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Critiques de Marie Rouanet (87)
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Les enfants du bagne



La pandémie et la guerre actuelle sur 2 fronts, Ukraine et Gaza, poussent probablement à des considérations nostalgiques du "bon vieux temps".

À la lecture du sort des enfants condamnés au bagne, jusqu'à une date relativement récente, c’est une tout autre réalité que l’auteure nous présente.



Ce qui m’a frappé dans cette analyse approfondie de Marie Rouanet, c’est que le traitement inhumain des gosses en marge de la société, orphelins ou abandonnés,

a perduré si longtemps en France, berceau du siècle des lumières. Il est vrai que l’auteure se limite à la France et qu’ailleurs la situation n’était vraisemblablement guère mieux. Souvenons-nous des malheurs de David Copperfield, le petit héros de Charles Dickens, dont la première édition de ses aventures remonte à 1849.



Toujours est-il que les choses n’ont commencé à changer qu’après une visite de l’impératrice Eugénie au centre de la Petite Roquette de Paris, le 22 juin 1865. Comme le note l’auteure : "Ce n’est pas que l’impératrice eût pitié...mais elle fut conspuée."

Dès août 1865, le quartier cellulaire de la Petite Roquette fut fermé et les enfants détenus envoyés dans d’autres colonies.



Pour rédiger son ouvrage, Marie Rouanet, née en 1936 à Béziers dans l’Hérault, a patiemment épluché de nombreuses archives et s’est entretenue avec maints témoins.

Comme elle indique dans l’avant-propos de son livre, paru initialement en 1992, c’est l’ignorance générale du pouvoir exorbitant des parents ou des tuteurs qui pouvaient faire enfermer un enfant mineur et indocile. Elle ajoute : "Nous ne savions pas grand-chose non plus des maisons de correction".



Ses recherches se sont concentrées sur quelques centres types, tels ceux de la Petite Roquette de Paris, du Pénitencier du père Barthier à Toulouse, celui de Sainte-Radegonde près de Rodez, celui de Pezet près de Villefranche-de-Rouergue, la Colonie agricole de Vailhauguès près de Montpellier, etc.



Ce sont les exemples concrets que Marie Rouanet cite dans son opus qui nous font comprendre pleinement l’horreur des abus que ces pauvres enfants, filles comme garçons, ont dû subir.

Ainsi, sur les 281 enfants détenus au pénitencier de la capitale en 1858, 58 avaient commis de vols simples et pour les autres, il ne s’agissait que de mendicité et de vagabondage.

Honoré Cabanier par exemple, un petit berger, a écopé jusqu'à 20 ans dans une maison de correction pour le vol de comestibles !



L’auteure nous décrit également comment une journée standard se passe pour ces enfants dans des centres pénitenciers, et qui se caractérise par de longues heures de travail et une nourriture pauvre et insuffisante.



Bref, Marie Rouanet a accompli un travail des plus rigoureux sur un sujet fort méconnu, mais fatalement, de par le thème même, dur et donc pas exactement agréable à lire.

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Arrière-boutique et autres textes

Si vous goûtez l’atmosphère désuète des épiceries d’autrefois avec ses odeurs, « l’étroitesse d’un magasin garni jusqu’au ras du plafond d’étagères » alors venez faire un tour dans cette épicerie ouverte à Béziers jusque dans les années 1998, et que tenait Armande, « une vivante survivance ». Mais plus que les légumes frais, les fruits juteux, parmi « les odeurs fortes de fromages, de morue, qui refluaient parfois au profit de celle des fruits », Marie Rouanet est attirée par la vie qui se cache dans l’arrière-boutique dont le secret est préservé par la « porte à ressort, aussi vite ouverte que fermée ». C’est grâce à son opiniâtre méticulosité que l’auteure percera peu-à peu l’intimité de l’épicière corsetée de discrétion. Cela commence avec les commérages de quartier, puis les recettes de cuisine échangées et, de fil en aiguille, viennent la confiance et les bribes de confidence.

« J’aimais que la confiance prît naissance dans des choses aussi concrètes et que nos rapports gagnassent en épaisseur au fil des jours, en restant toutefois dans des limites qui ne franchissaient pas la véritable intimité » A force de patience se dévoile l’envers du décor : dans l’arrière-boutique vivent deux autres personnes, la mère d’Armande et son neveu qui « était ce qu’elle aimait le plus au monde »

Telle une entomologiste, Marie Rouanet va se pencher sur le destin de ces trois personnages, et nous raconter avec ce don d’observation et cette curiosité emplie d’humanité, les petites choses qui remplissent leur vie.

Marie Rouanet est une conteuse qui sait ménager le suspense et qui nous amène – c’est elle qui donne le tempo- dans l’existence secrète de ces petites gens.



Trois autres textes, plus brefs, complètent ce recueil. L’un d’eux intitulé « Le Catalogue des armes et cycles de St Etienne » fait la part belle à ces catalogues désuets d’avant-guerre ou le papier était de mauvaise qualité. Malgré cela, la fillette qu’elle était « se plongeait avec délectation dans les pages “armes de chasse, pêche ” pour terminer par la papeterie et les jouets. C’était un voyage immobile.

« Quand je n’avais pas achevé mon périple, je mettais une marque de papier pour reprendre ma lecture où je l’avais laissée et l’achever tout à l’heure. Cela fonctionnait comme un roman ».

Marie Rouanet qui se décrit comme « artisan de l’écriture » excelle dans ces chroniques du quotidien, du presque rien où la délicatesse du regard se conjugue à la poésie des mots.













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Les enfants du bagne

Un livre coup de poing: voici ce qu'on faisait aux enfants, et pas seulement aux enfants délinquants, mais aux enfants orphelins, aux enfants vivant de la mendicité, aux enfants maltraités et retirés à leurs familles maltraitantes..



En France, ici, chez nous, dans nos bonnes villes, dans nos vertes campagnes...



Et cela se passait il n'y a pas 50 ans.



Marie Rouanet, la bucolique, la sensitive, prend ici sa plume la plus froidement factuelle et dresse le constat impitoyable d'un système pénitentiaire aberrant, qui confond prévention et punition, protection et contamination, mise en garde et déréliction absolue..



A lire de toute urgence, quand repointent - avec les mots de sauvageons, de racaille, de nettoyage au Kärcher- les notions de juridiction d'exception d'éducation surveillée, de centres fermés .. qui sont les tristes réponses que donne notre société violente à la violence désespérée qu'elle génère.
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Murmures pour Jean Hugo

Une merveilleuse lecture à l'image des toiles lumineuses, joyeuses, faussement naïves du peintre Jean Hugo, Héros de cette « promenade buissonnière » !



En souhaitant relire les Mémoires de Jean Hugo, je suis tombée par hasard, dans mes recherches sur cet ouvrage de Marie Rouanet dont je ne connaissais pas l'existence…



Une évocation libre et bienveillante de cet artiste aux mille talents, arrière-petit-fils du Grand Hugo !! Marie Rouanet nous raconte sa première rencontre avec une oeuvre de Jean Hugo, à travers les décors qu'il avait créés pour l'opéra-ballet « Daphnis et Alcimadure » [écrit originellement par Cassanéa de Mondoville en 1754, sur un livret en occitan]



Une admiration infinie…enrichie de points communs : La langue d'Oc, Mistral et le Félibrige, la Foi… les beautés du Languedoc : les paysages, sa Poésie et sa langue !



« Vous, Jean, avez revendiqué ce nom illustre et gênant et avez posé votre signature, lisible comme une écriture d'enfant, au bas de vos toiles lumineuses. Aussi silencieux que Victor était tonitruant, aussi modeste qu'il était orgueilleux, aussi discret que le trisaïeul se mettait en scène, aussi transparent qu'il était noir et tragique avec ses dessins de falaises infranchissables, d'ouragans et de maelströms où se devinaient des monstres. (p. 18)”



Jean Hugo (1894-1984) Arrière-petit-fils de Victor Hugo, déploya avec infiniment plus de modestie que son aïeul tous les talents : peintre, décorateur de théâtre, créateur de costumes de l'entre-deux-guerres. Il collabora avec les plus grands artistes de l'époque : Cocteau, Radiguet, Satie, Picasso, Satie, le cinéaste Théodore Dreyer…



Une trajectoire qui varie sur un point essentiel par rapport à son aïeul, « bouffeur de curés », c'est sa conversion à la foi catholique….sûrement influencé et durablement marqué par les années de la première guerre où il était un très jeune homme, période dramatique où il rencontra « des aumôniers compatissants, des religieuses comme des anges » qui adoucirent, soignèrent tous ces soldats tragiquement blessés et abîmés…par l'effroyable "boucherie"



Marie Rouanet, avec sa plume légère et colorée… nous fait revivre les principaux jalons, rencontres, oeuvres de cet artiste,ainsi que les abondantes raisons qu'elle énumère pour lesquelles elle admire et aime et la personnalité et l'esprit créatif de Jean Hugo.



Après cet ouvrage lumineux, je vais me glisser dans les mots de Jean Hugo, avec son « Regard de la mémoire »…avec dans la tête l'envie d'aller aux beaux jours « redécouvrir » le Musée Favre de Montpellier, possédant des toiles de ce créateur !



Je termine sur une phrase de son ami Cocteau le décrivant merveilleusement dans sa singularité :



« « Jean Hugo a mêlé son calme presque monstrueux au tumulte des entreprises de notre jeunesse. II était, il reste l'image même de cette modestie parfaite des enlumineurs, chez qui la vérité quotidienne l'emporte sur les grâces décoratives. Sa main puissante, son gros oeil jupitérien, son olympisme en quelque sorte, n'usent pas de foudres, mais de petites gouaches si vastes qu'on dirait que leur taille résulte d'un simple phénomène de perspective. Oui, c'est à distance qu'il semble voir la mer de Bretagne, et la garrigue par le gros bout de la lorgnette, ce qui ne l'empêche pas d'attirer autour de nous la mystérieuse odeur des algues et des simples. Jean Hugo, paysan subtil, moine médiéval, chasse l'ange du bizarre à force de connaitre ses ruses par coeur. »







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Tout jardin est Eden

Ce petit opus s’ouvre sur une citation de évangile selon Jean : « Celui qui est de la terre est terrestre et parle de choses terrestres »

Car oui, il est question de choses terrestres dans ces pages, mais avoir pour tout horizon les limites du jardin n’empêche pas une certaine élévation de l’esprit.

C’est à un vagabondage poétique entre courgettes et tomates, à l’heure de l’arrosage lorsque le soleil décline ou bien sous la chaleur quand « le soleil frappe droit », que nous convie Marie Rouanet.

Ecoutons le murmure de l’eau, celle des fontaines ou des réservoirs, celle qui coule dans les rigoles pour abreuver le jardin. Il y a tout un vocabulaire qui fait référence à cette eau emprisonnée : Lavagne, baignoire au rebus, fontaine, fontasse, capitelle.

« Dans la capitelle sous le sol du village et des jardins morts, l’eau veille comme une présence ».

Suivons les saisons avec, à chacune, des tâches bien définies et profitons de « ces minuscules bonheurs dans les jardins de l’hiver où les dernières roses ont gelé.



A travers ces textes aussi brefs et légers qu’aigrette de pissenlit, laissons-nous guider par nos sens et retrouvons, sous la plume poétique et si évocatrice de Marie Rouanet, la beauté oubliée du jardin.







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Luxueuse austérité

C'est un très joli petit livre qu'a écrit là Marie Rouanet. Une jolie mélodie sur le temps passé, le temps qui passe et l'attention prêtée à l'instant "comme si, en me concentrant sur le bonheur, j'allais réussir à l'éterniser." Il y a dans ce texte le charme un peu désuet des vieilles armoires de province que l'on entr'ouvre pour redécouvrir des souvenirs enfouis. Mais je trouve un peu dommage cette relative idéalisation d'un passé que ceux qui l'ont vécu alors auraient sans aucun doute préféré moins dur et où le labeur extrême ne permettait pas de s'attendrir. La nostalgie ne nous aide guère à vivre et l'amour enjolivé paraît quelquefois bien fade.

Il reste de merveilleux passages sur la nature, la vie à la campagne et la découverte de cette vérité intérieure qu'apporte le dépouillement, la renonciation à tout ce qui n'est pas indispensable pour vivre et aux excès qui étouffent l'âme sous un trop-plein de matérialité. Marie Rouanet a une belle écriture, toute en douceur , elle n'hésite pas à appeler un chat un chat , mais le fait avec cet humour délicat qui ajoute une petit touche de couleur et de réalisme à ses descriptions.

J'aime beaucoup, mais à petites doses, un peu comme une madeleine trempée dans du thé.

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Quatre temps du silence

Douce Marie Rouanet ! Que de pudeur et de délicatesse pour dire la douleur du veuvage, à travers les petites choses toutes simples de la vie, ces petites choses qui nous permettent de continuer à vivre après la disparition de l'être aimé, lorsqu'enfants et petits-enfants sont loin et vivent leur vie. Qu'il s'agisse du rythme des saisons avec leurs travaux particuliers, de l'amitié entre femmes, du rythme des jours et des nuits, de la solitude, des souvenirs et de cette volonté de ne pas se laisser aller quoiqu'il advienne, qu'il s'agisse du regard posé sur les autres habitants du village, ceux qui viennent, ceux qui s'en vont, c'est toujours de la simplicité et de la beauté des choses dont il est question, comme une croûte qui se forme sur la blessure de l'absence et du manque. Marie Rouanet écrit comme on dessine :par petites touches, en faisant apparaître peu à peu la vision d'ensemble à force de détails à la fois minutieusement et sobrement écrits. Elle sait aller au plus vrai en peu de mots, et en cela me fait souvent penser à Christian Bobin. Que de savoir-faire dans cette volonté toute simple de vivre qui défie les destructions du temps, cette volonté tranquille de tenir envers et contre tout, quand bien même le coeur n'y est pas toujours.

Marie Rouanet, c'est la douceur subversive. Merci à elle pour cette belle leçon de vie qui m'a à la fois touchée et éblouie.
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Balade des jours ordinaires

Un beau portrait des campagnes actuelles du dimanche, entre Causses et Lot-Et-Garonne.

Marie Rouanet relate ici avec un regard de journaliste ses tranquilles pérégrinations dans les calmes villages du Sud: jours de fêtes, petits musées régionaux, vie des petits agriculteurs et des jeunes des villages, rencontres inopinées et toujours insolites... elle a l'oeil vif et curieux, s'immisce dans le moindre petit événement pour y grappiller un petit mot intéressant ou une gorgée de bon vin!

Ces quelques récits très actuels sont un portrait très juste de nos villages d'aujourd'hui, entre architecture romane et agriculture post moderne, églises et pom-pom girls délurées.

A lire tranquillement à l'ombre d'un frais feuillage, un matin d'été.
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Dans la douce chair des villes

Combien j'aime la pensée et la sensibilité de cette femme ! Les livres de Marie Rouanet sont pour moi des cadeaux, cadeaux des traces de ma vie, de mes bonheurs, de page en page.

Ma première découverte fut son « Petit traité romanesque de cuisine ». A cause des beignets d'acacia ? Pas seulement. le pauvre depuis le temps que je le triture il ne tient plus guère debout !

Puis ce fut « du côté des petites filles », un enchantement !

Depuis ces deux-là, j'ai su que je les lirai tous. Puis, j'ai eu la bonne surprise de la rencontrer il y a deux ans, à la foire aux livres de Brive, petite femme frêle et douce, et non moins vive et malicieuse, telle que je l'imaginais (j'ai choisi sur son stand ce jour-là « Murmure pour Jean-Hugo ») ….

« Dans la douce chair des villes » Marie Rouanet, une fois n'est pas coutume, nous partage sa vision de l'urbain, pas celle des architectes, mais celle des hommes qui vivent leur ville, dévoilement de leur intimité dans leur environnement.

Marie Rouanet, c'est le coeur, et l'intelligence, et la chair qui se livrent en concert : « Il suffit d'appréhender le monde où l'on vit avec la totalité de ses sens et de son intelligence pour y trouver le reste de l'univers. Tout ce qui est ailleurs est forcément ici. Ce qui n'est pas ici n'existe nulle part. »

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La marche lente des glaciers

Marie Rouanet évoque ici les dernières années de vie de ses parents en regardant de pleine face le travail de sape de la vieillesse qui va les mener vers la mort. Tout d'abord chez sa mère dont l'esprit s'embrume peu à peu de ténèbres angoissantes, puis chez le père qui perd son autonomie en devenant fragile physiquement, elle observe le processus de décrépitude progressive mais inéluctable.

A cette occasion, elle ressuscite les souvenirs de la vie de ces gens modestes, une vie de plaisirs simples dont elle hérite et se fait la dépositaire.

On pourrait penser que cette lecture terriblement émouvante a de quoi donner le bourdon. C'est vrai par certains côtés car elle nous met face à ce qui nous attend tous, que ce soit concernant nos parents, nos amis ou nous même, mais Marie Rouanet ne se laisse pas aller au chagrin et à la morosité. Ensoleillée par une belle vitalité, la rondeur sensuelle de son écriture allège la noirceur du propos en opposant à la douleur de la perte, la douceur de vivre grâce aux précieux petits bonheurs que la nature sait nous offrir pour peu qu'on sache les voir.

Carpe diem !
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Nous les filles

Dans cet essai Marie Rouanet retrace la géographie de l'étroit territoire de son enfance: la maison, l'école, l'église, le patronage et la rue. Elle attache une importance toute particulière à la rue qui a été son principal terrain de jeu. Marie et ses amies sont d'un milieu modeste, leurs maisons sont trop petites pour accueillir leurs jeux et les chambres ne sont faites que pour dormir. Ne leur reste donc que la rue, un formidable terrain d'aventure et de découverte car même si elle est en ville, la nature n'est jamais bien loin. Il y a les jardins, les parcs, le cimetière, les fossés et même les trottoirs et caniveaux, pourvoyeurs de merveilleux trésors: les fruits cueillis dans les arbres, les bricoles perdues ou jetées, les végétaux que l'imagination destine à un usage infini.

Ces pages ne sont teintées d'aucune nostalgie. C'est avec une précision quasi photographique que Marie Rouanet dresse le portrait d'un univers presque exclusivement féminin où les garçons vivent dans un monde tangent. Cela se lit comme on écoute des histoires même si parfois l'abondance de détails et les répétions peuvent un peu lasser mais c'est le propre des histoires.. Dans l'ensemble cette évocation réaliste des rites ludiques, domestiques et religieux d'antan est plutôt passionnante. L'écriture de Marie Rouanet, à la fois très précise, savoureuse et poétique transforme cet essai en une belle ode à la simplicité.
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Enfantine

Le titre est joli, la photo sur la couverture montre un enfant escaladant une grille d'entrée. Chacune des 6 nouvelles contenues dans ce livre révèle un aspect effrayant de l' " innocence" enfantine. Ce n'est ni rassurant, ni larmoyant, et j'ai frémi aux récits de ces jeunes , en proie à la cruauté et à l'hypocrisie, cotoyant le sexe et la mort . Quels adultes deviendront ces enfants écorchés?
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Nous les filles

J'avais adoré le « petit traité romanesque de cuisine » de Marie Rouanet, aussi m'étais-je dit que si elle nous faisait entrer dans le monde des petites filles avec autant de poésie que dans celui de sa cuisine, je ne pouvais manquer cette promesse. Promesse tenue, ce livre est une vraie merveille, en tout cas il en fut une pour moi. De page en page c'est toute mon enfance qu'elle m' a fait revivre, je m'en suis repue délicieusement. L'enfance de Marie Rouanet se déroule à Béziers, mais toutes les petites filles nées dans les années 50, du nord au sud, de l'est à l'ouest de la France, ne seront pas dépaysées car plus qu'une région, c'est toute une époque que ce livre raconte, une époque où nous vivions une vie « de peu » mais oh combien imaginative, oh combien pleine ! Merci Marie Rouanet de m'avoir fait re-gambader dans mes jardins secrets dont j'avais jusqu'ici précieusement enfouis les saveurs et les parfums au fond de mon cœur.
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La marche lente des glaciers

Elle, c'était la maison, les enfants, puis ce furent les courses hebdomadaires à "Inter", l'économie domestique jalouse et de plus en plus rétrécie à une forme de perfection du minimum, enfin le naufrage inattendu de l'humeur, l'oblativité exactement inversée en égoïsme, l'oubli du monde et des autres succédant à l'oubli de soi qu'elle avait pratiqué toute sa vie. Lui, c'était l'atelier non chauffé du garage, la pin up du calendrier à moitié dissimulée pour ne pas choquer les enfants et les mères de famille, l'odeur de métal chauffé et les mains calleuses imprégnées de cambouis, les interminables journées de chasse entre hommes, la pêche, l'impavidité devant le sort du gibier, du poisson, les rituels barbares mais non cruels de mise à mort. Puis ce fut la solitude à la mort de l'épouse, les promenades de vieillard succédant aux battues d'antan.Le malheur de vouloir encore et de voir s'éteindre ses forces.Les renoncements.

Marie Rouanet évoque l'enfance et la jeunesse de ses deux figures tutélaires au décours d'une description d'un réalisme traversé d'éclats poétiques, et de commentaires poético-philosophiques sur le cadre nécessaire pour que l'enfance puisse s'épanouir et s'élancer à son tour vers la vie. Un des éléments de ce cadre est le regard maternel, reconstitué car jamais croisé par le sien, qui était porté sur ses jeux et son quotidien d'enfant. Mais quel renoncement chez cette mère, qui aurait sûrement souhaité la possibilité d'un ailleurs. Tous ces pas vers l'inéluctable constituent la marche lente des glaciers, très beau titre et un ouvrage qui , de nouveau, me porte à vouloir encore découvrir plus de l'oeuvre de Marie Rouanet.
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Je ne dois pas toucher les choses du jardin

Dans ce recueil de nouvelles ‪Marie Rouanet‬ capte des scènes de la vie de tous les jours de gens simples, ceux de son pays.

Dans un cadre rural, on y trouve des fillettes qui jouent ou s'ennuient, des lycéennes qui discutent, des commères qui cancanent, des amoureux qui se promènent …

Bref, un peu de tout dans ces dix-neuf nouvelles pas follement passionnantes même si elles se lisent sans déplaisir.
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Apollonie: Reine au coeur du monde

Emouvant récit qui retrace la vie de la grand-mère de l'auteur, paysanne du début du siècle dernier, et la place des femmes dans cette société rurale de l'Aveyron où la mémoire se transmettait par les femmes.
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Mauvaises nouvelles de la chair

Ce livre est un précurseur du végétarisme, mais malheureusement je ne pense pas que les carnivores convaincus se dirigent vers ce genre de lecture.

Et pourtant, il le faudrait…



Mauvaises nouvelles de la chair » ne nous cachent rien des méthodes indignes d’élevage industriel ni des conditions d’abattage des animaux,



Comme m’a fait remarquer une personne du site qui m’est très chère,

« Après l'obligation du service militaire, on devrait instaurer l'obligation de l'usine à viande ».



Une chose est certaine, après la lecture de ce livre, vous ne considérerez plus jamais de la même façon les rayons boucherie ou charcuterie, vous imaginerez forcément toute la souffrance qui se cache derrière.

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Année blanche

Plus jeune, j'aurai aimé ce livre. J'en suis certaine. Plus jeune, j'aurai été sensible à la poésie des mots, au lyrisme de ces phrases, à toute cette attention à des petits riens qui font la trame de ce récit. Mais aujourd'hui, cela ne m'a pas touché. Je me suis ennuyée à cette lecture, je n'y ai plus été sensible, alors que je l'aurai été - avant. Peut-être, plus tard, serais-je à nouveau sensible au style de Marie Rouanet, à la fine dentelle de ses phrases, à cet art de choisir le mot le plus juste et le plus beau pour exprimer ce qui a été vécu, ce qui a été ressenti. Mais, pour l'instant, je reste froide, aussi froide que la neige d'une année blanche.
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Nous les filles

"Nous, les filles, s'adresse plutôt à des femmes aujourd'hui "séniors", car c'est un retour vers leur enfance que propose Marie Rouanet dans ce ce livre, une enfance qui, grosso modo, se situe dans les décennies 1950/1960.

Ce récit est une délicieuse plongée dans ce qui étaient leurs jeux de cour, de rue, de quartier, de jardin, dans leurs aspirations, leurs lectures, leurs copinages et leurs démêles de groupe.

C'était une enfance bien différente de celle des fillettes d'aujourd'hui, qui ont à la fois accès à de multiples opportunités pour se distraire et s'ouvrir vers le monde et sont moins contraintes par les conventions qui avaient cours autrefois, mais qui sont aussi plus encadrées, plus dépendantes des horaires et des adultes, et qui, dès leur plus jeune âge, sont confrontées à l'attirance pour les "jouets-gadgets" que ne manque pas de leur proposer la société de consommation.

"Nous, les filles", n'étions-nous pas au fond plus libres, plus inventives, lorsque nous jouions avec des "riens" et que nous nous amusions des heures ?
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Luxueuse austérité

Pour l'inspiration, et la connection à la terre, la proximité au monde animal et végétal qui nous entoure et nous enserre, si peu que nous quittions la protection du confort et de la ville, elle m'évoque Colette. Mais Colette sans le lyrisme, sans les affèteries auxquelles notre bourguignonne nationale se risquait parfois, et qui font parfois qualifier son écriture de démodée.

Marie Rouanet décrit diverses maisons réduites au rudimentaire et à l'essentiel, où elle passa des moments de sa vie.Dans ce cadre la première proximité est celle du corps humain, ses odeurs, ses humeurs, ses excréments. Un cadre dépouillé de tout confort : pas d'eau courante, pas de "cabinets d'aisance", pas de ramassage des déchets, juste une bonbonne de gaz qu'il faut monter sur l'épaule.. toutes les fonctions vitales s'effectuent au prix d'un effort et d'un raisonnement.A contrario, les bonheurs sensuels des repas de poissons, de coquillages, de salades sauvages,à l'abri des chênes ou sous les étoiles retrouvées car n'étant pas éteintes par la pollution lumineuse, le silence très relatif, traversé par le vent, les cris animaux..Mais Marie Rouanet ne nous épargne pas l'envers du décor ,et sa propre enfance encore paysanne lui permet d'éduquer ses enfants : ils s'accomoderont donc de l'absence de lieux clos pour les fonctions excrétrices, de la présence persistante du pot de chambre à travers "l'odeur légère qui imprègne le bois de la table de nuit où il est enfermé" (je cite de mémoire), ils contribuent largement à la subsistance en ramenant quotidiennement le produit de leur pêche, tandis que les parents se résignent parfois à aller acheter le pain et les légumes pas encore trop flêtris de l'unique épicerie du village voisin.L'entrecroisement des souvenirs d'enfance de Marie Rouanet et de méditations plus contemporaines sur l'agréable, l'utile, que l'on disjoint à tort, et le divertissement pascalien des plaisirs de la ville, qu'elle pratique également,ne font pas de ce petit ouvrage une apologie de la vie sauvage, ni un pamphlet contre le progrès, ni une oeuvre passéiste voire réactionnaire. Toute la rudesse, le pénible de la vie paysanne d'autrefois sont bien évoqués et même détaillés, ainsi que leurs efffets sur le corps et l'âme qui la traversent.Mais Marie Rouanet , comme tous les voyageurs du temps, est confrontée au paradoxe d'une subjectivité qui, elle, sera forcément anachronique.C'est cette lucidité, cette division subjective qui font aussi le prix d'un livre que je trouve honnête et sincère, en même temps que remarquablement écrit.
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