ce pays qu’ils ont fait leur, avant que d’en être expulsé dans les années 1970 par le « Bébouin de la Syrte », Kadhafi. Dans le cœur alors et pour toujours « le mal d’Afrique », la nostalgie chevillée au corps, l’impossibilité d’oublier et pour les plus anciens de ces pauvres gens, l’incapacité de se réadapter avec ce sentiment lancinant qu’on leur a volé leur vie.



La mer est partout dans ce beau livre de la romancière italienne Margaret Mazzantini ; une étendue bleue dont la respiration s’accorde au rythme des êtres qui ont subi l’exil et dont les yeux ne cessent de se perdre vers l’horizon. C’est ce qui le rend si attirant, si secrètement vibrant et lumineux.

Si le sujet est grave, le style de Margaret Mazzantini ne nous fait pas pour autant naviguer en mer hauturière ; sa langue s’écoule plutôt avec mesure, comme un bruit régulier de ressac, le renflement permanent d’une écriture sobre et concise, distillée tantôt âprement, tantôt avec douceur et nostalgie, elle s’harmonise au feulement des vagues sur le sable, au bruissement du sable sur les rivages de Lybie et d’Italie.

Une poésie discrète, frugale, sourd de ces phrases chargées de sel marin ; force tranquille, ravageuse. Comme l’eau, l’écriture de Mazzantini est parfois souple comme un duvet de plumes, tantôt rigide et dure comme un mur de béton, mais toujours puissamment évocatrice.

Imprimée en creux comme une empreinte dans le sable, la détresse émerge avec la nonchalance feinte qui se cache derrière les sentiments les plus exacerbés et jaillit du dépouillement avec la force d’une déferlante, laissant le lecteur immergé dans un flot d’émotions brutes.

Car il règne dans « La mer, le matin » comme un faux temps suspendu, le calme menaçant d’une mer étale d’avant la tempête, tranquillité de façade, aura de lenteur qui envoûtent le lecteur dans un déferlement mousseux de vaguelettes jusqu’au retour de lame, froid et brutal comme une eau glacée, une mer qui de bleue se fait noire, destructrice, dévoreuse d’âmes, broyant les misérables rafiots qui entreprennent la traversée du dernier espoir, noyant les espérances, submergeant les attentes, engloutissant les rêves.



Jamila, Angela, Farid, Vito…des destins qui se croisent dans la violence d’un pays livré à la barbarie d’un dictateur, des personnages poignants dont la vie s’abîme dans le fracas des vagues, des êtres qui ne laisseront de leur passage qu’une petite amulette ensevelie dans le sable.

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Venir au monde

Faire une critique plusieurs années après la lecture est un exercice aussi difficile qu'il est intéressant. Retrouver ses impressions, constater ce qu'il reste en sensations.

En conseillant fortement cette lecture à une amie, et en tentant d'argumenter mon propos, j'ai dû constater que le souvenir en était encore bouleversant, certains détails restaient flous quand d'autres profondément gravés. L'ambiance générale du livre, la violence de la Yougoslavie en guerre, la résilience, la quête de la maternité et de la filiation, des thèmes qui ont a alimenté une passionnante discussion parmi mes amies lectrices à la parution en 2010.



Roman d'amour, de guerre, de secrets. Suivre les pas de Gemma la romaine et d'Hugo le photographe, c'est accepter de se faire bousculer par la réalité: le parcours du combattant du désir d'enfant, la survie dans les zones de conflit avec obstination et solidarité, la mort d'êtres chers et l'impérieuse nécessité de vivre.



Livre magnifique, intense et violent, en faits et sentiments, mais sans un brin de pathos pour nous tirer des larmes. La grande classe et le talent, récompensés par un succès d'édition mérité!

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La mer, le matin

Un petit livre, très marquant. Un récit très humain permettant de mieux comprendre le drame des migrants ( volontaires ou forcés). Ce drame dans une vie , cette cassure ! A lire absolument.
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La mer, le matin

Une femme tente de fuir cette guerre de Libye qui vient de lui prendre son mari. Elle donne tout ce qu'elle possède pour traverser la Méditerranée vers l'Italie, avec son fils, sur un boat-people.

Une italienne vient de traverser la Méditerranée avec sa mère et son fils pour tenter de retrouver le pays où elle est née et a passé sa jeunesse: la Libye.

Margaret Mazzantini raconte avec une écriture très belle et puissante, à travers l'histoire de ces déracinés, l'Histoire de tous ces italiens pauvres qui ont traversé la Méditerranée pour aller gagner leur vie en Libye au début du XXème siècle et ont été chassés à l'arrivée de Khadafi et de ceux qui veulent quitter une Libye en guerre où il n'y a pas d'avenir.

Très beau!

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Venir au monde

Un best-seller international d’un portrait dévastateur, ravageur d’un amour, d’une maternité, d’une perte et d’une rédemption dans la guerre déchirée de Sarajevo.



Nous sommes à Rome en 2008, Gemma vient de recevoir un appel de Gojko, son ami bosniaque qu’elle n’a jamais revu depuis son départ de Sarajevo. Ce dernier les invite, son fils Pietro et elle à retrouver cette ville autrefois assiégée, une ville qu’elle délaissée au moment où elle a eu son fils (il y a 16 ans). Gemma trouve en cette invitation l’occasion de montrer à Pietro ses origines et les traces de son père Diego, mort là-bas. Consciente que ce retour aux sources aura des conséquences dramatiques, elle souhaite toutefois répondre à de nombreuses questions qui sont restées en suspense durant toutes ces années.



Venir au monde est d’abord l’histoire d’une femme dont l’avenir était tout tracé, jusqu’au moment où elle rencontre cet homme, quelques jours avant son mariage… Cet homme qui ne paye pas de mine, mi- clochard, mi- artiste… Etonnée d’abord puis incrédule, ces deux êtres vont s’aimer et s’unir pour le meilleur et le pire… On suit leur cheminement sur la construction d’un couple, sur leurs rêves, leurs espoirs, sur cette rencontre des corps et des esprits… sur la puissance de ce lien qui les unit. Un couple mit à nu… Puis vient le désir d’avoir un enfant après tant d’années … Entre espoir et désillusion, entre désespoir et haine, entre folie et envie de disparaître… un lent combat s’installe…



Venir au monde est aussi une histoire d’un miroir, reflétant la tragédie qu’a vécu un pays au travers de sa guerre … Une histoire d’hommes et de femmes, des anonymes qui ont tant souffert, des traumatisés, des perdants, des battants qui essayent de construire ou de reconstruire… De Sarajevo à l’Italie, en passant par les qualités ou les défauts de ces hommes et femmes, je n’ai pu que me laisser submerger par leur combat de tous les jours… Comment transcrire ce que j’ai pu ressentir : j’ai vécu avec eux le calvaire, la peur, la tristesse, la déchirure et la joie… parce que la façon dont Margaret Mazzantini retranscrit cette histoire, m’a plongé dans le quotidien de ses personnages… Je me suis littéralement introduite dans ce miroir. Et plus le livre avance, plus l’intensité monte d’un cran pour finir en apothéose ! Il faut dire que depuis le début on est plongé dans une impression de malaise qui ne fera qu'augmenter au fil des pages et qui nous laisse pressentir que le retour de Gemma à Sarajevo va dévoiler des réalités qu’on trouvera dures à supporter. Alors que l’on pensait avoir compris l’histoire, les ultimes pages changent complètement la donne et nous pétrifient.



Venir au monde est un véritable hymne à l'amour et un très bel hommage à la maternité, c’est l'un des romans les plus bouleversants, les plus tristes, les plus horribles que j'ai jamais lu.

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La mer, le matin

Il y a des recettes qui ne sont pas infaillibles : un joli titre + un style rythmé + un sujet émouvant + une construction élégante...ne font pas nécessairement un bon bouquin.



La mer le matin a toutes ces qualités-là...et pourtant la sauce ne prend pas. Trop d'effets tue les faits. Trop de faits tue l'effet, aussi. Je vais essayer de m'expliquer.



Dans ce court récit aux parallélismes soigneusement étudiés -deux mères, deux fils, deux traversées entre Italie et Libye- la matière prolifère : d'abord, en toile de fond, une fresque historique sur les rapports complexes entre la Libye et l'Italie- quelque peu allusive et brouillonne, j'ai dû recourir à quelques recherches pour remettre tout ces éléments en place!- .

On passe de la colonisation italienne menée par le régime de Mussolini à la décolonisation conquise d'une main de fer par un certain Khadafi. On glisse très vite sur les rapports tendus entre Aldo Moro et Khadafi, puis sur la lune de miel entre Berlusconi et le dictateur . On surfe sur la guerre de déstabilisation et l'exécution du tyran, on effleure l' exode majeur des populations civiles libyennes que nous connaissons aujourd'hui , avec ces sinistres bateaux-poubelles qui larguent leur cargaison de chair humaine au large des îles siciliennes...



Il y avait là la trame d'un roman complexe, approfondi, documenté . Mais chez Mazzantini, c'est seulement une référence historique qui sert à planter - ou à crédibiliser ?- le récit. Ou plutôt LES récits: deux histoires se côtoient, réfléchissant leurs images en de savants jeux de miroir.



La première est sûrement la plus authentique: l'auteure est née ou a vécu en Libye, sa famille c'est un peu celle de Vito..Malheureusement, là encore, qui trop embrasse mal étreint: incapable de limiter la narration à la mère et à son fils, l'auteure se lance dans de larges flash-backs évoquant la famille de Vito sur trois générations...



Last but not least, il y a le deuxième récit: celui qui concerne le petit Farid et sa mère sur une barge pourrie, vers l'Italie. Pourquoi ce troisième fil rouge , dans un récit aussi court? Sans doute pour la recherche d'une structure mais la bipolarité n'a rien d'original: Laurent Gaudé dans son très bel Eldorado et, avant lui, Le Clézio dans le magnétique Désert avaient déjà usé de ces récits parallèles ou croisés sur le même sujet: la colonisation et l'émigration..Il y a sans doute une autre raison.



J'ai bien une réponse mais elle ne va pas plaire à tout le monde et je vais passer pour la méchante empêcheuse de pleurer en rond: j'y flaire une envie pas très saine de "séquence émotion" ( d'ailleurs j'ai moi-même marché: la seule partie du livre où j'ai été vraiment émue était celle du petit Farid et de sa gazelle...).



Bilan: quand on cherche les ingrédients d'un succès littéraire et qu'on fait un livre comme on lance un produit publicitaire avec tête de gondole et coeur de cible, on rate ce qui aurait pu être un beau livre, et on dupe son public , sensible qui, à une histoire familiale, qui, à un conte triste sur notre terrible époque de migrations désespérées, qui, à une page d'Histoire - la colonisation- qui commence seulement à se dire, et bien laborieusement. Le roman devient, dès lors, une auberge espagnole où chacun peut grappiller quelque intérêt mais où rien n'est vraiment travaillé, vraiment abouti.



Pas même le style, souvent poétique, mais artificiellement, comme le reste. C'est joli, bien tourné, mais sans chair. La ponctuation hache la phrase pour donner le halètement de l'émotion. Mais l'émotion est absente, elle est juste très habilement feinte.



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Venir au monde

Quel roman d'amour magnifique. Roman de passion, de fidélité, d'humanité, de résilience. Oui l'amour malgré la guerre, les violences, les incompréhensions.

L'amour malgré cette haine qui surgit du jour au lendemain. L'amour malgré les tours, mauvais et bons, que nous jouent le corps et le temps. Une réflexion, belle, grande, sur la maternité. Cette histoire d'amour, poignante, durant une guerre moderne, la Yougoslavie qui éclate, nous liera solidement aux personnages et à leurs émois. Interessante la façon qu'a Margaret Mazzantini de nous promener du présent au passé sans que cela soit tranché. Malgré la dureté de ses propos, l'écriture est douce.

Une lecture qui dérangera nos sentiments d'attachement et d'appartenance. Une belle lecture, n'hésitez pas !
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Venir au monde

Première rencontre pour moi avec l'autrice italienne Margaret Mazzantini, une tragédie, une magnifique et poignante histoire d'amour, d'amitié, de quête désespérée de maternité, avec pour toile de fond l'affreuse guerre qui déchira la Bosnie-Herzégovine de 1992 à 1996.

Gemma, Romaine pur jus, retourne à Sarajevo avec son fils Pietro, adolescent. Elle veut qu'il connaisse l'endroit où il est né et lui raconte son père Diego, que Pietro n'a pas connu. Gemma l'a rencontré à Rome, ils se sont follement épris l'un de l'autre, et vivront un grand amour malgré une certaine précarité, jusqu'à ce que l'envie d'enfant survienne et se heurte à des problèmes de fertilité, se muant alors en douloureuse obsession pour Gemma. Parallèlement, leur vie se transporte sporadiquement à Sarajevo où Gemma a autrefois travaillé sur sa thèse et où Diego exerce son métier de photographe; ils y retrouvent des amis précieux. Leur destin va basculer lorsque que la guerre y éclate. Sous les tirs d'artillerie et ceux des snipers, ils vivront alors le cauchemar avec les Sarajéviens assiégés. Difficile d'en raconter plus sans rien révéler, vous m'en voudriez !!! Lisez ce roman qui vous surprendra, vous touchera, vous fera pleurer et trembler... La prose de l'autrice est particulièrement touffue, d'aucuns la trouveront surchargée, il faut se laisser bercer par toutes ces images, ces évocations, ce roman ne peut se lire vite, même si à partir du milieu vous aurez envie de savoir la suite plus rapidement, il vous faudra prendre le temps, et croyez-moi ce temps ne sera pas perdu, vous vivrez plus d'émotions que vous en avez demandées (lire: vous en prendrez plein la gueule) !
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Écoute-moi

Angela, quinze ans, est admise aux urgences suite à un accident de scooter. Son père est chirurgien dans cet hôpital.

Hématome crânien. Son collègue se charge de l’opération.

Au chevet de sa fille entre la vie et la mort, il s’adresse à elle et lui confie toute sa vie, et en particulier son amour fou pour une jeune femme un peu paumée : Italia.

Comme sa fille, il joue sa vie comme il l’a jouée seize ans auparavant.



J’ai littéralement dévoré ce roman.

Même si le style n’a rien de particulier, il est mené de main de maître.

C’est un magnifique portrait d’homme, sans concessions, lucide, sensible, douloureux.

Un homme faible, comme nous pouvons tous l’être

Un homme qui a vécu un amour fou pour une fille étrange.

Certes, le livre est un peu dérangeant. Le fait que le père s’adresse à sa fille, même si elle ne l’entend pas, pour lui raconter son improbable histoire d’amour, avec des termes plutôt crus m’a parfois questionnée.

Mais je pense que la crainte de perdre sa fille le mène au plus profond de lui-même, d’où cette confession absolue.

Bref, un livre que j’ai aimé.

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La mer, le matin

Ce roman de deux histoires parallèles,(qui restent en suspens) est tout à fait ce que j'aime car il ajoute l'Histoire à ses personnages.

J'ai lu,apprécié, aimé, puis les pages refermées,suis allée rafraîchir ma mémoire.

Je savais que Tripoli avait été une colonie italienne, mais encore ? Donc,bref rappel historique.

Dès 1911,les Italiens ont débarqué à la conquête de Tripoli et l'ont envahie.

Le 5 novembre 1911,par décret royal,la Tripolitaine et Cyrénaïque font partie intégrante du Royaume italien.

Le cheikh Omar Al Mokhtar s'oppose à l'invasion,c'est la guérilla,l'insécurité, mais le général fasciste R. Graziani déclenche des représailles impitoyables contre la population soupçonnée d'aider les rebelles.

Mussolini ,en 1938,favorise l'émigration de masse des Italiens vers Tripoli et l'intérieur du pays et crée 26 nouveaux villages.

Kadhafi,le jeune Bédouin, s'impose,prend le pouvoir en 1969 et,en janvier de l'année suivante ,exproprie et expulse les colons italiens.

Le retour au pays est traumatisant,humiliant.

Plus tard,au moment de la rébellion du Printemps arabe, c'est au tour des libyens d'être persécutés et ils cherchent à se réfugier en Italie. Il n'y a que la mer entre eux,mais quelle mer impitoyable !



Ce roman affronte le thème universel de la migration des personnes,du destin de ceux qui sont exilés de leur maison,orphelins de leur terre,et de leur espérance d'une vie meilleure.

C'est un monde de guerre terrible,exécrable, un monde dans lequel les pauvres restent pauvres.

C'est un livre émouvant et cruel qui laisse l'amertume du dégoût de la guerre et de l'humanité assoiffée de pouvoir et de sang.

C'est aussi un chant très doux et un hurlement de douleur.



N.B. Je comprends maintenant la signification du "miel amer de Cyrénaïque".
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La mer, le matin

La mer, le matin c'est celle que traversa Angelina pour un retour cruel au pays, dont elle ne se remettra jamais.

C'est celle aussi, que traverse Djamila dans un bateau de fortune, pour sauver son fils de la haine et de la mort.

Deux destins qui ne se croiseront pas pour raconter la Lybie et les colons italiens installés dans ce pays en face de l'Italie.

J'ai attendu, espéré que le jeune Vito allait rencontrer le petit Farid pour un happy end salvateur. J'y croyais, tant ce roman nous prend aux tripes.

L'histoire des migrants, abandonnés sur la mer immense on connait, on en parle, on voit des photos, on frémit ... Et pourtant on n'imagine pas ce que peut être cette folie pour fuir la peur, espérer une vie meilleure.

Dans ce roman j'ai découvert une histoire que je ne connaissais pas. Khadafi oui, mais la colonisation de ce pays et son histoire non.

D'une écriture superbe, gorgée d'images, de senteurs, d'espoir elle nous entraîne dans ces vies. Elles nous laissent aussi pantois devant ce monde qui ne sait que tuer, détruire et alimenter la faim insatiable des puissants.

J'ai fermé ce livre, regardé encore une fois cette belle couverture qui ne laissait en rien présager des drames que j'allais découvrir dans ces pages.







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Écoute-moi

Un livre-confession, avec tout ce que cela comporte d'exhibitionnisme et d'obscénité.



Sur fond de mélodrame- un accident, une opération de la dernière chance- Timoteo, chirurgien et père d'une jeune fille accidentée, tandis qu'un de ses collègues se charge de l'opération, se lance dans une confession chaotique comme sa propre vie: celle d'une liaison torride avec une femme pauvre, laide, humble et fidèle prénommée Italia, qu'il a connue et aimée juste avant la naissance de sa fille, quinze ans auparavant.



Et c'est à sa fille, Angela, plongée dans le coma, qu'il fait le récit détaillé de cette passion dévorante.



On ne peut s'attacher à un tel narrateur: lâche, égoïste, mauvais père et mauvais mari, amant aussi cruel dans ses exigences que dans ses négligences...que reste-t-il de Timo?



On ne peut s'attacher à cette passion d'un homme pour une femme qui "n'était pas son genre" : Swann est passé par là, qui a si bien dit, lui, cette passion physique d'un homme du monde pour une femme du demi-monde, qu'il tentait de s'expliquer parce qu'Odette avait quelque chose d'un Botticelli dans le ployé de sa nuque...Buzzati a repris ce thème dans "Un amour", avec une grande finesse...Mais il y a chez Margaret Mazzantini un goût pour le sordide, le cru, le gore qui rend toute cette confession suspecte.



Et cet amour viscéral, commencé par un viol, incompréhensible.



On est plein de pitié, de commisération pour la pauvre Italia, résignée, souffrante, muette, repliée sur son attente, puis sur le vide de son existence mais on ne comprend pas ce que Timo lui trouve, qui lui donne tant de prix.



Le narrateur est tellement incapable d'aimer vraiment quiconque qu'il est bien en peine de le dire - il n'y a que lui-même, au fond, qui l'intéresse : comment expliquer les interminables pages finales, quand tout est devenu irrémédiable, si ce n'est par une insupportable complaisance narcissique?



Autre "disagio" et non des moindres: comment imaginer une seconde un père faisant ce récit dégoulinant de honte et de concupiscence mêlés à sa propre fille en train de lutter contre la mort?



Bref, j'ai lu en V.O. "Non ti muovere" - un bien meilleur titre, revenant en leit-motiv dans cette auto-flagellation machiste où tout le monde, en effet, doit cesser de bouger pour écouter Monsieur le chirurgien nous confier ses turpitudes.



Je l'ai lu jusqu'au bout, par acquis de conscience et surtout pour me familiariser avec la langue d'une nouvelle auteure réputée abordable. Mais, qu'on me pardonne, je n'ai aimé ni l'argument, ni le narrateur, ni les motivations latentes. Je me suis sentie salie, insultée, méprisée comme toutes les femmes de Timo. C'était peut-être le but. Mais cela ne m'a pas fait plaisir du tout. J'ai vérifié une fois de plus mon absence de masochisme féminin...et ça m'a toute ragaillardie!



Non ti muovere, Timo! Reste où tu es!
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La mer, le matin

Histoire d'exils, de guerres et de déracinements, "La mer, le matin" raconte cette Méditerranée, un monde d'eau qui joint et sépare deux pays et deux continents, l'Italie et la Lybie, dont l'Histoire a jeté des émigrants sur les rivages opposés.

La famille d'Angelina a fait partie des colons italiens venus en Afrique dès 1911, mais surtout à l'époque de l'"empire" mussolinien, pour conquérir, défricher, prendre racine dans cette nouvelle terre. Ces nouveaux venus font souche, s'adaptent aux usages arabes, ce pays devient le leur. Mais avec la prise du pouvoir par Kadhafi au début des années 70, ils sont expulsés, chassés de leur patrie et Angelina doit dire adieu à sa vie à Tripoli et à son amitié amoureuse avec Ali...

Par un fatal retour de l'Histoire, le Printemps arabe de 2011 jette encore plus d'émigrants libyens sur des embarcations de fortune avec pour terre promise l'Italie, ainsi Jamila et son jeune fils Farid, privés d'un mari et d'un père tué dans les affrontements. Mais ce sera un voyage sans retour...

Dans ces destins bien différents qui se croisent entre Lybie et Italie, c'est toute une souffrance humaine, celle de la guerre et de l'arrachement à la terre natale, celle de l'impossible exil, celle des migrants noyés dans les flots de ce désert salé qui borde les deux terres méditerranéennes. Lourde de douleur et de mélancolie, fatale comme le destin et ses décrets implacables, légère comme la gazelle apprivoisée par Farid et les subtiles fragrances mêlées dont la Lybie pourvoit la mémoire d'Angelina, cette méditation emporte le lecteur dans un monde de regrets et d'espoirs vains mais à l'impérieux pouvoir suggestif.
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La mer, le matin

Jamila vit en Libye avec son fils Farid, mais les troupes loyalistes arrivent dans leur petite ville du désert, c’est la guerre, ils doivent fuir. Les « fuyards » partent généralement pour les camps de réfugiés mais se font tirer dessus. Jamila décidera de s’enfuir en direction de la mer. C’est la découverte pour Farid, il ne l’a jamais vue « Farid regarde la mer. Pour la première fois de sa vie. Il la touche du bout du pied, il la recueille au creux de ses mains. Il la boit et il la recrache. Il pense que la mer est grande, mais pas autant que le désert. Elle s’arrête là où commence le ciel, juste après cette bande bleue, horizontale ». Commence alors une fuite douloureuse et difficile. Nous découvrirons aussi l’histoire de la famille de Jamila et celle de son mari Omar, des bédouins. « Ils sont partis à l’aube. Jamila a embrassé la dalle de pierre devant la porte. Farid a pensé au parfum qu’avaient certains après-midi, quand sa mère enlevait son voile et se mettait à danser, pieds nus, en soutien-gorge. Son ventre, petit, brillant d’huile d’argan, bougeait comme bouge la terre. Une croûte terrestre que faisait danser la vie. C’était ça, le centre de la maison. La pierre du Salut. »



Angelina vit en Italie avec son fils Vito, elle découvre encore la guerre avec tous ces hommes, femmes et enfants qui essaient d’arriver par la mer, fuyant la Libye de son enfance. Elle y a vécu jusqu’à ses 11 ans, fille d’une famille de colons italiens, qui a du fuir lors du coup d’Etat. « Angelina ne savait pas que le jeune Kadhafi allait expulser jusqu’aux morts du cimetiètre d’Hamangi. Que l’Italie devrait ramener les dépouilles de milliers et milliers de soldats morts en Libye. Que son père et sa mère, leurs amis du village d’Oliveti, ceux des rues voisines, la Sciara Derna et la Sciara Puccini, du quartier ouvrier Case Operaie, ceux qui avaient construit les routes, les immeubles, les fosses d’égout, qui avaient transformé le désert en verger, que tous ceux-là allaient payer pour les méfaits du colonialisme cruel et velléitaire de l’Italie libérale de Giolitti et de la quatrième rive fasciste. » Ses parents ne se remirent jamais de cet exil. Ils restèrent dans le passé et les regrets « Ils voulaient retrouver le lien de leur exil. Celui où ils pouvaient se plaindre en toute liberté, exprimer leurs regrets éternels ».



A travers ce roman de 133 pages (en format broché aux éditions Robert Laffont), nous trouvons deux femmes dans la douleur, deux vies pleines de souvenirs, un même pays et ses senteurs. Et au milieu de tout cela, de deux pays, la mer, mer pleine de promesses, d’espoirs et d’évasions. Ce récit m’a énormément touché, je ne veux d’ailleurs pas en dire davantage sur l’histoire car elle se lit très vite et il est mieux de la découvrir soi-même. L’écriture et le style de l’auteure sont fluides, très poétiques et émouvants. La détresse face à la guerre est très bien dépeinte et soulève les coeurs. Tout le désarroi, le sentiment d’abandon, le sentiment de déracinement sont ici en premier plan. Deux femmes qui aiment ce pays, la Libye, et qui ont dû le quitter, le fuir. Toutes ses odeurs, ses souvenirs d’amour et de vie à laisser derrière soi, c’est un trou béant en soi, un néant. Mais attention, bien que l’auteur y parle de la guerre, c’est avant tout le récit de deux destins de femmes, à travers plusieurs générations et tout ce qui les enracine à ce pays. Une femme qui se bat dans un bâteau pour survivre, survivre pour son enfant et que son enfant survive… et une autre perdue dans un pays où elle ne s’y reconnait pas. J’ai admiré la pudeur de ce récit malgré l’horreur de ce qu’est une guerre, ce qui m’a encore plus bouleversé.



Je suis profondément touchée par cet ouvrage et la plume de Margaret Mazzantini. De la poésie d’un côté dans la description d’un pays, de souvenirs d’enfance, d’amour familial et amical, des souvenirs intergénérationnels, et la souffrance de l’autre côté, dans l’incapacité de maîtriser ce qui arrive, de devoir être des victimes impuissantes, la soumission, la fuite, les morts abandonnés, les morts par milliers. La mer en toile de fond, celle des espoirs et des peurs. L’horreur de la guerre, la folie des hommes. La Libye de Kadhafi, « L’acteur aux mille visages ». Libye, de la vague migratoire à l’exil, de l’exil à une pseudo-reconnaissance, Libye de la fuite, Libye de la peur, Libye aimée mais dévastée, désertée… Libye qui pleure. Et Libye libérée.



C’est à nouveau un coup de coeur pour moi, je vous le conseille vivement.
Lien : http://madansedumonde.wordpr..
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Venir au monde

Un jour, Gemma décide partir pour Sarajevo avec son fils, Pietro âgé de 16 ans. Ce voyage est en fait un retour sur son passé, du temps où elle venait rejoindre l'amour de sa vie, Diego. On apprend alors toute son histoire, sa relation magnifique et passionnée avec Diego, son désir d'avoir un enfant. Mais il se trouve qu'elle est stérile. Elle fera alors tout pour adopter un enfant, ce qui ne sera pas une affaire.



Pendant presque tout le livre, Gemma et Diego vont lutter pour essayer d'avoir un enfant alors que tout autour d'eux les hommes se déchirent et s'entretuent. Ils vont lutter pour faire naître la vie alors que tout le monde semble être d'un autre avis... De ce fait, leur relation m'a paru encore plus intense et profonde.

Un grand coup de coeur.
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La mer, le matin

La mer,le matin est l'histoire de 2 femmes : celle d'Angelina avec son fils Vito, de Jamila avec Farid qui vont traverser une mer qui divise et qui unit, qui va être la partenaire inévitable et redoutable de 2 Pays qui se déchirent !

Jamila et Farid fuient la Libye durant le Printemps arabe : le Raïs veut remplir la Méditerranée de gens désespérés pour faire trembler l'Europe : "une arme meilleure que celle de la chair des pauvres " !

Angelina et sa famille ont été chassés de Libye par l'arrivée de Khadafi , car Mussolini après l'annexion de Benghazi et de la Tripolitaine avait envoyé des italiens pour créer des villages, des infrastructures mais ils ont du revenir en Sicile , abandonner leurs biens, leur cimetière et leurs morts, se réadapter sans soutien , sans argent à leur pays d'origine qui les a mal accueillis mais, le coeur d'Angelina est arabe et, elle rêve de retourner avec Vito et sa mère revoir la terres de son passé.

C'est un roman sur l'émigration, les déchirures dues aux guerres : un sujet qui est malheureusement encore d'actualité ! Un roman émouvant conté par Margaret Mazzantini dans un style direct, simple, ou sur le plan sensoriel : le désert invisible, infini avec ses dunes de sable, ses gazelles décrit par Farid n'a d'égal que l'étendue limpide, sereine de la Mare Nostrum qui engloutit les corps, les embarcations , les drames depuis des siècles, celle qui est témoin de l'histoire de la faim de l'homme et de sa cupidité !

L.C thématique de Mai 2021 : la littérature étrangère.

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La mer, le matin

Les plus belles rencontres littéraires reposent parfois sur les sujets les plus simples d'apparence. Je ne connaissais pas encore Margaret Mazzantini qui a déjà publié plusieurs romans, dont Ecoute-moi et Venir au monde. Le choix de celui-ci s'est fait sur la couverture, le titre, la quatrième de couverture, tous sobres et pleins de sérénité et qui me laissaient présager une découverte particulière. J'ai assez souvent connu de semi-déceptions pour me méfier. Et pourtant...



Un petit garçon découvre l'oasis du Sahara où il habite, devenue au fil des années une ville bâtie de bric et de broc dans le désert, loin de la mer qu'il aimerait connaître : « Farid n'a jamais vu la mer, il n'a jamais mis les pieds dans l'eau. Il se l'est imaginée des milliers de fois. Piquée d'étoiles comme le manteau d'un pacha. Bleue comme le mur bleu de la ville morte. » Farid s'amuse avec ses camarades, fréquente l'école, approche un soir une jeune gazelle venue du désert. La famille de Farid se réjouit et s'inquiète des premiers soubresauts du printemps libyen : « Quand il voit Misrata détruite par les tirs, grand-père Mussa arrache du mur l'affiche du Caïd, il en fait une boule et la jette sous le lit. » La suite montre comment la guerre touche immédiatement les plus faibles, les plus démunis, les plus éloignés de la politique.



De l'autre côté de la Méditerranée, dans une île proche de la Sicile, sans doute Lampedusa bien qu'elle ne soit jamais nommée, un tout jeune homme observe le flux des réfugiés déferlant sur la côte, en piteux état, malades ou mourants, ou n'arrivant jamais vers cette terre où se trouvait leur salut. Par la famille de sa mère, Vito est lié aussi à la Libye où des italiens s'étaient installés, avant d'en être chassés en 1970 par Kadhafi. Sa mère traîne avec elle une nostalgie ténébreuse de cette ville de Tripoli où elle a passé ses plus jeunes années. Vito rêve en regardant la mer, il rêve sa vie, son avenir, son destin...



Une narration au présent place d'emblée le lecteur aux côtés de ces deux familles qui connaissent chacune à leur tour le déracinement, la fuite ou le retour vers un ailleurs qui n'est pas le leur. D'une simplicité tout imprégnée de poésie, d'humanité, l'écriture de Margaret Mazzantini m'a séduite et touchée et si j'ai dévoré ce court roman, je l'ai laissé tout hérissé de marque-pages, et l'ouvrir et relire quelques lignes me fait retrouver immédiatement l’atmosphère qui m’a séduite. Une très belle découverte donc !
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Personne ne se sauve tout seul

Je n'avais jamais entendu parler de ce roman. Je voulais depuis longtemps découvrir Margaret Mazzantini dont certains livres ont eu un écho qui a suscité mon intérêt. J'ai trouvé le titre très intrigant et la photo de couverture très belle. Suffisant pour l'embarquer et en faire le sujet de ma contribution à cette journée du mois italien dédiée à la littérature au féminin. Bonne pioche. Un peu déroutée dans les toutes premières pages, je me suis ensuite coulée avec enthousiasme dans cette écriture acérée qui déroule de façon implacable son exploration de l'histoire d'un couple d'aujourd'hui.



Délia et Gaetano sont séparés depuis peu. La trentaine, deux enfants. Elle est nutritionniste, il est scénariste. C'est la première fois qu'ils se retrouvent pour dîner à l'extérieur depuis leur rupture que l'on devine pénible ; il s'agit d'organiser les modalités des vacances d'été de leurs enfants. Tenter d'être responsables, de retrouver la maitrise de leurs nerfs et de leurs sentiments. Tenter d'être raisonnables. Mais comment faire alors que la querelle n'est pas vidée, que les ressentiments persistent ? Au cours de ce dîner, les souvenirs remontent à l'esprit de Delia et de Gaetano... Comment passe-t-on de l'amour au désamour ? De l'espoir au désespoir ?



L'auteur décortique cette mécanique d'une façon chirurgicale, mettant à jour petit à petit les mensonges que l'on se fait à soi-même, le voile que l'on jette sur l'autre pour le rendre plus conforme à ce que l'on attend, les fausses bonnes raisons qui inclinent à se croire amoureux, les frustrations qui finissent par prendre le dessus. On assiste en direct et en temps réel à l'autopsie d'un couple : les malentendus sur lesquels il s'est construit, les blessures mal refermées qui finissent par se rouvrir, les différences que l'on a volontairement ignorées et qui deviennent des fossés de plus en plus béants, les envies et aspirations qui prennent des orientations différentes ...



C'est terriblement bien observé, terriblement efficace. Délia et Gaetano sont à la croisée des chemins. Ils peuvent continuer dans la destruction, la rancœur, la guerre ou bien choisir la lumière, l'apaisement, la réconciliation. Ils peuvent continuer à s'accuser ou tenter de se pardonner. Peut-être que ce couple de personnes âgées, dans un coin du restaurant, plein d'attentions et de tendresse l'un envers l'autre, peut-être que cette image pourrait les aider... Qui sait ?



J'ai très envie de poursuivre ma découverte de l'auteure dont l'écriture très contemporaine, à la fois précise et directe m'a beaucoup plu. En attendant, voici une lecture qui pourrait en éclairer plus d'un sur les raisons du désamour ou les mécanismes de la déconstruction amoureuse.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Venir au monde

Un grand merci à @Myriam3 de m'avoir piocher @venir au monde qui je ne sais plus par quel miracle avait atterri dans ma PAL.



Quand Gemma est partie à Sarajevo, pour approfondir sa thèse sur @Andric, quelques jours avant son mariage elle ne se doutait pas que sa vie allait être bouleversée pour toujours.



16 ont passé depuis que Gemma a quitté Sarajevo, en pleine guerre, avec Pietro son fils alors nourrisson. Elle mène une vie paisible à Rome jusqu'au jour où elle reçoit un appel de Gojko, son ami bosniaque, qui lui propose d'assister à une exposition photos dans laquelle seront exposées des tirages de Diego, le père biologique de Pietro, mort là-bas. C'est l'occasion rêvée pour Pietro de connaître le pays de ses origines et pour Gemma de refermer une page toujours douloureuse de son passé.



Les souvenirs de Gemma plonge le lecteur en pleine guerre de Yougoslavie, les habitants incrédules qui bien que voyant les événements se produire sous leurs yeux ne peuvent croire l'escalade de violence qui va se déchaîner. L'inaction des casques bleus et les pays de l'OTAN qui regardent les nettoyages ethniques sans lever le petit doigt. La survie quotidienne en pleine zone de combat où la quête d'un morceau de pain ou d'un morceau de bois pour se terminer sous les balles d'un sniper. Certains d'entre eux raconteront plus tard que c'était comme dans un jeu vidéo.



Un roman éprouvant mais aussi une très belle histoire d'amour entre Gemma et Diego, Diego, l'éternel adolescent qui perdra son innocence de la pire des façons. Diego qui continuera de prendre des photos même quand il n'aura plus de pellicule pour alimenter son appareil, juste appuyer sur le déclencheur pour être le témoin de l'histoire qui s'écrit sous ses yeux.



La quête de la maternité est également un thème central du roman. Avec beaucoup de finesse @Margaret Mazzantini nous décrit le parcours du combattant de Gemma pour avoir un enfant, ses espoirs, ses doutes, jusqu'à où sera t-elle prête à aller pour avoir cet enfant.



Et quand je pensais que l'histoire devenait aussi limpide qu'elle pouvait l'être, l'autrice m'entraîne dans un twist final hallucinant, jusqu'au boutiste sur la volonté de survivre à tout prix, quoiqu'il en coûte.



Un grand roman qui ne sombre jamais dans le pathétisme dans lequel il aurait été si facile de tomber. Magistral  !





Challenge Multi-Défis

Challenge pavé

Challenge Atout-Prix

Pioche dans ma PAL
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La mer, le matin

D'un côté, il y a cette femme et son fils Farid, qui fuient la Libye de Mouammar Kadhafi, une Libye qui est en train d'exploser durant le "Printemps arabe"; de l'autre il y a Angelina et son fils Vito, sur le point de partir pour mieux se trouver et vivre sa vie sur les conseils de sa mère : "Sa mère lui a dit il faut que tu trouves un lieu, à l'intérieur de toi, autour de toi. Un lieu qui te corresponde au moins en partie.".

Aucun rapport entre ces deux femmes ?

Et bien pourtant si, et c'est là le tour de force réalisé par Margaret Mazzantini dans ce court roman percutant.



Ces deux femmes que tout oppose et qui jamais ne se rencontreront se trouvent pourtant liées d'une étrange façon par l'Histoire, encore un de ces coups du sort qui fait se rejoindre la petite et la grande histoire.

L'une fuit son pays en proie à la révolte et au sang qui coule pour l'Italie, tandis que l'autre a dû fuir son pays d'adoption avec ses parents pour retrouver leur pays natal, l'Italie, car ils en étaient chassés par ce même dictateur qui aujourd'hui est sur le point de tomber.

Ces deux femmes ont, pour une raison et à une époque différentes, rejoint l'Italie, sauf que pour l'une la destination sera selon toute vraisemblance fatale et elle ne verra jamais le sol italien vivante, tandis que l'autre a fini par y construire sa vie.



Hymne à la liberté et à la fraternité, ce livre revêt également un souhait profond d'égalité pour tous : "Mais ici-bas personne n'est un saint. Et le monde ne devrait pas avoir besoin de martyrs, seulement d'une plus grande égalité.", et est une invitation à la Paix dans le monde et à l'abolition de toute dictature : "Elle sait comment finissent les dictateurs. Quand leur corps devient un mannequin que l'on traîne par terre. Le déchaînement insensé de la colère posthume. Pas la moindre joie, rien qu'un macabre trophée qui salit les vivants. La mémoire est une couche de chaux sur les trottoirs du sang.".

Le pari était plutôt risqué d'écrire aussi peu de temps après les évènements sur la chute du régime libyen et ces milliers de personnes qui, sur des embarcations de fortune, fuyaient le pays pour gagner un ailleurs meilleur.

Au final, c'est une réussite et un sans faute, il n'y a aucun côté voyeuriste ni moralisateur, au contraire, Margaret Mazzantini fait même preuve d'une justesse de vision et prend le recul nécessaire pour émettre son opinion sur notre propre civilisation occidentale : "Sous les fondations de toutes les civilisations occidentales, il y a une blessure, une faute collective.".

Il n'y a aucune palabre inutile, le roman est court et percutant, l'auteur s'est attachée à l'essentiel et c'est dans un très beau style narratif qu'elle narre le destin de ces deux femmes et de leurs fils, avec pudeur et avec calme, en contraste avec la situation politique en Libye et le déchaînement de la mer qui malmène les embarcations.

Le choix de la couverture est d'ailleurs des plus réussi et reflète assez fidèlement le contenu du livre.



"La mer, le matin" est un livre petit par la taille mais qui a tout d'un grand et qui m'a séduite par la beauté de l'histoire et la plume hautement évocatrice de Margaret Mazzantini, en conclusion, une belle rencontre littéraire.
Lien : http://lemondedemissg.blogsp..
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