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Critiques de Margaret Walker (17)
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Jubilee



Le récit débute à Savannah, dans l’état de Géorgie, sud-est des Etats-Unis. Dans le quartier des esclaves de la plantation de coton appartenant à John Morris Dutton, des hommes et des femmes se tiennent immobiles autour de la case de Netta. La pleine lune monte à l’horizon. Netta va quitter ce monde à l’âge de 29 ans. Caline se tient auprès d’elle tout en agitant la palme, elle réfléchit : « pour une esclave, il vaut mieux ne pas avoir d’enfants parce que les enfants, ils risquent toujours d’être vendus ou de mourir et aussi parce que les enfants, ça vous tue quant on en a trop ». Netta a eu quinze enfants les uns derrière les autres et sa dernière couche aura eu raison de sa vie.



Netta, consciente de son état, ne veux pas mourir sans avoir revu sa petite Viry, cette belle petite fille à la peau blanche qu’elle a eue avec le Maître. C’est maman Sukey qui élève la petite car Jake, le mari de Netta, ne l’aime pas. Frère Ezekiel arrive, il porte la petite sur ses épaules suivi de maman Sukey. Grand-mère Ticey, tante Sally, Grandpa Tom, May Liza, ils sont treize à entourer la mourante. Grand-mère Ticey se demande ce que la petite Viry va devenir. C’est elle qui a mis au monde, la petite bâtarde et Mamselle Liliane. Elles se ressemblent comme des sœurs jumelles, Madame Maîtresse n’acceptera jamais de garder la petite bâtarde à la Grande Maison.



Ce fut entre la nuit et le jour que Netta rendit son dernier souffle. De toutes les cases, des lamentations accompagnèrent le cantique de frère Ezekiel :



Un jour bientôt,

La mort viendra frapper à ma porte,

La mort viendra frapper à ma porte,

La mort viendra frapper à ma porte,

Oh, Seigneur !

Oh, Seigneur !

Que fera ton serviteur ?





Voilà ce sont les premières pages de cet immense livre que nous laisse Margaret Walker ! Sublime n’est pas assez puissant comme adjectif ! Je remercie vivement « Stockard » d’avoir su si bien rédiger son commentaire car sans elle, je serais passée à côté de la vie de cette petite Viry qui est l’arrière grand-mère de l’auteure.



C’est la grand-mère de Margaret, Elvira Ware Dozier qui vivant avec sa famille, lui a raconté la vie de sa mère, une ancienne esclave en Géorgie. De cette tradition orale, Margaret s’est inspirée pour écrire Jubilee qui de ce fait, est devenu le premier roman noir américain véritablement historique, contribuant ainsi à transmettre les racines folkloriques africaines de la vie noire américaine. Elle fut la première femme noire américaine à obtenir le prix prestigieux « Yale Série of Younger Poets » pour son recueil « For my people ».



Parut en 1966, ce livre est considéré comme un classique de la littérature afro-américaine. Margaret a effectué des recherches sur la vie des esclaves et leur place dans la guerre civile, consulté les registres de naissance. Elle a mis trente ans pour écrire « Jubilee ». Elle-même mariée à un vétéran handicapé, elle connait la difficulté d’élever quatre enfants tout en enseignant au Jackson State College du Mississipi, tout en travaillant à l’obtention de son doctorat. Non seulement elle porte un projet mais de surcroit, elle le vit. C’est certainement ce qui donne cette puissance à son écriture qui est d’une grande fluidité, très animée, réaliste, immersive.



Je vais vous faire une confidence, c’est la première fois que j’éprouve, dès les premières lignes, cette émotion assez troublante « je me suis sentie chez moi, je connaissais, un peu comme quelqu’un qui revient chez lui », je ne peux pas expliquer ce ressenti.



Alors, cette plongée en plein XIXème siècle, dans cette plantation de coton, fut pour moi une grande émotion. J’ai accompagné Viry dans son enfance, son adolescence, son amour pour Randall Ware, j’ai serré les poings avec elle, je me suis mise en colère, je me suis révoltée, j’ai pleuré, j’ai aimé, j’ai prié, en un mot, j’ai vécu dans la plantation Dutton et je ne sais pas comment, là encore, on peut se reconstruire après toutes ces horreurs.



Chère Margaret Walker, j’imagine que Viry doit être très fière de vous là où elle est. Elle qui rêvait de voir ses enfants aller à l’école, recevoir de l’instruction !



Viry c’est aussi une personnalité forte, une femme qui se veut libre, une mère comme on les aime aussi, dotée d’un courage exemplaire, consciente de la valeur de l’instruction qu’elle souhaite pour ses enfants, un cœur gros comme ça ……. Et un pouvoir de résilience hors du commun. Un portrait de femme magnifique !



Ce n’est pas un livre triste. Viry ne baisse jamais les bras, elle chante des cantiques, c’est là où elle puise sa force de vivre, c’est un véritable « negro spiritual » qui traverse ce livre.



Ce livre est aussi historique dans sa composition. La première partie relate l’enfance de Viry, son adolescence, sa rencontre avec l’Amour et le quotidien dans la plantation.

La deuxième partie fait place à la guerre de Sécession et là encore, Margaret retrace l’histoire de cette guerre fratricide ne ménageant aucun des camps, sachant parfaitement sans parti pris, dessiner les souffrances, les atrocités qui touchent les deux camps et la troisième partie, s’attache à la reconstruction bien difficile de la Nation et les épreuves que vit une population exsangue, la naissance d’un ostracisme virulent, violent, comme le KKK et sur la nouvelle vie de Viry, ancienne esclave, à la recherche d’une nouvelle terre en compagnie d’Innis Brown, son dernier mari.



Il y aurait encore beaucoup à écrire sur cette œuvre qui est traversé par un véritable souffle homérique et qui nous donne à aimer une héroïne exceptionnelle, d'une sagesse, d'une bonté intacte malgré les épreuves. Au départ, je m’imaginais l’offrir à l’aînée de mes petites filles adolescentes mais il y a des moments éprouvants mieux vaut être averti et démarrer par « Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur » de Harper Lee.



« I have a dream » discours de Martin Luther King du 28 août 1963



« Quand nous permettrons à la cloche de la liberté de sonner dans chaque village, dans chaque hameau, dans chaque ville et dans chaque Etat, nous pourrons fêter le jour où tous les enfants de Dieu, les Noirs et les Blancs, les Juifs et les non-Juifs, les Protestants et les Catholiques, pourront se donner la main et chanter les paroles du vieux Negro Spiritual « Enfin libres, enfin libres, grâce en soit rendue au Dieu tout puissant, nous sommes enfin libres ».

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Jubilee

🎶 Let my people go 🎶

Dans la plantation où vit Vyry, en Géorgie, le frère Zeke et les esclaves se retrouvent en cachette pour chanter l'attente du Jubilé, qui verra proclamé l'affranchissement de tous les habitants du pays, et leur espoir de voir Dieu envoyer un nouveau Moïse pour les libérer de l'esclavage.

En 1960, Lincoln, «ce nouveau Moïse», est élu Président et veut abolir l'esclavage. Les États du Sud font sécession. La guerre est terrible, mais les Nordistes sont vainqueurs et le rêve de Vyry se réalise: elle est libre. Elle pleure de joie, ses enfants, Jim et Minna, dansent et chantent

🎶 On est libres comme des oiseaux!

Jubilé, liberté! 🎶

Mais la liberté ne fait pas tout - être libre d'avoir sa maison brûlée par le Ku Klux Klan, ce n'est pas exactement l'ultime jubilation. Même si Vyry a eu de la chance si on compare ça au sort d'une de ses voisines, promise à une mort atroce, enduite de goudron brûlant et recouverte de plumes par le KKK. de façon générale, avec son mari, Innis, notre héroïne se heurte à une hostilité terrible de la part des Blancs pauvres convaincus que «les nègres allaient ramasser toutes les bonnes terres».

Vyry s'efforce et arrive à ne pas se faire rancir par toute cette violence et cette animosité raciste. Il y a une dimension spirituelle dans ce personnage, un plaidoyer contre la haine, une luminosité qui demeure malgré les coups durs, malgré la cruauté de ce bas monde.

Un beau personnage inspiré à Margaret Walker par son arrière-grand-mère, qui comme Vyry était la fille d'une esclave et de son propriétaire.

Une histoire pleine des fracas de l'histoire et du réconfort des negro-spirituals.
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Jubilee

Lecture recommandée par enjie77 que je remercie. L'histoire se passe en Géorgie et dans l'Alabama au siècle de l'abolition de l'esclavage et du Ku Klux Klan. le rôle principal est tenu par Vyry, ascendante de l'écrivaine. Elle naît d'une esclave noire qui meurt à sa naissance et du Maître blanc, qui aura la même année une fille avec sa bourgeoisie. Les deux soeurs se ressemblent physiquement mais auront un statut bien opposé. Vyry deviendra, elle aussi, esclave sur la plantation. On la voit devenir femme et être témoin des violences et du racisme. Deux amours et des enfants dont son voeu le plus cher est qu'ils aillent à l'école. Une longue lecture avec de terribles passages de tortures. Portrait d'une battante sur fond historique.
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Jubilee

En Géorgie, au mieux du XIXeme siècle, la petite Viry, dont la mère esclave est décédée, grandit sur la plantation de son père John Dutton, grand propriétaire blanc. Ce dernier vit avec sa femme et leur deux enfants et entreprend une carrière politique. Cuisinière et appréciée pour ses talents, elle est souvent maltraitée par Salina Dutton, qui supporte mal cette enfant, très blanche de peau et fille illégitime de son mari. Après des années de prospérité, les abolitionnistes du Nord commencent à diffuser leurs idées de liberté, s'attaquant de front aux États du Sud, qui s'arcqueboutent sur des interprétations fallacieuses de la Constitution et de la Bible pour légitimer leurs positions esclavagistes. Nord et Sud vont désormais s'affronter dans une guerre qui va bouleverser le destin de Viry et celui les propriétaires des plantations du Sud.



Jubilee retrace près de quarante ans de la vie d'une jeune fille qui traverse les périodes troubles du sud des États-Unis. Née esclave, son père, le Maître de la plantation l'ignore complètement. Devenue très bonne cuisinière, elle est au service du couple Dutton, mais cela ne l'exonère pas des sévices réservés aux esclaves en fuite ou de vivre dans leurs cabanes dépourvues de tout confort, jouxtant le domaine de la plantation qui s'étend à perte de vue, entourée de champs de coton et de canne à sucre.

Margaret Walker évoque la vie de Viry, et analyse finement la mentalité profonde du Sud des États-Unis. Elle décrit l'état d'esprit des propriétaires Blancs qui n'hésitent pas à séparer parents et enfants lors de ventes aux enchères de leurs esclaves et celui de ces derniers, leurs dures conditions de vie mais aussi la solidarité, l'importance de la religion qui leur permet de toujours conserver espoir, la cruauté des sévices infligés et la peur toujours maintenue pour contraindre les esclaves, les empêchant de songer à l'évasion. Les rares Noirs libres doivent être chapeauter par un tuteur blanc et même s'ils ont la liberté de déplacement, celle-ci reste fragile et sujette au paiement annuel d'une redevance élevée, qui, en cas de non-paiement signifie la perte du statut de Noir libre.

Jubilee est une fresque qui permet une compréhension du Sud des États-Unis, sans pathos et Margaret Walker reussit à dépeindre les mentalités passées sans transposer la mentalité actuelle sur les faits de l'époque, de même, elle respecte la façon de parler des esclaves peu éduqués, donnant a son récit toute sa crédibilité.
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Jubilee

«  Il voit venir la mort,

L'oiseau qui se lamente dans les ombres

Du soir. »

«  Un de ces jours, un beau matin clair,

J'aurai mes ailes et je m'envolerai dans l'air. »



Deux citations significatives de ce témoignage déchirant, très fort, marquant , le récit de l'auteure Margaret Walker contant le destin de son arrière grand- mère: Vyry, esclave , fille d’une esclave noire morte à 29 ans lors d’une fausse couche et d'un maître blanc dont le destin douloureux se confond avec la très longue marche vers la LIBERTÉ .

C’est la vraie vie de Vyry , grandissant dans un milieu hostile , en proie à la haine de sa maîtresse Salina, sa cruauté et son mépris quotidien, elle ressemble à sa fille Liliane , cheveux et teint clair pour une métisse.



Elle vivra des moments très difficiles , conditions de vie très dures, punition par le fouet, pendue par les pieds dans une armoire.

Rien ne la rebutera, partagée entre son amour de jeunesse et son époux , passionnément dévouée aux autres et à ses enfants.

Marquée par la douleur pétrie de bon sens , de courage, d’une profonde honnêteté , d’une dignité naturelle , sans aucun orgueil , dotée d’une lumière intérieure elle n’aura de cesse de croire en la vie, mais aussi et surtout le désir intense de voir ses enfants libres et éduqués .



Forte, elle ne baissera jamais les bras.



Le sujet est difficile : la liberté ne fut pas offerte aux Noirs américains , il a fallu la conquérir de haute lutte, guerre de sécession, atrocités qui traversent les deux camps, terreur du

Ku KLUX, KLAN , incendies de la maison, inondations, haine inextinguible des Blancs, pouvoir exorbitant des mêmes propriétaires blancs , rancœurs des blancs pauvres ....



L’auteure retrace avec clarté et honnêteté l’histoire de la guerre de Sécession .

Vyry chante sans cesse pour accompagner ses tâches..

L’écriture est parfaitement maîtrisée , lyrique, poétique accompagnée de couplets chantés par Vyry , alliant finesse , sensibilité et richesse des descriptions de l’esclavage à la reconstruction., sur la longue route de l’indépendance si chèrement acquise .

Un bel hommage déchirant et instructif , si bien construit qu’on le dévore , un ouvrage monument considéré comme «  L’autant en emporte le vent » des Noirs américains .



Je dois cet immense plaisir à Nathalie , merci beaucoup à elle .

Chacun devrait le lire.

Il m’a mis les larmes aux yeux . Je ne sais pas si j’ai trouvé des mots assez forts pour caractériser ce récit ...histoire d’amour, de guerre , de douleur et d’ESPOIR ...

Vyry : une figure inoubliable ..
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Jubilee

"L'Autant en emporte le Vent des Noirs américains" promettait la couverture. Rien que ça ? Ok, on va voir alors et sans perdre de temps, c'est parti on débarque dans cette immense plantation de Georgie pile au moment de la naissance d'Elvira Dutton, qu'on n'aura jamais vraiment l'occasion d'appeler ainsi et qui sera pour nous et pour tout le monde Vyry.

Vyry, une mulâtre fille d'une esclave qui meurt à sa naissance et du maître de la plantation à qui elle doit un teint si clair que beaucoup, au détour d'un chemin et de sa vie, la prendront pour une Blanche. Mais sur la plantation, une goutte de sang noir suffit à faire une esclave et sa couleur de peau ne compte pas quand dès son plus jeune âge, elle entre au service de la grande maison pour servir sa demi-soeur, fille de John Dutton, maître blanc de la plantation et de Salina, sa femme qui, connaissant l'ascendance de Vyry, n'aura pas assez de toute sa vie pour l'étriller et l'humilier à chaque fois que l'occasion se présentera, c'est à dire à chaque fois qu'elle en aura envie, c'est à dire... tout le temps.

Et ainsi se passent les premières années parmi les autres esclaves que Vyry voit se faire battre, vendre, parfois tuer et à l'instar de ses congénères, elle ravale ses larmes, son impuissance et son désespoir... jusqu'à l'arrivée de Randall Ware, un Noir né libre qui souhaite l'épouser et racheter sa liberté. Peine perdue. Vyry ne sera jamais à vendre (rien que d'écrire ça, ça fiche comme un vertige)

Il faudra qu'elle attende la guerre de Sécession et l'accouchement du treizième amendement pour pouvoir quitter la plantation.

Malheureusement et comme elle s'en rendra vite compte, cette Liberté promise reste encore et toujours à conquérir. Soit, il n'y a plus de maître, de régisseur et de surveillants mais il y a le ku klux klan, il y a le racisme qu'un décret et autres lois n'ont jamais éradiqué, il y a les perdants de cette guerre qui refusent la reddition d'Appomattox, en bref, on passe de l'esclavage à la ségrégation et si Vyry et les siens font l'expérience d'une certaine liberté au sens où quand ils trouvent du boulot, un salaire si minime soit-il leur revient enfin, la terreur est, elle, toujours bien présente entre meurtres, lynchages, intimidations et habitations réduites en cendre. Free at last, hein ?!



Malgré le sujet difficile, c'est un bel hommage à son arrière grand-mère sous forme de negro spiritual littéraire que nous propose Margaret Walker qui, en passant, nous offre un témoignage inédit de l'avant, pendant et après guerre de Sécession vu par les Noirs. Avec son écriture parfaitement maîtrisée alliée à la richesse de ses descriptions, elle nous transporte sans peine dans le Dixieland, de l'esclavage à la reconstruction, sur une route de l'Indépendance qui semble ne jamais finir d'être pavée.



Alors oui, il y a du Autant en emporte le Vent dans ce Jubilee, mais pas que... Finalement, Margaret Walker, c'est un peu la rencontre d'Alice Walker avec Margaret Mitchell.

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Jubilee

J’ai ce roman depuis des années dans ma bibliothèque (depuis 1989 pour être exacte !) et je n’avais encore jamais pris le temps de le lire. Or, après la relecture du roman de Kathryn Stockett « La couleur des sentiments », je cherchais une lecture similaire. Et puis en regardant les lectures de mes ami(e)s babéliotes, j’ai lu le commentaire enthousiaste d’Annette55 sur ce roman (merci à elle !). Et je suis allée, derechef, le dénicher dans ma bibliothèque pour le lire et, même, le dévorer.



La quatrième de couverture le présente comme le « Autant en emporte le vent » noir. Pour avoir lu Margaret Mitchell, effectivement on trouve des ressemblances puisque sont évoquées les années de la Guerre de Sécession et celles de la reconstruction. Mais les ressemblances s’arrêtent là car « Jubilee » c’est d’abord et surtout la vie de Viry, fille d’une esclave et d’un maître blanc, qui nous est racontée. Le fait qu’elle soit née blanche et qu’elle ressemble comme deux gouttes d’eau à l’autre fille de John Sutton, ne change rien à sa condition : esclave, elle est, esclave, elle le demeurera. Cette leçon lui est durement apprise, et pendant des années, Viry ne croit pas à la liberté dont on lui parle. Sa rencontre avec Randall Ware, homme noir libre qui lui promet mariage et liberté, ne changera rien à sa situation. Lui-même en danger, il la quitte, la laissant sur la propriété des Sutton. Alors certes, la guerre de Sécession va changer la donne et apporter cette liberté tant attendue mais la paix n’apportera pas le bonheur tant espéré. Margaret Walker a très bien décrit ces années difficiles d’après-guerre qui montre des sudistes vaincus, amers et violents, considérant toujours que les noirs sont des êtres inférieurs, regrettant que l’esclavage ait été aboli. Viry et son deuxième mari en font l’amère expérience, eux qui errent à travers l’Alabama, à la recherche d’un endroit où ils pourraient s’installer sans être en butte à la violence du KKK. Ce qui ressort de cette lecture c’est le portrait de Viry, une femme de caractère, pleine d’empathie pour les autres qui, jamais ne cède à la haine, jamais ne ploie face à l’adversité, qui, toujours, lutte pour des lendemains meilleurs.



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Jubilee

C'est une histoire essentielle pour moi: l'histoire de Vyry, qui connaît tous les méfaits de l'esclavage, mais qui ne cesse de vivre avec foi et avec courage.



Dans ce récit, le lecteur voit naître Vyry dans une plantation. Elle est à la fois la fille d'une belle noire et du "maître" blanc de la plantation.

Toute petite, elle perd sa mère morte peu après sa naissance.

Elle doit aussi faire face à la jalousie de la maîtresse de maison qui la déteste farouchement: en effet elle ressemble un peu trop à Liliane, sa propre fille. La Maîtresse blanche va punir un jour Vyry enfant, en l'enfermant dans un placard, suspendue par les bras ... la petite ne tarde pas à s' évanouir.. A 7 ans, elle travaille déjà.. et elle a cassé une assiette de porcelaine...



Vyry est élevée par Maman Sukey, puis par Tante Sally, la cuisinière, qui lui apprend son métier. Mais elle doit encore connaître des séparations: Maman Sukey meurt brusquement de maladie, et Tante Sally, la cuisinière qui l'a gardé près d'elle, est vendue.

L'esclavage, c'est aussi le fait de ne pas savoir si l'on ne sera pas séparé de ses proches et de ceux qu'on aime tant...



De l'esclavage, naît une foule d'injustices. Mais toute sa vie, Vyry lutte à sa façon: elle travaille et elle chante, de toute sa voix. Elle rencontre son mari Rendall Ware, et elle connaît enfin un peu de répit dans ses bras.



Puis celui-ci s'échappe vers le Canada à la recherche de la liberté. Mais ils ne peuvent pas se retrouver.

Vyry doit longuement attendre pour trouver à son tour la liberté. Elle essaie sans cesse de s'en sortir, mais doit faire face à de nombreux coups du sort (une inondation de sa ferme construite dans une zone inondable, et un incendie causé par le Ku Klux Klan).



Malgré tout, elle ne perd jamais courage, élève ses enfants et ne cesse de se remettre à l'ouvrage. Elle ne cesse jamais de redresser la tête, de garder sa dignité et de chanter.



Ce livre est une ode à la liberté, comme Vyry qui ne cesse de croire et de garder la foi: il est un roman poignant, un chant vers la liberté.
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Jubilee

« Jubilee » se situe en grande partie en Georgie dans le sud des états-unis, sensiblement à la même période (traversée par la guerre de Sécession) que « Autant en emporte le vent ». L'auteure y raconte la vie de Vyry, son arrière grand-mère, née esclave dans une plantation.



La servitude, la peur et la souffrance sont constitutives de l'existence des esclaves, à la merci de leur maître et de sa famille, du régisseur du domaine, des surveillants et des Blancs en général. Épuisement au travail, punitions corporelles pouvant entraîner la mort, brimades et humiliations sont leur lot. Ils ne bénéficient d'aucun droit ; ils sont achetés, vendus, séparés de leurs enfants et de leurs famille au bon vouloir de leurs propriétaires. Face aux Blancs, ils sont totalement impuissants.

La maltraitance des esclaves est physique et morale ; au mieux, ils sont considérés par leur maître comme un avoir.



La guerre de sécession, qui durera 4 ans, va scinder le pays en deux : le Nord abolitionniste et le Sud esclavagiste. Considérée au début comme une « aventure » par les sudistes convaincus de leurs bons droits, cette guerre très meurtrière laissera le sud exsangue.

La majorité des sudistes considérera que les Noirs sont responsables du conflit et de ses conséquences.



Enfin devenus libres, les Noirs continueront à vivre dans la peur et à subir les mêmes violences que par le passé. En effet, les lois concernant les droits civiques et le droit à l'éducation (qui devaient accompagner l'abolition de l'esclavage) ne seront pas appliquées. Loin de devenir des citoyens à part entière, les Noirs seront traqués par le Ku Klux Klan, né quelques mois après leur libération, et ils seront victime du racisme ordinaire de personnes conditionnées de tout temps à les considérer comme des êtres inférieurs.



Les esclaves avaient été « formés » pour travailler et obéir. Il leur avait été formellement interdit d'apprendre à lire et à écrire, de s'instruire. Ils avaient été maintenus dans la plus grande ignorance.

Libérés, ils ne disposent en fait d'aucun moyen pour lutter contre les exactions de toutes sortes dont ils seront victimes.



Ce roman de Margaret Walker, qu'illumine le personnage de Vyry, si humaine et si digne, met en évidence que la liberté ne fut pas offerte aux Noirs américains. Il leur fallut la conquérir.
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Jubilee

Margaret Walker a composé à partir de la vie de son arrière-grand-mère une fresque inédite de l'histoire de l'Amérique au XIX è siècle du point de vue des Noirs Américains. Et c'est magistral !

« Jubilee » est un gospel, dont les voix s'élèvent ténues d'abord, pleines de douleur, célébrant la puissance divine dans l'espoir qu'elle libère de leurs chaînes ces esclaves que l'on exploite sans vergogne dans une grande propriété du Sud-Est de la Géorgie. C'est chez les Dutton que naît Vyry, fille d'une esclave et de son maître John dont elle a hérité la peau claire. Orpheline à la naissance, ce sont les esclaves de la cuisine qui l'élèvent, dans les parfums de poulet frit et de tous les mets que Vyry ne tarde pas à préparer elle-même.

A travers les yeux de cette jeune esclave, c'est toute un système de violence et de soumission que nous raconte avec beaucoup de pudeur Margaret Walker. Mais au milieu de ces voix, Vyry découvre peu à peu des notes d'espoir, celles de frère Ezechiel, prédicateur ou de Randall Ware, forgeron libre, qui introduisent le souffle d'une liberté possible, venue du Nord abolitionniste. Douloureuse idée qui vient troubler Vyry, qui se plaît à rêver d'une autre vie pour elle et ses enfants.

C'est la guerre de Sécession, décrite dans toute son horreur, qui précipite le destin de Vyry : elle doit maintenant composer son propre chant, improviser une nouvelle partition, celle d'une esclave libérée. C'est la plus grande réussite du roman à mon sens : alors que l'oppression dont elle était l'objet disparaît légalement, le personnage de Vyry s'individualise, avec ses rêves propres, ses projets, ses combats et ses échecs aussi. Elle s'appartient, enfin.

Mais les mentalités, elles, n'évoluent pas au rythme des batailles perdues et le Sud esclavagiste n'a pas dit son dernier mot : Vyry et sa famille se heurtent à la furie des suprémacistes blancs incarnée par les membres du Ku Klux Klan. Réussira-t-elle à concrétiser ses rêves, une maison à elle, un travail rémunéré, l'école pour ses enfants, une vie décente en somme ?

Oh que j'ai adoré ce chant d'espoir et de courage, amplifié par la beauté et l'émotion de la dernière partie du roman. Mais Walker ne nous laisse pas nous faire d'illusion : la lutte pour les droits civiques ne fait que commencer en cette fin de siècle pour Vyry, sa famille et tous les Noirs Américains.

Ce roman intelligent, construit brillamment et tellement fort est à découvrir de toute urgence!

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Jubilee

Vyry est la fille d'une esclave noire et du maitre de la plantation, John Morris Dutton. Sa mère est morte à l'âge de 29 ans des suites d'une fausse couche. Vyry a la peau très claire pour une métisse et la confusion est souvent faite avec la "fille légitime" du maître. Elle va vivre des moments difficiles avec les conditions dures imposées aux Noirs mais aussi la guerre de Sécession et la volonté de se bâtir une maison pour sa famille...



J'ai beaucoup aimé cette histoire, la vraie vie de l'arrière-grand-mère de Margaret Walker, l'auteur. Les conditions imposées aux Noirs à cette époque sont incroyables, ils étaient considérés comme des moins que rien, vendus comme du bétail. Vyry a un coeur d'or, elle sait faire la distinction entre les bons et les mauvais sans regarder leur couleur de peau. J'aurais voulu en savoir plus sur leur devenir mais vraiment un grand roman que j'ai eu du mal à lacher.
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Jubilee

Ca n'a pas très bien commencé entre ce roman et moi.

Divisé en trois grandes parties, la première, qui est en quelque sorte la mise en place du contexte, la présentation des personnages, m'a laissée froide, en surface.

Jubilee s'ouvre sur la mort de Netta, jeune esclave mourant en couches, après avoir donné moult enfants à son maître. Parmi ces enfants, Vyry, blonde, ressemblant plus à son père qu'à sa mère mais une négresse tout de même, travaille à la grande maison, sous la coupe de Madame Maitresse, la femme du maitre, qui la déteste.



L'entrée en matière m'a évidemment émue et révoltée à de nombreuses reprises. J'ai souvent pensé à Twelve Years a Slave, qui m'avait beaucoup touchée.

Mais d'un point de vue romanesque, je n'ai pas réussi à m'attacher à Vyry, que j'ai trouvée trop opaque. Pas un mot sur ses sentiments, sur ce qu'elle ressent alors qu'en parallèle, une anecdote sur les gaz intestinaux de la jeune maitresse occupe plusieurs pages. J'imagine que le procédé est volontaire, une esclave n'avait pas de temps à accorder aux états d'âme, mais ça a eu comme conséquence de me laisser un peu en dehors.



La seconde partie, traitant de la Guerre de Sécession, m'a beaucoup plus intéressée, et j'ai enfin réussi à m'attacher à Vyry, lors de la troisième partie, que j'ai trouvée très émouvante.

Cette lecture ne sera pas un coup de cœur mais contrairement à ce que j'ai pu penser au tout début, je ne l'oublierai pas, et elle a été très instructive. Elle permet vraiment de plonger au cœur de la Guerre de Sécession et de ses conséquences, mais du point de vue des Noirs Américains. Et l'on peut malheureusement se rendre compte que certaines blessures et mentalités résistent au passage du temps.
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Jubilee

Ce roman a été écrit en 1966 et il est considéré comme un « classique » de la littérature afro-américaine qui a même eu le droit a une réédition spéciale pour son 50e anniversaire. Et pourtant, je n’en avais pas entendu parler et c’est le hasard qui l’a mis sur mon chemin (ou plus exactement, ma maman qui sait que le sujet de la vie des Afro-Américains m’intéresse!)



Le résumé dit que ce roman est « considéré comme l' »Autant en emporte le vent » des Noirs américains » et il y a de cela dans le contexte effectivement.

L’histoire est une saga qui a pour personnage central Vyry et qui commence à l’époque de l’esclavage dans le Sud des Etats-Unis, sur une plantation en Géorgie. Vyry est une enfant quand on la rencontre. C’est la fille d’une esclave qui vient de mourir et son père (ou plutôt son géniteur) est le maître blanc de la plantation. Vyry grandit dans un environnement hostile, tant par sa condition d’esclave, par le dur travail demandé, la peur, la haine et la cruauté de la maîtresse de maison, la solitude…

Elle a des enfants avec un homme noir libre qui sait lire et écrire mais elle ne peut pas pour autant quitter sa condition d’esclave elle-même. Son rêve est non seulement d’être libre mais aussi de voir ses enfants devenir libres et être éduqués.

Vient la période de la guerre de Secession où le monde tel que le Sud des Etats-Unis l’a connu, et particulièrement les riches blancs, est en train de s’effondrer (c’est peut-être la partie qui m’a la moins intéressée).

Et puis, après la guerre, il y a l’abolition de l’esclavage, et Vyry est déstabilisée car ce n’est pas si simple de devenir libre quand on n’a rien connu d’autre. Elle rencontre un homme avec qui elle va essayer de se créer une vie libre en travaillant dur mais cette fois pour elle-même et sa famille.

Ce roman est vraiment très riche et montre beaucoup d’aspects de la vie des Afro-Américains dans l’histoire : l’esclavage, l’underground railroad et les abolitionnistes, le pouvoir des propriétaires blancs, la rancœur des blancs pauvres qui s’en sortaient moins bien que les propriétaires blancs et que certains esclaves et leur haine vis à vis des anciens esclaves libérés, le Ku Klux Klan, les chants appris pendant l’esclavage et qui accompagnent Vyry…

C’est une belle découverte, une page d’histoire mais avec des aspects très romanesques. Vyry est un personnage de femme forte que j’ai aimé suivre ainsi que toute la thématique de la famille qui n’était pas une évidence à l’époque de l’esclavage. C’est aussi intéressant de savoir que Margaret Walker est une autrice Afro-Américaine et elle raconte de façon romancée l’histoire de sa famille.
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Jubilee

Ce roman nous plonge dans l'histoire de Vyry, dont la mère est esclave et le père se trouve être le maître blanc de la maison – qui toutefois la traite de la même façon que tous les esclaves. A travers sa vie, c'est une saga générationnelle que nous offre Margaret Walker : depuis ses grandes tantes et autres personnes âgées qu'elle côtoie dans sa jeunesse, en passant par ses fréquentations quand elle est une jeune femme, puis sa vie en tant que mère ainsi que celle de ses enfants.



J'ai été très intéressée de découvrir ces destins entremêlés par le prisme d'une femme esclave – elle-même l'arrière-grand-mère de l'autrice de ce roman. Car certes, les hommes esclaves menaient une vie de forçats, épuisés de travail, quand ils ne succombaient pas au fouet ou à la maladie, mais les femmes n'étaient pas en reste : viols, humiliations, placement de leurs enfants dans d'autres familles dès leur naissance, mais aussi fouet et violences dès qu'on avait quelque chose à leur reprocher.



C'est évidemment un livre engagé où il est question du racisme du début à la fin, dans toutes ses nuances : les plus grotesques comme les plus sournoises. Au delà de l'idéologie qu'on ne connaît que trop bien, on découvre aussi une population noire qui n'a pas accès à l'éducation et où beaucoup finissent par eux-mêmes penser qu'ils sont inférieurs – voire ne pas vouloir prendre leur liberté quand celle-ci devient possible, afin d'aider leurs maîtres jusqu'au bout et montrer qu'ils sont des esclaves respectueux... Certains maîtres militaient d’ailleurs pour l'esclavage pour permettre à leurs esclaves d'avoir une meilleure qualité de vie qu'ailleurs (en l'occurrence : meilleure que dans les plantations voisines où ils étaient encore davantage en sous-nutrition, et davantage battus). Tout un programme !



Il est aussi question des esclaves qui risquent leur vie pour fuir les plantations, et des quelques hommes blancs qui risquent la leur pour aider les esclaves – ce qui paraît d'ailleurs insensé aux personnes noires, qui pensent d'abord être les seules à se soucier de leur sort.



L'autrice aborde également le contexte très politique : les conflits entre le Sud et le Nord des États-Unis qui mèneront à la guerre de Sécession, les conséquences de la guerre, les différents présidents qui s’enchaînent, mais aussi le KKK ainsi que les tentatives des personnes noires pour représenter leur peuple dans l'hémicycle. Cela m'a beaucoup intéressée, et les éléments historiques et politiques étaient assez bien liés aux différents rebondissements pour que l'histoire garde tout son intérêt tout en apprenant beaucoup au lecteur sur les circonstances.



Bref, un roman nécessaire mais parfois très violent, à garder pour quand vous avez un minimum le moral !
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Jubilee

Rester sans voix après avoir entendu le récit de la vie de Vyry (je dis "entendu" car j'ai vraiment l'impression de l'avoir entendue s'exprimer).

Vyry est née dans une plantation : elle est la fille du Maître et d'une esclave et selon la coutume, elle sera considérée comme une esclave. Nous sommes en Georgie et la vie de Vyry va se confondre avec l'Histoire.

Le roman se découpe en trois parties : l'esclavage, la révolution, la construction.

J'ai tremblé, mon coeur s'est serré devant les drames et les mésaventures de Vyry et à chaque fois, j'ai admiré sa résilience et sa capacité à pardonner.

J'ai vraiment été happée, comme parachutée dans l'espace et le temps, je me suis régalée avec l'écriture de Margaret Walker, complètement immersive.

Jubilee est présentée comme L'Autant en emporte le vent des Noirs Américains : c'est cela! J'y ai retrouvé tout ce que j'avais aimé dans le mivre de Margaret Mitchell : un souffle épique grandiose, la même désolation et une héroïne attachante!



Un énorme coup de coeur!



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Jubilee

Beaucoup aimé Jubilee de Margaret Walker qui raconte la vie de son aieule, esclave dans une plantation de Géorgie. Avec elle on traverse la guerre de sécession la fin des plantations, l'avènement des petits blancs et du ku klux klan. On nous décrit plus souvent les fastes de ce sud



Livre qui finit bien, et ça c'est toujours agréable.



Sur un thème approchant, j' avais aussi aimé il y a une petite quinzaine d'année les Chênes du Tennessee de Elena Yates Eulo.



Au-delà d'un vrai, bon roman il permet de remettre en place quelques notions d'histoire qu'on avait peut-être un peu oublié, l'histoire des noirs américains et de leur place dans la société.
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Jubilee

Vyry est une esclave, fille de l'esclave Netta et de son maître, John Morris Dutton. Elle était l'arrière-grand-mère de Margaret Walker qui, dans ce roman, raconte son histoire de sa petite enfance à ses premiers pas de femme libre après la guerre de Sécession. Dès l'âge de sept ans la petite Vyry est employée à la Grande Maison où Madame Maîtresse Salina la traite durement, se vengeant sur elle du comportement de son mari: Vyry a la peau blanche, les cheveux blond-roux et ressemble comme deux gouttes d'eau à Mademoiselle Liliane au point qu'on les prend parfois pour des jumelles.



C'est la vie dans une plantation de Géorgie du point de vue des esclaves que l'autrice nous présente ici. Les esclaves y sont victimes de grandes violences : viol, fouet, vente, familles ou amis séparés. Je découvre que les maîtres sont aussi enfermés par ce système pervers. Ainsi Madame Maîtresse Salina craint tellement que ses esclaves ne la volent qu'elle tient tout sous clé. Le matin elle sort des réserves alimentaires la quantité de nourriture nécessaire pour la journée. Après une réception elle surveille la femme qui lave sa vaisselle précieuse. Cette suspicion généralisée tourne parfois à la paranoïa et entraîne de nouvelles violences contre les esclaves dont on nous dépeint aussi les stratégies de survie et de résistance.



Cette société du Sud est très inégalitaire. A côté des riches planteurs on trouve aussi de nombreux petits Blancs parfois misérables et souffrant de la faim dont la couleur de la peau est le seul motif de fierté. Ceux-ci accusent les Noirs d'être responsables de leur sort et c'est encore plus le cas après la défaite sudiste. On tape sur les petits, pas sur les gros. Cela me fait penser à ceux qui aujourd'hui prétendent ou croient que les étrangers ont droit à toutes les aides en France.



Après la victoire du Nord Vyry et sa famille connaissent encore bien des vicissitudes quand ils sont victimes des conditions météorologiques, d'un escroc ou même du Ku Klux Klan



J'ai beaucoup apprécié ce très bon roman qui est paru en 1966. Comme quoi il reste toujours des bonnes choses à découvrir, même dans la littérature moins récente. Le récit est illustré de nombreuses anecdotes, parfois insignifiantes, mais qui donnent la saveur du vécu : on a l'impression d'être en train d'écouter quelqu'un qui nous raconterait ses souvenirs de famille. En même temps Margaret Walker apporte aussi des informations historiques sur le sort des Noirs libres, sur les filières d'évasion des esclaves, sur la guerre de Sécession et ses conséquences. Tout le roman est traversé par le personnage de Vyry, une femme remarquable et courageuse. Soutenue par sa foi chrétienne elle se laisse rarement abattre et n'est jamais dominée par le ressentiment. Elle forme un couple très sympathique avec son second mari.
Lien : http://monbiblioblog.revolub..
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