Gabriel remonte le capuchon de son chandail par-dessus sa tête. Il devra penser à porter une tuque maintenant que l’hiver est bel et bien installé. Il regrette aussi de ne pas avoir fait demi-tour lorsqu’il a réalisé qu’il avait oublié ses gants dans sa case au cinéma. Le froid mordant de janvier, qui lui gruge les doigts jusqu’aux phalanges, est là pour le lui faire regretter davantage. Ses jambes redoublent la cadence tandis que son vélo file sur la chaussée asphaltée du boulevard. La circulation abondante de véhicules a au moins le mérite d’avoir fait fondre la neige. Les choses se compliquent lorsqu’il emprunte une petite rue parallèle moins fréquentée. L’accumulation de neige rend sa progression plus ardue et périlleuse. À deux reprises, il doit maîtriser un dérapage. Il se glisse finalement entre deux voitures stationnées, et s’engage dans une ruelle qui donne sur les cours arrière de multiples triplex en rangée. La soirée a été longue. L’adolescent a l’habitude de rentrer tard, mais son quart de travail lui a tout particulièrement semblé interminable aujourd’hui. Il lâche le guidon, l’espace de quelques secondes, pour approcher de sa bouche ses mains jointes, qu’il tente de réchauffer un peu de son haleine. Plus que quelques coups de pédale et il sera rendu à destination.
Depuis qu’elle est toute petite, Abigaïl est témoin des conversations échangées pendant ces séances de beauté et elle n’hésite pas à y mettre son grain de sel en faisant des commentaires ou en posant des questions qui ne manquent pas de créer des malaises ou, encore mieux, de faire rire aux éclats.
Gabriel adore sa sœur qui est tout sauf ennuyante. Il ne la changerait pour rien au monde.
"J’ai découvert en moi un invincible été.»
Albert Camus