Citations de Marie-Christine Chartier (86)
C'est une chose de manger de la viande, c'en est une autre de s'asseoir entre boys pour s'échanger des anecdotes sur les êtres vivants qu'on a tués avant le dîner, une canette de Labatt 50 entre les genoux.
Les jardins les mieux soignés perdurent, même lorsqu’ils sont délaissés.
Je me sens comme une forêt d'érables au printemps, comme si je venais de passer les derniers mois dans un hiver sans pitié, engourdie dans le froid et la neige. Un an et demi de survie. Et voilà que tout d'un coup le soleil inonde mon être et le dégel me prend au corps. Ma sève coule de tous mes pores, je revis, enfin.
En décidant de venir m'installer ici avec
Max, je choisis du même coup de cesser de lutter contre le bonheur que la vie veut m'offrir. De mon eau stagnante et entêtée est née la plus belle des fleurs de nénuphar.
Les adieux n'existent pas quand on s'aime assez.
Et l'amour, c'est une espèce de bouclier contre la pluie de merde au quotidien.
Le bonheur est une forme importante de succès [...]
On existe au carrefour d'un univers de possibilités. Nos vies ne sont pas des lignes droites, ce sont des tracés sinueux, où s'entrecroisent notre âme et celles de ceux qui nous sont chers. Je sais que notre rencontre est un pur hasard, que nous aurions pu emprunter une multitude d'autres voies, où nous serions restés des étrangers... Cependant, une fois qu'elle est entrée dans la mienne, je n'ai plus jamais cru en une version de ma vie où elle ne serait pas là.
Dans notre famille, ma mère a instauré très tôt le terme « partenaire » au lieu de « chum » ou « blonde ». Quand, à dix-sept ans, Gab a invité son premier amoureux à souper, la scène s’est déroulée comme suit :
Nous étions en train de jaser dans la cuisine. Gab est entré, tirant derrière lui un gars encore plus grand et plus mince que lui.
Je ne savais pas si je pleurais parce que mon fiancé venait de me demander un break ou parce qu’il avait cru si longtemps que j’étais une autre personne, pour finalement se rendre compte que la vraie version de moi était peut-être trop dure à gérer.
Toutefois, j'ai réalisé que ce qui est différent, une fois que tu es clean, ce n'est pas que tu as moins envie de consommer: c'est juste que tu décides de ne pas le faire. La sobriété est un choix de chaque instant.
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C’est difficile de se rappeler avec joie les choses qui sont teintées d’échec.
Chez nous, il faut savoir se défendre, ou bien devenir une proie. Je n’ai jamais eu la force d’assumer la place qui me revenait de droit ; avant Samuel, je n’avais pas compris que j’étais en mesure d’y arriver.
Elle jouait pour moi le rôle d’une muse : près d’elle, j’étais inspiré. Et vice versa. Un échange d’énergie créatrice. Quand Ariane a quitté ma vie, ma propre inspiration s’est tarie. Comme un vide en moi qui a grandi, nourri par ma douleur. Nourrir le vide… C’est étrange comme image, mais c’est celle qui traduit le mieux ce que j’ai ressenti.
C’est souvent ainsi : les ondes de choc restent, mais les mots s’échappent, parce que c’est plus facile de survivre en gommant les détails. C’est comme quand on vient de guérir d’une blessure : on sait qu’on a eu mal, mais on ne pourrait plus le décrire. C’est un peu semblable, pour mon père. Même dans mon souvenir, l’expression de son visage est plus douce. On se protège comme on peut.
Les choses seraient restées simples si nous n’avions pas grandi ; si, dans l’année de notre cinquième secondaire, Sam et moi ne nous étions pas rendu compte que le lien qui nous unissait était différent. Qu’il y avait plus entre nous. Le genre de sentiment aussi envoûtant que l’étaient les feux de camp dans ma cour ces étés-là. Aussi dangereux, quand on ne fait pas attention.
Reste que c’est difficile de regarder vers l’avenir lorsqu’on ne fait que me rappeler mon passé.
Je veux croire en nous, notre amour, seulement je ne sais plus si j’en ai la force. J’ai été le pilier de cette relation pendant si longtemps, mais là ma base est rouillée et la structure prend l’eau. Je m’ennuie du temps où je me sentais suffisamment forte pour soutenir mon poids et le sien.
Contrairement à ce que j’espérais, l’exil ne m’a pas transformée. L’angoisse, la tristesse, tout est encore là, en moi. Ces sentiments se sont adoucis, oui, sans pour autant disparaître. C’est drôle, quand même, l’idée que voyager peut tout régler. On pense qu’il y aura une espèce d’illumination et qu’on va être une nouvelle personne, une meilleure personne. C’est sûr que voyager, c’est plaisant, mais ce n’est pas magique.
On passe nos vies à chercher du compliqué, alors que c'est le simple qui nous fait vibrer.