C’était une très belle journée d’été, avec un ciel bleu intense. Aucun nuage n’empêchait les rayons du soleil d’embraser l’horizon. Dans les champs à perte de vue, des poulinières suitées paissaient tranquillement. Quelques foals étaient allongés, à l’ombre des arbres. Ils ne bougeaient même pas une oreille, restaient tellement immobiles qu’ils semblaient morts. Un peu plus loin, de jeunes pouliches gambadaient gaiement. De l’autre côté de la rivière, dans un pré éloigné des autres, des poulains joueurs galopaient, essayant de se mordre.
Une grande bâtisse à deux étages s’élevait au milieu de la propriété. Le calme et la paix régnaient en maître en ce lieu. Un papillon blanc se posa un instant sur une pancarte indiquant : « Haras de Baude ».
A l’intérieur de la maison, une odeur de pâtisserie chatouilla les narines d’un vieillard affalé dans un fauteuil en cuir râpé. Il ouvrit un œil, pour vérifier un détail sur l’écran de télévision allumé devant lui, mais muet. L’écran montrait une course de trotteurs attelés, sur l’hippodrome de Cagnes sur Mer. Rassuré, il referma son œil.
Autour de lui, la pièce semblait immense. Des meubles anciens étaient mis en valeur par un carrelage couleur ocre, et des poutres en bois. Les volets à peine entr’ouverts maintenaient la fraîcheur à l’intérieur. Derrière un bureau, au fond de la pièce, trônaient de nombreuses photographies de victoires de courses, à Longchamp, Evry, Auteuil, Deauville, Vichy...
Les jours passaient. Identiques. Les semaines passaient. Egalement identiques. Rien de bien passionnant ne venait égayer la vie d' Eva. Entre son travail du matin et du soir à l'écurie, les repas au réfectoire, ses cours d'anglais deux fois par semaine, et ses révisions les autres soirs, elle était suffisamment occupée pour ne pas s'ennuyer. Mais il lui manquait de la passion dans sa vie. Elle commençait à se dire que le travail au haras n'allait pas l'intéresser très longtemps... La compétition lui manquait.